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1 Le contenu des actifs dans le cadre de la comptabilité statique pure

Dans le document COMPTABILITE GENERALE (Page 196-199)

Les hypothèses fondamentales de la CS pure conduisent en principe à retenir le principe de propriété, le principe d’unicité du patrimoine et le principe d’élimination des actifs n’ayant pas de valeur sur un marché (actifs fictifs).

1.1 Le principe de propriété

Pour payer ses dettes, on ne peut revendre que les biens dont on est propriétaire, c’est-à-dire sur lequel on a le droit de disposition2 (abusus). Cette évidence conduit à éliminer de l’actif tous les biens loués, y compris les biens en crédit-bail. Il est vrai, comme le soulignent certains spécialistes désireux de faire apparaître les biens loués en crédit bail à l’actif dans le cadre d’une comptabilité patrimoniale3, que le locataire d’un bien loué en crédit bail se comporte « comme un propriétaire » (il choisit le bien, le gère, supporte les risques de sa perte, etc.) ; mais il n’est pas propriétaire car il n’a pas le droit de revendre ce bien : il est donc absolument exclu d’inscrire un bien reçu en crédit bail à l’actif dans le cadre d’une CS pure même si l’on inscrit les dettes de crédit bail au passif (voir sur ce point le chapitre 16).

1.2 La prise en compte de tous les actifs y compris les actifs personnels Dans un grand nombre de pays du monde, les commerçants et les associés de certaines sociétés (dites à responsabilité illimitée) répondent encore de leurs dettes commerciales non seulement sur leurs biens professionnels (affectés à l’entreprise

1. Ou comptabilité strictement en valeur de marché.

2. L’abusus est l’attribut fondamental, la pierre angulaire du droit de propriété ; l’usus et le fructus n’en sont que des attributs secondaires (au sens latin du terme). (voir sur ce point notamment Crocq, 1995).

3. Voir notamment le travail fondamental de Raybaud Turillo, 1993.

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174 THÉORIE COMPTABLE ou à la société) mais également sur leur biens propres (tableaux, yachts, apparte-ments etc.) : c’est la conception de l’unicité du patrimoine développée et théorisée au XIXe siècle en France par les juristes Aubry et Rau, conception héritée du droit romain, qui vise à protéger les créanciers. Il est vrai que le système capitaliste, au fil des années, a de plus en plus réduit cette responsabilité indéfinie en multipliant les types de sociétés à responsabilité limitée : dans ce cadre, les associés ne répondent des dettes commerciales que sur leurs apports en société.

Normalement, la solvabilité d’un commerçant (d’une société) devrait s’apprécier en tenant compte de tous les actifs, que ces actifs soient professionnels ou propres, qui sont le gage des dettes. C’est la raison pour laquelle les fondateurs de la théorie statique du bilan ont demandé l’inscription de principe au bilan des biens propres1 des commerçants (associés), sauf convention d’exonération de la responsabilité. On verra cependant que, depuis la Seconde Guerre mondiale, les pratiques statiques n’ont plus respecté cette règle qui existait au XVIIIe et au XIXe siècle. On peut donc distinguer une conception « pure » de la CS qui tient compte de tous les actifs et une conception « approchée » qui ne retient que les actifs mis à la disposition de l’entre-prise (et qui est une concession à un autre type de comptabilité, la comptabilité dynamique).

1.3 Le principe d’élimination des actifs sans valeur (« fictifs »)

Le principe

Les investissements (dépenses ayant des effets à terme) qu’effectue une entreprise peuvent être de nature très diverse (corporelle, incorporelle, financière) et d’origine très diverse (investissements achetés à des tiers ou faits par l’entreprise).

La doctrine statique pure distingue fondamentalement les investissements qui ont une valeur de revente sur un marché actif2 et ceux qui n’en ont pas : ces derniers sont, logiquement, éliminés de l’actif.

En général, les investissements « sans valeur », au sens de la comptabilité stati-que, sont ceux qui correspondent à des dépenses très spécifiques à l’entreprise qui portent sur des biens ou des services qui, du fait de leur spécificité, ne peuvent être échangés sur un marché régulier.

Il n’est théoriquement pas possible de dire in abstracto quels sont les investisse-ments « sans valeur » ; cependant, en pratique, on peut dire qu’il s’agit le plus souvent, des investissements incorporels (immatériels) tout particulièrement des

1. Si ces biens propres sont inscrits, il faut débiter l’actif par le crédit du compte capital.

2. Par marché actif, on entend un lieu dans lequel s’échangent régulièrement à des prix connus des biens de nature homogènes entre des acheteurs et vendeurs bien informés agissant dans des condi-tions de concurrence normale. Cette notion de marché actif n’a rien à voir avec un simple accord de vente entre deux co-contractants.

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investissements incorporels faits par l’entreprise elle-même et à un moindre degré des investissements immatériels achetés.

Les praticiens de la comptabilité statique prennent aussi parfois en compte le degré de protection juridique de ces immatériels.

L’application du principe aux investissements immatériels faits par l’entreprise Ces investissements sont particulièrement « suspects » aux yeux des CS pure car ils n’ont jamais fait l’objet d’une valorisation sur un marché actif. En absence de preuve d’un marché actif (ce qui est généralement le cas) ils seront éliminés de l’actif et passés immédiatement en charges.

En général, donc, si une entreprise fait des dépenses internes de formation, de publicité, de recherche et développement, de création de marques, etc., ces dépenses ne seront pas activées : on connaît certes leur coût mais non leur valeur de marché.

Elles sont donc passées immédiatement en charges.

L’application du principe aux investissements immatériels « achetés » à des tiers Ces investissements immatériels ont certes fait l’objet d’un échange sur un marché lors de leur achat. Mais cela ne suffit pas à leur donner une valeur d’échange géné-ralisée car ils peuvent être spécifiques à l’entreprise.

La règle de principe est donc la même : sauf preuve contraire, ces investissements doivent être immédiatement passés en charge. La pratique soulève cependant des difficultés :

– le cas le plus simple est celui des dépenses faites pour constituer une entreprise : ces dépenses ne peuvent évidemment être revendues séparément sur un marché ; il en ira de même généralement des sommes versées à des tiers à des fins de publi-cité, de recherche, de formation etc. ;

– le cas le plus complexe concerne celui des acquisitions de marques et de fonds commerciaux. En raison de sa difficulté nous traiterons de ce cas au chapitre 30.

Mais fondamentalement, pour la CS pure, ces dépenses doivent être considérées comme des charges.

L’application du principe aux investissements immatériels juridiquement protégés

Certains investissements immatériels, qu’ils soient effectués de manière interne ou externe, peuvent bénéficier, dans un grand nombre de pays, d’une protection juridique.

Cela signifie qu’on ne peut en découvrir le secret par espionnage pendant une certaine période dite de protection ; l’exemple type est celui des brevets.

Pour un certain nombre de spécialistes, la protection juridique devrait permettre d’accorder le statut d’actif aux incorporels qui en bénéficient dans le cadre même d’une vision statique de la comptabilité ; il semble cependant que cette thèse soit

diffi-176 THÉORIE COMPTABLE cilement soutenable ; en effet l’accord d’une protection juridique ne signifie ni qu’un marché du bien concerné soit organisé ni qu’une valeur de ce bien soit garantie.1

En conclusion sur ce point, on peut dire que si l’on s’en tient à une définition stricte de la « valeur de marché actif » les investissements incorporels, sauf excep-tion, ne devraient pas être inscrits à l’actif dans le cadre de la comptabilité statique pure parce qu’ils n’ont pas de marché actif.

Quand au début du XXe siècle, certaines entreprises ont osé mettre à l’actif des services immatériels tels que des frais de constitution les théoriciens de la comptabi-lité statique ont qualifié ces actifs de « fictifs » ; pour eux, il était impossible de reconnaître leur existence. Cette appellation d’« actifs fictifs » est encore de mise actuellement, notamment en analyse financière.

Quelques cas d’investissements incorporels activables

Certains incorporels comme des licences de taxi, de droits de pêche etc. font l’objet de vente sur un marché actif : ils sont donc activables pour la CS pure ; ce sont des exceptions.

2 L’évaluation des actifs dans le cadre des comptabilités

Dans le document COMPTABILITE GENERALE (Page 196-199)