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3 aux multiples effets

PARTIE 1 : Les régulations de Hug

4. Confirmation par résonance magnétique nucléaire

Les prédictions in silico laissent présager la présence d’une hélice en partie N-terminale et les données de dichroïsme circulaire semblent montrer la présence d’une petite zone structurée. Dans le but d’étudier la structure secondaire de Hug1 nous avons alors décidé d’initier des analyses par résonance magnétique nucléaire.

4.1. Principe et applications

La résonance magnétique nucléaire (RMN) est un phénomène qui a lieu quand certains atomes sont mis en présence dans un champ magnétique fixe et qu’ils sont exposés à un second champ magnétique oscillant. Elle désigne une propriété de certains noyaux atomiques possédant un spin nucléaire (par exemple 1H, 15N, 13C…)(Canet, 1991). L’environnement dans lequel se trouve le noyau apporte un effet perturbateur. Cela conduit à une différenciation des fréquences de résonance en fonction de l’environnement électronique du noyau et donc de la nature du groupement chimique auquel il appartient.

Cet effet est nommé déplacement chimique et s’exprime en parties par million (ppm) (Canet, 1991).

A côté de la diffraction aux rayons X, la RMN est devenue une méthode d’étude des macromolécules biologiques en biologie structurale. Des protéines de masse moléculaire de 10 à 30 kDa peuvent être analysées ainsi que des oligonucléotides de plusieurs dizaines de paires de bases. Et en plus la RMN donne accès à certaines informations non accessibles en cristallographie.

On peut réaliser différents types de spectres donnant des informations différentes sur la protéine. La RMN du proton (1H) permet d’évaluer rapidement la faisabilité de son étude structurale par RMN.

La RMN bidimensionnelle 1H 15N, pour la plus simple de type HSQC (Heteronuclear Single Quantum Coherence), permet de corréler, pour chaque groupe amide, les fréquences des noyaux d’hydrogène et d’azote. La carte ainsi obtenue est souvent qualifiée d’empreinte caractéristique de la structure protéique considérée. C’est en particulier le type de spectre utilisé pour explorer les interactions intermoléculaires à partir d’un titrage de la protéine marquée au 15N avec un partenaire non marqué. La variation des déplacements chimiques indique la formation d’un complexe et l’identification des résidus dont les fréquences sont affectées permet de déterminer les régions d’interaction.

Pour finir la RMN tridimensionnelle 1H 15N 13C permet la détermination de la structure d’une protéine et elle est basée sur l’évaluation des distances moyennes entre les protons de la protéine. L’attribution complète des déplacements chimiques du squelette peptidique permet de connaître précisément la structure secondaire d’une protéine. En effet les déplacements chimiques de certains noyaux sont des indicateurs de structure secondaire.

4.2. Une protéine totalement désordonnée

La protéine que nous étudions est de petite taille ce qui est un prérequis pour réaliser des expérimentations en RMN. Pour réaliser ces expériences il a fallu marquer notre protéine avec de l’azote lourd 15N comme décrit dans la section « Matériels et méthodes ». Ayant dû changer de milieu de culture pour le marquage des protéines, nous avons rencontré des difficultés à produire Hug1 en grande quantité. Les bactéries transformées avaient une faible croissance dans le milieu synthétique M9. Nous avions un rendement de l’ordre de 10% de

ce que nous étions capables de produire en Magic Media. Ainsi nous n’obtenions que 30μM de protéines alors que la limite basse pour les expériences de RMN est de 10μM. Dans un premier temps nous avons augmenté le volume de production en passant de 1 à 4L de culture, mais ceci n’a pas augmenté considérablement la concentration de protéines obtenues à la fin des étapes de purification (de l’ordre de 40-50µM). Après un dernier test infructueux de changement de protocole de préparation du milieu M9, nous avons choisi d’utiliser un milieu riche commercial (ISOGRO) et avec seulement 200mL de culture, nous sommes parvenus à produire la protéine Hug1 à une concentration de 60µM. Une fois la protéine marquée produite, nous avons réalisé les premières étapes de purification jusqu’au clivage à la protéase TEV inclus et la purification Ni-NTA. Après cette étape, les contaminants restants étant de grande taille et donc non visibles en RMN, nous nous passons de l’étape de purification sur une échangeuse d’ions.

Nous avons alors pu initier, en collaboration avec l’équipe de Françoise Ochsenbein, les analyses par RMN. Sur le spectre obtenu en deux dimensions (spectre HSQC) nous couvrons la totalité des résidus constituant Hug1, plus ceux présents dans le site de clivage à la TEV. Le profil du spectre ne laisse présager aucune structure secondaire (Figure III11). Ce dernier est plutôt ramassé sur lui-même signe que la protéine est désordonnée (Tompa, 2009).

Ainsi, les approches in silico nous ont permis de proposer une hypothèse quant à la structuration de Hug1, hypothèse qui a été confirmée par la suite par des approches expérimentales. Nous avons donc pu montrer que Hug1 fait bien partie de la catégorie des protéines intrinsèquement désordonnées.

Nous avons initié des analyses en trois dimensions afin d’attribuer les pics obtenus. Pour se faire il faut marquer Hug1 ; à la fois avec du carbone 13C et de l’azote 15N. Nous avons également utilisé du milieu commercial pour nous placer dans les conditions les plus proches de ce que nous avions fait précédemment. Là encore les bactéries transformées avec His6-

GST-Hug1 avaient une croissance lente, mais au final nous sommes quand même parvenus à purifier suffisamment de protéine Hug1 (environ 70µM) pour réaliser les analyses en trois dimensions. Ainsi nous avons pu initier de multiples spectres tridimensionnels (HNCA, CBCA(CO)NH, HNCO, HBHA(CO)NH, NOESY-HSQC, DIPSIHSQC (ou TOCSY-HSQC), HN(CA)CO) afin de pouvoir attribuer les pics (attribution réalisée en collaboration avec Nicolas Richet et Françoise Ochsenbein du LBSR au CEA Saclay).

Figure III 11 : Spectre HSQC de Hug1 marqué au 15N et attribution.

Le spectre bidimensionnel est obtenu à partir de protéine recombinante Hug1 purifiée et analysée sur un spectromètre Brucker 700MHz. Puis les données d’attributions, réalisées à partir de spectres tridimensionnels, ont été transférées ce spectre 2D. Les résidus correspondant à Hug1 sont numérotés de 1 à 68. Les résidus -1 à -4 correspondent aux acides aminés restant après la coupure à la TEV.

A partir de cette attribution, les indices de déplacement chimiques ont été calculés. Ces indices nous permettent d’avoir accès à la structure secondaire de la protéine (Figure III12).

Figure III 12 : Indice de déplacement chimique des Hα, CO et Cα de Hug1 (d’après les données 3D)

Les indices de déplacement chimiques sont calculés à partir des analyses tridimensionnelles. Ils permettent de définir les structures secondaires présentes dans la protéine. Les structures secondaires identifiées sont reportées en haut du schéma. Les valeurs calculées sont faibles et suggère que les hélices identifiées ne sont pas structurellement stables.

Dans notre cas, nous observons la présence d’une pseudo hélice du résidu D15 à T36 (car les valeurs des déplacements chimiques sont faibles, donc elle n’est pas structurellement stable). La localisation de la pseudo hélice majoritaire correspond à peu près à ce qui était proposé lors des analyses in silico (voir paragraphe 1).