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CHAPITRE 1 : REVUE DE LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE

1.1 Le contexte des sports acrobatiques

1.1.1 Croyances et connaissances dans les milieux sportifs

Les entraîneurs jouent un rôle crucial dans le développement et la performance des athlètes [2,7,167]. Peu importe le sport, les entraineurs n’ont pas tous la même expertise et celle-ci diffère selon le niveau, qu’il soit récréatif, éducatif ou élite [167]. Ce qui différen- cie en partie l’entraîneur expert du novice est non seulement son bagage de connaissances spécifiques aux sports que celui-ci possède [8], mais aussi sa manière de les utiliser [2]. Or, l’aquisition et l’utilisation des connaissances sont influencées par les croyances de l’en- traîneur [63]. Alors que les connaissances sont davantage factuelles, les croyances sont personnelles à l’individu et comportent une dimension subjective [63]. Les croyances sont donc déterminantes de l’expertise puisqu’elles sont à l’origine des connaissances que l’en- traîneur possède et mobilise [73]. Cette expertise propre à chaque entraîneur participe à créer une culture propre à chaque fédération ou équipe sportive qui se manifeste par des croyances, un langage particulier au sport, des théories implicites ainsi que des procédures d’entrainement [60]. La culture du sport véhicule des idées préconçues et des manières de penser qui sont difficiles à changer et deviennent problématiques si elles sont basées sur des notions erronées ou infondées [63]. Chaque sport possède une sous-culture dans laquelle circule des croyances plus ou moins répandues dont la véracité et la pertinence peuvent être questionnables [162]. Celles-ci sont, soit factuelles et souvent indubitables de par les ancrages immédiats pouvant y être liés, soit représentationnelles, plus réfléchies et nuancées [47]. Par exemple, Cizeron [46] et Cizeron et Gal-Petitfaux [47] ont montré que l’entraînement de la gymnastique avait comme fondements plusieurs croyances qui se renforcent avec l’expérience comme la fausse idée de devoir créer de la vitesse verticale

d’abord puis, une fois en phase aérienne, créer la rotation. D’ailleurs, selon Pajares [137], plus une croyance existe depuis longtemps dans la pensée d’une personne, plus elle sera difficile à modifier. Puisque la plupart du temps, l’entraîneur débutant a lui-même été en- cadré par des entraîneurs lorsqu’il pratiquait son sport, des croyances lui ont été transmises avant même qu’il ne commence sa formation. Aussi, les entraîneurs, avant de monter de ni- veau, ont souvent été assisants-entraineurs et ont cotoyé des entraîneurs-chefs qui leur ont partagé leurs croyances [162]. Selon Gal-Petitfaux [73], puisque les références culturelles sportives induisent des propositions pédagogiques relatives aux tâches d’apprentissage, les formations offertes devraient comporter un volet qui enseigne aux entraîneurs à avoir une conscience claire à ce sujet. Si les croyances voyagent à travers l’interaction entre les en- traîneurs, il en va de soi que les ateliers de formation sont des occasions de propagation des références culturelles préconçues et infondées.

De plus, les formations offertes par les fédérations, les gouvernements, les collèges et les universités sont souvent incomplètes ou trop générales [162]. D’une façon générale, il existe deux types de programmes différents, l’un basé sur ce que l’entraîneur devrait connaître et l’autre basé sur ce que l’entraîneur devrait faire [162]. Dans le même ordre d’idées, il existe deux approches d’apprentissage, soit l’approche expérimentale dans laquelle le participant met, lors de mises en situation, son expertise à l’épreuve et apprend de ses erreurs ainsi que l’approche qui décortique les connaissances globales en éléments spéci- fiques précis [2]. Puisque les entraîneurs apprennent et s’améliorent dans leur pratique non seulement par l’acquisition des connaissances, mais aussi par l’interaction et la pratique [162], il est logique de croire que les volets théorique et pratique ont tous deux leur place au sein d’une formation. Apprendre par l’expérience nécessite toutefois les compétences permettant d’identifier le problème, d’élaborer des stratégies de solution et de les tester [162]. La majorité des programmes de formation offerts tels que le programme de certifica- tion des entraineurs de l’Association Canadienne des Entraîneurs (ACE, coach.ca) ciblent et évaluent les compétences jugées importantes. L’évaluation des compétences vise à dé- terminer si l’entraîneur possède les connaissances recquises, mais aussi s’il est en mesure

de les mettre en pratique dans un contexte d’entraînement. Dans le cas de l’ACE, cinq compétences critiques que sont la transmissions des valeurs, l’interaction, le leadership, la résolution de problème et la pensée critique, se recoupent en huit résultats attendus dont l’analyse de la performance, la planification d’une séance d’entrainement et la gestion de la progression. À notre connaissance, ni le contenu des formations, ni l’évaluation de ces trois compétences spécifiques n’incluent de notions mécaniques des saltos vrillés en sports acro- batiques. Ces mouvements rapides et complexes sont pourtant à la base de la pratique de ces sports et accentuent la difficulté de la tâche de l’entraîneur [149]. Cela dit, Rolland et al. [149] ont mené une étude sur les entraîneurs experts de la Fédération Française de Gymnas- tique et ont montré que les connaissances mobilisées lors des intervations relevaient parfois de l’hypothèse ou d’une interprétation improvisée. À certains moments, les entraîneurs ont testé des propositions plus intuitives après qu’une autre se soit avérée infructueuse. Les entraîneurs simplifiaient le mouvement complexe afin de pouvoir émettre une rétroaction contenant une suggestion d’amélioration compréhensible et claire pour l’athlète [149]. Le terme «bricolée» est même employé pour caractériser la façon dont l’entraineur adapte son intervention en fonction du gymnaste, de l’agrès et de l’habileté avec les connaissances et l’expérience dont il dispose. Aussi, même si les connaissances que mobilise l’entraîneur sont difficiles à formaliser, Rolland et al. [149] suggèrent que les formations des entraî- neurs intègrent des dimensions cinématiques et dynamiques du mouvement. Ces auteurs recommandent également que les dispositifs de formation soient basés sur des études de cas qui rappellent à l’entraîneur de penser en fonction de la situation et du contexte. Durand et al. [60] affirment que de plus en plus d’outils technologiques permettant aux entraîneurs de compléter et d’affiner leurs observations et impressions sont utilisés tels que les caméras à haute vitesse et des logiciels d’analyse du mouvement. Aussi, des interfaces offrant un contrôle interactif comportent des modèles cinématiques et dynamiques et per- mettent de générer des animations de plongeon [192] ainsi que de ski et de planche à neige [193]. Celles de Zhao et van de Panne [193] permettent à l’utilisateur de choisir parmi une banque limitée de 12 actions cinématiques et dynamiques telles que takeoff et pike, puis

de décider à quel moment elles surviennent de manière à ce qu’elles s’enchaînent dans un mouvement généré [192]. L’interface de plongeon développé par Zhao [192] comporte tou- tefois certaines limites qui seront détaillées à lasection 1.3 et constitue davantage un outil d’animation et de visualisation que de formation et d’apprentissage. Selon nos recherches, il n’est pas possible de connaître la portée que cette interface a connue auprès des milieux sportif ou des jeux vidéos, ni son développement depuis la dernière publication de 2005. Yeadon et Knight [190] ont développé un environnement virtuel permettant au gymnaste d’apprendre une nouvelle acrobatie de manière sécuritaire en visualisant le mouvement. Le système est basé sur un système d’un écran-casque doté d’un logiciel de visualisation permettant à l’athlète de prendre conscience de ce qu’il verra lorsqu’il effectuera le mou- vement. Offrant plusieurs possibilitées comme le trampoline, la barre fixe, les anneaux et le plongeon, l’outil n’a été testé qu’auprès d’un gymnaste en apprentissage d’une nouvelle acrobatie. La simulation a été effectuée à partir d’une combinaison de deux modèles que sont les modèles de Hiley et Yeadon [84] pour les grands tours à la barre fixe et de Yeadon et al. [185] pour la phase aérienne des saltos vrillés. Le gymnaste a témoigné de l’utilité de l’outil, entre autres, pour la visualisation de la réception. À notre connaissance, il s’agit des deux seuls outils de simulation des saltos vrillés pouvant être utilisés par les entraîneurs de manière à faciliter leur compréhension du mouvement. Cependant, ceux-ci demeurent difficilement accessibles et/ou sont encore en développement.