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Les défi s à relever : les limites du bénévolat ?

François Haragirimana

4.7 Les défi s à relever : les limites du bénévolat ?

Le système des CDC fait cependant face à des défi s. Les hommes et femmes qui sont membres des CDC travaillent bénévolement et sont accaparés par leurs responsabilités communautaires ; ils éprouvent donc fréquemment des diffi cultés dans l’exécution de leurs responsabilités au niveau du ménage. C’est pourquoi ils demandent souvent une forme

de motivation qui pourrait compenser les efforts fournis et le temps qu’ils consacrent aux activités de type communautaire.

La motivation actuelle des CDC est la confi ance en soi qui résulte du fait d’être élu par la communauté, selon des critères comme l’intégrité, l’engagement pour le développement, la disponibilité, le sens des responsabilités et de l’intérêt commun. Il y a d’autres formes de motivation intrinsèques, comme les indemnités pour les séances de formation et les réunions organisées par les projets de développement, les informations sur les opportunités d’intervention dans leur milieu, les connaissances acquises à travers les cours de formation et les visites d’échange, et la participation à des échanges avec les cadres au niveau communal et provincial. Les membres des CDC n’ont pas un accès privilégié aux kits : ils les reçoivent seulement lorsqu’ils remplissent les conditions requises, au même titre que les autres membres de la communauté, notamment. Il y a aussi des avantages sociaux à être membre d’un CDC, comme le respect de la communauté, l’ouverture d’esprit, la considération sociale dans les réunions ou les fêtes communautaires, etc.

Mais est-ce que cette motivation est suffi sante ? La question de la motivation des CDC est posée dans les différentes rencontres organisées à leur intention. C’est une question tellement délicate que la commune ou les projets ne peuvent pas à eux seuls y trouver une solution durable. C’est à tous les partenaires de la décentralisation et du développement communautaire de réfl échir à une stratégie à base communautaire et durable pour encourager les CDC. Faut-il les motiver davantage, comment, avec quoi et selon quelle périodicité, et qui doit les motiver ? Voilà, entre autres, des questions qui restent posées et qui méritent une réfl exion approfondie de tous les acteurs qui interviennent en milieu rural.

Des consultations communautaires ont été organisées dans les quatre provinces par ACORD pour défi nir les tâches dévolues aux CDC, analyser la nécessité et la possibilité de les motiver, déterminer la nature et la provenance de ces mesures de motivation, ainsi que les modalités de leur mise en pratique. Ces consultations, organisées dans quatre communes, regroupaient les représentants des CDC, des bénéfi ciaires, des leaders communautaires, des autorités locales, des services publics, de la société civile et des intervenants. Après avoir inventorié et évalué les activités réalisées par les CDC, les participants ont estimé qu’elles sont très pertinentes et qu’elles exigent beaucoup de temps, d’effort et de dévouement. Ils sont conscients de l’importance des services rendus par les CDC à la communauté, aux services publics et aux intervenants.

Ils soutiennent par conséquent l’idée de la motivation des CDC pour éviter les

mécontentements et les tentatives de détournement. La question se pose en termes de nature, de périodicité, de source et de pérennisation d’une telle motivation. Plusieurs scénarios ont été proposés en ce qui concerne la nature et la périodicité de la motivation des CDC (motivation en argent, en nature ou sous forme d’avantages sociaux). Concernant la nature, les consultations avec les partenaires au niveau communautaire ont relevé les éléments suivants, par ordre d’importance : le bétail, les formations, les moyens de transport, l’argent, les avantages sociaux et un certain pourcentage des contributions communautaires fi nancières collectées par les CDC. Concernant les sources, les consultations

communautaires ont relevé les éléments suivants, par ordre d’importance : les intervenants, la population, l’Etat (la commune).

En bref, il est nécessaire, voire indispensable, de motiver les CDC. Cette motivation ne doit pas être de nature salariale puisque les CDC sont des personnes élues et mandatées par les communautés et qui travaillent donc pour le compte de ces dernières et non sous contrat de qui que ce soit. La prime peut être mensuelle, trimestrielle, semestrielle, saisonnière ou annuelle. Elle peut être donnée à tous les membres des CDC ou aux meilleurs d’entre eux, selon des critères d’évaluation clairs, objectifs, communautaires et consensuels.

Il est important que la motivation soit durable et de type communautaire et non pas individu-elle : une motivation individuindividu-elle risquerait de provoquer des confl its ou de la jalousie parmi les membres des CDC. Pour la provenance de la motivation, on pense naturellement aux différents intervenants, sans toutefois oublier que la population des collines ainsi que l’administration ont à long terme plus de responsabilités pour cette question. Il est important que les CDC sachent qu’ils rendent des services aux communautés qui les ont élus et à la collectivité plus qu’aux intervenants, qui sont des intermédiaires pour servir les mêmes communautés.

4.8 Conclusion

La vision qui a motivé la mise en place des CDC était de construire « un mouvement communautaire, fort, responsable, capable d’infl uencer, de contrôler, de négocier, d’exercer l’audit social et de décider de sa propre destinée ». Il est évident qu’à l’heure actuelle, il n’est pas encore possible de tirer des conclusions à cet égard. Néanmoins, il est possible de voir que des étapes préliminaires ont été franchies. On constate le début de l’appropriation par les communautés des mécanismes de développement et un sentiment de confi ance accrue entre les populations, les services techniques et l’administration.

Les communautés ont assumé une certaine responsabilité pour leur développement et sont en train de bâtir des structures à travers lesquelles elles vont pouvoir infl uencer, contrôler et négocier. Elles sont encore loin d’être à même de pouvoir exercer l’audit social ou de décider de leur propre destinée. Le système en est encore à ses premiers balbutiements et ne peut s’enraciner qu’à travers la pratique sur la durée et avec l’accompagnement des différents acteurs de la décentralisation et du développement communautaire. Les impacts plus généraux sur le niveau de vie des populations rurales et sur leurs relations internes et externes sont encore à mesurer. On constate cependant que des mécanismes existent pour la consolidation et l’élargissement des acquis, mais que plusieurs facteurs, surtout économiques, peuvent infl uencer l’évolution du système.

Parmi les activités en cours et en perspective, citons les suivantes : la répartition des membres des CDC et des CCDC dans des commissions de travail (en référence au CSLP) pour leur professionnalisation, une solution à la question de la motivation, une réfl exion approfondie de tous les acteurs intervenant en milieu rural sur les stratégies et modalités pratiques de motivation des CDC, le plaidoyer en faveur de l’égalité des genres (car le pourcentage des femmes dans ces organes a chuté), le renforcement des capacités des CDC et CCDC, car tous les cinq ans, de nouveaux membres sont nommés après les élections, le plaidoyer en faveur de la reconnaissance des CDC dans la Loi communale, le renforcement du système de collaboration entre les acteurs intervenant dans le milieu rural : UE, Banque mondiale, FIDA, Coopération suisse, etc.

5 Participation des communautés