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« ‘Dire’ est une pratique qui consiste à mettre en correspondance » (Ingold 2017, 234). En suivant les premières expérimentations techniques, nous avons pu longer certaines lignes d’un processus en devenir de l’éolien, elles sont encore distinctes mais sont les prémisses d’une tresse en cours de tissage. Ces premières expérimentations techniques, comme étapes de l’expérience des parcs éoliens citoyens de la Frise du Nord, nous permettent de

considérer le cas d’un projet qui se construit en l’absence de modèles prédéfinis, de scénarios établis à l’avance, dans les premiers développements des énergies renouvelables. En l’absence de modèle, les Frisons ou les acteurs de l’éolien en Frise, ont fabriqué en faisant. Pourquoi et comment se sont-ils lancés s’ils n’avaient pas de buts précis et qu’est-ce que cela veut dire ? Ces histoires d’expérimentations nous interrogent en différents termes : humains, techniques, politiques et environnementaux mais surtout il nous importe de comprendre les relations entre ces termes que nous regrouperons autour de la question suivante : comment les expérimentations techniques peuvent-elles permettre la création de valeurs ? En reliant les travaux de Tim Ingold (3.1) à ceux de John Dewey (3.2), pour

mettre en correspondance techniques, paysages et valeurs, nous pourrons proposer une première formulation d’hypothèse autour de démocratie et transition énergétique : les expérimentations techniques peuvent constituer une forme d’enquête indispensable à un mode de vie démocratique, si et seulement si elles sont en correspondance avec le paysage. Nous ne nous attacherons pas à vérifier cette hypothèse dans ce chapitre mais plutôt à enquêter sur ses termes, notamment conceptuels. Nous pourrons alors les remettre au travail dans les chapitres suivants.

1 - Mettre en correspondance

Tim Ingold, la météo et la ligne d’éolienne

Nous nous arrêtons ici sur ces premières étapes d’expérimentations pour comprendre la mise en correspondance (Ingold 2017) de l’expérimentation technologique de l’éolien avec son propre mouvement, dans et avec le paysage ; les allers-retours entre les pratiques et les intérêts, leurs croissances mutuelles. Dans cette section, nous revenons sur les éléments centraux de la pensée d’Ingold que sont le monde météorologique, les matériaux, les pratiques

et la correspondance. Il s’agit de regarder les expérimentations techniques que nous venons de parcourir comme un mouvement du monde, fait de correspondances entre des

matériaux et des pratiques.

La Frise du Nord, un monde-météorologique

Peut-être avez-vous sauté des pages pour arriver jusqu’ici ? Nolde vous a semblé lointain et les expérimentations trop longues à lire. Vous n’avez peut-être pas voulu faire l’effort

d’endurer les détails techniques. Vous vouliez peut-être aller plus vite ? Simplement traverser

la Frise lorsque l’on vous proposait de longer ces lignes d’expérimentation justement pour en saisir toutes les dimensions, tous les entremêlements76. Il s’agit d’essayer de partager toute la Frise avec le lecteur, de lui proposer une anthropologie avec les Frisons, de l’associer à la perception d’une histoire de quarante ans de l’éolien qui loin d’être linéaire se compose de différents courants. Si vous avez lu toutes les pages précédentes, peut-être êtes-vous entrés dans le monde-météorologique des Frisons. Pour vraiment bien faire, il aurait fallu commencer par marcher sur la digue en plein vent, écouter les goélands, respirer les embruns et regarder les éoliennes tourner77.

      

76 Nous nous référons ici à « une brève histoire des lignes » de Tim Ingold (2013) dans laquelle il distingue la ligne qui longe comme partie en promenade, de la ligne qui traverse, en se contentant de relier des points disposés dans l’espace en deux dimensions (Ingold 2013, 101).

77 Le récit photographique d’une telle marche vous est toutefois accessible dans la présentation d’un transect que j’ai réalisé lors de ma première session de terrain en Frise en 2014 (Chezel 2014, 19), nous l’avions aussi mentionné en introduction.

« Immergés dans les mouvements incessants du vent et de la météo, en une zone où substances et médiums se réunissent dans la constitution d’êtres qui, à travers leur activité, participent au tissage des textures du monde » ? (Citton et Walentowitz 2012, 6). Peut-être est-ce le climat des côtes d’Ecosse qui inspire à Ingold cette position originale « dans le ciel vu de la Terre » (ibid.) plutôt que sur la Terre regardant le ciel ? Peut-être ce climat est-il similaire de l’autre côté de la mer du Nord le long des côtes de Frise ? Quoi qu’il en soit, la prégnance du vent sur celles-ci nous pousse à qualifier les lieux d’expérimentation de l’éolien de « monde en mouvement, en flux et en devenirs, un monde d’océan et de ciel, un monde-météorologique (a weather-world) » (Ingold 2011, 131,TEC). Un

monde-météorologique. Cette expression de Tim Ingold paraît parfaitement appropriée pour parler de la Frise.

Cette conception du monde, opposée à celles d’une surface à occuper, nous invite à adopter une perspective d’habitant, « quelqu’un qui de l’intérieur participe au monde en train de se faire » (Ingold 2013, 108 et 135). Habitants de la terre mais aussi du ciel, habitants avec les autres êtres vivants et avec les ressources, parcourant des lignes de vie. Dans l’un de ses articles sur les matériaux sur lesquels nous reviendront juste après, Tim Ingold nous demande :

“Is it primitivist to acknowledge that we inhabit a world of earth, sky, wind and weather, in which the sun shines, rain falls, trees grow and water can turn to ice? Life as we know it depends on all these things.” (Ingold 2008).

Peut-être cela est-il primitiviste. Peut-être cela a-t-il aussi quelque chose d’essentiel ?

Rappelons-nous les mots de Nolde décrivant le primitivisme qu’il cherche à capter dans ses peintures, comme « être une partie du cosmos tout entier » (lettre de 1914, voir chapitre I.3) Peut-être au contraire cela est-il très contemporain et fait sens dans un monde en changements climatiques ? Dans les années 80 en Frise du Nord, on ne parlait pas encore de changements climatiques comme il s’entend depuis les conférences internationales de Rio, de Kyoto et les suivantes. En revanche, les événements climatiques extrêmes, tels que les raz-de-marée, font intégralement partie des expériences, des savoirs et des paysages frisons depuis le Moyen-Âge. Ils ont pour corollaire l’entretien et la protection des côtes par

la construction de digues et de canaux ainsi que la construction de polders. Près de la moitié des terres en Frise du Nord sont donc construites –par des humains- au niveau de la mer. Si les points culminants se situent à environ 50m d’altitudes, le relief est surtout constitué par les digues, traçant des lignes d’environ 7m de haut (voir chapitre suivant et Chezel 2014, 5 -18). En Frise du Nord on ne peut faire autrement que vivre dans un monde-météorologique, dans le sens où nul ne peut prétendre ignorer l’importance des flux géophysiques. La force des éléments est omniprésente, surtout celle de la pluie, du vent et de la mer. Que ce soit à pieds, à vélo ou en bateau, chacun peut en faire l’expérience lorsqu’il se met en mouvement hors de sa chaleureuse maison. Nous avions aperçu chez Nolde cette force, elle anime également tous les discours autour de l’éolien.

„Wenn wir, die so dicht an der Nordsee wohnen, […], wenn wir nicht bereit sind, wenn wir nicht bereit sind so etwas zu unterstützen, eine solche Technologie, von wem ist es dann zu erwarten?“ (Extrait d‘entretien FWLK 12.08.2015)78

On pourrait sans doute dire que le vent constitue une habitude des habitants de Frise. Sans cesse dans mes entretiens, j’entends parler de lui comme quelque chose que l’on connaît très bien, comme quelqu’un de la famille. Le vent fait partie des Frisons, le vent fait partie des paysages, le vent fait partie des dunes de sable, le vent a sans cesse repoussé la mer sur les terres en construction des Frisons. Les agriculteurs le connaissent particulièrement bien. Ils font avec. Ceci laisse entendre que le vent est actif dans l’habitat des Frisons, dans leurs relations avec la Terre.

Le vent : une matière-flux

Nous entreprenons ici un petit détour par la matière pour saisir un peu plus la puissance du

monde-météorologique, considérant que cette puissance se situe justement dans les flux de matière, de circulation d’énergies et des échanges. Dans un article dédié (Ingold 2007), Tim Ingold se positionne à l’encontre du concept de matérialité pour remettre les matériaux au centre. Il cite notamment: “The mental and the material, by Maurice

      

78 « Si nous qui habitons si près de la mer du Nord, […], si nous ne sommes pas prêts, si nous ne soutenons pas une telle technologie, alors de qui pouvons-nous l’attendre ? » TEC.

Godelier (1986); Material cultures. Why some things matter, edited by Daniel Miller (1998a) ; Mind, materiality and history, by Christina Toren (1999); and Matter, materiality and modern culture, edited by Paul Graves-Brown (2000)”. Il considère le concept de matérialité comme un frein à l’étude sensible de la matière, de ses

transformations et de ses possibilités et nous invite ainsi à repasser par les matériaux et leurs propriétés pour saisir le mouvement. Il reprend la distinction de James Gibson entre les substances et les médiums (Ecological Approach to visual perception (Gibson 1979)). Un médium permet le mouvement et la perception alors qu’une substance peut les

contraindre. L’intéressant étant de comprendre que tout se joue dans leurs interactions. Au-delà de leurs propriétés, ce sont les histoires que les matériaux racontent ou qu’ils

permettent de fabriquer qui intéressent Ingold. La forme des choses n’est donc pas imposée depuis l’extérieur sur un substrat inerte de matière, elle est générée en continue par le flux des matériaux à l’interface entre la substance et le milieu (medium) qui les entoure. Les choses sont donc actives au sens où elles sont prises dans les lignes du monde vivant. La « force de la matière-flux », idée que Ingold reprend de Deleuze et Guattari (1980), et de Simondon (2012), guide, accompagne la création de nouvelles formes (Ingold 2017, 66-69 et 107).

Si l’on suit le raisonnement d’Ingold et de Gibson, l’air constitue un médium, il permet le mouvement et la perception. Le vent, en tant que « air en mouvement », constitue un médium, mais peut aussi être considéré comme une contrainte au mouvement et à la perception. Il est plus difficile de pédaler contre le vent, il est plus difficile d’entendre à cause

du vent. Le vent peut aussi être caractérisé comme un accélérateur de mouvement ou un amplificateur de la perception. Il est plus rapide d’avancer avec le vent dans le dos et quand le vent souffle, il est facile de sentir l’air se déplacer dans les cheveux. Le vent est donc un flux qui peut mettre en mouvement la matière. Le vent est une matière-flux. Cette propriété se découvre dans les relations que nous constituonsavec le vent, pour reprendre les termes de Zask mentionnés en introduction (Zask 2007, 130).

La force du vent, associée à la matière, induit des transformations du monde. Les humains ont depuis toujours cherché à utiliser cette association pour induire les transformations

qu’ils souhaitaient réaliser. Ils ont ainsi produit, fabriqué des objets techniques pour saisir l’occurrence du vent et naviguer dans leurs environnements (voiliers), modifier leurs environnements (moulins à grains), déployer leurs environnements (moulins pompes à eau). Ces objets techniques ont une forme induite par le vent, elle est physiquement

qualifiée d’aérodynamique. Les éoliennes en font partie. La conception de ces objets est plus que complexe. Elle relève du vent mais aussi des autres matériaux utilisés, transformés pour capter sa force. Le vent a donc fait faire aux humains des objets techniques. Sa puissance, comme celle de l’eau et du soleil, est fondamentale dans le monde météorologique.

“We […] have to contend with those fluxes of the medium that we call weather.” (Ingold 2011, 119)

Les agriculteurs de Frise ont toujours fait avec le vent, et la météo en général. Ils ont développé des cultures peu élevées (pommes de terre, choux, blés…) pour s’y adapter, ont construit des digues et planté des arbres pour protéger leurs habitats. Cette habitude sensible les a peut-être prédisposés à tenter l’éolien. Mais beaucoup d’autres lignes de conduite aussi. L’enthousiasme pour entreprendre chez les agriculteurs n’est pas propre aux Frisons, il repose souvent sur des « possibilités de savoir-faire autodidacte, garants d’une certaine autonomie d’action » comme l’a montré Laure Dobigny (2016, 211), et comme nous le reverrons avec les travaux de Joëlle Zask sur « La démocratie au champ » (2016). Ce qui nous intéresse ici est de saisir une forme d’apprentissage particulière qui consiste à faire, dans ce monde météorologique.

Faire dans un monde-météorologique

C’est précisément parce qu’elles sont extrêmement ventées que ces terres frisonnes ont été propices à l’expérimentation, mais peut-être n’est-ce pas la seule raison. Le vent, cette

matière en mouvement, ce médium et cette force, a guidé le développement de l’éolien. Pour Ingold les matériaux sont actifs, ils participent, autant que la main de l’homme, à dessiner les formes d’un monde en train de se faire.

En étudiant ces premières expérimentations techniques, il s’agit pour nous de comprendre « des manières de penser en agissant plutôt que des manières d’agir en pensant » (Ingold 2017 p13). Qu’est que faire permet d’apprendre ? Ingold dans son livre et surtout dans ses enseignements sur les 4A met l’accent sur les possibilités offertes par ‘connaître de

l’intérieur’. Mettant ses étudiants « au travail », autant que possible en extérieur, il leur propose d’apprendre par eux-mêmes, en faisant. Il constate que « la qualité des échanges pendant que nous faisions des choses ensemble était très supérieure à ceux que nous avions pu voir au cours du séminaire » (Ingold 2017 p37) et pose la question à laquelle il

s’attachera à répondre dans toute la suite du livre « comment expliquer que le fait de fonder la discussion dans un contexte d’activité pratique ait pour effet de lui conférer une qualité toute différente ? ».

Connaître de l’intérieur. Il ne s’agit pas d’acquérir des connaissances mais de comprendre en faisant, de comprendre par la pratique. Dans son livre, Ingold développe l’idée d’une distinction entre les savoirs de l’artisan (qui fait) et les savoirs de l’intellectuel (qui conçoit) pour s’interroger sur le dépassement de cette distinction, pour saisir ce qui dans la

« tension » entre les « rêves » et le « travail des matériaux » permet la « relation entre le concevoir [design] et le faire [making] » (Ingold 2017, 165). Comment le comportement des matériaux nous fait-il ajuster nos conceptions ? Comment nos conceptions se

modifient-elles au fur et à mesure qu’elles se concrétisent par la matière ? Ingold s’en réfère ainsi à la construction adaptative des cathédrales, autant qu’à la précision de l’horloger, pour démontrer ces allers-retours incontournables dans la réalisation d’un projet, entre penser et agir.

Ingold propose ainsi de repenser le « faire » non comme un projet (où l’on jetterait en avant quelque idée préconçue) mais comme un processus de croissance (en référence à la biologie et non pas à l’économie). Pour lui, celui qui fait est quelqu’un qui agit dans un monde de

matières actives. Ainsi, l’engagement de celui-ci avec la matière compte plus que l’idée qu’il a en tête de ce qu’il va fabriquer. Cet engagement passe notamment par « l’insertion dans les processus déjà en cours, lesquels engendrent les formes du monde qui nous entoure » (Ingold 2017, 60-61). Passant tour à tour par la vannerie, la maçonnerie ou encore la métallurgie de Deleuze et Guattari et la brique de Simondon, Ingold conclue sur l’idée que

l’important est de « mettre l’accent sur une pratique qui est porteuse de compétences techniques » (ibid. p77).

Nous pouvons de la même façon démontrer que des agriculteurs et des habitants, en participant aux expérimentations de l’éolien, ont construit leurs compétences techniques. Depuis le début du XXème siècle et surtout depuis la deuxième guerre mondiale, les énergies fossiles avaient relégué la ligne du vent au simple rang de médium : sa force n’était plus que rarement utilisée. En Frise du Nord, il ne reste que sept des quelques 114 moulins à vent qui fonctionnaient en 1900 (Chezel 2014,20). Après le premier choc pétrolier de 1973 et encore plus après 1979, la trajectoire de la matière-flux vent semble avoir à nouveau changé de direction.

Avec les expérimentations éoliennes, voilà que le vent reprend des propriétés de substance dont la force peut être investie par les humains. Le récit des pratiques d’expérimentations techniques montre bien que les éoliennes ainsi fabriquées ne sont pas seulement le produit du déroulement d’une idée conceptuelle. Le récit montre qu’il a fallu trouver des terres pour les installer, fabriquer des moules pour leurs pales, mesurer les kilo-watt-heures, couler le béton, assembler les rouages de la métallurgie, ajuster les conducteurs d’électrons, creuser la terre pour les fondations, serrer et resserrer les boulons etc… Le récit montre aussi que toutes ces étapes n’étaient pas données à l’avance mais bien renégociées à chaque instant avec la matière et à chaque tempête avec le monde-météorologique.

« En entrelaçant tantôt la ligne dans l’esprit, et tantôt l’esprit dans la ligne » (Ingold 2017, 269) se forme ce qu’Ingold appelle une correspondance : ces allers-retours de la pensée à la matière et de la matière à la pensée. Ce qui se passe entre le vent, les matériaux et les

expérimentateurs n’est pas qu’une histoire d’interactions, c’est une histoire de relations, une histoire de paysage.

La technique et le paysage, être en correspondance

Nous avons montré en mettant l’accent sur les pratiques de l’éolien que des compétences techniques avaient émergé ici et là dans la région. Pour achever notre propos sur sa mise en

mouvement et sa transformation durable, il nous faut montrer que ces expérimentations techniques ont été en correspondance avec le paysage. Qu’est-ce qui perdure dans les lignes de vie ? La forme, la matière, la pensée ? Qu’est-ce qui fait que la forme survit au dialogue, à la pensée, au geste qui l’a créé ? Que deviennent les matériaux ?

Après avoir mis en discussion la « continuité du processus » de Tim Ingold, nous pourrons décrire les expérimentations techniques en correspondance avec les ressources locales et les habitants comme un paysage de pratiques.

Pour Ingold, les objets tels que le cerf-volant, le cabillot ou le violoncelle sont des

transducteurs : ils convertissent le mouvement kinesthésique du corps en un flux matériel (vol, mélodie…). Ces transducteurs semblent être dans un présent permanent nous dit-il, alors qu’il glisse le long du fil du temps (ibid. p216). Ce n’est en effet pas la matérialité de ces objets qui fait leur stabilité, mais la continuité du processus dans lequel ils évoluent, temps pendant lequel ils peuvent suivre leur ligne. Parfois les matériaux survivent aux formes (un paquet de bâtons jeté en l’air et photographié), parfois la forme survit aux matériaux (arpentage romain). Pour saisir les transformations du monde, il ne s’agit donc finalement pas de comprendre qui de la forme de la matière ou de la pensée guide mais bien plutôt de saisir les formes de correspondance entre eux. Ingold emploie le terme de

correspondance au sens d’un échange de lettres. Sans véritable commencement ni fin, une correspondance est « suivie ». Il ne s’agit pas simplement de lire une personne et d’écrire à cette personne. Il s’agit d’être avec. Partager des perspectives comme lors d’une marche et non pas s’affronter comme dans un face à face. Etre en correspondance, c’est un

mouvement réel et sensible. Ainsi, Ingold distingue l’interaction de la correspondance. Dans