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2.2 Accélération des particules solides

2.2.1 Conservation de la séparation d’échelle

Un des résultats les plus commodes que nous avons observé lors de notre étude de l’accélération des particules fluides est celui de la séparation d’échelle entre la norme de l’accélération et de son orientation. En effet cette considération autorise l’isolation d’une de ces deux variables dans son contexte sans craindre qu’un effet lié à la seconde puisse avoir une influence sur les résultats, ce qui simplifie la manière d’observer et d’analyser leurs propriétés. Pour ces raisons et dans le but d’étudier l’influence de l’inertie sur les propriétés de l’accélération des particules fluides, nous souhaitons d’abord savoir si cette séparation d’échelle peut toujours s’appliquer pour l’accélération des particules inertielles. La figure 2.19 montre les fonctions d’autocorrélation lagrangiennes pour la norme d’accélération |ap| des particules, de ses composantes api et de l’angle du vecteur d’accélération θ = arctan(ap2/ap1) projeté dans le plan de cisaillement pour le nombre de Stokes St = 3.0. Comme pour les particules fluides, on constate que la norme de l’accélération est corrélée sur des temps longs alors que ses composantes ainsi que l’angle d’orientation sont corrélés à temps courts. Le temps de décorrélation de l’orientation est un peu plus grand que celui des particules fluides et s’éloigne de l’ordre de grandeur du temps de Kolmogorov. Cependant, le rapport entre le temps de corrélation de la norme d’accélération et de son orientation reste suffisamment important (sa valeur étant environ égale à 4.5) pour émettre l’hypothèse que la norme d’accélération est ici aussi corrélée aux grandes échelles turbulentes et que l’orientation est corrélée à de bien plus petites échelles. La même tendance peut être observée pour les particules dont le nombre de Stokes vaut St = 0.3 (non montré).

Modifications des temps de corrélation

Partant de l’hypothèse selon laquelle la séparation d’échelle s’applique pour les par-ticules inertielles dans le cisaillement homogène et selon la dynamique de l’écoulement

Figure 2.19 – Fonctions d’autocorrélation sur l’ensemble de la simulation de la norme (•), des composantes (a1 : O, a2 : ×, a3 : ) et de l’angle d’orientation (− · ·−) de l’accé-lération de particules inertielles pour un nombre de Stokes égal à 3.0 dans le cisaillement homogène.

discutée à la section 2.1.3, nous devrions toujours constater une sensibilité du temps de corrélation de la norme d’accélération avec les phases de croissance et d’effondrement et une invariance de l’orientation à ces mêmes phases malgré la présence de l’inertie. Nous souhaitons vérifier cette supposition et mieux qualifier les effets de l’inertie sur les temps de corrélation. On analyse d’abord les fonctions d’autocorrélation des com-posantes d’accélération conditionnées aux phases de croissance et d’effondrement sur la figure 2.20 pour les deux nombres de Stokes. En accord avec l’hypothèse de séparation d’échelle, on relève que le temps de corrélation des composantes d’accélération (et donc de son orientation) reste identique avec les phases du cycle de régénération. On peut certes noter une légère sensibilité de la part de la composante longitudinale ap1 mais cette variation reste assez faible pour être considérée comme négligeable. Enfin il ap-paraît que les particules ayant une plus forte inertie restent corrélée légèrement plus longtemps. Cela vient du fait que l’inertie est moins sensible aux petites perturbations locales. Pour un nombre de Stokes vraiment important, on comprend que cette tendance pourrait à terme devenir significative mais nous serions alors dans le cas où les parti-cules deviennent insensibles à l’écoulement en s’y déplaçant sans réelles contraintes (ce qui arrive dans le cisaillement homogène aux alentours d’un nombre de Stokes égal à 10[41]). Ce cas de figure ne correspond cependant pas au cadre de notre étude et, dans le cas présent, l’ordre de grandeur du temps de corrélation reste très similaire pour les deux nombres de Stokes, indiquant que l’orientation de l’accélération des particules reste corrélée à la même gamme de petites échelles.

Figure 2.20 – Figure a (à gauche) : Fonctions d’autocorrélation des composantes d’ac-célération ap1 (rouge), ap2 (bleu) et ap3 (vert) des particules inertielles pour un nombre de Stokes St = 0.3 dans le cisaillement homogène sur l’ensemble de la simulation (—) et conditionnées aux phases de croissance (•) et d’effondrement (· · ·). Figure b (à droite) : Même figure pour St = 3.0

fois les fonctions d’autocorrélation de la norme d’accélération des particules inertielles conditionnées à la croissance et à l’effondrement des grandes structures sur la figure 2.21. On distingue cette fois la sensibilité de la norme d’accélération au cycle de régénération des structures. En effet, le temps de corrélation pendant la phase de croissance est environ 1.7 fois plus important par rapport à la phase d’effondrement. Les figures 2.22a et 2.22b nous montrent que les particules sont plus sensibles à ces phases lorsque l’inertie augmente. On peut en effet relever que le temps de corrélation moyen de la norme diminue avec l’inertie. Cette tendance se retrouve également dans le cas de la turbulence homogène isotrope où le temps de corrélation de la norme des particules inertielles tend à diminuer avec l’augmentation du nombre de Stokes (jusqu’à St = 5.0 où la tendance s’inverse) car leur inertie les rend moins sensibles aux tourbillons dans lesquels elles sont captives et leur permet ainsi de s’en échapper rapidement[49]. On voit en revanche que la différence entre la corrélation de la norme d’accélération des particules fluides et celle des particules inertielles est moins marquée lors d’une phase de croissance. Ceci indique que la phase de croissance permet d’augmenter le temps de corrélation de la norme des particules inertielles de manière plus significative par rapport aux particules fluides. Cet effet peut s’expliquer par le fait que les tourbillons grandissent lors de la phase de croissance et deviennent capables de piéger durablement les particules inertielles. L’augmentation de l’intensité des structures permet en effet d’augmenter la force de traînée des particules les plus lourdes et donc de les garder plus longtemps sous leur influence. Les particules moins inertielles sont également entraînées par ces structures mais peuvent également répondre à des sollicitations d’intensité moins importante ayant une durée de vie plus courte, contrairement aux particules très inertielles. D’autre part, le temps de corrélation diminue lors de la phase d’effondrement pour correspondre à la tendance selon laquelle la norme d’accélération des particules inertielles possèdent une durée de vie plus courte par rapport aux particules fluides car les nouvelles structures plus petites n’ont pas un niveau d’influence suffisant pour entraîner les particules. Le temps de corrélation intermédiaire de la norme non conditionnée sur la figure 2.21 s’explique

Figure 2.21 – Figure a (en haut) : Fonctions d’autocorrélation de la norme d’accélé-ration des particules inertielles pour un nombre de Stokes St = 0.3 dans le cisaillement homogène sur l’ensemble de la simulation (—) et conditionnées aux phases de croissance (•) et d’effondrement (· · ·). Figure b (en bas) : Même figure pour St = 3.0.

Figure 2.22 – Figure a (à gauche) : Comparaison des fonctions d’autocorrélation de la norme d’accélération des particules fluides (•) et inertielles pour un nombre de Stokes égal à 0.3 (− · ·−) et 3.0 (—) dans le cisaillement homogène conditionnées à la phase de croissance. Figure b (à droite) : même figure conditionnée à la phase d’effondrement.

simplement par le fait qu’elle est moyennée sur tous les cycles apparaissant lors de la simulation.

On peut finalement conclure que la séparation d’échelle entre la norme d’accélération et son orientation est bien valable pour les particules inertielles et ce, quelle que soit la valeur de l’inertie. Nous allons donc nous servir de cette propriété pour étudier l’influence de l’inertie sur les statistiques de la norme d’accélération et de son orientation indépen-damment l’une de l’autre. Tout comme pour les particules fluides, nous observerons aussi l’influence des phases de croissance et d’effondrement sur ces statistiques.