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Chapitre IV : Elaboration et caractérisation de couches µc-Si:B

I. Développement et caractérisation des couches cristallisées

I.2 Propriétés structurales et électriques de la couche

I.2.1 Cristallinité et taille de grains

La littérature indique que la cristallisation totale du silicium amorphe est possible dès 510°C pour des temps de recuit très longs (72h) [Panwar89] et qu’une augmentation de la température de recuit conduit à l’obtention de grains plus larges [Marcins11]. Il est alors nécessaire de suivre l’évolution de la cristallisation de nos couches a-Si:BH en fonction de la température de recuit. La durée du plateau a été ici fixée à 30min87.

Tout d’abord, un suivi par mesure ellipsométrique permet de qualifier le niveau de cristallisation de notre couche : en effet, le signal de la partie imaginaire (ε2) de la fonction

diélectrique d’une couche a-Si:H est caractérisé par une distribution large tandis que celle d’un cristal c-Si est caractérisée par un double pic, tel qu’illustré en Figure II-2 (Chapitre II). Ainsi, un suivi du signal mesuré sur nos échantillons permet de connaitre l’évolution des phases présentes dans la couche µc-Si:B. Les résultats d’un tel suivi sont présentés pour différentes températures de recuit sur la Figure IV-7.

 La courbe noire, correspondant à l’échantillon après dépôt, comporte un large pic centré autour de 3,6eV caractéristique du silicium amorphe88.

 Le recuit à 500°C (courbe rouge) entraine un décalage du pic de l’amorphe vers 3,5eV, traduisant un début de cristallisation, confirmé par ailleurs par mesure Raman (Figure IV-8), via la présence d’un pic à 521cm-1

, lié au silicium cristallin. Le rapport entre les pics liés à chacune des deux phases indique que la cristallisation à cette température est même bien avancée (fraction cristalline Xc~75%).

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Une durée de recuit plus courte n’est pas suffisante pour garantir une bonne stabilité de la température dans le tube.

Figure IV-7 : Evolution de la partie imaginaire de la fonction diélectrique ε2 d’une couche

cristallisée à différentes températures pendant 30min.

Figure IV-8 : Spectres Raman des échantillons a-Si:BH recuits à 500°C et 600°C pendant 30min.

 En passant à 600°C (courbe bleue), le simple pic fait place à un doublet dont les contributions, caractéristiques du silicium cristallin, sont centrées à 3,5 et 4,0eV. Le spectre Raman correspondant (Figure IV-8) montre que la phase semble89 totalement cristalline (pic fin et largeur à mi-hauteur de 3cm-1).

 Enfin, à 700°C, on observe la diminution de l’amplitude du pic ε2 centré à 4,0eV

(courbe verte). Cette diminution est liée à une exodiffusion de l’hydrogène contenu dans la couche, faisant apparaitre des vides surfaciques (rugosité) [Munoz08]. Un recuit à 800°C amplifie ce phénomène (courbe rose) et à 900°C (courbe non représentée ici), on observe une dégradation très importante du matériau et du substrat à l’interface. Il semble donc que dans les conditions étudiées (recuit de 30min) la gamme de température 700-800°C soit optimale90.

La littérature fait état de l’impact néfaste de l’augmentation du B2H6 sur la

cristallisation du a-Si:H [Voz00]. D’autre part, l’influence du débit d’hydrogène sur la structure cristallisée du µc-Si, elle aussi reportée dans la littérature, montre que son augmentation favorise la cristallisation du silicium amorphe [Niikura00][Sriraman06]. Il semble alors intéressant d’évaluer l’influence des débits de B2H6 et H2 sur la cristallinité des

couches µc-Si:B en comparant les parties imaginaires (ε2) de leur fonction diélectrique. Le

recuit est fixé à 700°C pendant 30min. L’évolution du signal à 3,5eV est notre paramètre d’évaluation : plus l’amplitude du pic augmente, plus la phase est cristalline91

.

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Cependant il faut se méfier car il se peut qu’une contribution amorphe existe toujours (pic écrasé par celui du cristallin).

Figure IV-9 : Impact du débit de diborane sur l’amplitude de la courbe ε2. Le débit de H2 est

fixé à 200sccm et le recuit à 700°C

Figure IV-10 : Variation de l’amplitude de la courbe ε2 en fonction du débit de H2. Le débit

de B2H6 est fixé à 600sccm et le recuit à 700°C.

La diminution du flux de B2H6 (Figure IV-9) a pour effet d’améliorer

significativement la cristallinité de la couche alors que l’impact du flux de H2 reste beaucoup

plus modéré dans la gamme étudiée (Figure IV-10). Ces résultats sont en accord avec la littérature puisque le bore participe au ralentissement de la cristallisation. Dans les conditions de cette étude, la meilleure cristallinité est obtenue pour des débits de B2H6 et de H2 de

400sccm.

I.2.1.b. Proportion de petits et gros grains

Jellison et al ont publié un modèle ellipsométrique adapté à l’évaluation de couches dont la structure se situe entre amorphe et cristallisée, considérant le matériau µc-Si:B comme un composite faisant intervenir une proportion de matériau dite « petits grains », une proportion de matériau dite « gros grains », et une proportion de « vide » [Jellison93]. Les petits grains sont considérés comme des nano-cristaux isolés dans une matrice amorphe et les gros grains comme des nano-cristaux adjacents avec joints de grain dans une phase amorphe bien moins importante. D’un point de vue ellipsométrique, les modèles utilisés pour chacune des deux tailles de grain sont empiriques et ne peuvent pas être modifiés.

La Figure IV-11 présente la variation de la proportion de petits et de gros grains en fonction des débits de B2H6 et de H2 obtenue en utilisant ce modèle92. On remarque que la

proportion de gros grains suit la même tendance que l’amplitude des courbes ε2 : plus le débit

de B2H6 est bas et celui de H2 est élevé, plus la proportion de gros grains est importante.

En plus d’uniformiser le dépôt comme évoqué précédemment, l’élévation du débit de dihydrogène permettrait donc d’augmenter la taille des grains. Le passage à des débits de H2

plus élevés (>800sccm) a conduit à une amélioration fulgurante de la proportion de gros grains (~95%), qui sature à 98% à 4000sccm (cf. Figure IV-12).

Figure IV-11 : Evolution de de la proportion de petits et gros grains dans la phase cristalline en fonction des débits de B2H6 et H2 pour un

recuit à 700°C-30min.

Figure IV-12 : Influence du débit de H2 sur la

proportion de gros grains dans les couches a-Si:BH (débit(B2H6)=400sccm). La ligne rouge

est un guide pour les yeux.

Pour finir de caractériser la cristallinité des couches, de l’imagerie TEM a été réalisée sur des coupes transversales de ces échantillons, représentées sur la Figure IV-13. Celles-ci montrent que la cristallisation de la couche µc-Si:B a suivi la maille du substrat cristallin sous-jacent. Néanmoins, des défauts d’empilement sont aussi révélés et caractérisés par la présence de lignes entrecroisées. Ces défauts d’empilements sont présents dans les plans de glissement (111) du silicium cristallin et peuvent conduire à la formation de macles.

Figure IV-14 : Diagrammes de diffraction dans l’espace réciproque pour le substrat en silicium cristallin et la couche µc-Si:B.

Les diagrammes de diffraction93 associés au substrat c-Si (100) et à la couche µc-Si:B sont représentés sur la Figure IV-14. Ceux-ci indiquent que les sites cristallographiques présents dans la couche µc-Si:B sont à l’aplomb de ceux situés dans le substrat c-Si (taches intenses), confirmant ainsi la bonne cristallinité de la couche selon l’orientation du substrat. De plus, les deux taches visibles entre les taches intenses (dues au silicium monocristallin) sont caractéristiques de la présence de défauts de type macles (liées aux défauts d’empilements observés précédemment).