4.5 Actions de maintenance
4.5.4 Conséquences sur le coupon élémentaire
4.5.4 Conséquences sur le coupon élémentaire
Comme le montre la figure 4.9, l’action de maintenance agit à la fois sur l’état de la pleine
barre et sur l’état de la soudure, ainsi que sur la probabilité d’existence de cette dernière.
Les paragraphes suivants ont pour objet la description probabiliste de l’impact des actions
de maintenance sur le coupon élémentaire.
État du coupon élémentaire
Le coupon élémentaire est remis à neuf que l’action de maintenance sélectionnée soit
cu-rative (C) ou de type renouvellement (R). Autrement dit, la pleine barre et la soudure se
retrouve dans l’état neuf (N) quelle que soit leur état précédent. Ceci se traduit en termes
probabilistes par l’intermédiaire des lois de transition artificielleQ
actpb
etQ
actsd
définies comme
suit :
Q
actpb(resp.Q
actsd)
X
pb,t(resp.X
sd,t)
X
pb,t−1(resp.X
sd,t−1) A
st−1N OX1 X2S SRup
N C 1 0 0 0
OX1 C 1 0 0 0
X2S C 1 0 0 0
SRup C 1 0 0 0
N R 1 0 0 0
OX1 R 1 0 0 0
X2S R 1 0 0 0
SRup R 1 0 0 0
.
En ne s’intéressant qu’à l’état du coupon élémentaire, une simple réparation et un
renou-vellement ont exactement le même effet. En revanche, ces deux actions n’ont pas les mêmes
coûts ni les mêmes conséquences sur le processus de création ou de suppression de soudures.
4.5 Actions de maintenance 149
Existence de la soudure
Rappelons que les soudures aluminothermiques sont introduites sur la voie suite à la pose
de coupons neufs lors d’une opération de maintenance. Chaque réparation entraîne
théori-quement l’introduction de deux soudures. Toutefois, lorsque le défaut a lieu au droit d’une
soudure, la réparation du coupon correspondant conduit à l’ajout de deux nouvelles
sou-dures de réparation et supprime la soudure défectueuse. Il se peut également que plusieurs
soudures soient proches de la position d’un défaut. Dans ce cas, une réparation entraîne
généralement le retrait des soudures proches du défaut, faisant ainsi chuter le nombre de
soudures total sur la voie. La quantité de soudures n’augmente donc pas forcément
linéai-rement en fonction du nombre de réparations effectuées. Plus précisément, ce phénomène
de recouvrement de soudures se produit d’autant plus souvent que les défauts sont peu
dispersés, conduisant à des concentrations locales de soudures. À l’inverse, si les défauts
apparaissent de manière uniforme sur la voie, la probabilité de faire chuter le nombre de
soudures lors d’une réparation est plus faible.
Dans la suite, nous proposons une méthode empirique permettant de tenir compte de cette
réalité pratique. En se fixant un contexte z, la modélisation adoptée permet de calculer
l’espérance du nombre de soudures présentes à l’instanttsur la voie étudiée, composée de
N
ce,zcoupons élémentaires de longueur L
ce. Cette quantité, notéeN
sd,z,t, est définie par
N
z,sd,t=N
ce,zω
+sd,z,t, (4.6)
où ω
+sd,z,t=P(E
sd,t=présente;z) désigne la probabilité d’existence d’une soudure sur le
coupon élémentaire à l’instantt.
Décrivons à présent l’approche empirique proposée permettant de caractériser le
proces-sus de création/suppression d’une soudure conditionnellement aux actions de maintenance
effectuées. Deux situations sont envisageables :
1. L’action de renouvellement est sélectionnée (A
st−1
=R). La voie est donc entièrement
remise à neuf et par conséquent les soudures de réparation sont toutes supprimées.
Néanmoins, un certain nombre de soudures aluminothermiques, notéN
sd,z,1, est
réa-lisé afin d’assembler les coupons neufs entre eux selon la technique dite des longs rails
soudés. Cette quantité de soudures dépend donc de la longueur des rails de
renouvel-lement : une longueur de rail importante implique moins de soudures à réaliser. Par
conséquent, la probabilité d’existence d’une soudure sur le coupon élémentaire après
un renouvellement est égale à la probabilité d’existence d’une soudure à l’instant
initial ω
+sd,z,1(cf. équation (4.1)), quel que soit le nombre de soudures effectuées dans
le passé.
2. Une action corrective est déclenchée suite à la détection d’un défaut (mineur, critique
ou rupture). Dans ce cas, il convient de distinguer les deux cas suivants :
(a) Aucune soudure n’est présente sur le coupon élémentaire (E
sd,t−1= absente).
La pose du nouveau coupon s’effectue donc en réalisant deux soudures. D’après
la modélisation de la voie considérée, ceci se traduit en ajoutant de manière
déterministe une soudure au coupon élémentaire. La probabilité qu’une soudure
existe à l’instant t sachant qu’une action corrective a été effectuée et que le
150 Chapitre 4. Application à la prévention des ruptures de rails
coupon ne possédait pas de soudure est égale à P(E
sd,t= présente|E
sd,t−1=
absente, A
st−1=C) = 1.
(b) Le coupon élémentaire possède déjà une soudure (E
sd,t−1=présente). Dans ce
cas, il est nécessaire de tenir compte d’un possible recouvrement de soudure. Par
conséquent, la probabilité de présence de la soudure après réparation ne vaut
plus forcément un, puisqu’en pratique plusieurs soudures peuvent être
suppri-mées lors de l’opération de maintenance.
Afin d’estimer cette probabilité, nous avons été contraint d’étudier la distribution spatiale
des avaries. L’objectif est de calculer une estimation de la loi de probabilité des Points
Kilométriques (PK) associés aux défauts. Soient pk
iet pk
fle PK initial et le PK final
délimitant la section de voie considérée. Notons Y
pkla variable aléatoire à valeurs dans
{pk
i, . . . ,pk
f}représentant la PK d’un défaut. Il s’agit d’estimer pour touty=pk
i, . . . ,pk
f,
la distribution des PK d’avaries, notéePb(Y
pk=y), en exploitant les informations spatiales
contenues dans la baseAvaries.
Par la suite, nous réalisons une mesure de la dispersion des défauts. Nous calculons pour
cela l’entropie des PK d’avaries. Plus précisément, nous utilisons l’entropie normalisée,
notéeH(Y
pk)∈[0,1], qui a pour définition
H(Y
pk) =− 1
log(pk
f−pk
i)
pkfX
y=pkiP(Y
pk=y) logP(Y
pk=y). (4.7)
Lorsque la distribution spatiale des défauts est uniforme, la dispersion est maximale et
H(Y
pk) = 1, tandis qu’à l’inverse si tous les défauts sont localisés au même PK, le lieu
des avaries est déterministe et H(Y
pk) = 0. Autrement dit, plusH(Y
pk) est proche de un,
moins il y a de chance qu’un recouvrement de soudure ait lieu lors d’un changement de
coupon.
Nous notons enfin τ
sd+,z=P(E
sd,t=présente|E
sd,t−1=présente, A
st−1=C;z), le taux de
création d’une soudure après une opération de maintenance corrective sur un coupon
pos-sédant déjà une soudure. Ce taux est fixé de façon à vérifier les deux conditions suivantes :
(i) Si la dispersion des défauts est uniforme, chaque coupon élémentaire devrait posséder
une soudure au bout d’un certain temps. Aussi, la probabilité asymptotique
d’exis-tence d’une soudure, notée lim
t→∞P(E
sd,t=présente;z) =ω
+sd,z,∞doit tendre vers
1.
(ii) Si tous les défauts apparaissent au même PK, seul un coupon sur la section de voie
étudiée présente des défauts. Or, d’après l’hypothèse des coupons élémentaires
in-dépendants et identiquement distribués, la probabilité asymptotique qu’un coupon
particulier présente tous les défauts est donnée parω
+sd,z,∞= 1/N
ce,z.
De façon à vérifier les conditions précédentes, nous utilisons l’entropie définie par l’équation
(4.7) afin de traiter les cas intermédiaires. Nous cherchons τ
sd+,ztel que la probabilité
asymptotique d’existence d’une soudure soit égale à :
ω
sd+,z,∞= 1
N
ce,z+H(Y
pk)N
ce,z−1
N
ce,z.
4.5 Actions de maintenance 151
En utilisant les propriétés asymptotiques associées à la chaîne de Markov représentant le
processus de suppression/création de la soudure, nous en déduisons
τ
sd+,z= 2− 1
ω
+sd,z,∞.
L’approche décrite dans les paragraphes précédents permet de construire la LPC W
act sd,zcontrôlant l’évolution du processus d’existence d’une soudure :
W
sdact,zE
sd,tE
sd,t−1A
s tabsente présente
absente C 0 1
présente C 1−τ
sd+,zτ
sd+,zabsente R 1−ω
sd+,z,1ω
+sd,z,1présente R 1−ω
sd+,z,1ω
+sd,z,1.
Reprenons l’exemple du contexte z correspondant aux courbes de rayon inférieur à 500
mètres dans le tronçon central du réseau RER A (entre les stations La Défense et
Vin-cennes). Cette zone correspond àL
v,z= 6246 mètres de rails . En considérant un coupon
élémentaire de longueurL
ce= 25 mètres, la voie étudiée est constituée de N
ce,z= 249.8
coupons élémentaires indépendants. Les figures4.10aet4.10breprésentent respectivement
la distribution spatiale des avaries pour les files hautes et pour les files basses dans ce
contexte. La table 4.2donne l’entropie normalisée de la localisation des défauts ainsi que
la valeur deτ
sd+,zpour les deux types de files.
204150 22614 23118 25166 25612 26149 26595 27428 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 4x 10 −3 PK Probabilite
(a)File haute
204150 22614 23118 25166 25612 26149 26595 27428 1 2 3 4 5 6 7x 10 −3 PK Probabilite (b) File basse
Fig. 4.10– Distributions spatiales des défauts sur les courbes de rayon inférieur à 500 mètres sur le tronçon central du RER A.
152 Chapitre 4. Application à la prévention des ruptures de rails
Nous observons graphiquement que les défauts apparaissent de manière plus dispersée sur
les files hautes. Ceci est confirmé numériquement par une entropie des PK de défaut plus
importante comparée à celle calculée sur les files basses. Le taux de création d’une soudure
est plus élevé d’environ 10%sur les files hautes que sur les files basses.
File haute File basse
H(Y
pk) 0.907 0.809
τ
sd+,z0.898 0.765
Tab.4.2– Entropie normalisée de la localisation des défauts et taux de création de soudure dans le contexte des courbes de rayon inférieur à 500 mètres sur le tronçon central du RER A.