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3.6 Conclusions et perspectives

4.1.1 Contraintes observationnelles

Les inclusions riches en Calcium et en Aluminium, appelées communément CAIs, sont des solides de taille comprise entre le mm et le cm (Charnoz et al., 2015) de forme sphé-rique qu’on retrouve dans les météorites les plus primitives. Cependant, ces inclusions ne sont pas présentes dans tous les types de météorites mais essentiellement dans les chondrites carbonées. La Fig. 1.4 montre un exemple de CAIs présentant trois types de

structures bien distinctes. Des mesures de rapports isotopiques révèlent que ces inclusions constituent le matériau le plus ancien de notre système solaire connu à ce jour avec un âge de 4567.30 ± 0.16 millions d’années (Connelly et al., 2012). Un aspect particulièrement

intéressant est que la formation de ces inclusions a été relativement rapide pendant les premières phases de la nébuleuse solaire, notée NS. Des études en laboratoire portant sur les séquences de condensation (cf. Fig. 4.2) estiment que la formation des CAIs a duré entre 16.000 et 40.000 ans (Jacobsen et al., 2008) et que ceux-ci se sont formés à partir de condensats sub-microniques. Les mesures de la fraction isotopique de l’16O de ces solides indiquent par ailleurs que ceux-ci se sont formées dans un gaz riche en 16O avec une composition proche de celle du Soleil et à des températures d’environ 1600 K (Berg et al., 2009). Il est possible de contraindre également la pression à laquelle se sont formés ces solides en analysant la séquence de condensation dans les régions proches du proto-Soleil : MacPherson et al. (2005) et Liffman et al. (2012) trouvent que les CAIs condensent à partir de la phase gazeuse et à des pressions d’environ 10−4 atm. De plus, la texture granuleuse et ignée de la surface de certains CAIs (cf. Fig. 4.1) indique qu’ils ont subi une fusion partielle de la surface au moins une fois (MacPherson et al., 2012).

Figure 4.1 – Différentes structures observées dans un échantillon de Vigarano 3138 F4. Les fausses couleurs correspondent aux analyses avec rayons X qui sont superposées aux images obtenues par microscopie électronique à balayage. La melilite est en bleu-ciel, le pyroxène en vert olive, l’anorthite en bleu foncé et la spinelle en rouge. Crédits : Mac-Pherson et al. (2012)

Le mécanisme de fusion partielle de ces CAIs dans les disques est actuellement très débattu et de nombreux scénarios ont été proposés (Hewins et al., 2011). Récemment, Ivanova et al. (2014) ont étudié deux exemples de CAIs dans des échantillons de chon-drites de type CV (NWA 3118 et NWA 5950) qui ont la particularité d’avoir une forme de bol1 certainement due à des effets aérodynamiques. Auparavant, Lorenz et al. (2012) avaient affirmé que ces formes sont en accord avec un processus de formation à partir de gouttelettes liquides en interaction avec un milieu de gaz raréfié. Dans ce contexte, Ivanova et al. (2014) ont proposé les vents stellaires afin d’obtenir les vitesses élevées requises pour les particules solides. Dans cette étude, on suivra cette idée en explorant l’évolution thermique des CAIs dans le modèle de la fontaine stellaire où le jet magné-tique stellaire affecte les régions internes de la NS et expulse des particules vers l’extérieur.

4.1. Propriétés et mécanismes de formation des CAIs 99 Composés organiques glaces mellilite (Ca2MgSi207) corundum (D-Al2O3) perovskite (CaTi03) spinel (MgAl2O3) diopside (MgCaSi2O6) enstatite (MgSiO3) iron (Fe,Ni) forsterite (Mg2SiO4) anorthite (CaSi2Al2O8) plagioclase (with Na+AllCa+Si)

olivine & pyroxene

(FelMg) troilite (FeS) phyllosilicates magnetite (Fe3O4 ) sulfates, carbonates 1400 1100 500 150 CAIs Chondrites ordinaires Chondrites carbonées 0 Temp erature (°C)

Figure4.2 – Séquence de condensation dans la nébuleuse proto-solaire, à p = 10−4 atm, d’après Grossman & Larimer (1974). Sur la droite, le type de matériau obtenu en fonction de la composition du solide.

Le modèle de formation par ondes de chocs est également un candidat robuste pour expliquer la fusion et le recuit des CAIs dans le disque. De ce fait, il a été très largement considéré dans l’étude des mécanismes de formation des solides à haute température trouvés dans les météorites. Cependant, de récentes études théoriques suggèrent que la variabilité de l’intensité des processus de chauffage et de refroidissement causés par les ondes de choc est beaucoup trop importante pour reproduire les taux caractéristiques de chauffage et de refroidissement des chondrules (Liffman, 2009; Stammler & Dullemond, 2014). Il est important de rappeler que, même si des ondes de choc ont probablement lieu dans les disques, à ce jour aucune n’a été observée directement. Quand bien même des observations montreraient l’existence de celles-ci au sein des objets stellaires jeunes, elles ne sont pas nécessairement liées au processus de fusion et de recuit du matériau rocheux en question.

La seule observation mettant en évidence la transformation de poussière en silicates cristallins, tels que la forsterite (Mg2SiO4), dans un disque protoplanétaire est associée à un phénomène de chauffage radiatif. Cette observation a été réalisée pendant la phase d’éruption stellaire de EX Lupi par Ábrahám et al. (2009). En effet, les auteurs n’ont pas trouvé de trace observationnelle permettant d’associer le déplacement des minéraux “chauds” vers l’extérieur avec la propagation d’une onde de choc. Des observations posté-rieures (Juhász et al., 2012) ont permis d’estimer la vitesse radiale des grains de forsterite à des valeurs proches de 40 km s−1. Les observations suggèrent que ces solides, récemment formés, ont un mouvement radial vers l’extérieur sur la surface du disque.

Ce manque de preuves observationnelles couplé aux prédictions théoriques négatives est à considérer sérieusement car il pourrait bien signifier que les ondes de choc, en dépit de leur popularité, ne soient pas liées à la production de CAIs. Ici on décide d’adopter la

démarche inverse en développant une théorie pour la formation de CAIs qui soit directe-ment basée sur les observations de systèmes protoplanétaires. Dans le cas de cette étude, on prendra le système EX Lupi comme le cas de référence.