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Couplage ultra-fort

Un traitement sans approximation d’un système de puits quantiques en microcavité a été présenté pour la première fois dans la référence [22]. Il passe par la construction d’opérateurs de création bosoniques d’excitations inter- sous-bandes b† = q 1 NQWNsS NQW X j=1 X |k|<kF c(j)†2,kc(j)1,k

où c(j)†i,k est l’opérateur de création d’un électron de vecteur d’onde k sur la

sous-bande i du puits quantique j. L’hamiltonien du système s’exprime, à l’aide de ces opérateurs (nous avons ici négligé le vecteur d’onde du photon) :

H = ~ωc  aa+1 2  + ~ω12bb+ i~ΩR  a+ a b− b+ ~Ω2R ω12  a+ a2

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Figure 1.6 – figure extraite de la référence [22] qui démontre les dépendances non-linéaires des énergies des polaritons pour ωc= ω12à mesure que le couplage augmente.

avec ~ΩR donné par l’équation 1.14. Le premier terme correspond à l’ha-

miltonien du champ électromagnétique dans la cavité, le second à celui des excitation inter-sous-bandes, le troisième au couplage entre les deux, conte- nant les termes anti-résonants, et le dernier au terme en A2. Notons que

lorsque l’on néglige les termes anti-résonants et quadratique, on se retrouve avec l’hamiltonien de deux oscillateurs couplés linéairement via la constante ~ΩR, équivalent à l’hamiltonien de Jaynes-Cummings. La diagonalisation de

l’hamiltonien complet permet d’établir les états propres, dont les opérateurs d’annihilation sont des combinaisons linéaires des opérateurs de création et d’annihilation de l’excitation inter-sous-bande et du photon de cavité :

pUP/LP = wUP/LPa+ xUP/LPb+ yUP/LPa+ zUP/LPb

La présence de l’opérateur de création photonique dans l’expression de pUP/LP

a pour conséquence que l’état fondamental contient un nombre fini de photons de cavité virtuels, qu’il est théoriquement possible d’émettre dans le milieu extérieur en modulant de façon non adiabatique l’énergie de Rabi ~ΩR[22,49].

Les énergies des polaritons pour ωc = ω12 en fonction de l’énergie de Rabi

sont visibles à la figure 1.6. On peut remarquer les non-linéarités qui ne sont pas présentes dans le cas du couplage fort, car dans ce cas à la résonance, EUP/LP = E12± ~ΩR.

Néanmoins, ce modèle ne prend pas en compte les interactions coulom- biennes dynamiques entre les différentes excitations inter-sous-bandes. Une description qui inclut naturellement ces contributions a été proposée récem- ment [50]. Elle consiste en une description du système dans la jauge dipolaire, qui permet d’exprimer l’hamiltonien d’interaction en fonction du déplacement

électrique D et de la polarisation P induite par les excitations inter-sous- bandes : Hint = RV dr(−D · P + P2/2)/(εsε0). Il contient deux termes : le

terme D · P est associé à l’interaction entre les dipôles du gaz bidimensionnel et le champ extérieur, et le terme P2 à l’interaction mutuelle entre dipôles.

En définissant le facteur de recouvrement fw entre le mode de cavité et les

puits quantiques, l’hamiltonien complet s’exprime ainsi : H = ~ωc  aa+1 2  +~ω12bb+i~ω2P12 s fw ωc ω12  a − a† b+ b†+ 2 P12 12  b+ b†2 avec ~ωP12 l’énergie de plasma introduite dans l’équation 1.4. L’introduction

de l’opérateur p= ˜ω12+ ω12 2√˜ω12ω12b+ ˜ω12− ω12 2√˜ω12ω12b

permet de diagonaliser la partie matière qui ne dépend que de b et b. On a

posé, comme en 1.3, ˜ω12=

q

ω212+ ωP212. L’hamiltonien s’écrit alors : H = ~ωc  aa+1 2  + ~˜ω12pp+i~ω2P12 s fw ωc ˜ω12  a − a† p+ p† (1.15) On voit alors que l’opérateur p est associé à une excitation matérielle d’énergie ~˜ω12, qui interagit avec la lumière. Cette énergie renormalisée est la

même que l’énergie de la résonance calculée dans la partie 1.3. Le décalage en énergie n’est pas dû à la présence de la cavité, mais à l’interaction mutuelle entre les électrons, qui mène à l’établissement d’une unique excitation collec- tive, le plasmon inter-sous-bande, qui se couple à la lumière. Il en résulte une levée de dégénérescence entre le plasmon inter-sous-bande et les autres com- binaisons d’excitations inter-sous-bandes qui lui sont orthogonales, les états noirs.

La fréquence plasma ωP12, déja rencontrée dans la description du couplage

entre le puits quantique et le continuum des ondes planes, intervient une fois encore directement dans la constante de couplage avec la lumière. Dans la situation du couplage avec le continuum, elle détermine l’amplitude du pic d’absorption, et dans la situation du couplage fort, elle est directement reliée au dédoublement de Rabi. C’est donc une quantité centrale dans la description de l’interaction entre la lumière et un puits quantique dopé. Notons que lorsqu’on cherche à optimiser le couplage de Rabi, certaines grandeurs vont affecter la fréquence plasma (Ns, m, f12...) et donc l’énergie de l’excitation

électronique couplée à la lumière, et d’autres non (NQW, Lcav).

Comme mentionné plus haut, le facteur fw traduit le recouvrement

entre les puits quantiques et le mode de cavité. Pour le cas du mode TM0

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cas général, on peut le calculer numériquement à partir du profil du mode optique. Dans le cas d’une cavité planaire dont le vecteur d’onde est associé à un angle de propagation θ, fw sera proportionnel à sin2θ.

La diagonalisation de l’hamiltonien 1.15 aboutit à l’équation aux valeurs propres



ω2−˜ω212 ω2 − ωc2= fwωP212ω2c

dont les solutions sont les énergies des deux branches de polaritons : EUP/LP2 = ~ 2  ω2c + ˜ω122 ± q 2 c˜ω212) 2+ 4f wωP212ω2c  (1.16) Ces courbes de dispersions des polaritons sont représentées à la figure 1.7

en fonction du désaccord ~(ωc˜ω12). Elles présentent un anticroisement au

voisinage de la résonance ˜ω12 = ωc. Le minimum de la différence d’énergie

entre les deux branches de polaritons, le dédoublement de Rabi, vaut 2~ΩR =

~ωP12

fw. On peut également observer l’ouverture d’un gap photonique entre

les deux branches car l’asymptote de la branche supérieure pour ωc  ˜ω12

(EUP → ~˜ω12) est différente de celle de la branche inférieure pour ωc 

˜ω12 (ELP → ~

q ˜ω2

12−(2ΩR)2). Dans le cas des polaritons inter-sous-bandes,

la présence de ce gap photonique peut être considérée comme la signature expérimentale du régime de couplage ultra-fort. On retrouve l’équation 1.13

lorsque ωP12 ω12. gap photonique EUP ELP Ec ˜ E12 q ˜ E122 − ER2 énergie désaccord ER 0

Figure 1.7 – dispersion des polaritons en fonction du désaccord Ec− ˜E12. On peut observer

la présence d’un gap photonique, par opposition à la dispersion observée en régime de couplage fort (figure1.5).

Le couplage ultra-fort a déjà été observé dans la gamme térahertz avec des puits quantiques en micro-cavité zéro-dimensionnelle [50] avec un

rapport 2ΩR/˜ω12 de l’ordre de 50 %, et plus récemment, avec des puits

quantiques paraboliques [51] dans des cavités LC. Dans le moyen infra-rouge, les premiers effets du couplage ultra-fort ont été observés dans [27] grâce à 70 puits quantiques en microcavité planaire, et plus récemment dans [52] grâce à un confinement photonique sub-longueur d’onde. Dans ces deux références, le rapport 2ΩR/˜ω12 est de l’ordre de 20 %, et les caractéris-

tiques du couplage ultra-fort peuvent encore être considérées comme des corrections par rapport au modèle du couplage fort. Ceci est dû à la nécessité de garder une seule sous-bande occupée (donc EF < E2), ce qui

limite la valeur maximale du couplage de Rabi accessible. Dans les cha- pitres 3 et 4, nous allons démontrer un moyen de passer outre cette limitation. Le régime de couplage ultra-fort a également pu être observé dans d’autres systèmes physiques : une transition cyclotron d’un gaz bidimensionnel d’élec- tron couplée à un méta-matériau térahertz [53], des atomes artificiels supra- conducteurs en interaction avec un résonateur micro-onde [54] ou dans le vi- sible avec des molécules de spiropyrane en microcavité planaire [55].