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Chapitre 2. Des données aux connaissances pour l’étude de l’état de

2.5. Connaissances du domaine: interprétation d’informations

2.5.1. Intégration des connaissances métiers

Le domaine de la conservation fait graviter un nombre important d’experts pour un objectif commun : suivre l’état de l’édifice patrimonial en donnant du sens aux phénomènes complexes d’altérations. La connaissance métier est, par définition, une connaissance définie collectivement mettant en place des compétences et savoir-faire. La collecte et le croisement d’information permettent dans le meilleur des cas de définir des connaissances générales sous forme d’ouvrages présentant des résultats et des interprétations (rapports d’analyses, articles de journal scientifiques, livres, etc.). Afin d’obtenir de tels ouvrages, les experts doivent nécessairement passer par des phases d’observation scientifiques. Ces ouvrages doivent être croisés pour obtenir des savoirs au sujet des phénomènes spécifiques étudiés et en ressortir une stabilité dans la façon de les identifier. Afin que ces phénomènes et leurs mécanismes soient partageables, il est primordial de créer consensuellement des termes pour les reconnaître et pour communiquer. Ces termes font partie de ce que l’on appelle : le

vocabulaire contrôlé du domaine d’étude (section 4.3.1.1.). Il doit rester immuable [Gruber T.

R., 1993]. Dans le but de bien comprendre leur signification, chaque terme du domaine doit être défini précisément dans un glossaire par la communauté scientifique. Ces termes peuvent être considérés comme des connaissances explicites. Une connaissance n’est pas l’exactitude de la réalité, mais elle est le résultat d’une mûre réflexion sur un phénomène. Le glossaire est

82 le support principal utilisé pour exprimer les connaissances d’un domaine. Un glossaire est défini comme étant « un recueil de gloses, c'est-à-dire de termes étrangers ou rares associés à leurs définitions, et centré sur un domaine dont il détaille les termes techniques spécifiques » [Larousse].

Les différents glossaires, présentés par la suite, ont acquis une crédibilité en termes de connaissances de références dans le domaine, via leur construction avec la participation d’une communauté scientifique pluridisciplinaire. Le glossaire est donc le résultat d’un travail consensuel, transcrivant les connaissances partagées d’un domaine d’expertise. Ils constituent une base nécessaire pour créer des ontologies de domaine car permettent un gain de temps en termes de modélisation (section 4.3.1.1.). Certains d’entre eux ne renferment pas seulement une liste de termes définis mais propose également une structuration hiérarchique proche de la taxonomie et du thésaurus. Une taxonomie est définie comme une liste de termes contrôlés organisés de façon hiérarchique. Le thésaurus quant à lui, est constitué de ce même réseau de termes mais qui est enrichi par des relations associatives pré- définies (section 4.3.1.1.1.).

2.5.1.1. ICOMOS : le glossaire illustré des formes d’altérations de la pierre

Ce document a été réalisé afin de lister les différentes formes d’altérations de pierre existantes sur les structures maçonnées. Il est décliné en plusieurs langages montrant l’investissement international et la volonté de formaliser des connaissances dans un ouvrage commun [Verges-Belmin V., 2008].

Ce glossaire est composé de six familles d’altération ou groupe ayant les mêmes caractéristiques générales et comporte chacun de deux à onze termes : les termes généraux, fissure et déformation, détachement, figures induites par une perte de matière, altération chromatique et dépôt, et colonisation biologique (Figure 63).

83 Figure 63 : Structuration des termes en famille du glossaire ICOMOS.

Chaque terme est également accompagné :

- D’images constituant des instances qui les illustrent dans différents contextes. - De propos illustrant les relations de la forme d’altération avec le substrat (la pierre), - De termes équivalents existants dans d’autres glossaires,

- D’une liste de sous-termes, - De termes à ne pas confondre,

- De remarques concernant par exemple des interactions physico-chimiques connues. Chaque figure d’altération possède une description phénoménologique basée sur une analyse visuelle. Cependant, certaines altérations, comme « Dégât mécanique », qui regroupent « traces d’impact », « rayures », « figures », « abrasion » sont manifestement liées à des causes particulières et évidentes. Une classification de terme a également été définie concernant des altérations superficielles : « Figures induites par une perte de matière ». Ils décrivent des surfaces abîmées, même si le phénomène a été connu comme étant inactif lors de l’observation de la figure.

Par exemple, une surface présentant une forme d’ « alvéolisation » peut être active, auquel cas sa surface présentera une « désagrégation granulaire » ou une « desquamation », mais elle peut être aussi inactive, donc elle aura tendance à se noircir (par d’autres phénomènes d’altération), car la pierre ne perd plus de matière à ce stade. Il en va de même pour la forme « érosion » et « colonisation biologique », car une surface qui s’est préalablement érodée

84 peut ultérieurement être colonisée par des végétaux. Par ailleurs, certaines altérations montrent un état de surface qui résulte de la combinaison simultanée ou successive de plusieurs mécanismes de dégradation [Verges-Belmin V., 2008].

Le glossaire ISCS ne contient que des termes relatifs à la pierre en tant qu’élément d’un mur, ou en tant que sculpture.

2.5.1.2. EWAGLOS : glossaire illustré européen des termes de la conservation pour les peintures murales et surfaces architecturales

Ce glossaire, dédié à la collecte des termes de références dans le domaine de la conservation notamment des peintures murales et surface architecturale, a été édité sous le même principe que l’ICOMOS [Weyer, A., 2015]. La mobilité des spécialistes de la conservation et les appels d’offres au niveau européen augmentent à la même vitesse que l’intérêt du public envers leur patrimoine culturel et en termes de mesures prises pour les préserver. Étant donné une communication encore difficile à cause d’une terminologie non-standardisée en Europe et un manque de dissémination, un glossaire richement illustré a été réalisé par sept pays différents disposant de patrimoine varié. Cet ouvrage inclut au même titre que l’ICOMOS, des photographies et des esquisses accompagnées de textes concis et des illustrations démonstratives désignées spécifiquement pour permettre au lecteur de comprendre le terme qu’il rencontre malgré la barrière des langues. Le nombre de termes (environ 220) est également divisé en différentes familles. Chaque famille a été assignée à un groupe de recherche considéré comme responsable pour fournir l’ensemble des pré-requis afin que le terme soit intégré dans le glossaire. Ceci passe bien évidemment par des observations scientifiques en croisant les différentes ressources produites.

2.5.1.3. Architecture : description et vocabulaires méthodiques

Le glossaire de l’architecture est un ouvrage qui référencie les différents composants architecturaux existant, d’une part, dans les structures modernes et d’autre part, dans les structures de types maçonnerie [Pérouse de Montclos J. M., 2004]. Le domaine de la description est défini comme exact dans certains domaines des sciences notamment les sciences de la nature. Cependant, dans l’archéologie monumentale et en histoire de l’architecture, qui tendent à se confondre avec des valeurs littéraires, la description n’a pas de valeur scientifique. Toutefois par l’intermédiaire de dessin de restitution et de définition, il est possible de réaliser une littérature pertinente afin de donner la possibilité à l’expert de décrire un bâtiment complexe dont les composants, aux dimensions et aux proportions (morphologie) variées, sont représentés dans ce glossaire. Celui-ci a été rédigé en prenant en compte toutes les avancées méthodologiques de la renaissance jusqu’à aujourd’hui.

La définition du vocabulaire présentée ne s’appuie que sur des différenciations morphologiques dépendantes de toute qualification historique. Par exemple, la définition du terme « tour-lanterne » ne fait pas état de fait que ce mot, inventé par un architecte

85 spécifique, n’est employé que par les spécialistes de l’architecture médiévale. L’étude de l’architecture classique s’en trouve de fait à utiliser des expressions permettant de réduire les ambiguïtés d’un terme particulier. En outre, l’extension de chaque notion peut en effet renvoyer à une fonction. L’identification des formes doit précéder l’interprétation historique. Les styles disponibles dans cet ouvrage ne font que référence à des formes bien spécifiques. De la même manière, sa structure n’a pas préféré l’ordre alphabétique, mais davantage l’ordre méthodologique. Le regroupement des notions, propres aux différentes parties ou aux différents genres de l’architecture, permettent le passage de l’observation scientifique à l’identification et à la désignation. Ces groupes attirent l’attention sur les différentes corrélations existantes dont les connaissances sont la condition d’une mûre analyse.

De plus, une table est conçue pour faire référence à des synonymes, à des termes désuets, aux variantes orthographiques et sémantiques.

Ce glossaire se découpe en trois parties importantes, dont deux sur lesquelles nous nous intéressons davantage : « le vocabulaire commun à tous les édifices » et « le vocabulaire des différentes parties d’un édifice ».

Cette première partie est structurée en plusieurs chapitres, qui fournissent des connaissances générales sur le vocabulaire commun :

- Vocabulaire général - Les divisions

- Les constructions en pierre et en terre - Les constructions en bois et en fer

Dans une deuxième partie, appelée « le vocabulaire des différentes parties d’un édifice », nous retrouvons des termes relatifs à la morphologie et à la structure générale du bâti :

- Les fondations et sols,

- Le mur, le garde de corps et la clôture, - La baie,

- Le support et organe de stabilité, - Le couvrement,

- La couverture,

- Le décor d’architecture.

[Jacquot K. et al., 2015] a notamment utiliser ces connaissances afin de réaliser de la rétro conception de bâtiments à partir de données 3D d’acquisition.