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7.2.1 Dans le domaine de la régulation du FSTA

Notre recherche a élargi nos connaissances sur la régulation du FSTA. Nous avons démontré l’effet vasodilatateur de deux systèmes neurohormonaux.

7.2.1.1 Le système cholinergique

L’acétylcholine, agoniste non-sélectif des récepteurs nicotiniques et muscariniques, est un vasodilatateur artériel reconnu mais son action sur la microcirculation du TA n’avait jamais été établie. Nous sommes les premiers à démontrer que son effet vasodilatateur s’exerce aussi dans ce tissu. Nous sommes allés plus loin en montrant que l’effet de l’Ach est médié par les récepteurs muscariniques.

Ce travail contribue au débat ancien qui concerne le système nerveux parasympathique (SNPS) dans le TA. Bien que le TA blanc n’est pas un tissu (ou organe) innervé par le SNPS, plusieurs études, immunohistologiques et métaboliques, indiquent la présence du système cholinergique. Nos résultats apportent des preuves de la réalité de ce système dans la régulation de la perfusion du TA. Nous avons démontré son rôle dans une situation physiologique, c’est-à-dire en postprandial. Néanmoins, vu le caractère local de la production et de l’action de l’Ach, on suggère que ce système participe à toutes les situations avec une augmentation du FSTA.

Le fonctionnement de segments particuliers de la microcirculation est coordonné grâce à la communication étroite entre les cellules endothéliales et les VSMC, ainsi que mutuellement entre les cellules endothéliales avec mise en jeu de l’EDH (voir le chapitre 1.3.1 sur la microcirculation). Nos résultats suggèrent que la communication interendothéliale peut passer aussi par le système cholinergique local.

Nos résultats doivent être mis en contexte de certaines études portant sur l’effet du système cholinergique sur les processus métaboliques. Il a été établi que la stimulation des récepteurs nicotiniques du TA a pour conséquence une augmentation de la lipolyse et que la

179 stimulation des récepteurs muscariniques a l’effet inverse (Andersson et Arner, 1995; 2001; Yang et al., 2009). La dissociation des effets muscariniques (inhibition de la lipolyse mais stimulation du FSTA) est relativement unique car habituellement les vasodilatateurs (les catécholamines, le PNA) augmentent le FSTA et la lipolyse. On peut tenter d’expliquer l’effet inverse par le fait que lʼAch est l’agoniste de ses deux récepteurs, muscariniques et nicotiniques. Elle stimule donc aussi les récepteurs nicotiniques lipolytiques (Andersson et Arner, 1995; 2001). Une explication moins probable est que l’Ach produite par les cellules endothéliales a un effet purement local, vasculaire. Un problème méthodologique offre une autre explication : un pourcentage élevé de NR dans le volet avec la mécamylamine a pu masquer l’influence de lʼAch sur le FSTA via les récepteurs nicotiniques. On pourrait aussi spéculer sur la diversification de l’effet de lʼAch qui inhiberait la lipolyse par les récepteurs muscariniques dans les adipocytes et simultanément augmenterait l’afflux de TG par le FSTA. Après un repas, ce mécanisme assurerait une captation plus efficace des AGL formés durant la lipolyse intravasculaire grâce à l’augmentation du gradient de concentration des AGL vers l’intérieur de l’adipocyte.

7.2.1.2 Le VIP

Notre étude a montré l’effet vasodilatateur du VIP dans le TA. Cette découverte, en plus de la présence des récepteurs VIP sur les adipocytes, les cellules endothéliales et les macrophages, et de l’effet lipolytique reconnu du VIP, permet de penser que le VIP joue un rôle physiologique dans le métabolisme du TA blanc. Comme le système β-adrénergique ou le PNA, le VIP serait donc un nouveau facteur régulateur dans le TA blanc, il participerait à la mobilisation des AGL. L’effet vasodilatateur du VIP pourrait être impliqué aussi en postprandial, alors même que son effet lipolytique serait bloqué par l’insuline. Tout cela reste discutable car la source du VIP n’a pas toujours été clairement définie, comme discuté dans l’article No 4.

Des neurones non-adrénergiques et non-cholinergiques du SNPS et des plexus nerveux du tractus gastrointestinal sont vus comme la principale source de VIP. L’impact du VIP sur les cellules musculaires lisses est démontré dans le système cardiopulmonaire innervé par le nerf vague : le VIP cause une vasodilatation des artères coronaires et une bronchodilatation. Le VIP a aussi des effets chronotropes et inotropes sur le myocarde et un

180 effet anti-inflammatoire dans les poumons (Wu et al., 2011). Les neurones VIP-énergiques du nerf vague ont une action myorelaxante sur les cellules musculaires lisses de l’œsophage et du pylore, et ils influencent la sécrétion pancréatique endogène et exogène. Mais, comme discuté dans la section précédente sur le système cholinergique et dans l’article correspondant (No 3), le TA blanc ne contient pas de SNPS. Également, on ne croit pas que

des neurones postganglionnaires du SNS puissent se servir du VIP pour la signalisation peptidergique (Anderson et al., 1993).

Une autre source hypothétique du VIP dans le TA serait extraneuronale, sous forme d’une production locale avec l’effet paracrine. Ce mode de communication du VIP a été décrit entre les cellules immunocompétentes (Wu et al., 2011). Cependant, d’un point de vue immunohistochimique, la présence du VIP dans le TA n’a pas encore été prouvée (Giordano et al., 2006). Et les mécanismes qui stimuleraient dans ces cellules la formation et la libération du VIP sont aussi obscurs.

La dernière explication, probablement la plus plausible, est que l’origine de la source du VIP est extraadipocytaire, qu’elle résulte du spillover issu des terminaisons parasympathiques et des plexus nerveux gastrointestinaux. Cependant, l’évaluation du VIP succombe à quelques problèmes techniques : une demi-vie courte (1-4 minutes), une clairance hépatique importante et une distribution ubiquitaire des neurones VIP-énergiques dans l’organisme. On peut probablement dire sans se tromper que le VIP augmente via stimulation vagale. Exemple : la stimulation vagale d’origine cardiopulmonaire pendant l’activité physique (Opstad, 1987). Le VIP libéré de cette manière peut coparticiper à l’apport d’AGL aux muscles en action et au myocarde. Donc, en situation de demande énergétique, et vraisemblablement à cause de l’activation centrale du nerf vague, le VIP augmente et agit sur le TA mais aussi sur le foie en mobilisant le glycogène hépatique.

Un spillover important du VIP se produit aussi dans les plexus submuqueux et myentériques durant la stimulation du tractus gastrointestinal. Néanmoins, c’est surtout la composition du repas qui détermine si le VIP atteint la circulation systémique. À ce chapitre, notre travail a bien démontré que les glucides seuls n’ont pas le potentiel d’augmenter les taux circulants de VIP, et donc que le VIP ne participe pas à la régulation glucidique du FSTA. La question de sa production et de son rôle après un repas mixte, ou riche en lipides, ou riche en protéines, reste ouverte.

181 7.2.2 Dans le domaine de la non réponse du FSTA

Pendant l’étude sur le système cholinergique, il est apparu que la réponse à lʼAch exogène ne différait pas entre les R et NR, excluant ainsi qu’une dysfonction des récepteurs muscariniques participe au phénomène de la non réponse. Par contre, nos résultats ne permettent pas d’exclure définitivement un défaut dans la production de lʼAch. Le blocage de l’effet de l’Ach endogène par l’atropine a diminué le FSTA postprandial chez les R mais n’a eu aucun effet chez les NR. Ceci s’explique : l’augmentation négligeable du FSTA après l’ingestion de glucose chez les NR a pu masquer l’effet du blocage muscarinique.

Les résultats de l’étude avec le VIP vont contre un défaut des récepteurs VIP chez les sujets NR puisqu’ils ont répondu à la microinfusion de VIP. Un trouble de la sécrétion de VIP ne peut pas non plus être invoqué comme cause du phénomène de non-réponse puisque les taux de VIP n’ont pas changé après ingestion de glucose.

On peut donc dire que notre travail a contribué à déterminer la cause du phénomène R-NR en éliminant lʼAch et le VIP du puzzle. Le bon fonctionnement des récepteurs pour lʼAch et le VIP peut suggérer que le dysfonctionnement endothélial n’est pas majeur chez les NR. Des résultats non encore publiés de nos études supportent cette idée : les taux de sICAM-1, un marqueur de la dysfonction endothéliale, sont identiques chez les R et les NR. Pour l’instant, la seule explication valide de la non réponse est la résistance du FSTA à la stimulation β-adrénergique, comme nous l’avons démontré précédemment (Ardilouze et al., 2012).

7.2.3 Dans le domaine du risque cardiométabolique

Le but de notre dernière étude (article No 5) était d’évaluer si les altérations du FSTA peuvent

précéder la RI/la diminution de la sensibilité à l’insuline. En principe, pour évaluer une telle hypothèse, deux approches sont possibles : prospective, en observant à moyen terme un groupe avec FSTA altéré et un groupe témoin, ou transversale, en comparant un groupe à haut risque de développer la RI et un groupe témoin. L’idéal est bien sûr de faire une étude prospective mais cela nécessite du temps, au moins cinq ans, et un budget considérable, deux conditions improbables dans le cadre d’un doctorat.

Nous avons choisi la deuxième approche. Avant notre travail, une seule étude transversale était disponible, celle qui montre, nous en avons parlé, un FSTA postprandial

182 considérablement amoindri chez des sujets sains à haut risque de développer un DT2 (Dimitriadis et al., 2007). Mais dans cette étude, la sensibilité à l’insuline des participants était déjà diminuée. Nous avons choisi un autre modèle expérimental, un groupe à très haut risque : des femmes avec une histoire récente de DG, mais avec un IMC normal, pour optimiser nos chances que la sensibilité à l’insuline soit encore normale. Et de facto nous avons recruté des femmes avec FSTA altéré et une sensibilité à l’insuline comparable à celle des contrôles. Nous avons donc à nouveau montré (Ardilouze et al., 2012) que les anomalies du FSTA peuvent être présentes indépendamment de la RI.

Nous avons aussi montré autre chose. Les femmes minces avec une histoire de DG sont, d’après la littérature, à risque élevé de DT2 surtout à cause de la détérioration graduelle de la fonction des cellules β du pancréas. Toutefois, plusieurs données de la littérature (voir l’article No 5 et le chapitre sur le DG) justifient de considérer ces femmes comme à risque

de RI. Dans notre étude, outre l’histoire de DG, cette supposition est soutenue par l’histoire familiale de maladies cardiométaboliques, qui sont typiquement associées au SM, et à une distribution désavantageuse, centrale, du TA, comme chez nos participantes. Tout cela permet de dire que les anomalies du FSTA existent certes indépendamment de la RI, mais aussi que ces anomalies, probablement déterminées génétiquement, agissent comme facteur pathogénique du développement de la RI. Les individus dont le FSTA est congénitalement insuffisant peuvent être prédisposés au développement de l’obésité et/ou peuvent exprimer tôt une capacité insuffisante du TAsc à capter les AGL, ce qui mène, on l’a vu, à des dépôts ectopiques des TG et à la RI.

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