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Chapitre 1 – Dégradation des AME de PEMFC

4. Couches actives

Les couches actives sont le siège de la réaction d’oxydation de l’hydrogène (anode) et de réduction de l’oxygène (cathode). Elles doivent donc être poreuses pour permettre l’arrivée des gaz, posséder de bonnes conductivités protonique et électronique et avoir une bonne activité catalytique vis-à-vis des deux réactions électrochimiques. Pour ce faire, les couches actives sont généralement constituées par un mélange de catalyseurs (classiquement du platine, ou un alliage de platine), de carbone et d’un liant polymère conducteur protonique.

Les couches actives classiques sont préparées à partir d’une encre contenant un polymère à conduction protonique (20-40 % en masse) et du platine supporté par du carbone Pt/C (20-50 % m.) [23], permettant un chargement en platine pouvant varier entre 0,01 et 1 mg.cm-2 [17]. En raison de la cinétique de réaction plus lente à la cathode, le chargement en platine y est plus élevé. Son épaisseur est environ quatre fois plus large que l’anode [11]. Outre le choix des matériaux, la formulation des électrodes a une importance majeure [8]. Les recherches effectuées en ce sens cette dernière décennie ont ainsi permis de diminuer considérablement la charge en platine, tout en maintenant une densité de puissance élevée. Le dépôt de l’électrode peut se faire aussi bien sur la membrane (CCM) que sur la couche de diffusion (CCB). L’assemblage membrane-électrode, d’une épaisseur inférieure au millimètre, se fait ensuite par pressage à chaud [20].

Pour choisir le bon catalyseur, trois facteurs sont déterminant [20]: les performances, le coût, et la stabilité. Le platine est un métal noble incontournable dans les électrodes de PEMFC en raison de son efficacité dans les réactions d’oxydo-réduction. Cependant, le platine représente un coût

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incompressible élevé. Par exemple, pour une production de 500 000 stacks de 80 kWnet par année, le platine représente 46 % du coût total du stack [24]. Il est donc recommandé de diminuer en chargement en platine [20]. L’utilisation de nanoparticules de platine permet de diminuer le coût inhérent au catalyseur. La taille des nanoparticules s’échelonne entre 2 et 6 nm [25], permettant d’atteindre des surfaces spécifiques très élevées, de l’ordre de 25-40 m2

.g-1 [8].

Ces nanoparticules sont dispersées sur un support devant posséder une grande surface spécifique ainsi qu’une bonne conductivité électronique. En outre, il doit assurer l’accessibilité aux gaz, être peu coûteux, être non nocif pour l’environnement, et être stable dans les conditions de fonctionnement imposées par la pile à combustible [20]. De plus, ses propriétés de surface doivent permettre l’ancrage et la stabilité du catalyseur. Le carbone, à l’instar du Vulcan XC-72 ®, est le matériau le plus couramment choisi car il regroupe les propriétés nécessaires.

En raison du coût du carbone platiné Pt/C et de la tendance du platine et du carbone à se dégrader, des recherches sont orientées d’une part sur l’utilisation de nouveaux catalyseurs moins couteux, et d’autre part sur l’utilisation de supports offrant une meilleure stabilité.

Pour diminuer le coût lié à l’usage de platine, une première solution consiste à concevoir un alliage de platine binaire avec des métaux de transition, de préférence avec un ratio 3:1 afin d’obtenir une activité catalytique optimale pour la réduction de l’oxygène [20], [25]. Par exemple, l’alliage Pt3Ni (111) décuple l’activité catalytique par rapport au Pt (111) et améliorerait aussi l’adhésion au support. D’autres éléments ont été utilisés, tels que le cobalt, le manganèse, le fer ou le chrome, notamment pour former des alliages ternaires (PtRuNi et Pt6CoCr). Par ailleurs, l’alliage de l’or avec le platine repousse la formation d’oxydation du catalyseur à des potentiels plus élevés, le rendant plus stable et plus réactif. Bien que leur activité catalytique soit faible, l’utilisation d’oxydes métalliques a aussi été citée, particulièrement pour stabiliser le platine. Une autre solution pour diminuer le coût lié au platine est de la nanostructurer, comme sous forme cœur-coquille. Une dernière alternative consiste à ajouter du carbure de tungstène à des catalyseurs non platinés (MoWC, CoWC), employer un métal noble différent du platine, ou utiliser un complexe organométallique [20].

Le choix d’un catalyseur dépend aussi du support. Une bonne affinité entre les deux est primordiale [20], [25]. De nombreux travaux ont premièrement été effectués pour modifier le support carboné. L’augmentation de la cristallinité du carbone crée de nombreuses liaisons qui permettent un meilleur ancrage des nanoparticules de platine. De plus, cela favorise la conduction électronique et diminue considérablement la corrosion du carbone. Les nanotubes et nanofibres de carbone sont actuellement étudiés pour des usages en PEMFC. Le dopage du carbone par de l’azote est aussi utilisé afin de modifier les propriétés de surface du matériau. L’azote étant donneur, le milieu devient davantage donneur, ce qui permet un meilleur ancrage des particules de platine. D’autres supports non carbonés sont en développement. L’oxyde d’indium dopé à l’étain (ITO) est un semi-conducteur montrant une meilleure stabilité thermique et électrochimique à hauts potentiels. Cependant, la taille des particules d’ITO doit être rectifiée afin de permettre une plus grande activité catalytique. L’oxyde de titane TiO2 est également un très bon candidat en raison de sa résistance à la corrosion et aux potentiels élevés, une bonne stabilité en milieu acide, une cinétique de réduction de l’oxygène élevée. Qui plus est, il est bon marché, disponible et n’est pas dangereux. L’oxyde de tungstène WO3 est un semi-conducteur pouvant aussi être intégré dans la formulation des électrodes de PEMFC. Un autre support a été développé par 3M, le NSTF. Il s’agit d’une monocouche de platine cristallin déposé sur un matériau organique [20].

35 Après avoir décrit les principes de fonctionnement des PEMFC et leur élaboration, le paragraphe suivant présente succinctement les applications visées.

Applications de la technologie PEMFC

D.

La technologie PEMFC peut être déployée dans diverses applications requérant des puissances variables [7], [11], [12], [17]. Les applications mobiles (de 1 à 100 W) rassemblent les jeux, le matériel académique, les applications militaires, l’électronique portable (cellulaire, ordinateur, caméra…) et les groupes auxiliaires de puissance (GAP).

La production combinée de puissance et de chaleur (CHP) communément appelée « cogénération », l’alimentation sans interruption/backup power (UPS)[26] et les groupes de puissance primaires (e.g.

module Cleargen® de Ballard) constituent les principales applications stationnaires des PEMFC. Cette technologie peut aussi être adaptée pour le transport ; pour équiper par exemple les véhicules de manutention, les sous-marins (200 à 500 kW) (Drone Ifremer), les bus (env. 200 kW), ou les bateaux, à l’instar du bateau « Zéro CO2 » conçu au CEA en 2010 (Figure 7-a). Des piles à combustible (env. 100kW) peuvent également équiper les véhicules électriques, comme la Toyota Mirai commercialisée depuis 2014 au Japon (Figure 7-b).

Figure 7. Piles à combustible appliquées à la mobilité. (a) Voilier « Zéro CO2 » développé en 2010

par le CEA/Liten [27] ; (b) Toyota Mirai [28]

Ce véhicule comporte un système semblable à celui schématisé sur la Figure 8. L’énergie fournie par la pile à combustible est dirigée vers un convertisseur DC-DC, alimentant le véhicule et les divers auxiliaires (pompes, compresseur…). Leur consommation d’énergie tend à diminuer le rendement global de ce système. Un détendeur permet de réduire la pression de l’hydrogène avant d’entrer dans le stack tandis qu’un compresseur d’air et un humidificateur enthalpique sont utilisés pour conditionner l’air ambiant. Un circuit de refroidissement, permet de maintenir le stack à la température désirée. La seconde partie de ce chapitre s’intéresse aux mécanismes de dégradations des différents matériaux constituant les AME. Une attention particulière sera apportée aux causes inhérentes à l’application automobile.

a b

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Figure 8. Schéma d’un système pile à combustible [11]

Mécanismes de dégradations des AME

E.

Les conditions de fonctionnement inhérentes à l’utilisation de la pile à combustible engendrent des dégradations des composants et donc une perte de performances de l’empilement. Des tests sont alors nécessaires pour pouvoir les quantifier. Les essais effectués en conditions réelles sont plus réalistes mais sont coûteux. En conséquence, des tests accélérés sont plus couramment utilisés pour améliorer la compréhension de ces mécanismes de dégradation. Ces essais peuvent être conduits sur des cellules entières (in situ) ou des demi-cellules (ex situ). L’étude in situ est plus significative car la cellule fonctionne en conditions réelles alors que l’analyse en demi-cellule ne tient pas compte des phénomènes observés sur monocellule (engorgement, perméation des gaz, effets de la température) ainsi que de la dégradation de la membrane [20].

Il est nécessaire de distinguer les dégradations réversibles des dégradations irréversibles. Toutes deux causent une baisse de performances. Cependant, les premières impactent temporairement la pile à combustible et peuvent être récupérées au moyen de stratégies de fonctionnement particulières (cycle régénératif, arrêt prolongé, courbe de polarisation…). Parmi les causes de dégradations réversibles figurent la contamination du catalyseur ou l’engorgement de la cathode. Les dégradations irréversibles résultent de la modification irrémédiable des matériaux constitutifs de la pile à combustible (couche de diffusion, polymère conducteur, catalyseur, support carboné…).

Dans le cadre de cette thèse, seule la dégradation de l’assemblage membrane-électrode sera étudiée. Ainsi, ce paragraphe recense les diverses dégradations rencontrées par la couche de diffusion, la membrane, le support carboné et le catalyseur. Les mécanismes de dégradation et l’influence des conditions opératoires seront explicités et des propositions d’améliorations seront apportées.

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1. Dégradation de la couche de diffusion

Il est difficile d’étudier la dégradation de la couche de diffusion poreuse (GDL). Par exemple, le caractère hydrophobe du matériau peut dépendre à la fois de la structure du matériau carboné mais également de la teneur en PTFE. Cela nécessite donc une étude à l’échelle microscopique. Il existe trois types de dégradations. Les dégradations physiques rassemblent l’impact de la compression, de la température ou l’effet des températures négatives sur la porosité et sur l’interface couche active/couche de diffusion. Les dégradations chimiques et électrochimiques engendrent principalement la perte d’hydrophobie, qui cause d’importantes répercussions sur le transport de l’oxygène et de l’eau. Liu et Case ont ainsi observé que les surfaces de la MPL et de la GDL sont devenues plus hydrophiles après une utilisation prolongée [20]. La majorité des travaux portant sur la dégradation des couches de diffusion ont été faits à l’aide de tests accélérés. Frisk et al. ont montré une perte de masse et une diminution de l’angle de contact après une exposition dans une solution contenant du peroxyde d’hydrogène à 15 % [20]. Les pistes d’amélioration envisagées face à ces dégradations concernent la composition (charge en PTFE), la conception de la couche de diffusion (fabrication à température élevée pour augmenter la cristallinité du carbone) et la réponse dynamique du système (meilleure régulation des chutes de pression). Afin de gérer au mieux l’évacuation de l’eau, il a été envisagé de perforer la GDL au laser ou de découpler le transport d’eau de l’arrivée en air [20].