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CHAPITRE 2 : REVUE DE LITTÉRATURE

2.5 Couplage hydromécanique

Les études concernant le comportement hydromécanique des discontinuités rocheuses sous contrainte normale ont été nombreuses et variées (Gale, 1982; Gale et Raven, 1985; Benjelloun, 1991; Tsang et Stephansson, 1996).

Les études du comportement sous cisaillement sont moins nombreuses. Le comportement couplé des discontinuités inclut aussi bien la déformation que les changements des propriétés hydrauliques sous divers processus couplés. La déformation des discontinuités peut inclure une dilatation, une fermeture ou un cisaillement. Le couplage de différents processus (thermique, hydraulique, mécanique et chimique) implique qu’un processus affecte l’initiation et la progression d’un autre.

2.5.1 Relation écoulement - contraintes

Plusieurs études ont montré l’effet des contraintes sur l’écoulement des fluides dans les discontinuités. L’état des contraintes va influencer de façon directe ou indirecte l’ouverture des fractures ce qui entraîne une variation de la conductivité hydraulique et des débits d’écoulement. Tsang et Stephansson (1996) ont étudié l’écoulement laminaire en régime permanent le long d’une fracture sous contrainte normale et sous contrainte de cisaillement. Ces études ont montré que sous l’effet de contrainte normale, il y aura augmentation de la surface de contact d’où variation de l’ouverture de la fracture et donc variation de la conductivité hydraulique. Sous des contraintes de cisaillement, c’est le degré d’enchevêtrement des deux surfaces inférieure et supérieure de la fracture qui va influencer leur ouverture et donc l’écoulement.

Witherspoon et al. (1986) ont montré qu’une augmentation de la contrainte normale induit plus d’aspérités en contact (pour les fractures rugueuses) diminuant ainsi la

distance moyenne entre les points de contact d’où une variation de l’ouverture et de la conductivité hydraulique.

Durant un chargement normal, les fractures rocheuses naturelles ou artificielles, altérées ou non, présentent un comportement commun caractérisé par une forte non-linéarité et un effet d’hystérésis prononcé entre la contrainte normale et le déplacement relatif normal entre les épontes, et entre la contrainte normale et la perméabilité (Raven et Gale, 1985).

Ce comportement typique des interfaces, reflète l’emboîtement progressif des macros et des microrugosités et l’accroissement du nombre de points de contacts quand la contrainte normale et/ou le nombre de cycles de chargement augmentent. Ces deux phénomènes ont pour effet de diminuer la conductivité hydraulique en réduisant l’espace des vides et en augmentant la tortuosité de l’écoulement (Hakami, 1988 cité dans Benjelloun, 1991).

Plusieurs études ont mis en évidence la nature variable de l’ouverture des fractures et l’importance de considérer cette variabilité dans le calcul des débits d’écoulement et le transport de solutés (Witherspoon et al., 1986; Indraratna et Ranjith, 2001). La perméabilité à l’écoulement est souvent contrôlée par les régions à petites ouvertures, ce qui donne naissance à la formation de canaux qui acheminent un grand débit d’écoulement. Ces canaux seront sensibles à la variation de la contrainte normale.

Des études effectuées par Barton et al. (1985) ont montré que le cisaillement des joints induit un glissement le long des aspérités, ce qui augmente l’ouverture et donc la conductivité hydraulique. Cette même étude a montré qu’un changement de l’ouverture des discontinuités peut induire une variation allant jusqu’à trois ordres de grandeur de la conductivité sous contraintes normales modérées. La figure 2.13 présente quatre configurations typiques de l’intérieur d’une fracture. Il s’agit du cas de fractures lisses avec une ouverture approximativement constante, cas de fractures rugueuses sans points

de contact entre les parois, cas de fractures rugueuses avec points de contact entre les parois et cas de fractures contenant des matériaux de remplissage.

L’ouverture des fractures dépend aussi des variations de la pression d’eau dans la fracture et la matrice poreuse, étant donné que ces variations vont affecter les contraintes effectives autour de la fracture (Tsang et Stephansson, 1996).

Figure 2.13 Schémas de quatre configurations typiques de l’intérieur d’une fracture (tiré d’Indraratna et Ranjith, 2001).

Suite à une étude sur l’effet de variation de la contrainte normale sur des fractures simulées, Zimmerman et al. (1990) ont constaté que :

i) le pourcentage de surface en contact augmente quasi linéairement en fonction de la contrainte normale appliquée,

ii) la fermeture moyenne des joints augmente en fonction de la contrainte normale, mais à un taux décroissant,

iii) le débit d’écoulement diminue en fonction de la puissance 3 de la contrainte normale, mais après une certaine valeur critique, il y a une chute du débit.

La logique du couplage hydromécanique est illustrée sur la figure 2.14 La pression d’eau dans un milieu modifie le champ de contraintes ainsi que ses propriétés mécaniques. Inversement, la déformation d’un milieu suite à une sollicitation mécanique peut modifier considérablement la conductivité hydraulique de ce dernier et changer ou créer des chemins d’écoulements préférentiels.

Figure 2.14: Couplage hydromécanique dans les massifs rocheux (tiré de Kadiri, 2002)

En plus de son rôle hydraulique, la pression de l’eau a aussi un effet mécanique souvent non négligeable. Cet effet est mis en évidence par le concept de contraintes effectives. Ce concept est très important puisque la résistance mécanique du milieu s’exprime en fonction des contraintes effectives.

Si on se place dans le cadre du milieu fracturé, l’eau exerce sur les épontes de la fracture une pression hydraulique réduisant la contrainte normale exercée par le massif. D’autre part, l’agrandissement de l’ouverture de la fracture sous pression hydraulique tend à faciliter les mouvements tangentiels (Kadiri, 2002).

Le modèle de Barton et al. (1985) fournit une expression de l’ouverture hydraulique eh

en fonction de l’ouverture mécanique em :

eh = em2/JRC2.5 (2.57)

avec : JRC caractérisant la rugosité de surface. Cette ouverture hydraulique incorporée dans la loi cubique, est censée donner une bonne estimation du débit transitant dans la fracture.

Barton (2000) a proposé un modèle qui fournit un ensemble complet d’équations pour la modélisation du comportement hydromécanique d’un joint rocheux sous une contrainte normale. Le modèle a été validé en comparant les prédictions numériques et les données expérimentales. La même relation établie par Barton et al (équation 2.84) entre l’ouverture hydraulique e en fonction de l’ouverture mécanique em, a été adoptée dans ce

modèle. La contrainte effective est définie de la manière suivante :

∆σn’ = ∆σn - α ∆P (2.58)

α étant un coefficient de couplage qui traduit l’effet de la pression du fluide sur le déplacement normal de la fracture. Ce coefficient n’est pas constant et varie en fonction de la fermeture progressive du joint. L’effet hydromécanique est lié à l’espace de vides accessible au fluide (Sotoudeh, 1995, cité dans Kadiri, 2002).

Une nouvelle approche numérique pour simuler la réponse hydromécanique de roches hétérogènes à l’échelle du laboratoire a été développée par Yuan et Harrison (2005).

Leurs simulations numériques ont montré qu’une compression uniaxiale et triaxiale cause une concentration des contraintes dans les éléments de faible résistance et qu’il y a une initiation et une propagation de la dilatance et la perméabilité (Yuan et Harrison, 2005).

2.5.2 Méthodologie de couplage

Durant le présent projet de recherche une méthode de couplage hydromécanique indirect entre les deux codes HydroGeosphere et Phase2 a été développée. Cette méthode a été appliquée au cas du chantier remblayé vertical avec une fracture horizontale. À partir des résultats de variation des contraintes normales et de cisaillement en fonction de la distance le long de la discontinuité obtenus avec Phase2, le modèle CSDS a été utilisé pour déterminer les variations de déplacement normal en fonction du déplacement de cisaillement et calculer ainsi le changement de l’ouverture. La méthodologie de calcul des ouvertures hydrauliques sera expliquée dans le chapitre 6.