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Pauvres et pauvreté

Chapitre 1. Contextes de la pauvreté

Les estropiés123

123 Attribué à Jérôme Bosch, 1450-1516. Les estropiés. Plume et encre brune, 28,5 cm x 20,5 cm.

Le concept de pauvreté est une réalité ancrée dans la dimension sociale d’un territoire : on est pauvre par rapport à ce que les autres possèdent, en fonction de ce que l’on est en droit d’attendre dans la société à laquelle on appartient. S’intéresser aux pauvres, c’est d’abord s’interroger sur les contextes qui permettent à la pauvreté de s’établir, de révéler des écarts de richesse entre les individus. L’étude du contexte économique et financier d’un territoire permet de répondre à ces questions, mais cela nécessite aussi de chercher aussi des « traces » de pauvres dans l’effacement des sources, parfois « cachés » par une société et donc absents d’archives où ils ne sont souvent visibles qu’au travers de documents officiels ou comptables.

Les sources permettent d’étudier de quelles manières le contexte économique et financier du Haut-Dauphiné a généré de la pauvreté, mais aussi comment le statut social des personnes envisagées ici a pu illustrer l’errance sociale et la misère.

Sous l’Ancien Régime, la misère fut non seulement un phénomène mouvant en raison de plusieurs paramètres qui entrèrent en interaction, mais aussi une succession de constructions mentales inhérente à la société du XVIIIe siècle :

« Le dénuement, la pauvreté, l’errance sont comme frappés d’hérésie. Le XVIIIe siècle a la philosophie des gens de bien et le réalisme des aveugles, aussi la masse impressionnante des indigents auxquels on ne sait pas donner de nom se trouve-t-elle à la fois enfermée et assistée, répudiée et réactivée dans un imbroglio de réglementations de police et d’ordonnances royales qui montrent à la fois leur appartenance à l’héritage médiéval du salut, aux formes éclairées d’une philosophie dite du progrès, aux pratiques policières les plus quotidiennes et les plus complexes »124.

De fait, l’aspect politique s’affirme ici comme prépondérant. Plus qu’une cause, l’aspect politique peut donc être considéré comme la prima ratio dans une analyse de la pauvreté en n’éludant pas le côté irréductiblement intrinsèque du pauvre, juxtaposé à côté du traitement que la société lui réserve montrant toute la complexité du croisement entre l’héritage du Moyen Age, la philosophie des

124 A. Farge, J.-F. Laé, P. Cingolani, F. Magloire, Sans visages. L’impossible regard sur le pauvre,

Lumières et la mise en place progressive de pratiques policières. On constate alors deux niveaux de causes. Le premier niveau est constitué par des causes politiques et économiques, selon des domaines qui pouvaient s’influencer entre eux, et concernant in fine les personnes, selon des niveaux tantôt collectifs, tantôt individuels, pouvant être réunis dans un deuxième niveau de causes. Les causes politiques furent les plus complexes car elles concernaient notamment la prise en compte par la société, puis les conséquences des guerres ou encore l’hétérodoxie de la confession religieuse; et de manière individuelle leurs impacts pouvaient se concrétiser sous la forme de la destruction d’une ville – obligeant à chercher ailleurs des conditions pour subsister – ou de celle d’un cheptel mais aussi le poids des impositions125. Les causes économiques pouvaient à la fois être attachées à une province : les pays du Massif Central comme l’Auvergne, la Marche, le Limousin, le Gévaudan, le Velay, le Vivarais, les Cévennes ou encore le Rouergue et ceux des Alpes, au premier rang desquels on trouve la Bresse, le Bugey, le Dauphiné, les Pyrenées et le Jura étaient reconnus comme des

« […] pays de petite culture, reservoirs of men, sometimes small independent owners of scraps of property, strain was manifest from the 1740s and 1750s. From then on, in these regions, more and more people found themselves unable to live off the proceeds of their land and turned increasingly to a type of economy of makeshifts: an extra job, seasoned migration, turning the children out to beg […] »126. La misère fut donc attachée aux conditions d’existence dans une province. Ensuite, l’augmentation des prix fut un phénomène récurrent sous l’Ancien Régime:

« Le prix des journées n’est pas augmenté en proportion de celui des denrées… on ne donne à présent que comme l’on donnait il y a 15 ans, 8 et 10 sols par jour à un journalier ; à supposer que cet ouvrier soit occupé tous les jours de la semaine, il n’y aura gagné à la fin que 2 livres 8 sols ou 3 livres ; il y a 15 ans que le demi de seigle ne valait que 2 livres ou 2 livres 10 sols. Cette mesure locale est

125 A. Cheytion, Mendiants et vagabonds dans les villages de la plaine de Valence (XVIe – XVIIIe

siècles), Université Pierre Mendès-France, Grenoble, UFR sciences humaines, 1997, p. 37 Je

remercie M. Alain Belmont pour m’avoir signalé l’existence de ce document.

actuellement vendue 4 livres 10 sols et 5 livres. Comment le journalier peut-il vivre lui et faire vivre une famille qui est souvent nombreuse ? »127.

Cet exemple a été choisi précisément en raison de l’osmose entre le niveau collectif – le prix des denrées – et le niveau individuel – le journalier préoccupé de faire vivre sa famille. En restant dans les causes économiques, on relève que la misère était un fléau transmissible

« […] in the early modern and modern periods would have been the Sudden sharp increase in numbers of homeless and starving individuals in cities during winters of economic recession, or the permanent presence of urban under-employed families on the edge of starvation, transmitting their poverty and social exclusion to their children in a cycle of deprivation »128.

Pour les pauvres de l’Ancien Régime fonder une famille revenait souvent à transmettre la misère:

« Les journaliers, les manoeuvres, les compagnons de métier et tous ceux dont la profession ne fournit pas beaucoup plus que le vivre et le vêtement sont ceux qui produisent les mendiants. Etant garçons, ils travaillent et lorsque par leur travail ils se sont procurés un bon vêtement et de quoi faire les frais d’une noce, ils se marient. Ils nourrissent un premier enfant, ils ont beaucoup de peine à en nourrir deux et s’il en survient un troisième leur travail n’est plus suffisant à la dépense »129.

Mais, à la campagne, le choix d’une descendance, plus ou moins nombreuse130, représentait une assurance pour les parents d’une pauvreté moins lourde à porter dans leur vieillesse.

Parmi les facteurs individuels, on note les handicaps physiques131, l’expulsion, la naissance mal venue d’un enfant, la disparition prématurée du chef de famille132,

127 A. D. Ille-et-Vilaine, C 1635, cité par ibid, p. 15.

128S.-J. Woolf,op. cit., p. 3.

129 A. D. Calvados, H supplément 1308, cité par Hufton O., op. cit., p. 11. Cf. également infra, chapitre

2, § Le terme « mendiant » : de la réalité au fait de langage, p. 165 sq.

130 Cf. infra, chapitre 6, § Mesures de secours des administrations royale et consulaire, p. 601 sq. Dans une communauté, au moins, de la vallée de l’Ubaye, on relève la plus forte proportion de familles nombreuses de l’aire étudiée.

la perte d’un emploi, la vieillesse133, la confession religieuse, notamment par le biais d’incendies dûs à des différends confessionnels, uniquement attestés en milieu protestant134 et la taille de la propriété135. Outre ce qui a été énoncé ci-dessus, les facteurs collectifs englobent également les conditions météorologiques136.

En raison des paramètres économiques évoqués, la pauvreté fut un phénomène sujet à des mutations : « The terms “poor” and “indigent” are […] highly ambiguous and changed significantly over the centuries »137, ce qui indique que les pauvres d’Ancien Régime demeurent difficiles à appréhender : « The very fluidity and relativity of the condition of being poor denies the fixity of all categorizations »138. Ainsi, cet aspect oblige à effectuer des recoupements entre différentes sources.

Les causes de la pauvreté ont été étudiées à partir de sources recueillies auprès de la Bibliothèque Nationale de France, soit la correspondance de l’Intendant Fontanieu avec plusieurs grands commis de l’État et des textes issus de ses

Mémoires. Au niveau des deux provinces en question, ce travail s’est appuyé sur des sources de la série C pour l’intendance de Provence. En ce qui concerne les archives départementales, on a eu recours à l’administration diocésaine à travers la série G, à des sources hospitalières avec la série H supplément pour l’hôpital général Sainte-Claire et la Charité de Gap. Au niveau des municipalités urbaines, les sources ont trait à la fois à la prise en compte des pauvres d’Embrun et de Gap à l’aide des sous-séries GG de chacune de ces deux villes, par la sous-série BB du Journalier de

Gap, par des archives municipales de Briançon et par le registre des décès de

l’hôpital général d’Embrun de la seconde moitié de la décennie 1730 à la seconde moitié de la décennie 1770. Enfin, par des actes de décès recueillis dans les registres d’une dizaine de communautés urbaines et rurales. En ce qui concerne l’identité des pauvres, ce travail a eu recours à la correspondance de Fontanieu avec plusieurs grands commis de l’État. On a également eu recours à la série E des

131 J.-P. Gutton, La société et les pauvres. L’exemple de la généralité de Lyon 1534 – 1789. Paris,

Centre d’Histoire Economique et Sociale, Les Belles Lettres éd., 1970, p. 29.

132A. Cheytion, op. cit., p. 37.

133 J.-P. Gutton, op. cit., p. 30.

134 Cf. infra, chapitre 7. La charité en milieu réformé : quel enjeu confessionnel ?, p. 637 sq.

135 « Bernard Bonnin a calculé qu’un paysan devait [dans les Terres Froides orientales] disposer d’au

moins 6 hectares pour nourrir sa famille », cité par A. Belmont, Des artisans au village, Les artisans

ruraux en Dauphiné sous l’Ancien Régime, Presses universitaires et Musée dauphinois, Grenoble,

1998, vol. I, p. 66.

136A. Cheytion, op. cit.., p. 37.

137 S.-J. Woolf, op. cit.., p. 8.

archives départementales des Alpes de Haute-Provence, des Hautes-Alpes, de la Drôme et de l’Isère; à la série G relative à l’administration diocésaine et aux archives municipales de Briançon. L’étude des mendiants a été conduite à partir de la sous-série II C des archives départementales de l’Isère, concernant essentiellement les mendiants enfermés dans les dépôts de mendicité de Gap et de Grenoble. Les Piémontais ont été étudiés principalement à partir des actes de mariage et de décès consignés dans les registres paroissiaux et secondairement à partir des registres de décès des hôpitaux généraux de Sainte-Claire de Gap et du Saint-Esprit d’Embrun.

Les sources des professions et des travaux sont présentées séparément dans la mesure où les premières sont plus étoffées avec des origines plus variées. Ces deux catégories de sources sont uniquement issues d’archives départementales. En outre, des approches transversales ont été mises en place afin de dissocier autant que possible l’étude des professions de celle de la capitation proprement dite, et de mettre ainsi en valeur l’aspect strictement fiscal des rôles de celle-ci. Les sources relatives aux professions sont regroupées dans la sous-série GG pour la ville de Gap, puis dans la série E des archives des communautés; la sous-série HH ayant seulement fourni un manuscrit à titre de comparaison pour l’ensemble des professions exercées à Gap intra-muros au milieu du XVIIIe siècle. Avec la série H supplément, on a abordé les gages de domestiques dans les quatre principales structures hospitalières du milieu urbain: celles de Briançon, d’Embrun et de Gap. Les professions de plusieurs pauvres ont été également retrouvées par le biais d’actes de mariage et accessoirement par des actes de décès. La série H supplément a également permis d’étudier les orphelines de la Charité de Gap et des petites filles pauvres de l’hôpital général d’Embrun avant leur mise en condition chez des particuliers pour les premières et la mise en apprentissage pour les secondes. En revanche, les sources relatives aux apprentis se trouvent principalement dans des actes notariés et de manière secondaire dans les archives d’hôpitaux généraux, comme celui d’Embrun, dans celles de l’administration de cet archidiocèse et enfin dans celles d’hôtels-Dieu comme celui de Ribiers.

Les sources relatives aux travaux sont nettement moins étoffées puisque l’administration de l’archidiocèse d’Embrun pour les deuxième et troisième quarts du XVIIe siècle et la sous-traitance de diverses tâches par l’hôpital Sainte-Claire et la Charité de Gap fournissent la plus grande partie des manuscrits. De manière secondaire, on trouve des travaux de pauvres dans diverses communautés de la

série E; les communautés de Remollon et de Saint-Pierre-de-Méarotz peuvent être distinguées pour leur spécificité soit le cadre de la Maison des pauvres pour la première, et le registre paroissial renfermant l’année 1742 pour des travaux confiés par le seigneur de cette deuxième communauté à des pauvres de sa paroisse. Enfin, les travaux des nourrisseurs ont été étudiés à la fois du point de vue des hôpitaux, comme ceux d’Embrun et de Seyne, mais aussi de celui du bailleur de fonds, avec les archives municipales de Briançon; cette étude a été assortie de sondages dans les registres paroissiaux de quatorze communautés, principalement situées dans l’Ouest et le Sud-Ouest139 du diocèse de Gap140. Enfin, les rôles de capitation sont matériellement répartis entre les séries E et F.

A/ Le contexte économique et financier

Sur le plan économique, la pauvreté se développa en raison de la fragilité et de la surexploitation du terroir mais aussi à cause de la complexité des mouvements frumentaires. De plus, les mécanismes des dettes et des créances aggravèrent la situation des pauvres. Enfin, l’économie du territoire offrait peu de possibilités sur le plan professionnel.

1/ Un terroir fragile et surexploité

Le Haut-Dauphiné est composé de territoires qui présentent de véritables fragilités : au Sud, ils sont fréquemment soumis à la sécheresse, dans la partie montagneuse, la rudesse du climat, le gel, les crues… fragilisent le terroir agricole141. Dans sa thèse, Bernard Bonnin dresse longuement un tableau de ce territoire difficile à exploiter ; cet historien évoque ainsi l’infertilité du sol avec « les cônes de déjection pierreux des torrents, et, dans une partie des Préalpes du Sud les pentes en roches friables ravagées par l’érosion mécanique, et transformées par elle en un relier

139 Soit des paroisses actuellement situées dans les Hautes-Alpes pour l’Ouest de ce territoire et dans

les Alpes de Haute-Provence pour celles situées dans le Sud-Ouest.

140 L’évêché de Gap était suffragant de l’archevêché d’Aix-en-Provence, tandis que l’archevêché

d’Embrun ne dépendait que de lui-même, ayant, par exemple, l’évêché de Senez comme suffragant. Cet aspect dénote un profond contraste au sein de l’aire étudiée entre une sphère religieuse plutôt tournée vers la Provence et une seconde vers les montagnes. Pour le terme « suffragant », cf. infra, vol. II, lexique, p. 1170.

confus de croupes désertiques […] »142, mais aussi « les sols pierreux, souvent calcaires, à la terre pauvre, qui recouvrent une partie des versants des grandes vallées alpines, Durance et Isère […] »143. Bernard Bonnin présente également le contraste en termes d’hydrologie, ce territoire subissant à la fois des crues dévastatrices et des sécheresses importantes ; ce fut notamment le cas pour les vallées de la Durance et du Drac144. Cet historien mentionne enfin la rigueur du travail en montagne : aux difficultés d’exploitation145 s’ajoute les aléas du climat en altitude.

Les terres intéressantes étaient donc en nombre limité, ce qui explique la surexploitation de certaines d’entre elles. Or, la première cause de pauvreté correspond à la surexploitation de certains domaines fonciers et à l’abandon de terres agricoles qui représentèrent, par voie de conséquence, un manque à gagner pour les communautés où elles se produisirent.

L’état du foncier dans le diocèse de Gap au cours du XVIIIe siècle illustre l’analyse de Bernard Bonnin ci-dessus. A la fin des années 1750, l’évêque de Gap délivra un diagnostic sans appel concernant l’état du foncier dans son diocèse. Ainsi, ce prélat indiquait que « dans les montagnes du Dauphiné, les biens [fonciers] […] ont diminué de prix au lieu d’augmenter »146. Dans un courrier circonstancié à ses ecclésiastiques, l’évêque de Gap avançait trois raisons principales : « 1e […] la nature et situation du terrein, le ravage des torrents, le défaut des fourrages par a destruction des prairies ; 2e le défaut de commerce ; 3e la fréquente disette des récoltes »147. L’évêque développait ensuite plusieurs arguments en lien avec « le sol des fonds du Gapençois […] de sa nature sec et aride »148 en citant notamment l’amoindrissement de la qualité des récoltes149. Cet enchaînement de causes à effets finit par impacter les ecclésiastiques eux-mêmes : « Les dixmes qui font presque le seul revenu des bénéficiers du diocèse ont dû suivre le sort des propriétés et leur

142 Ibid., p. 127.

143 Ibid., p. 128.

144 Ibid., p. 118.

145 Ibid., p. 137. « Difficultés, fatigues, pertes de temps et même dangers marquaient déplacements et

transports, ceux-ci bien souvent assurés à dos d’homme ».

146 A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758 établie suite à la décision du Bureau diocésain.

147 A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758.

148 A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758.

149 « […] l’on ne peut plus semer que du seigle où l’on semoit autrefois du froment, et que le grain, dans les meilleures récoltes, ne produit que quatre pour un […] ». A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758.

produit diminuer à proportion »150. La gravité de cette situation se traduisit, par exemple, par la nécessité qu’il y eut « de faire venir des troupes d’Embrun pour faire garder à Gap les magasins du Roi […] et qui risquaient d’être forcés par le peuple »151 au cours des années 1758 et 1759. Cet ensemble de phénomènes, s’apparentant à une surexploitation foncière, met en évidence l’opposition entre économie traditionnelle et économie « moderne » :

« On passe de l’attitude "oeconomique" ancienne, marquée par un pullulement de règlements locaux et une surveillance de tous les instants, à une "économie" à visée productiviste, qui favorise les défrichements précipités : les acquéreurs de communaux ne cherchent guère à ménager des biens dont la seule finalité désormais était d’éponger des dettes au plus vite. La "crise" rurale provençale correspond au passage, dramatique à bien des égards, d’une économie traditionnelle, conçue d’abord comme une gestion de bon père de famille, à une économie "moderne", tournée résolument vers l’accroissement des richesses et caractérisée par le recul de l’hétéronomie des espaces ruraux »152.

La déforestation fit partie des formes de surexploitation des domaines fonciers comme le montre l’exemple du Bois de Charance. Un privilège octroyé aux pauvres de Gap par un évêque de cette ville, à une date qui n’a pas été retrouvée, leur permettait de « boiseller » dans ce lieu, qui semble avoir été propriété conjointe de l’évêque et de la ville. Un constat de la part du consulat gapençais témoigne d’une pratique de coupe anarchique, sans doute déjà ancienne :

« Le Bois de Charance est entièrement ruiné, à cause que les habitants et forains y vont boiseller, portant aches et piauches, et arrachent entièrement les seps, de sorte que la montaigne est bientost en friche, estant à craindre qu’au premier débordement des eaux, la terre qui se trouve remuée par le susd. arrachement, ne cause des ravines »153.

150 A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758.

151 A. D. Hautes-Alpes, G 2330. Circulaire du 25 août 1758.

152 G. Pichard, « “L’espace absorbé par l’économique ? “ Endettement communautaire et pression

sur l’environnement en Provence (1640 – 1730) », Histoires & sociétés rurales, 2001/2, vol. 16, p. 82.

Un règlement sur l’usage de ce bois est établi le 20 mai suivant154, mais il ne paraît pas avoir été très suivi puisque, quelque temps après, il est de nouveau constaté que : « L’on défrèche totalement le Bois de Charance, ce qui expose tous les fonds intérieurs à un dommage considérable, pour ne pas dire à une ruine totalle »155. Enfin, les consuls décidèrent que : « pour éviter la ruine du Bois de

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