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Conditions d’existence

III. LE POLYMORPHISME 1. Introduction

III.2. Conditions d’existence

III.2.1. Quelques rappels thermodynamique

Pour expliquer l’origine du polymorphisme (BOISTELLE, KLEIN et al. 1996), on peut considérer les variétés d’un système polymorphique comme des phases homogènes susceptibles d’intervenir dans un équilibre. L’état d’équilibre d’un système physico-chimique

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ouvert ou fermé peut être décrit par les valeurs des paramètres intensifs que sont les fractions molaires des constituants, la température et la pression du milieu. L’expérience montre, cependant que tel ou tel de ces paramètres peut évoluer dans une gamme numérique plus ou moins large sans que le système en soit, pour autant nécessairement déséquilibré. La notion de variance, υ précise le nombre de facteurs qui, intervenant dans l’équilibre, peuvent varier sans le détruire. Cette grandeur υ est donnée par le théorème de Gibbs :

υ=c+2-ϕ (II.34) Où c est le nombre de constituants dits indépendants c’est à dire les composants chimiques

dénombrées, diminuées du nombre de relations qui les lient et où 2 représente les deux variables indépendantes Température et Pression. ϕ est le nombre de phases.

Si on prend l’exemple de l’équilibre entre deux variétés solides A et B uniquement, il y a bien deux espèces mais il y a aussi une relation qui les unit, c’est la relation d’équilibre A↔B. Dans ces conditions, la variance du système vaut 1, le système est monovariant. Cela signifie par exemple qu’à pression atmosphérique l’équilibre est réalisé à une certaine température, appelée température de transition de phase.

D’un point de vue thermodynamique, on rappelle que si plusieurs phases cristallisent simultanément ou successivement en solution et coexistent temporairement, la seule phase stable est celle qui a l’énergie libre G la plus faible. Cette dernière est reliée à l’enthalpie H de la phase par la relation (II.35):

G = H-TS (II.35)

Où T est la température considérée et S l’entropie de la phase.

On peut alors établir les relations suivantes (II.36 et II.37) pour des formes cristallines A et B mais aussi pour la phase fondue.

Gl = Hl-TSl (II.36)

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Où GA, GB et Gl sont respectivement les énergies libres des phases cristallines A et B et de la phase fondue. Lorsque l’énergie libre de la phase cristalline est égale à l’énergie libre de la phase fondue, une transition de phase a lieu, il s’agit de la fusion. On définit alors en ce point une température Tf fixe du diagramme unaire.

Dans un système où il n’y a pas de phase vapeur et où la pression est constante, le positionnement relatif des courbes de l’énergie libre des phases cristallines en fonction de la température définit alors les deux systèmes polymorphiques suivants : Monotropie et Enantiotropie (GIRON 1995).

III.2.2. Monotropie

Le terme « monotropie » vient du grec mono « seul », « unique », et tropos « direction ». Dans le cas de la monotropie (fig.2.7(a)), la forme B est métastable par rapport à A, la transformation B vers A est irréversible pour chaque température inférieure à TBf dans le diagramme unaire. La courbe GA ne coupe pas la courbe GB avant la fusion, le système est dit monotropique.

Dans un diagramme de phases binaire, concentration de soluté en fonction de la température de la solution (soluté dissous dans solvant), un système est dit monotropique si les deux courbes de solubilité des deux polymorphes ne se croisent pas (fig.2.7(b)). Un seul polymorphe est stable dans le domaine de température, la transformation de la phase instable en phase stable est alors irréversible.

Lorsqu’on considère un système binaire, soluté-solvant par exemple, le solvant va agir sur la cinétique des transformations de phases des polymorphes, en revanche la nature monotropique du système est inchangé par rapport au diagramme unaire.

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(a) (b)

Figure 2.7 : (a) Diagramme Energie-Température dans le cas d’un système monotrope (forme cristalline A, TfA température de fusion de la forme A, forme cristalline B, TfB température de fusion de la forme B, ∆HfA et ∆HfB sont les enthalpies de fusion des formes A et B). (b) Représentation schématique des courbes de solubilité d’un système monotropique dans un diagramme binaire Concentration-Température.

III.2.3. Enantiotropie

Le terme « énantiotropie » vient du grec enantios « opposé » et tropos « direction ». Dans le cas de l’énantiotropie (fig.2.8(a)), A et B sont stables chacune dans un domaine de température et le passage de A vers B (et inversement) est possible avec l’existence de la température de transition Tp inférieure à la température de fusion dans le diagramme unaire. Dans un diagramme de phases binaire, concentration de soluté en fonction de la température de la solution, si les deux courbes de solubilité des deux polymorphes se croisent à une température de transition Tp’ alors chaque polymorphe est stable dans un domaine de température, la transformation de l’une en l’autre est réversible (fig.2.8(b)). Tout comme le système monotropique, la présence de solvant n’agit que sur la cinétique des transformations de phases des polymorphes.

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(a) (b)

Figure 2.8 : (a) Diagramme Energie-Température dans le cas d’un système énantiotrope (même légende que la figure précédente avec Tp comme température de transition pour un diagramme unaire). (b) Représentation schématique des courbes de solubilité d’un système énantiotropique dans un diagramme Concentration-Température ou Tp’ est la température de transition de phase pour un diagramme binaire.

Burger en 1979 a déduit des diagrammes G = f(T) des règles intéressantes permettant de classifier un système polymorphique comme système monotrope ou énantiotrope. Il clarifiait ainsi les travaux de Tammann qui proposait déjà en 1913 des règles similaires basées uniquement sur des probabilités sans tenir compte de la nature des polymorphes.

III.2.4. Règles de Burger

La lecture des publications de Burger (BURGER and RAMBERGER 1979 ; BURGER and RAMBERGER 1979) met en évidence les règles et exceptions présentées en annexe 2.2. Le tableau II.1 est un résumé de ces règles thermodynamiques érigée dans le but d’aider à distinguer une transition monotropique d’énantiotropique lors de l’analyse thermique d’un polymorphe.

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Tableau II.1 :Règles thermodynamiques des transitions polymorphiques d’après Burger où A est la forme ayant la plus grande température de fusion (GIRON 1995).

Enantiotropie Monotropie

Transition (Tp) avant point de fusion de A

Transition (Tp) après point de fusion de A

A Stable > Transition (Tp)

B Stable < Transition (Tp) A est toujours le plus stable Transition réversible Transition irréversible Solubilité de A > à B avant Tp

Définitions du système

Solubilité de A < à B après Tp

Solubilité de A toujours inférieure à B

Transition B→A endothermique Transition B→A endothermique ∆Hfusion A < ∆Hfusion B ∆Hfusion A > ∆Hfusion B Peak IR de A avant B Peak IR de A après B Règles de Burger

Densité A < Densité B Densité A > Densité B

D’un point de vue expérimental, l’utilisation de l’analyse enthalpique différentielle (DSC) décrit dans le chapitre III, est particulièrement intéressante pour mesurer en particulier les températures et enthalpies de fusion des différentes formes afin de caractériser les systèmes en appliquant les règles de Burger. Les différents profils DSC (GIRON 1995) associés à la monotropie et à l’énantiotropie (annexe 2.3) montrent la difficulté d’interpréter correctement ces courbes parce que la thermodynamique et la cinétique jouent un rôle important dans le tracé des courbes.

Il devient donc intéressant de comprendre les conditions de formation des polymorphes.