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La considération du flux de transit

II) La place de l’homme dans le métro

2) La considération du flux de transit

L’ « automatisme » qui est d’usage pour la majeure partie des voyageurs va ainsi permettre en partie à la RATP de considérer les personnes qui transitent dans le métro non pas dans leur singularité mais dans leur globalité, en distinguant en réalité des flux de déplacements différents selon les heures de transport et les lieux empruntés. Pour Eliséo Véron, le flux correspond au « collectif de voyageurs

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moment donné dans un espace donné » (Véron, 1986, p.11). Si l’on sait qu’environ

5,26 millions de personnes transitaient en moyenne par jour dans le métro en 2014, (contre environ 5,23 en 2012), selon les chiffres de la RATP, il semble en effet plus simple d’appréhender l’humain dans le métro dans un système de flux, une globalité de déplacement, que dans un particularisme. On peut distinguer alors différents flux de progression, d’intensité variable dans le métro.

Tout d’abord, le flux de déplacement s’inscrit dans une temporalité assez fixe : il n’est pas le même selon le moment de la semaine et selon le moment de la journée. Les flux de déplacements les plus denses se retrouvent ainsi les jours hors week-end aux heures moyennes de transition lieu de vie – lieu de travail (généralement entre 7h et 9h du matin, avec un pic entre 8h et 9h) et de transition lieu de travail – lieu de vie (généralement entre 17h et 20h, phénomène plus étalé dans le temps que le matin), durant les « heures de pointe ». A l’opposé, vers les heures d’ouverture et de fermetures du métro se retrouvent les flux de déplacement les moins denses.

Ce flux est aussi variable de la localisation physique : nous pouvons ainsi dégager des pôles sur le réseau du métro où l’on retrouvera la plus grande densité de transit. Ces pôles peuvent être appréhendés autant dans la station et ses couloirs que dans la rame.

Selon les chiffres du STIF pour l’année 2009, nous pouvons ainsi remarquer que certaines lignes sont plus fréquentées que d’autres, avec pour les cinq plus fréquentées en 2009 : la ligne 1 (avec 172,4 millions de passagers annuels), la ligne 4 (avec 172 millions de passagers annuels), la ligne 7 (avec 127 millions de passagers annuels), la ligne 9 (avec 127 millions de passagers annuels), et la ligne 13 (avec 124,3 millions de passagers annuels). La ligne 5 représente un trafic moyen à l’ensemble des lignes, avec 101 millions de passagers annuels.

Ceci est corrélé avec la fréquentation plus élevée de certaines stations. Ainsi les 10 stations les plus fréquentées en 2012, selon les chiffres de la RATP, sont Gare du Nord avec 49,7 millions de voyageurs, Saint-Lazare avec 45,7 millions de voyageurs, Gare de Lyon avec 35 millions de voyageurs, Montparnasse avec 31,5 millions de voyageurs, Gare de l’Est avec 20 millions de voyageurs, République avec 16,7 millions de voyageurs, Châtelet avec 14,1 millions de voyageurs, Hôtel de Ville

69 avec 12,8 millions de voyageurs, La Défense avec 13,9 millions de voyageurs et Opéra avec 12,6 voyageurs.

On se rend compte ici que les 5 stations les plus fréquentées correspondent à des gares. L’aspect plus homogène du trafic des gares sur une journée ne permet pas autant que certaines stations de mesurer l’impact que les heures de pointes peuvent avoir sur les mobilités. Pour comprendre les différentes caractéristiques de flux dans le réseau de la RATP, il faut croiser les critères de spatialité et de temporalité avec les dynamiques socio-économiques qui structurent l’espace urbain et les rythmes de vie des citadins. Ainsi par exemple, la ligne 1 qui est la plus fréquentée connaît aux heures de pointe une saturation unilatérale, dans la direction de La Défense le matin et dans la direction de Château de Vincennes en fin d’après- midi. Ceci est dû à l’emplacement des lieux de travail (situés à La défense) et des lieux de vie (situés en grande partie à Paris-Est) des voyageurs. Autre exemple, la ligne 13 est connue pour être la ligne la plus saturée aux heures de pointe, particulièrement le matin, et particulièrement au Nord de Saint-Lazare, au niveau de l’exploitation de la ligne en deux branches qui limite ainsi beaucoup la fréquence des trains. La densité des personnes est en moyenne de 4,5 personnes au mètre carré, tandis que la capacité maximale de stockage de la rame est de 4 personnes au mètre carré. Cette saturation à des heures particulières est surtout due au développement d’une grande zone économique au niveau de La Plaine – Saint Denis, pensé comme un lieu de travail sans avoir spécialement créé des zones de logements autour, ainsi que plus secondairement au raccord de la ligne 14 à la Gare Saint-Lazare.

L’idée de « flux » permet de saisir de manière globale les disparités de répartition des mobilités dans le métro. Elle semble aussi être la solution la plus adaptée pour pouvoir prendre en compte l’ampleur de ces mobilités, en termes de nombre de personnes qui composent ces flux. C’est un outil très utile pour pouvoir réfléchir de façon logistique sur les modes d’organisation spatiale les plus pertinents pour la gestion des déplacements sur le réseau métropolitain.

Maintenant, l’aspect par très quantitatif de cette notion occulte une part de « vécu » des voyageurs quant à leur déplacement dans le métro. Dans l’optique de pouvoir saisir comment l’homme expérimente cet espace, je vais désormais

70 dépasser la notion de « flux » afin de pouvoir mieux saisir l’homme dans sa qualité personnelle et intime.