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Chapitre 2. Approches, matériels et méthodes

II. Approche Paléosismologique

II.2. Travaux en tranchée

II.2.2. Critères de paléoséismes

Le travail de logging des murs de la tranchée consiste à identifier et caractériser les différents horizons composant le dépôt, ainsi que les déformations associées aux séismes. Les unités sont décrites selon la granulométrie du dépôt, le type de matrice et son abondance, la stratification et les figurés associés (pendage, lamines, imbrications des clastes, surfaces d’érosion etc.), la couleur du dépôt, et le granoclassement. Dans le contexte décrochant, certain indicateurs stratigraphiques (par la suite nommés critères) sont généralement rencontrés dans les tranchées transversales à la faille, permettant une reconnaissance des paléoséismes. Ces critères sont détaillés ci-dessous (Figure 2-17) :

II.2.2.1.1. Terminaisons supérieures de failles

Ce critère est couramment observé dans le contexte décrochant, et consiste en l’identification d’une rupture se propageant vers le haut, et s’interrompant lors d’un changement d’horizon : l’horizon inférieur pré-date l’évènement sismique à l’origine de cette rupture, et l’horizon supérieur le postdate (Figure 2-17-A). Il est à noter que l’identification d’un évènement sur un seul critère de terminaison supérieur de faille est parfois délicat, et il est préférable de se baser sur plusieurs de ces critères pour une même unité, afin d’avoir une vision statistique de la détermination de l’évènement (e.g. Weldon et al., 2002). Par exemple, en milieu semi-aride, l’alternance de périodes humides et sèches, couplées à la présence de dépôt argileux, peut aboutir à l’apparition de fissures par phénomène de retrait-gonflement des agriles, alors purement associées à des variations de teneur en eau et non à des phénomènes sismiques.

Figure 2-17 : Diagramme schématique des indicateurs stratigraphiques typiques des paléoséismes, d’après Gurrola et Rockwell (1996) et : A : dépôts horizontaux sur des terminaisons supérieures des failles, B : dépôt sur un escarpement de faille érodé, C : formation d’un coin colluvial sur un escarpement de faille érodé, D : remplissage d’une fissure tectonique, E : déformation en surface d’une couche horizontale, F : figures de liquéfaction.

II.2.2.1.2. Coins colluviaux

Les coins colluviaux correspondent à des figures d’effondrement et de dégradation, postérieurs à la formation d’un escarpement raide, par exemple associé au rejet de la faille (vertical ou simplement apparent) ou à l’ouverture d’une fente de tension. Le matériel environnant vient alors soit combler la dépression ainsi formée, soit retrouver un profil topographique diffusif par effondrement gravitaire de l’escarpement (e.g. Dawson et al., 2003) (Figure 2-17-C). Ainsi les coins colluviaux peuvent provenir de processus gravitaires (effondrement et diffusion) ou fluviatiles lorsque la dépression est associée à des captures de drains ; les matériaux les composant sont généralement non granoclassés et relativement pauvres en matrice, bien que ce ne soit pas toujours le cas. Le nombre de coins colluviaux peut parfois être associé au nombre de ruptures, mais certains de ces objets peuvent également provenir de processus d’érosion distinct de l’activité tectonique (e.g. McCalpin et Forman, 1988).

II.2.2.1.3. Décalages d’unités stratigraphiques

Dans le contexte décrochant, sont observées en tranchée des juxtapositions d’unités stratigraphiques distinctes au niveau des zones de failles (fissures ou zones de cisaillement), indiquant le déplacement horizontal associé au glissement de la faille (Figure 2-17). Cependant, les variations latérales de dépôts (e.g. chenaux, effondrements etc.), peuvent également aboutir à ce type d’observation. A l’inverse, un dépôt tabulaire et uniforme décalé par un mouvement purement horizontal ne présentera pas ce type de critère.

II.2.2.1.4. Fissures et injections de sable

Les fissures se distinguent des failles par une ouverture en cisaillement pur (contre simple dans le cas des zones de cisaillement), ensuite remplies par le matériel de l’unité qui se dépose après le séisme (Figure 2-17-D). Il est également possible d’observer des figures d’injections de sables, provenant d’unités sous-jacentes, et venant s’étendre soit en surface, soit entre deux unités préexistantes (Figure 2-17-E).

II.2.2.1.5. Figures de liquéfaction

Les figures de liquéfaction sont associées aux vibrations générées par le séisme et se localisent dans les unités mal consolidées et souvent saturées en eau (Figure 2-17-F), comme des milieux lacustres. Ces types de dépôts sont alors appelés sismites (Figure 2-18), et peuvent être identifié même loin de la faille (McCalpin, 2009). Dans le contexte du Gobi-Altaï, où les températures hivernales sont très rudes, les sismites peuvent potentiellement être confondues avec des figures de cryoturbation (Figure 2-18).

Figure 2-18 : Photographie de sismites couplées à de la cryoturbation sur la faille de Bogd Occidentale.

II.3. Datations II.3.1. 14C

La méthode de datation au 14C, ou radiocarbone, est basée sur la mesure de la concentration en 14C dans la matière organique. Le principe repose sur la fait que tout organisme vivant, animal ou végétal, échange du carbone avec son environnement, et le rapport 14C/12C est par conséquent à l’équilibre avec l’atmosphère (et a fotiori avec la biosphère) (e.g. Bowman, 1990).

Le 14C étant un isotope radioactif de demi-vie 5730 ± 40 a, il va se dégrader dans le temps, et sa concentration dans les organismes va décroître après leur mort ou la mort d’une de leur partie. Cette décroissance exponentielle va ainsi permettre de quantifier le temps écoulé depuis la mort de l’organisme considéré. Il est néanmoins nécessaire de calibrer la méthode en fonction des variations de concentration en 14C qu’a connu l’atmosphère, et en particulier retrouver ce ratio au moment de la mort de l’organisme, en croisant l’âge déterminé avec une courbe de calibration (Figure 2-19), principalement construite par dendrochronologie (e.g. Reimer et al., 2013). Les calibrations ont été réalisées dans cette thèse à l’aide du logiciel Oxcal (Lienkaemper et Ramsey, 2009).

Figure 2-19 : Calibration d’un âge radiocarbone à partir du logiciel Oxcal. La courbe bleue correspond à la courbe de calibration d’après Reimer et al. (2013) ; la distribution grise représente la gamme d’âges probables correspondant à l’intersection entre : i. la gaussienne rouge, représentant l’âge carbone non-calibrée de l’échantillon et les incertitudes associées, et ii. La courbe de calibration.

La qualité d’une datation au radiocarbone dépend de l’âge de l’échantillon et de sa teneur en carbone. Ainsi, les limites de cette méthode viennent du temps écoulé et de l’histoire de l’échantillon entre la mort de l’organise (ou l’enfouissement dans le cas de paléosols) et le prélèvement. En effet, dans le cas d’un charbon détritique, il existe des incertitudes relatives au temps écoulé entre la mort de cette partie de l’arbre et son dépôt, d’une part au travers de l’inbuilt (âge hérité avant le transport du charbon), et d’autre part provenant du temps de stockage ‘’in situ’’ avant d’être remobilisé, et de la durée du transport. Cet intervalle de temps, inconnu, va induire un âge apparent plus vieux que l’âge réel de la mort de l’organisme, entraînant systématiquement une surestimation de l’âge du dépôt considéré (e.g. Gavin, 2001; Bollinger et al., 2016). Dans le cas d’une datation sur amalgame de sédiments (e.g. paléosol), des phénomènes de contamination de l’échantillon par de la matière organique moderne, essentiellement dûs à des processus de bioturbation, pourra à l’inverse entrainer une sous-estimation de l’âge de l’échantillon.

En conséquence, nous avons dans cette étude tâché autant que possible de coupler plusieurs datations, 14C et OSL, afin de déterminer les âges (i.e. les intervalles d’occurrences) des paléoséismes.

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