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2.3 Confrontation du modèle

2.3.2 Confrontation aux expériences en laboratoire

Le modèle utilisé dans cette étude a déjà fait l’objet de comparaisons avec des expériences en laboratoire. Dans le cadre de l’article Mangeney et al., [2005], des étalements de colonnes granulaires en laboratoire ont servi de témoin pour évaluer le modèle. Les principaux résultats montrent que la distance maximale Lf des dépôts est fonction du rapport d’aspect initial a = Hi/Li, avec Hi la

hauteur initiale et Li le rayon initial de la colonne.

FIG. 2.14: Comparaison entre la simulation et une expérience d’effondrement de colonne Mangeney et al.,

[2005]. La morphologie des dépôts est ici correctement reproduite par la simulation pour un rapport d’aspect

a = 0.56.

Les expériences montrent également que, pour un tas de sable sec, il existe deux régimes contrô- lés par ce rapport d’aspect. Si a < 1 , la distance de parcours est une fonction linéaire de a. Si

a > 1, la distance de parcours est contôlée par une loi de puissance. Il semble que, dans ce second

cas, l’accélération verticale domine la phase de déstabilisation, alors qu’elle est négligeable lorsque que le rapport d’aspect a est inférieur à 1. Le modèle numérique utilisé ne prend pas en compte cette accélération verticale considérée négligeable face au gradient de pression vertical. D’autre part, l’hypothèse de couche mince n’est plus vérifiée dans le cas d’un rapport d’aspect élevé. Il n’est donc pas surprenant que le modèle ne reproduise pas correctement la dynamique de l’étalement de colonne pour de grands rapports d’aspect (typiquement a >> 1). À l’inverse, lorsque celui-ci est petit (a < 1), la dynamique et la géométrie des dépôts observées dans les expériences so nt correc- tement reproduites par le modèle (Figure2.14). Il existe ainsi un domaine de validité du modèle au regard du rapport d’aspect initial. Heureusement, les exemples naturels se trouvent, dans une très large proportion, dans ce domaine de validité.

Le Chenal 3D d’après Iverson et al., [2004]

Iverson et al., [2004] ont proposé une expérience d’effondrement de grains de sable le long d’un chenal irrégulier réalisée en laboratoire. Le modèle numérique de terrain, obtenu par scanner laser, a permis d’effectuer la comparaison avec la simulation numérique.

L’expérience modèle est constituée de trois parties : un réservoir en amont, le chenal lui-même placé entre 9,14 cm et 39,12 cm et un réceptacle en aval (figure2.15).

Les caractéristiques géométriques de cette topographie sont : – angle moyen de la pente dans le chenal : 31.6o,

– largeur de l’ouverture du réservoir : 12 cm, – X distance de l’ouverture : 8.858 cm,

– Localisation du revêtement d’urethane de x = 9.14 cm à x = 39.12 cm

– le prisme triangulaire du réservoir s’étend sur la largeur totale du modèle et atteint une hauteur de 4,35 cm au niveau de l’ouverture. L’épaisseur maximale de la masse h0 = 4, 35 cm.

Un revêtement d’uréthane a été placé au niveau du chenal et du formica a été utilisé pour le réservoir et le réceptacle. La friction basale n’est donc pas homogène sur l’ensemble du domaine de l’expérience. Les angles de friction basale calculés dans l’expérience sont de 23.45opour le formica

et 19.85opour l’uréthane [Iverson et al., 2004].

Un ajustement du modèle numérique a été effectué pour prendre en compte ces variations de friction. Aussi, pour les besoins de la simulation, le modèle numérique de terrain a été interpolé avec un pas d’espace ∆x = ∆y = 1.10−3 m soit une grille de 562 × 201 points.

Plusieurs simulations ont été réalisées. Les meilleurs résultats ont été obtenus avec un angle de friction de 26o pour le réservoir et le réceptacle et de 23o pour le chenal (figure 2.16). Comme

pour l’effondrement de colonne, le modèle à besoin d’angles de friction plus élevés (+ 3o) que ceux

mesurés en laboratoire pour obtenir la bonne dynamique.

Cependant, la masse est déposée jusqu’à la sortie du chenal dans les expériences, alors qu’elle ne s’y dépose pas dans la simulation (Figure 2.17-(9)), la hauteur maximale des dépôts est bien reproduite par le modèle (Figure2.17-(10)).

L’analyse du champ de vitesse au niveau du réservoir permet de comprendre la dynamique et la forme des dépôts en amont à la fin de l’expérience (Figure2.18). En particulier, on observe sans

FIG. 2.15: Chenal irrégulier expérimental. La masse (ici en couleur) est initialement placée dans un réservoir

en amont du chenal. Le réceptacle et le réservoir sont revêtus de formica. Le chenal est réalisé en uréthane.

surprise que la vitesse est très faible au niveau des dièdres (coins derrière le mur du réservoir). À l’inverse, la vitesse maximale est observée au centre de l’ouverture. La purge s’effectue donc axialement d’où la forme en "V" obtenue dans l’expérience et dans la simulation (Figures2.17-(6,8) et 2.18). Très rapidement (t = 0.7 s), la vitesse dans les deux coins devient nulle. Ainsi un dépôt triangulaire s’y forme à chaque coin (2.17-(8) et2.18).

FIG. 2.16: Comparaison entre simulation numérique (en haut) et expériences (en bas) à différents pas de

temps. Morphologiquement, les structures observées dans les expériences sont bien reproduites par le modèle. La distribution de la masse est similaire dans les deux cas et, ce, à différent pas de temps. Ceci illustre que la dynamique simulée n’est pas éloignée de celle observée en laboratoire.

Le modèle numérique SHALT OP s’est montré capable de reproduire la dynamique et la géo- métrie des dépôts observés dans les expériences de laboratoire. Les meilleurs résultats sont obtenus

FIG. 2.17: Agrandissements sur les comparaisons entre expériences et simulations de la figure2.16. (a) Pour

t = 0.30s dans l’experience et t = 0.22 s dans la simulaton, 1 : le modèle est en mesure de reproduire la

séparation observée dans les expériences, 2 : les morphologies des bordures de la masse en écoulement sont très similaires dans les deux cas ; 3 : la géométrie concave vers l’aval est également bien reproduite. (b) pour

t = 2.81 s dans l’expérience et t = 2.89 s dans la simulation, 4 : morphologie aux bords bien reproduite ; 5 :

la masse est divisée en deux chenaux, 6 : alors que le réservoir est presque purgé dans l’expérience, il reste encore un peu de masse dans la simulation ; (c) pour t = 8 s (dans les deux cas) en amont du domaine, la répartition de la masse est bien reproduite dans le réservoir (8) et à la sortie (7), (d) en aval du domaine, la masse est dé posée jusqu’à la sortie du chenal dans les expériences, alors qu’elle ne s’y dépose pas dans la simulation (9), la hauteur maximale des dépôts est bien reproduite par le modèle (10).

avec des angles de friction supérieurs à 3o par rapport aux valeurs mesurées dans les expériences.

En outre, nous avons observé des décalages temporels entre simulations et expériences. Le modèle a tendance à être plus rapide lors de la phase initiale de déstabilisation de la masse pour t ∈ [0, 30]s (Figures 2.16 et 2.17). Pendant la phase de propagation le modèle en revanche se montre légère- ment plus lent que les expériences t ∈ [0.30, 8.00]s (Figures 2.16 et 2.17). La surestimation des vitesses simulées dans la phase initiale d’étalement est également observée dans le cas d’étalement de colonnes granulaires sur un plan horizontal [Mangeney-Castelnau et al., 2005] et a été interprétée comme étant liée à l’accélération vert icale qui est négligée dans les modèles de couche mince. Il est néanmoins intéressant d’observer que le temps écoulé pendant l’effondrement observé dans les expériences est correctement reproduit par le modèle.

Le modèle reproduit correctement les expériences avec des angles de friction raisonnables. Quand est-il avec des exemples naturels, objets de notre étude ?

FIG. 2.18: (à gauche) Évolution de la masse. Épaisseur minimale représentée hmin = 0.0005 m, (à droite) et