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Introduction g´ en´ erale

I.4 La connectivit´ e au sein de m´ etapopulations marines

I.4.1 Qu’est-ce qu’une population ?

De nombreuses d´efinitions ont ´et´e propos´ees pour d´efinir ce qu’est une population (Waples et Gaggiotti, 2006). D’un point de vue ´evolutif, une population d´esigne un groupe d’individus de la mˆeme esp`ece vivant suffisamment `a proximit´e les uns des autres pour que n’importe quel individu puisse potentiellement se reproduire avec n’importe quel autre individu. D’un point de vue ´ecologique, une population d´esigne un groupe d’individus de la mˆeme esp`ece occupant un espace particulier `a un temps donn´e et qui vivent en interaction. C’est cette d´efinition que nous utiliserons au cours de ce travail de th`ese.

En milieu marin, la d´elimitation des populations peut parfois s’av´erer difficile (Grimm et al., 2003). Dans le cas d’esp`eces marines `a cycle bentho-p´elagique et vivant au sein d’un habitat fragment´e, la population est alors form´ee des individus adultes d’un fragment d’habitat benthique (ou patch) donn´e.

I.4.2 Qu’est-ce qu’une m´etapopulation ?

Bien que l’importance des ph´enom`enes d’extinction-recolonisation dans la persistence des populations locales fut soulign´ee par Wright (1940) et Andrewartha et Birch (1954) d`es le milieu du vingti`eme si`ecle, le concept de m´etapopulation ne fut d´efini pour la premi`ere fois par Levins qu’en 1969 comme “une population de populations soumises `a une alternance d’extinction et de colonisation”. Il s’agit donc dans cette d´efinition initiale d’un ensemble de populations structur´ees spatialement qui persiste malgr´e des extinctions locales (Figure I.12). Dans ce mod`ele d’extinction/recolonisation, les populations locales occupent un maillage infini compos´e de fragments d’habitat (ou ‘patchs’) ´equidistants et de mˆeme caract´eristiques (i.e. taille, qualit´e, probabilit´e d’extinction). Le mod`ele de Levins fut initialement d´evelopp´e pour le contrˆole des populations d’insectes nuisibles. Les objectifs de ces travaux ´etaient alors d’expliquer la persistence ou l’extinction des esp`eces

ne peut avoir que deux ´etats : occup´e ou vide. En consid´erant des taux de migration entre populations locales faibles et ind´ependants de la distance les s´eparant, un tel mod`ele permet d’expliquer la p´erennit´e d’une esp`ece `a une ´echelle r´egionale sup´erieure `a celle des populations locales.

Figure I.12 – Mod`ele de m´etapopulation de Levins (1969), compos´e d’un maillage infini de fragments d’habitat (carr´es) ´equidistants et de mˆemes caract´eristiques. Les fragments d’habitat sont vides (en blanc) ou occup´es par une population locale (en bleu).

Par la suite, le mod`ele de m´etapopulations de Levins fut repris et d´evelopp´e dans des cas plus r´ealistes o`u les fragments d’habitat diff`erent en taille, en qualit´e et en probabilit´e d’extinction, devenant ainsi un paradigme majeur en ´ecologie des populations et en biologie de la conservation (Hanski, 1999; Harrison, 1991). Plusieurs types de m´etapopulations furent ainsi d´ecrits (Harrison, 1991) :

– le mod`ele classique de Levins compos´e d’une matrice d’habitats occup´es ou vides (Figure I.13A) ;

– le mod`ele ˆıles-continent (Figure I.13B) dans lequel il existe une population persis-tante (i.e. le continent) et des populations satellites (i.e. les ˆıles) soumises `a des ph´enom`enes d’extinction et de recolonisation ; les ´echanges d’individus sont faibles et ont lieu aussi bien entre le continent et les ˆıles qu’entre les ˆıles ;

– le mod`ele source-puits (Figure I.13C), mentionn´e d`es 1940 par Wright, dans lequel le maintien de la m´etapopulation d´epend uniquement de la population source d’o`u sont issus tous les migrants et dont la probabilit´e de s’´eteindre est nulle.

Figure I.13 – Exemples de m´etapopulations propos´es par Harrison (1991) : (A) le mod`ele initial de Levins (1969), (B) le mod`ele continent-ˆıles, (C) le mod`ele source-puits, (D) le mod`ele de population fragment´ee, (E) le mod`ele de populations fragment´ees en d´es´equilibre, et (F) un mod`ele interm´ediaire. En noir sont repr´esent´es les habitats occup´es et en blanc les habitats vides. Les fl`eches rouges symbolisent la dispersion.

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A ces trois mod`eles th´eoriques majeurs de m´etapopulations qui mettent tous l’accent sur l’existence de ph´enom`enes d’extinction-recolonisation et de flux de migrants faibles, il est possible d’ajouter d’autres formes d’organisation spatiale des populations :

– le mod`ele de population fragment´ee (Figure I.13D), dans lequel les ´echanges entre populations locales discr`etes sont intenses de sorte qu’il n’existe pas de ph´enom`ene d’extinction ; le syst`eme fonctionne alors comme une unique population structur´ee dans l’espace ;

– le mod`ele de populations fragment´ees en d´es´equilibre (Figure I.13E), dans lequel les populations locales discr`etes ne sont pas interconnect´ees et pour lequel il n’existe pas de recolonisation suite `a des extinctions locales ;

– des mod`eles interm´ediaires entre ces diff´erentes formes d’organisation spatiale o`u des populations locales peuvent exister, tels que celui report´e sur la Figure I.13F qui allie un mod`ele source-puits avec un mod`ele de population fragment´ee : dans de tels mod`eles les ´echanges sont plus intenses au centre de l’aire de distribution de l’esp`ece

I.4.3 Comment caract´eriser les m´etapopulations marines ?

Bien que la majorit´e des premi`eres ´etudes empiriques et th´eoriques sur l’´ecologie des m´etapopulations concern`erent les esp`eces terrestres (Hanski, 1999; Harrison, 1991), un nombre croissant d’´etudes sur les m´etapopulations marines apparut d`es la fin des ann´ees 80. Ainsi, Botsford et al. (1994) d´efinirent les m´etapopulations d’esp`eces marines `a cycle de vie bentho-p´elagique comme des ensembles de sous-populations adultes reli´ees entre elles par la phase larvaire. Dans cette d´efinition, c’est donc la dispersion larvaire qui r´egit la dynamique de la m´etapopulation. Celle-ci s’oppose ainsi au consensus qui se fit dans la lign´ee des travaux de Levins (1969), sur l’importance pr´epond´erante des probabilit´es d’extinction des populations locales dans la d´efinition des m´etapopulations (Grimm et al., 2003; Smedbol et al., 2002) : un fort risque d’extinction d’au moins une population locale est n´ecessaire pour d´efinir une m´etapopulation. Or, le crit`ere d’extinction locale est souvent difficilement applicable aux populations d’esp`eces marines `a cycle bentho-p´elagique. De plus, il est extrˆemement difficile d’estimer la localisation et la taille des populations locales en milieu marin ´etant donn´e la difficult´e d’en d´efinir les contours et de les ´echantillonner correctement (Grimm et al., 2003; Smedbol et al., 2002).

Dans la d´efinition d’une m´etapopulation propos´ee par Hanski en 1999, les extinc-tions locales ne sont plus le crit`ere primordial : la m´etapopulation est plutˆot d´efinie comme un ensemble de populations locales occupant un habitat fragment´e et reli´ees par la dispersion, sugg´erant que la dynamique de l’une est influenc´ee par la dynamique des autres et r´eciproquement. Il existe alors des ´echanges entre populations, sans qu’il y ait n´ecessairement d’extinction. L’accent est mis sur l’absence de synchronisme entre les dy-namiques locales puisque les populations locales sont partiellement ferm´ees (i.e. autore-crutement possible), et donc sur l’absence d’homog´en´eisation de la dynamique r´egionale. Cependant, dans ce concept les dynamiques locales et r´egionales demeurent li´ees.

La r´ecente d´efinition formul´ee par Kritzer et Sale (2003) correspond `a l’application en milieu marin de la d´efinition propos´ee par Hanski (1999). Ainsi, une m´etapopulation marine est un syst`eme de populations locales discr`etes dont chacune d´etermine en grande partie sa propre dynamique interne mais dont une partie de la dynamique est ´egalement

in-fluenc´ee par les autres populations locales `a travers la dispersion d’individus (Figure I.14). Cette d´efinition de la m´etapopulation prend donc en compte en premier lieu l’organisation spatiale des populations locales et leurs relations via les ´echanges larvaires. Cependant, elle ne pr´ecise pas leur dynamique et donc n’impose pas de crit`ere bas´e sur des ´ev`enements d’extinction-recolonisation.

Figure I.14 – Trois types de populations spatialement structur´ees en fonction des ´echelles spatiales de la dispersion larvaire et les noyaux de dispersion associ´es, d’apr`es Kritzer et Sale (2003). (A) Populations locales ferm´ees : populations avec des dy-namiques ind´ependantes et sans ´echange d’individus lors de la dispersion larvaire. (B) M´etapopulation : r´eseaux de populations partiellement ferm´ees, i.e. avec un cer-tain degr´e d’autorecrutement (ind´ependance des dynamiques locales) mais une part non n´egligeable d’´echanges entre populations via la dispersion larvaire. (C) Population frag-ment´ee : ensemble de populations locales fonctionnant comme une seule population ferm´ee au sein de laquelle les individus sont r´epartis en groupes discrets fortement connect´es par la phase larvaire (dynamiques locales inter-connect´ees), l’ensemble fonctionnant comme une seule ”grande” population. Les fl`eches symbolisent les ´echanges larvaires.

Dans ce contexte, deux ´echelles spatiales sont n´ecessaires pour enti`erement appr´ehender la dynamique des m´etapopulations : l’´echelle locale des sous-populations, et l’´echelle r´egionale du r´eseau de populations locales. Dans la d´efinition propos´ee par Kritzer et Sale (2003), le degr´e de connectivit´e d´emographique est le crit`ere essentiel de la d´efinition de la m´etapopulation, prenant en compte des processus locaux et r´egionaux. En pla¸cant la connectivit´e au centre de la d´efinition des m´etapopulations marines, ces auteurs insistent sur le fait que la dynamique des populations locales, bien que fortement d´ependantes des processus d´emographiques locaux, est aussi influenc´ee par des processus d’apports ext´erieurs. Le concept de la m´etapopulation, tout comme la th´eorie de la ’supply-side eco-logy’ pr´esent´ee en Section I.1.2, mettent donc en avant l’importance de la phase larvaire dans la dynamique des populations marines. La mesure de la connectivit´e en tant que taux d’´echanges entre populations locales devient donc un ´el´ement central de l’´etude des m´etapopulations marines.

I.4.4 De la dispersion `a la connectivit´e

La connectivit´e des populations est donc l’´echange d’individus entre populations g´eographiquement s´epar´ees, celles-ci ´etant alors les sous-ensembles d’une m´etapopulation (Cowen et Sponaugle, 2009). Chez les organismes `a cycle de vie bentho-p´elagique, la connectivit´e entre populations inclue le plus souvent la dispersion larvaire et la survie des premiers stades de la vie benthique (Figure I.15A), c’est-`a-dire les processus inter-venant depuis la reproduction jusqu’au recrutement (Cowen et al., 2007; Pineda et al., 2007). S’il serait plus juste de d´efinir la connectivit´e `a l’issue de la phase dispersive lors de la s´edentarisation, ceci est rarement possible dans la pratique o`u la connectivit´e est le plus souvent mesur´ee in situ `a une date plus ou moins arbitraire. Une p´eriode de vie benthique plus ou moins longue au cours de laquelle une partie des individus nouvelle-ment s´edentaris´es meurt est donc prise en compte. Enfin, la connectivit´e reproductive d´esigne la dispersion d’individus qui survivent et se reproduisent (Figure I.15B). Elle int`egre ainsi les processus affectant les stades larvaires, juv´eniles et adultes. La

connecti-vit´e reproductive est parfois appel´ee dispersion efficace ou dispersion r´ealis´ee, telle que d´efinie dans la Section I.2.1.

Figure I.15 – D´efinitions de (A) la connectivit´e et de (B) la connectivit´e reproductive, d’apr`es Pineda et al. (2007). Les processus impliqu´es dans la connectivit´e sont indiqu´es par des fl`eches oranges, les processus impliqu´es dans la connectivit´e reproductive par des fl`eches pourpres.

Par cons´equence, il existe un lien direct entre la dispersion et la connectivit´e (Cowen et al., 2007) : une dispersion sur de courtes ´echelles spatiales engendrera une faible connec-tivit´e entre populations distantes, tandis qu’une dispersion sur une plus grande distance augmentera la connectivit´e entre populations ´eloign´ees (Figure I.16). Selon l’importance des ´echanges larvaires entre les populations marines (Figure I.16), celles-ci peuvent ˆetre qualifi´ees de ‘ferm´ees’ en absence d’´echanges (Figure I.14A) ou d’‘ouvertes’ lorsque les ´echanges sont intenses, libres, et sur de longues distances (Figure I.14C). La situa-tion interm´ediaire correspond alors `a la d´efinition de m´etapopulation marine propos´ee par Kritzer et Sale (2003) (Figure I.14B).

Figure I.16 – Lien entre dispersion et connectivit´e. L’intensit´e de la connectivit´e est fonc-tion de l’allure des noyaux de dispersion. D’apr`es Cowen et al. (2007).

I.4.5 Les populations marines sont-elles ouvertes ou ferm´ees ?

Historiquement, le milieu marin fut suppos´e ˆetre un milieu de libre ´echange, o`u les larves pouvaient se disperser sur de longues distances, rendant les populations marines ouvertes aux ´echelles de temps ´ecologiques (Roughgarden et al., 1988; Scheltema, 1986; Thorson, 1950). Cette supposition a ´et´e notamment appuy´ee par des ´etudes d´emontrant la faible structure g´en´etique des populations marines sur de grandes ´echelles spatiales, et donc des ´echanges de g`enes tr`es intenses entre populations ´eloign´ees g´eographiquement (Hellberg et al., 2002; Palumbi, 1994).

Cependant, depuis une dizaine d’ann´ees, la question de savoir si les populations ma-rines ´etaient ’ouvertes’ ou ’ferm´ees’ a ´et´e pos´ee (Cowen et al., 2000; Mora et Sale, 2002; Todd, 1998). En effet, des travaux issus d’´echantillonnage in situ (Paris et Cowen, 2004), de mod`eles (Cowen et al., 2000; James et al., 2002), d’analyses biog´eochimiques (Swea-rer et al., 1999; Thorrold et al., 2001) et/ou d’analyses g´en´etiques (Jones et al., 2005) ont montr´e que les taux d’´echanges larvaires ´etaient fr´equemment sur-estim´es. Ainsi, la r´etention lavaire et l’autorecrutement peuvent jouer un rˆole important dans le main-tien des populations marines (Warner et Cowen, 2002).

Sponaugle et al. (2002) ont en particulier identifi´e certains des m´ecanismes biologiques et physiques favorisant la r´etention larvaire, tels que le comportement natatoire ou les structures hydrodynamiques complexes. La survie des populations locales et donc de la m´etapopulation d´ependrait donc tr`es fortement du succ`es de la r´etention larvaire (Hastings et Botsford, 2006). Dans ce contexte, plusieurs ´etudes ont depuis cherch´e `a mesurer le degr´e de connectivit´e des populations marines (Barnay et al., 2003; Becker et al., 2007; Xue et al., 2008) ou `a identifier des populations sources et des populations puits au sein de ces m´etapopulations (Bode et al., 2006; Chiswell et Booth, 2008).

Dans le contexte de l’´etude des m´etapopulations marines, Kinlan et al. (2005) pr´econisent cependant d’utiliser les termes ’ouvert’ et ’ferm´e’ avec pr´ecaution puisque ceux-ci sont relatifs (’plus ouvert que...’, ’plus ferm´e que...’), et que la dispersion et la connectivit´e s’effectuent sur une vaste gamme d’´echelles spatiales. Par ailleurs, une classification sim-pliste des distances de dispersion et donc des ´echelles spatiales de la connectivit´e (courtes vs. longues) n’est pas recevable, dans la mesure o`u des processus ´ecologiques diff´erents (maintien des populations locales vs. extension de l’aire de distribution) interviennent sur diff´erents aspects de la dispersion (dispersion moyenne vs. ph´enom`enes rares de dispersion extrˆeme) (Kinlan et al., 2005). Les notions relatives telles que court, long, ouvert, ferm´e, retenu, ou export´e ne doivent donc ˆetre utilis´ees que lorsqu’est pr´ecis´ee l’´echelle `a laquelle les processus biologiques observ´es sont pertinents.

I.4.6 Comment d´ecrire la connectivit´e ?

Les matrices de connectivit´e permettent de d´ecrire les ´echanges larvaires entre les sous-populations d’une m´etapopulation. Ainsi, dans le cas d’une m´etapopulation compre-nant n populations, une matrice de dimension n × n permet de repr´esenter les probabilit´es pij qu’une population i re¸coivent des larves ´emises depuis la population j (Figure I.17).

Les matrices de distance temporelle permettent, quant `a elles, de d´ecrire le temps n´ecessaire pour qu’une larve se disperse d’une population `a une autre.

Figure I.17 – Un exemple simple de matrice de connectivit´e dans le cas d’une m´etapopulation th´eorique contenant 4 populations, d’apr`es Botsford et al. (2009). Cette matrice (5) int`egre successivement : (1) les 4 populations locales, (2) les probabilit´es de dispersion des larves telles que d´efinies th´eoriquement par les noyaux de dispersion, (3) les densit´es et les origines des recrues, leur origine ´etant symbolis´ee par la couleur respective des populations A, B, C et D, et (4) les ´echanges entre sous-populations.

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A partir des matrices de connectivit´e ou de distance temporelle, un graphe de connec-tivit´e repr´esentant la connectivit´e de la m´etapopulation peut ˆetre construit (Treml et al., 2008). Dans ce graphe, les populations sont repr´esent´ees par des nœuds, reli´ees par des fl`eches orient´ees repr´esentant la dispersion d’individus d’une population vers une autre et dont l’´epaisseur est proportionnelle `a l’intensit´e des ´echanges larvaires (Figure I.18). Selon la th´eorie des graphes, le nombre de populations (nœuds) est appel´e ordre du graphe, tandis que le nombre total de fl`eches est appel´e taille du graphe. Des analyses de graphe peuvent ensuite permettre de d´ecrire les patrons spatio-temporels de la connectivit´e, d’identifier pour chaque population ses populations voisines (receveuses et ´emettrices), et de pr´edire d’´eventuels chemins de dispersion (Newman, 2003).

Figure I.18 – Graphe de connectivit´e, d’apr`es Treml et al. (2008). Les nœuds du graphe repr´esentent les diff´erentes populations locales d’une m´etapopulation. Les fl`eches orient´ees indiquent la dispersion d’individus d’une population vers une autre et l’´epaisseur des fl`eches est proportionnelle `a l’intensit´e des ´echanges larvaires. Dans cet exemple, le graphe est d’ordre 6 et de taille 11 (6 nœuds, 11 fl`eches).

I.4.7 Quelles sont les ´echelles spatio-temporelles de la connectivit´e ?

Les ´echelles spatiales et temporelles auxquelles la dispersion et la connectivit´e s’effectuent sont au centre de l’´etude des m´etapopulations marines (Cowen et Sponaugle, 2009; Pineda et al., 2007).

Des ´echelles temporelles croissantes, associ´ees `a des degr´es de complexit´e croissants, peuvent ainsi ˆetre d´efinies en fonction de l’objet d’´etude (Figure I.19) :

– l’´echelle temporelle du comportement individuel, incluant le comportement de ponte des adultes, les comportements de nage des larves, le comportement de s´edentarisation des larves, et les migrations post-larvaires,

– l’´echelle temporelle du transport larvaire r´esultant de l’interaction entre le compor-tement larvaire et les processus physiques de transport,

– l’´echelle temporelle de la dispersion int´egrant les processus de ponte, de transport, de survie larvaire et de s´edentarisation,

– l’´echelle temporelle de la connectivit´e non reproductive int´egrant les processus de dispersion et de survie post-larvaire jusqu’au stade d’adultes matures,

– l’´echelle temporelle de la connectivit´e reproductive, i.e. dispersion efficace, int´egrant les processus de connectivit´e et de reproduction des jeunes recrues.

Figure I.19 – Les diff´erentes ´echelles temporelles de la dispersion et de la connectivit´e, associ´ees `a des degr´es de complexit´e croissants.

D´efinir les ´echelles spatiales de ces diff´erents processus demeure plus difficile. L’´echelle spatiale du comportement individuel est de l’ordre du milim`etre au centim`etre, par exemple avec des vitesses verticales de nage de quelques mm.s-1pour les larves d’invert´ebr´es (Chia et al., 1984). Les processus de transport, de dispersion larvaire et de connectivit´e se d´eroulent sur des ´echelles spatiales similaires, du m`etre `a la centaine de kilom`etres. En effet, Cowen et al. (2006) ont d´emontr´e que la dispersion larvaire chez les poissons r´ecifaux des Cara¨ıbes pouvait ˆetre observ´ee `a des ´echelles allant de la dizaine `a la centaine de kilom`etres. En s’appuyant sur une ´etude comparative des distances de dispersion estim´ees sur la base de donn´ees g´en´etiques pour de nombreux taxons marins, Kinlan et Gaines (2003) puis Gaines et al. (2007) ont estim´e des distances de dispersion r´ealis´ee s’´echelonnant du m`etre au millier de kilom`etres chez les invert´ebr´es marins. Une distance modale plus grande est observ´ee pour les poissons alors qu’elle est plus restreinte pour les algues (Figure I.20). En revanche, l’´echelle spatiale de la connectivit´e reproductive peut ˆetre inf´erieure `a l’´echelle spatiale de la connectivit´e non reproductive, en particulier en limite d’aire de distribution des esp`eces.

Figure I.20 – Distances moyennes de dispersion des propagules (i.e. spores ou larves) estim´ees pour plus de 100 esp`eces d’oganismes marins `a partir de donn´ees de distance g´en´etique. D’apr`es Gaines et al. (2007) et Kinlan et Gaines (2003).

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Etant donn´e la complexit´e de ces diff´erentes ´echelles spatio-temporelles, l’´etude de la dispersion et de la connectivit´e regroupe plusieurs disciplines op´erant `a diff´erentes ´echelles spatio-temporelles (Figure I.21). `A des ´echelles spatio-temporelles croissantes d’´etude, on peut ainsi distinguer :

– l’´etude de la physiologie larvaire, `a l’´echelle de l’individu,

– les ´etudes comportementales, `a l’´echelle d’un ou plusieurs individus, – la dynamique des populations, `a l’´echelle des populations locales,

– la biologie et l’´ecologie des m´etapopulations, `a l’´echelle des m´etapopulations, – la biologie de la conservation, de l’´echelle locale `a l’´echelle r´egionale,

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