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Notre premier objectif est de comprendre l'impact du paysage proche des colonies sur l'abondance, la fécondité et les tendances démographiques des colonies de maternités du Petit rhinolophe. Pour ce faire, les associations "Bretagne Vivante" et le "Groupe Mammologique Breton" ont accepté de nous fournir des comptages effectués pendant 15 ans (de 2000 à 2014) dans 94 colonies. Les comptages distinguent les adultes des juvéniles, nous donnant donc des informations sur la taille des populations mais aussi sur la fécondité au sein de chaque colonie. Afin d'accomplir cet objectif, nous avons tout d'abord décidé de mieux comprendre l'impact de variable environnementales connues pour influencer la dynamique des populations des chauves-souris. En effet, les variables climatiques sont connues pour influencer l'activité, la survie et la mise-bas des chauves-souris, notamment la température et les précipitations (Adams and Hayes 2008; Burles et al. 2009; Schorcht et al. 2009; Frick et al. 2010; Adams 2010; Amorim et al. 2012; Lučan et al. 2013; Amorim et al. 2015). Avant de s'intéresser à l'effet du paysage, nous avons donc décidé de dissocier l'impact de ces variables climatiques, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, toutes les colonies n'ont pas été suivi pendant la période complète de comptage : certaines n'ont pas été détectées dès l'année 2000, d'autres ont pu disparaitre, et la disponibilité des bénévoles comme l'accessibilité aux colonies peuvent varier d'une année sur l'autre. Ainsi, toutes les colonies n'ont pas été comptées les mêmes années, et ont donc subi des conditions climatiques différentes. De plus, la Bretagne est une région spatialement hétérogène en termes de conditions climatiques, notamment selon la proximité à l'océan. Les conditions climatiques peuvent induire une variation de nos données de comptages même au sein d'une même année (Lamy and Dubreuil 2010). Comprendre l'impact des variations climatiques sur la dynamique des populations du Petit rhinolophe nous était donc nécessaire pour extraire leur influence sur la variabilité de notre jeu de données. Si les études s'intéressant à l'impact du climat sur les populations de chauves-souris sont nombreuses, il n'existe aucun consensus concernant l'échelle temporelle considérée pour ces variables (López-Roig and Serra-Cobo 2014; Amorim et al. 2015; Kerbiriou et al. 2015) : nous avons donc construit différents modèles expliquant la taille de la population et la fécondité avec les variables climatiques en testant différentes échelles temporelles, afin de déterminer quelles variables expliquaient le mieux la variation de notre jeu de données.

Nous avons ensuite pu étudier l'impact du paysage en construisant des modèles expliquant la taille de la colonie ou la fécondité (moyennée au cours du temps) par la composition et la

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structure du paysage autour de chaque colonie, tout en prenant en compte l'impact des variables climatiques précédemment étudié. La répétition des comptages sur une longue période nous a également permis de considérer la tendance démographique. C’est-à-dire le sens de la variation de la taille de la population, comme une variable réponse de nos modèles. La sélection de l'habitat du Petit rhinolophe a déjà été largement étudiée à une échelle individuelle (Schofield 1996; Bontadina et al. 1999; Holzhaider et al. 2002; Motte and Libois 2002; Bontadina et al. 2002; Biedermann et al. 2004; Bontadina et al. 2006; Reiter et al. 2013; Downs et al. 2016a) et nous avons caractérisé le paysage autour de la colonie en se basant sur ces études pour étudier son impact sur la dynamique des populations. Six classes d'occupation du sol ont donc été différenciées : les bois de feuillus, les bois de conifères, les surfaces artificielles, les cultures, les milieux ouverts, et l'eau douce. L'activité du Petit rhinolophe est concentrée dans les 500 mètres autour de la colonie (Bontadina et al. 2002; Reiter et al. 2013), mais des études récentes considèrent l'impact du paysage sur de plus larges étendues (Afonso et al. 2016). Nous avons donc testé l'impact du paysage dans des cercles de rayons différents autour de la colonie, afin de voir quelle échelle spatiale est la plus pertinente. L'identification des classes d'occupation du sol importantes pour la dynamique des populations, de même que l'échelle spatiale à laquelle elles agissent, sont des informations essentielles pour la mise en place de mesures de conservation telle que l'aménagement de sites permettant d'accueillir les colonies de petits rhinolophes.

Les informations concernant l'impact du paysage nous ont ensuite servi de base sur un jeu de donnée beaucoup plus restreint - 11 colonies – situées en Picardie, mais pour lesquelles nous avons des informations fournies par l'Office National des Forêts concernant la gestion forestière autour de la colonie. Nous avons ainsi pu tester l'impact de la proportion de futaies régulières, du diamètre des arbres et de leur diversité spécifique sur la taille de ces populations. L'acquisition de la taille de ces populations est détaillée dans la deuxième partie de ce mémoire.

Méthodologie

L'analyse de l'impact de chaque variable environnementale s'est faite via la construction de modèles linéaires (généralisés pour s'adapter à la distribution de l'abondance et de la tendance démographique) considérant une variable de dynamique des populations avec une distribution appropriée comme variable réponse, et les variables environnementales (paysage ou climat) comme variables explicatives. Nous avons ensuite utilisé la méthode du "model averaging" en construisant les modèles considérant toutes les combinaisons possibles de variables

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environnementales avant de les classer selon leurs critères d'information (Burnham and Anderson 2002). Les modèles s'intéressant aux variables climatiques ont considéré chacun des comptages indépendamment (avec la colonie en effet aléatoire), et nous avons utilisé l'AIC comme critère d'information. Nous avons par contre utilisé l'AIC corrigé pour les petites tailles d'échantillons pour les modèles s'intéressant aux variables paysagères, qui ont considéré des données moyennées sur le temps du comptage. Une fois ordonné, l'impact de toutes les variables présentes dans les meilleurs modèles (c’est-à-dire les modèles dont le critère d'information ne dépasse pas deux au-dessus du plus petit critère d'information) est estimé avec un intervalle de confiance qui dépend du nombre et du rang des modèles dans lesquels elles sont présentes. Si cet intervalle de confiance n'inclut pas zéro, on peut alors en conclure qu'une variable à un impact significativement négatif ou positif (Lankinen et al. 2016).

L'impact de la gestion forestière a été testé en construisant un modèle basé sur l'impact du paysage, puis en évaluant si l'ajout de variables de gestion forestière descendait significativement le critère d'information (BIC, plus adapté pour tester ce genre d'hypothèse -Aho et al. 2014).

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Which temporal resolution to consider when investigating the