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1. L’entrée en phase-M

Lors de l’entrée en phase-M, l’activation des kinases, en particulier celle de Cdk1, permet la phosphorylation des régulateurs directs de Cdk1, Myt1/Wee1 et Cdc25, et des substrats mitotiques qui gouvernent les évènements structuraux de la division. L’inhibition simultanée des phosphatases qui contrebalancent les activités kinases agit ainsi à deux niveaux distincts dans le contrôle moléculaire de la phase-M : l’activation totale des complexes Cdk1-Cycline B accumulés lors de la phase-G2 et le maintien des substrats mitotiques sous forme phosphorylée.

a) Activation des complexes Cdk1-Cycline B

L’activation des complexes Cdk1-Cycline B débuterait au niveau des centrosomes et dans le noyau (Lindqvist et al., 2009). Dans les cellules humaines, l’analyse par FRET et vidéo-microscopie d’un substrat spécifiquement phosphorylé par les complexes Cdk1-Cycline B1 a par ailleurs permis d’établir que l'activation de ces complexes débute dans les 20 minutes qui précèdent la rupture de l’enveloppe nucléaire pour induire l’entrée en prophase (Gavet and Pines, 2010a, b). Leur activité augmente ensuite fortement jusqu’en métaphase et coordonne les évènements structuraux de l’entrée en phase-M comme la rupture de l’enveloppe nucléaire (Gavet and Pines, 2010a, b). Comme mentionné dans la partie A.2.c, l’activation des complexes Cdk1-Cyclines B requiert la déphosphorylation de Cdk1 sur T14 et Y15 suite à l’activation de Cdc25 et à l’inhibition simultanée des kinases Wee1/Myt1 lors de la transition G2/M. Ce mécanisme est principalement gouverné par les premières molécules actives de Cdk1 et est connu sous le nom de boucle d’auto-amplification (voir chapitre III).

i. L’équilibre Wee1/myt1 et Cdc25

En phase-G2, Wee1/Myt1 sont actives alors que Cdc25 est inactive. Lors de la transition G2/M, l’inhibition de Wee1/Myt1 et l’activation de Cdc25 permettent la déphosphorylation de Cdk1 sur T14 et Y15 et donc l'activation des complexes Cdk1-Cycline B. Ces deux classes d’enzymes antagonistes sont régulées par phosphorylation de manière opposée lors de l’entrée en mitose. Wee1/Myt1 sont actives sous forme hypophosphorylée en interphase et inactivées

un état hyperphosphorylé et actif en mitose (Gabrielli et al., 1997; Gaffre et al., 2011; Karaiskou

et al., 1998; Karaiskou et al., 1999). Que ce soit pour Wee1/Myt1 ou Cdc25C, ces

phosphorylations sont principalement catalysées par Cdk1 (Booher et al., 1997; Gaffre et al., 2011; Mueller et al., 1995a; Mueller et al., 1995b; Tang et al., 1993). Outre leur action sur les activités enzymatiques de Cdc25C et Wee1/Myt1, elles modifient leur localisation intracellulaire et favorisent l’activation des premiers complexes Cdk1-Cycline B au niveau du noyau et des centrosomes (Booher et al., 1997; Mueller et al., 1995a ; Mueller et al., 1995b; Tang et al., 1993). En régulant ses propres régulateurs par phosphorylation, Cdk1 contribue à l'amplification de son activité et la maintient ainsi à un niveau élevé tout au long de la mitose. Outre Cdk1, d’autres kinases activatrices participent à la boucle d’auto-amplification en ciblant également les régulateurs directs de Cdk1 comme Aurora, Plk1 (Polo Kinase 1) et la MAPK.

ii. Greatwall et PP2A-B55δ

Conjointement, les phosphatases qui contrecarrent les activités kinases mitotiques, en particulier celle de Cdk1, sont inhibées. Ceci permet notamment la régulation efficace de Wee1/Myt1 et Cdc25 car il n’y a plus d’enzyme s’opposant à leur phosphorylation par Cdk1. Chez le xénope, la phosphatase qui antagonise Cdk1 correspond à une isoforme bien spécifique de PP2A, PP2A-B55d. Cette phosphatase est active en phase-G2 et inhibée lors de la transition G2/M (Mochida et al., 2009). Son inactivation est indirectement sous le contrôle de l’activité de Cdk1 qui, par phosphorylation, active la kinase Greatwall. En retour, Greatwall phosphoryle ses deux substrats, membres de la famille des Endosulfines, ENSA (a-endosulfine) et Arpp19 (cAMP-regulated phosphoprotein of 19 kDa), sur un résidu très conservé, la S67/S64 (xénope/homme) (Castilho et al., 2009; Gharbi-Ayachi et al., 2010; Mochida et al., 2010; Zhao

et al., 2008). Une fois phosphorylées, les protéines ENSA et Arpp19 sont converties en de

puissants inhibiteurs spécifiques de PP2A-B55d qui se lient directement à la phosphatase et titre son activité en servant de substrats préférentiels (Gharbi-Ayachi et al., 2010; Mochida et

al., 2010; Williams et al., 2014). Le rôle régulateur exercé par la voie

Greatwall/ARPP-ENSA/PP2A-B55d sur la division a été découvert à partir d'extraits acellulaires de xénope et chez la drosophile et sont conservés dans la plupart des modèles expérimentaux avec cependant certaines spécificités (pour revue, Vigneron et al., 2016). L’invalidation complète de Greatwall par ARN interférence dans les cellules humaines provoque un arrêt en phase-G2 (Adhikari et

al., 2014; Alvarez-Fernandez et al., 2013; Archambault et al., 2007; Burgess et al., 2010; Voets

humaines, la drosophile ou les ovocytes des souris n’affecte pas la rupture de l’enveloppe nucléaire mais conduit à des défauts majeurs dans la condensation des chromosomes, la séparation des chromatides sœurs et la cytokinèse (Adhikari et al., 2014; Alvarez-Fernandez et

al., 2013; Archambault et al., 2007; Burgess et al., 2010; Voets and Wolthuis, 2010). Ces

différents effets peuvent être expliqués par le degré d’inactivation de l’expression de Greatwall (Vigneron et al., 2016). Par ailleurs, l’isoforme de PP2A-B55 qui contrecarre Cdk1 varie également selon le modèle expérimental puisque le niveau d’expression des B55 est fonction des espèces et des types cellulaires. Chez l’homme, il correspondrait à l’isoforme PP2A-B55a (Castilho et al., 2009; Mochida et al., 2009). Cette voie régulatrice Greatwall, Arpp19/ENSA et PP2A-B55 sera plus amplement détaillée dans le chapitre IV.

iii. Le signal déclencheur de l’entrée en phase-M

Le déclenchement de la boucle d'auto-amplification repose sur un niveau seuil d'activité du complexe Cdk1-Cycline B. Comment cette amorce d'activité Cdk1 peut-elle naître ? Il a été récemment proposé que le signal déclencheur corresponde aux complexes Cdk1-Cycline A qui phosphorylent plusieurs protéines régulatrices impliquées dans l’activation des complexes Cdk1-Cycline B : Wee1, Plk1 et Greatwall (Figure 5). Les complexes Cdk1-Cycline A sont actifs avant et indépendamment des complexes Cdk1-Cycline B (Fung et al., 2007; Hégarat et

al., 2018). De plus, ils ne sont pas ou partiellement phosphorylés sur Y15 chez le xénope et

l’homme (Clarke et al., 1992; Vigneron et al., 2018). Dans les cellules humaines, l’invalidation de la Cycline A par ARN interférence prolonge la phase-G2 ou bloque les cellules dans cette phase, en corrélation avec une augmentation de la phosphorylation de Cdk1 sur Y15 (Fung et

al., 2007; Hégarat et al., 2018) (Clarke et al., 1992; Vigneron et al., 2018). L’arrêt en

phase-G2 induit suite à l’absence de Cycline A est alors fonction de Wee1 et/ou de l’axe Plk1-Cdc25 (Fung et al., 2007 ; Hégarat et al., 2018; Vigneron et al., 2018). Les complexes Cdk1-Cycline A inhibent Wee1 par phosphorylation sur T239 (Li et al., 2010). Ils activent également la kinase Plk1 qui inhibe Wee1/Myt1 et active Cdc25 par phosphorylation (Gheghiani et al., 2017; Lobjois et al., 2011; Nakajima et al., 2003; Roshak et al., 2000). L’axe Plk1-Cdc25 dépend d’une kinase additionnelle, Aurora A, et de son co-activateur, la protéine Bora (Macurek et al., 2008). Aurora A active Plk1 par phosphorylation sur un résidu activateur, T210, dès la phase-G2. La phosphorylation par Cdk1-Cycline A sur S110 de Bora permet à cette dernière de

Figure 5 : Le signal déclencheur de l’activation des complexes Cdk1-Cycline B