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CONNAISSANCES DES PROCESSUS D'OXYGENATION SUR LES TROIS ESTUAIRES ET MISE EN EVIDENCE DES FACTEURS FORÇANTS MAJEURS

PUBLICATIONS ISSUES DU PROJET BEEST

C. CONNAISSANCES DES PROCESSUS D'OXYGENATION SUR LES TROIS ESTUAIRES ET MISE EN EVIDENCE DES FACTEURS FORÇANTS MAJEURS

1. Des processus d'oxygénation semblables sur les 3 estuaires

Le traitement des données issues des réseaux de suivis en continu mis en place sur les estuaires de la Gironde (MAGEST), de la Loire (SYVEL) et de la Seine (suivi par le GPMR) confirment que ces trois estuaires sont régis par des processus semblables régissant l'oxygénation des eaux et les phénomènes d’hypoxie. En revanche, la morphologie des différents estuaires ainsi que le niveau de pressions anthropiques qu'ils subissent font que la durée et les zones concernées par des déficits en oxygène sont très différentes.

Figure 3 : Evolution de l’oxygénation des eaux (en haut) et de la turbidité (en bas) à Bordeaux en 2006 (valeurs moyennes par heure) données MAGEST

Quel que soit l'estuaire considéré, l'analyse des données haute fréquence permet de localiser les zones de déficits fréquents en oxygène et d'en identifier les causes. On observe une cyclicité de l'oxygénation des eaux à différentes échelles temporelles (Figure 3) : (1) une variabilité saisonnière, (2) une variabilité à l'échelle du cycle mortes-eaux/vives-eaux à débits quasi-constants et (3) une variabilité infra-journalière au rythme du cycle de marée cemi-diurne.

Ces variabilités permettent de cerner l’apparition et la durée des phases de sous-oxygénation. Dans la majorité des cas, celles-ci apparaissent en période estivale autour des basses mers.

Figure 4 : Zoom de l’évolution de l’oxygénation des eaux (moyenne par heure) à Bordeaux en 2006 sur deux périodes critiques lors de l’étiage (10 au 24 juillet et 02 au 20 septembre 2006)

Par exemple, en Gironde, en période estivale (Figure 4), la température de l'eau est relativement élevée ; les faibles débits fluviaux favorisent la remontée et la permanence du bouchon vaseux en amont ; le renouvellement des eaux autour de Bordeaux est moindre, surtout vers les marées de mortes-eaux ; la ré-aération des eaux par agitation est faible (courants ralentis autour des basses mers) et, enfin, les apports organiques des effluents du complexe urbain de Bordeaux dans la Garonne sont moins bien dilués. La conjoncture de tous ces événements cause, à ces moments là, une baisse significative de la concentration en oxygène autour de ce site, plusieurs heures par jour, avec une durée croissante lorsque les coefficients de marée baissent.

Les causes majeures des déficits en oxygène sont alors : la température élevée des eaux;

la présence de zones urbaines et industrielles de grande ampleur, qui constituent des sources potentielles d'apports en charges organiques potentiellement très dégradables;

les oscillations limitées des masses d’eaux et leur faible renouvellements en étiage, du fait de leur relatif blocage en amont

la présence du bouchon vaseux connu pour ses caractéristiques de « réacteur biochimique », où toute fraction organique biodégradable se minéralise par processus bactériens (cas du phytoplancton et de la matière organique associée aux effluents).

2.Des spécificités estuariennes impliquant des réponses différentes à des pressions variables Même si les processus physico-chimiques observés dans les estuaires de la Gironde, de la Loire et de la Seine sont semblables, chaque estuaire a des spécificités hydro-morpho-sédimentaires qui conditionnent leur

réaction face à une perturbation. Par ailleurs, chacun d'entre eux ne subit pas le même degré de pression anthropique, qui est fonction des usages des bassins.

L'estuaire de la Gironde est caractérisé par une intrusion marine prononcée et par une érosion forte des sols des bassins versants de l’amont. La turbidité y est donc élevée, associée à de longs temps de résidence des eaux et des MES. En période d’étiage, le bouchon vaseux remonte très en amont, où il est plus étalé et concentré du fait de la réduction des sections des fleuves. Par ailleurs, les pressions anthropiques sont relativement faibles aussi bien à l'échelle du bassin hydrographique qu'à celle de l'estuaire, hormis les environs de l’agglomération bordelaise et ses apports de matériels organiques dégradables associés aux effluents. L'estuaire de la Gironde connaît donc ses déficits récurrents d’oxygénation des eaux en période d'étiage aux environs de Bordeaux.

Avec une intrusion marine moins prononcée et un bassin versant amont moins érosif, l'estuaire de la Loire est caractérise par un bouchon vaseux moins turbide, qui stationne le plus souvent dans l’estuaire central. Mais, le fleuve Loire reçoit d’importants apports de sels nutritifs, dûs à une pression agricole forte sur les bassins versants de l’amont. Des blooms algaires fréquents et relativements longs se produisent en milieu fluvial et sur les zones estuariennes intertidales. Le matériel dégradable ainsi produit, consomme beaucoup d’oxygène lors de sa minéralisation dans les eaux turbides de l’estuaire. Ainsi, dans l'estuaire de la Loire, les déficits sont surtout observés au niveau du bouchon vaseux, le plus souvent dans l’estuaire central. Si l’étiage est très prononcé, le bouchon vaseux remonte en amont de Nantes, où il peut stationner plus ou moins longtemps.

Des taux « records » de sous-oxygénation des eaux sont alors enregistrés du fait de la présence cumulée de matériels organiques phytoplanctoniques et anthropiques qui se dégradent rapidement.

Pour l'estuaire de la Seine, l’intrusion marine est bien moindre que pour les deux autres estuaires, et l’érosion des sols des bassins versants est estimée comme très réduite. Par comparaison, le bouchon vaseux est peu développé et peu turbide, et se situe de façon quasi permanente très en aval de l’estuaire. Le niveau de pression anthropique subi est en revanche trs élevé : agglomération parisienne en zone fluviale amont, agglomération de Rouen plus en aval, nombreuses activités industrialo-portuaires et agricoles présentes le long de l'estuaire. Ces facteurs sont à l'origine d'apports nutritifs très conséquents, responsables de développements algaux, et d’apports massifs de matières organiques dégradables, qui entraînent des hypoxies et même des anoxies chroniques en aval de Rouen, où les eaux sont soumises à des oscillations amont-aval de faible amplitude en période d’étiage. L'estuaire de la Seine, le plus touché des trois, connaît donc des déficits chroniques sévères de la Bouille en aval immédiat à Rouen jusqu'à Caudebec-en-Caux en amont du bouchon vaseux.

D. PERTINENCE DES SEUILS DE QUALITE PHYSICO-CHIMIQUE DEFINIS DANS LE CADRE DE LA DCE