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Chapitre 3 : La paroi d’Aspergillus fumigatus

B) La couche externe de la paroi conidiale

La couche externe de la paroi conidiale d’A .fumigatus est constituée de DHN (dihydroxynaphtalène)- mélanine et de petites protéines hydrophobes appelées hydrophobines disposées en bâtonnets donnant

un aspect échinulé à la paroi (Fig.22). 1) La mélanine

La mélanine n’est pas une seule substance à proprement parler mais constitue un large groupe de diverses molécules ayant des propriétés similaires. Les mélanines ont longtemps étaient définies par leur résistance à la dégradation par les acides forts ou par les solutions alcalines concentrées. Elles sont formées par polymérisation de composés phénoliques ou indoliques et sont insolubles dans l’eau ou les solvants organiques. La mélanine est un pigment hydrophobe noir ou marron chargé négativement considéré comme un facteur de virulence important protégeant A. fumigatus contre les défenses de l’hôte. On trouve de la mélanine aussi bien chez les champignons pathogènes humains et phytopathogènes que chez les non-pathogènes. Chez les phytopathogènes, elle a un rôle essentiel dans la turgescence des appressoria des plantes pour pénétrer dans les feuilles. Concernant les pathogènes, elle a principalement un rôle de protection vis-à-vis de la réponse immunitaire de l’hôte. Il existe deux types principaux de mélanine synthétisés par deux voies différentes : la DOPA- mélanine caractéristique de Cryptococcus neoformans et la DHN-mélanine caractéristique des conidies d’A. fumigatus (Langfelder K. et al., 2003). Cette DHN-mélanine est le résultat de la polymérisation du 1,8-DHN et serait nécessaire à l’assemblage correct de la paroi. La synthèse de la DHN-mélanine met en jeu six gènes : ALB1, AYG1, ARP1, ARP2, ABR1 et ABR2 exprimés pendant la conidiogénèse (Fig.23). Des mutants pour les gènes ALB1 et ARP2 ont été étudiés. Le mutant ALB1 n’avait pas de pigmentation alors que le mutant ARP2 avait une teinte brune. La paroi de ces mutants était lisse prouvant une perte de la couche externe avec ses hydrophobines et de son

Figure 22: Surface conidiale (d’après Aimanianda V. et al., 2010)

arrangement si particulier. L’étude a montré que les mutants ALB1 étaient moins virulents que la souche WT dans des modèles murins d’aspergillose. La délétion d’ARP2 n’entraînait pas de diminution de la virulence dans les modèles murins d’infection intranasale. In vitro, la mélanine a une action protectrice vis-à-vis de la phagocytose et des ROS. Il a été aussi observé lors de cette étude une augmentation de la capacité de liaison à la fibronectine (MEC) mais aussi une diminution de celle à la laminine chez les mutants prouvant donc que certaines adhésines fongiques se situent dans les « ornementations » de la paroi de la conidie en dormance. Cependant, les relations entre la mélanine et les différents composants de la paroi fongique ne sont pas encore définies (Pihet M. et al., 2009).

Figure 23 : Schéma de la biosynthèse de la DHN-mélanine (d'après Pihet M. et al., 2009) 2) Les hydrophobines

Les hydrophobines sont le deuxième constituant important de la couche externe de la paroi conidiale. Elles appartiennent à une famille de protéines de faible poids moléculaire (<20kDa) caractérisées par huit résidus de cystéines conservés formant quatre ponts disulfure. Chez A. fumigatus, on trouve deux hydrophobines : RodAp (protéine GPI) et RodBp. Il existerait quatre autres gènes qui coderaient ce type de protéines. Ces hydrophobines disparaissent avec le gonflement de la conidie jusqu’à totalement disparaître à la germination et sont donc absentes de l’hyphe. Le gène RODA d’A. fumigatus partage 85 % de similarité avec celui d’A. nidulans. RodA a une masse moléculaire de 16 kDa et RodBp a une masse de 14 kDa. Les hydrophobines sont insolubles dans le SDS mais solubles dans le TFA (Paris S. et al., 2002). Les mutants pour les gènes codant ces protéines ont été étudiés. Sur le mutant δRodA, on observait la perte de la couche en bâtonnets, les conidies devenaient hydrophiles et les mutants perdaient leur capacité à disperser les conidies mais gardaient leur virulence dans un modèle murin d’infection. (Thau N. et al., 1994)

Quant au mutant δRodB, il n’affichait pas de modifications morphologiques particulières, il a été observé une couche de « bâtonnets » semblable à celle d’une souche WT signifiant ainsi que δRodB n’est pas nécessaire à la formation des « bâtonnets ». Un double mutant δRodAδRodB a été construit

et affichait une surface amorphe lisse suggérant que RodB a un rôle dans la structure de la paroi conidiale. Le double mutant est plus sensible à l’attaque de macrophages alvéolaires. Les hydrophobines auraient donc un rôle protecteur contre les ROS produits par ces macrophages. (Paris S. et al., 2002)

Ces hydrophobines évitent la reconnaissance par le système immunitaire de l’hôte en masquant les antigènes (β-glucane, α-glucane et galactomannanes) qui pourraient déclencher une réponse fatale à la survie du champignon. En effet, un traitement chimique par de l’acide hydrofluorique permet d’ôter cette couche d’hydrophobines mettant à découvert la paroi interne constituée de polysaccharides déclenchant la réponse immunitaire et de protéines à caractère antigénique qui vont être sécrétées. La réponse immunitaire est alors déclenchée au détriment de la survie du champignon. Les réactions inflammatoires qui en découlent peuvent être aussi préjudiciables pour l’hôte lui-même en menant à la mort des phagocytes et à la nécrose des tissus. Cela peut déclencher la croissance fongique dans le parenchyme pulmonaire.

Des expériences sur le potentiel immuno-stimulateur de RodAp ont été effectuées et se sont révélées négatives comme l’a prouvé le manque d’activation des cellules dendritiques (DC), l’absence d’expression de cytokines par les DC humains et les macrophages alvéolaires murins in vitro ainsi que l’incapacité à activer les réponses des cellules T in vivo. RodAp n’est pas dégradée par les cathepsines L et S phagolysosomales montrant sa résistance au clivage protéolytique et donc son inertie immunologique (Aimanianda V.et al., 2009 ; Aimanianda V. et Latgé J.P., 2010).

C) Ecm33p et CspA : deux protéines pariétales importantes dans le maintien de l’intégrité de la