• Aucun résultat trouvé

Dans cette section, nous examinerons succinctement comment la voie NF-kB peut influencer, souvent défavorablement, divers états pathologiques affectant le cerveau. Comme

expliqué ci-dessus, le large éventail de voies de signalisation régulant l’activité de NF-κB en

fait un « pivot » dans la production de cytokines, de facteurs de croissance et de médiateurs de l’inflammation (Mattson MP 2006). Cela s’applique également à l’environnement cérébral où un dérèglement n’est pas sans conséquence. Dans les processus pathologiques, cette voie peut augmenter l’apoptose neuronale associée à des lésions ischémiques du cerveau, des maladies neurodégénératives et des conditions inflammatoires.

84

Dans les processus pathologiques corticaux

Tout d’abord, il a été montré que la voie NF-κB peut être activée dans des pathologies telles que l’épilepsie et les blessures traumatiques cérébrales. Durant les crises épileptiques, il y a une augmentation rapide du taux de NF-κB activé dans l’hippocampe (Prasad AV 1994). En parallèle, cette voie est activée dans les cellules voisines et permet un effet neuroprotecteur qui va durer tout au long de l’inflammation engendrée par l’injure cérébrale subie (Mattson MP 2001). Néanmoins, cette activité peut rester élevée durant de longues périodes (des semaines ou même des mois) suivant la lésion et contribuer aux processus inflammatoires délétères associés.

Il a également été montré que l’invalidation d’Ikk2 ou de Nemo dans le neurone et l’oligodendrocyte améliore l’état pathologique d’un modèle murin de sclérose en plaque (Van Loo G 2006). Cela est dû à une expression réduite de médiateurs de l’inflammation.

La voie NF-κB activée dans les cellules gliales (microglie et astrocytes) entraîne un processus d’inflammation, qui peut s’opposer aux rôles précédemment décrits de NF-κB dans le cerveau (Figure 31). En effet, NF-κB est sous forme latente au niveau de la glie et se retrouve activé en cas de lésions, telles qu’un dommage au niveau du tissu nerveux. Son activation microgliale module le processus d’inflammation, par l’infiltration des cellules immunes dans le cerveau, sous l’induction de chimiokines (Kaltschmidt B 2015). En parallèle, la signalisation NF-κB dans les astrocytes peut réguler cette infiltration au niveau des lésions cérébrales. De plus, l’activation microgliale de NF-κB pourrait être un contributeur crucial dans l’ischémie. Chez la souris, un processus neuroprotecteur se met en place (Duckworth EA 2006), contrairement à chez l’Homme où la neuroprotection semble être moins efficace (Röther J 2008). Après l’induction d’une ischémie pendant 1h (paradigme de MCAO, Middle Cerebral

Artery Occlusion) chez des souris p50−/−, il est prouvé le rôle neuroprotecteur de NF-κB dans

85

La dérégulation de la voie de signalisation NF-κB par l’inflammation ou des facteurs environnementaux, interfère avec la neurogénèse dans le cerveau en développement, mais aussi adulte. Par exemple, une infection maternelle pendant la grossesse peut toucher par la libération d’activateurs proinflammatoires de NF-κB, le développement du cerveau fœtal (Van Steenwinckel J 2014) et donc plus tard entrainer, entre autres, des troubles de l’apprentissage (Boksa P 2010). De même, son activation cellulaire intrinsèque par un stress aigu dans les cellules souches neurales supprime la neurogénèse hippocampale chez les rats adultes (Koo JW 2010). Le stress dit « aigu d’immobilisation » peut aussi entrainer des défauts dans la neurogénèse, induits par l’activation de NF-κB par IL-1β (Koo JW 2010).

86

Dans la myélinisation

Dans le cas de démyélinisation accompagnée d’inflammation, NF-κB est activé dans les cellules progénitrices d’oligodendrocytes recrutées par des facteurs issus de la glie non activée. Cela entraine leur différenciation en oligodendrocytes remyélinisants, afin de permettre la survie d’axones démyélinisés en les remyélinisant (Blank M 2014). Cela prouve que l’activation de NF-κB impliquant RelA et/ou IKK2 n’est pas nécessaire à la maturation des oligodendrocytes in vitro et in vivo, tout comme pour la myélinisation des axones dans le SNC (Raasch J 2011), mais est nécessaire au processus de remyélinisation.

Dans ce cas, l’activation par différents régulateurs extracellulaires de la voie de signalisation NF-κB dans les astrocytes, a aussi un impact positif sur l’induction de la remyélinisation (Blank M 2014). Au contraire, dans de nombreuses maladies impliquant les oligodendrocytes, de la démyélinisation causée par l’activation de NF-κB peut être observée. Il n’a pas encore été déterminé si cet effet est direct ou dû aux cellules environnantes. Néanmoins, une protection contre la démyélinisation induite par des toxines, a été obtenue par l’ablation astrocytaire d’IKK2 (Raasch J 2011). Cela réduit l’induction de cytokines inflammatoires potentiellement toxiques pour les oligodendrocytes. En outre, l’inhibition astrocytaire de NF-κB diminue aussi l’expression par ces cellules de la disintégrine et métalloprotéase A (ADAM) 12, surtout présente dans les zones cérébrales affectées par de la perte d’oligodendrocytes (Baertling F 2010), et donc la démyélinisation (Figure 32). Or, ADAM12 clive l’IGFBP3 (Insulin-like Growth Factor-2 Binding Protein-3) (Shi Z 2000), qui semble être fonctionnellement relié au développement astrocytaire, au développement des oligodendrocytes et à la (re)myélinisation (Lovett-Racke AE 1998). Cela prouve que les astrocytes peuvent directement moduler la myélinisation par la libération de facteurs sécrétés (Moore CS 2011).

87

De plus, les oligodendrocytes perdus lors de la démyélinisation peuvent être remplacés par des OPCs (Oligodendrocytes Precursor Cells) (Tripathi R 2007). Une expérience in vitro a prouvé que la microglie non activée pouvait, en association avec NF-κB, augmenter le nombre d’oligodendrocytes survivants, par l’inhibition de l’apoptose des OPCs et la stimulation de leur maturation en oligodendrocytes (Nicholas RS 2001). En effet, ces cellules peuvent migrer jusqu’au site de la lésion et se différencier en oligodendrocytes matures et myélinisants, si l’environnement le permet (Franklin RJ 2008). Au contraire, la dégénérescence de la myéline entraine la libération de molécules inhibitrices comme NogoA, MAG (Myelin-Associated Glycoprotein) et OMgp (Oligodendrocyte-Myelin glycoprotein) qui bloquent la

remyélinisation. Elle active aussi dans les macrophages, la voie FAK/PI3K/Akt/NF-κB et

augmente l’expression de médiateurs inflammatoires (Sun X 2010). Ces facteurs inhibent la régénération des axones et active des systèmes complémentaires pour détruire la myéline intacte (Chen MS 2000). De plus, la présence près des oligodendrocytes touchés, d’inhibiteurs de différenciation, tels que les cytokines et les chimiokines dont plusieurs sont régulés par NF-κB,

Figure 32. Les signaux de régulation de la dé- et remyélinisation dans le SNC. Lors de la démyelinisation, NF-κB est fortement activé au niveau des astrocytes et de la microglie activée. Au contraire, NF-κB est fortement activé au niveau des OPCs et très réduit au niveau des astrocytes et de la microglie, lors de la remyélinisation (Blank M 2014).

88

peut entrainer une mauvaise remyélinisation (Kremer D 2011). Finalement, NF-κB a un rôle dans le processus de remyélinisation via le TNF (Figure 32), qui est aussi requis pour la prolifération des OPCs (Arnett HA 2001).

Dans le vieillissement

La voie NF-κB a un rôle dual dans la maladie d’Alzheimer. En effet, cette voie permet l’expression de la protéine APP qui, après clivage, donne le peptide pathologique amyloïde β se déposant en plaques dans le cerveau des patients Alzheimer. Or, NF-κB tient aussi un rôle neuroprotecteur contre la toxicité du peptide Aβ, en initiant la transcription de gènes-cibles neuroprotecteurs (Liu H 2015) (Kaltschmidt B 1997).

Le processus de plasticité synaptique s’altère avec le vieillissement, ce qui peut expliquer les difficultés croissantes à retenir des informations. Dans certaines formes familiales de la maladie d’Alzheimer, des mutations génétiques (au niveau des gènes codant les protéines présentées en Figure 28) sont associées à des défauts de plasticité des synapses, expliquant les troubles majeurs de mémoire dans cette maladie. Or, l’activation constitutive de NF-κB est une marque du vieillissement menant à son hyperactivation et l’expression de gènes proinflammatoires dans les neurones (Jurk D 2014). Cela pourrait affecter directement la transcription de gènes synaptiques dépendants de NF-κB et donc contribuer aux problèmes observés dans la plasticité synaptique durant le vieillissement.

90

Résultats & Discussion

I. Système analysé

Notre travail vise à élucider la cause des anomalies cérébrales souvent sévères observées chez les patientes IP [cf. II.A.1(b) Signes cliniques p. 41). Pour cela, nous utilisons un modèle murin de la pathologie qui présente une délétion du gène Nemo, mimant la situation observée chez 70-75% des patientes (Schmidt-Supprian M 2000). A la naissance, les portées obtenues sont viables et d’un nombre habituel. Les souris ne présentent aucune différence entre elles à la

naissance (Figure 33). Les souris femelles Nemo+/- (IP) développent 5 jours après la naissance

une dermatose cutanée très similaire à celle des patientes IP (Figure 33) et subissent

également le phénomène d’inactivation biaisée du chromosome X, caractéristique de la pathologie.

Figure 33. Portée issue d’un croisement Xcre/Y x XNemofl/XNemofl. Les animaux sont montrés à l’âge P4 (Panneau du haut) et P7 (Panneau du bas).

91

Les souris IP présentent un phénotype cutané variable, avec un taux de mortalité élevé à P10.

Nous avons donc analysé leur cerveau à P7, afin d’éviter toute perte conséquente d’animaux.

Tableau 1. Hétérogénéité du phénotype cutané chez les souris IP à P7

Phénotyp e Faible Moye n Fort Total Nombre 61 111 56 228 % 26,8 48,7 24,6 100,0

Pour cela, les animaux ont été décapités et leurs têtes disséquées (élimination de la peau et des yeux) puis fixées. Elles ont ensuite été analysées en utilisant des protocoles d’IRM mis au point pour de jeunes animaux [cf. Matériels & Méthodes p. 104].

II. Analyse des cerveaux par IRM