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Même si l’Accord sur les ADPIC a permis de combler une grande part de l'espace politique ouvert aux pays en dé-veloppement sous les aauspces des traités de l'OMPI, il n’en contient pas moins des flexibilités dont les pays en développement peuvent s'inspirer pour l'élaboration de

leur propre régime de propriété intellectuelle. Les pays moins avancés, en particulier, bénéficient d'une période de transition prorogeable qu'il leur revient impérative-ment d’exploiter dans le but d’élaborer leur politique nationale de propriété intellectuelle. Celle-ci peut certes se trouver en deçà du niveau fixé par le règle-ment de la propriété intellectuelle des ADPIC mais, en fin de compte, les politiques doivent rester adaptables

aux besoins changeants de l'Afrique, et non seulement aux besoins des sociétés dans les pays développées.

Tous les pays africains – pays moins avancés et non-PMA confondus – doivent s'efforcer d'adopter des stratégies visant à optimiser l'espace politique dédié à l'agricultu-re, à la production manufacturière et à la santé publique et plus généralement l'accès au savoir, dans le respect des différentes normes de protection de la propriété in-tellectuelle et eu égard aux flexibilités accordées dans le cadre des ADPIC. Les pays africains doivent rester actifs afin d’opérationnaliser les deux objectifs (17.6 et 17.7) relatifs aux droits de propriété intellectuelle dans le cadre des Objectifs de développement durable.

Les pays africains sont présents au sein de l'OMC et de l'OMPI à Genève dans le domaine de la législation en matière de propriété intellectuelle, et la Déclaration de Doha sur l'Accord sur les ADPIC et la santé publique constitue l'un des rares exemples de leur réussite. À l'inverse, leurs initiatives en ce qui concerne le système mondial de propriété intellectuelle pour la protection du savoir traditionnel, qui sont des instruments de lutte contre la biopiraterie, n'ont pas encore porté leurs fruits.

Si les pays africains se sont montrés volontaristes en s’engageant en faveur du régime mondial de la proprié-té intellectuelle, ils ont quelque peu manqué d’exploiter la propriété intellectuelle pour valoriser l'innovation et la compétitivité afin d’impulser le changement structu-rel. Les dispositifs de coopération régionale en matière de politique de propriété intellectuelle, doivent être ré-formés. Ces dernières années, les institutions africaines chargées de la propriété intellectuelle — l'Organisation régionale africaine de la propriété intellectuelle et l'Or-ganisation africaine de la propriété intellectuelle— ont lancé des tentatives de collaboration, mais les liens avec les communautés économiques régionales (et par extension, les objectifs d'intégration) restent ténus. Sur le plan opérationnel, les liens de ces deux organismes avec les cadres politiques en matière de sciences, de technologie et d’innovation à l'échelle nationale, régio-nale et continentale méritent d'être renforcés, alors que leurs mandats portent plus sur l'attribution, l'examen et l'enregistrement des brevets que sur l'exercice des droits de propriété industrielle, limitant ainsi l'aide ap-portée aux États pour identifier et utiliser les flexibilités prévues par l’Accord sur les es ADPIC. De plus, l'Organi-sation régionale africaine de la propriété intellectuelle et l'Organisation africaine de la propriété intellectuelle Encadré 4.5.

Dépôt de brevets à des fins mercantilistes Dans son édition du 8 août 2015, The Economist a dé-noncé les abus en matière de brevets : « Les brevets sont supposés diffuser la connaissance en obligeant les titulaires à présenter leur innovation à tous ; ce n'est souvent pas le cas car les avocats spécialisés en droit des brevets sont passés maîtres dans l'art de semer la confusion. » Les pratiques de dépôt de brevets à des fins mercantilistes en sont une parfaite illustration.

Brevets abusifs. Les demandes de brevets qui ne reflètent pas une véritable innovation ont augmen-té de façon alarmante. Les titulaires cherchent au contraire à obtenir l'enregistrement de brevets sur des développements abusifs comprenant peu ou pas d'activité inventive, afin d'acquérir un avantage concurrentiel sur les marchés – le « renouvellement perpétuel » des brevets (Correa, 2014).

Brevets à validité douteuse. Cet effort est payant pour certains titulaires de droits de propriété intel-lectuelle car les procédures juridiques retardent l'en-trée sur le marché de concurrents potentiels. Près de 28 % des brevets actuels ont été déclarés non valides par les tribunaux américains (Correa, 2014).

Demandes divisionnaires de brevets. Il s'agit de demandes de brevets qui comprennent une partie d'un objet ayant été revendiqué dans une demande précédente («  parente  »). Étant donné qu'elles revendiquent la priorité par rapport à la date de dépôt d'une demande parente, elles répondent à l'exigence de nouveauté ou d'activité inventive. Elles peuvent être détournées afin de suspendre la déci-sion d'octroi d'un brevet sur de longues périodes, rendant très difficile pour les concurrents de savoir s'ils courent ou non le risque d'enfreindre un brevet (Correa, 2014).

sont largement dissociées des accords de libre-échange et d'investissement bilatéral avec des partenaires exté-rieurs.

Or, les deux initiatives actuelles de l'Union africaine — les négociations en vue de la Zone de libre-échange continentale et la création de l'Organisation panafri-caine de la propriété intellectuelle — représentent une chance de coordonner l'approche de l'Afrique en ce qui concerne la coopération régionale en matière de poli-tique de propriété intellectuelle. Ces deux initiatives devraient utiliser les mécanismes qui sont à leur portée pour sauvegarder les flexibilités prévues par l’Accord sur les ADPIC afin de répondre à leurs besoins de

dé-veloppement. Un accord de la Zone de libre-échange continentale sur la propriété intellectuelle pourrait constituer la base pour l’adoption d'une approche com-mune pour la négociation des règles de propriété intel-lectuelle dans les accords de commerce et d'investisse-ments avec des partenaires extérieurs. Une approche stratégique de la politique de propriété intellectuelle au niveau continent peut également servir de base pour la mise en commun des ressources, entre pays africains et communautés économiques régionales, pour mettre en place les importantes capacités nécessaires pour assu-rer la protection de la propriété intellectuelle.

Anne xe 4.1. Sta tut d ’adhésion des É ta ts afric ains aux tr ait és multila tér aux de pr opriét é in tellec tuelle

African statesWPBPCTPLTMIMMMPHGHNLIROLOIPCPHVCBPSNOSTLTWCTWPPTBEIJINGWASSGMARRAUNUOMC Algérie                  Angola                          Bénin                    Botswana                   Burkina Faso                   Burundi                          Cap-Vert                         Cameroun                         République centrafricaine                         Tchad                         Comores                          Congo                      Côte d’Ivoire                        République démocratique du Congo                         Djibouti                          Égypte          *    Érythrée                             Éthiopie                            Gabon                     Gambie                         Ghana                    Guinée                  Guinée-Bissau                         Kenya                   Lesotho                      Liberia                      Libye                          Madagascar                     

African statesWPBPCTPLTMIMMMPHGHNLIROLOIPCPHVCBPSNOSTLTWCTWPPTBEIJINGWASSGMARRAUNUOMC Malawi                      Mali                    Mauritanie                         Maurice                          Maroc             Mozambique                      Namibie                     Niger                       Nigeria                       Rwanda                     Sao Tomé et Principe                        Sénégal                     Seychelles                          Sierra Leone                        Somalie                             Afrique du Sud                       Soudan du Sud                              Soudan                        Swaziland                       Togo                  Tunisie               Ouganda                        Tanzanie                        Zambie                        Zimbabwe                        Note : B, Convention de Berne ; BEIJING, Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles ; BP, Traité de Budapest ; GH, Acte de Genève de l'Arrangement de La Haye ; H , Arrangement de la Haye ; IPC, Arrangement de Strasbour; LI, Arrangement de Lisbonne ; LO, Arrangement de Locarno ; MARRA, Traité de Marrakech visant à faciliter l'accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d'autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées ; MI . Arrangement de Madrid (Indications de provenance , MM, Arrangement de Madrid concernant l'enregistrement international des marques ; MP, Protocole de Madrid ; N, Arrangement de Nice ; NOS, Traité de Nairobi ; P, Convention de Paris ; PCT-Traité de coopération en matière de brevets ; PH, Convention phonogrammes ; PLT, Traité sur le droit des brevets ; RO, Convention de Rome; S, Convention de Bruxelles ; SG, Traité de Singapour ; TLT, Traité sur le droit des marques ; U , Convention UPOV ; UN, Nations Unies; VC , Arrangement de Vienne ; WAS , Traité de Washington ; WCT,WIPO Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur ; WPPT,WIPO Traité de coopération en matière de brevets ; WTO, Accords instituant l'Organisation mondiale du commerce. Source : Compilation des auteurs à partir de différentes sources de l'OMPI et de l'OMC.

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Chapitre 5

Les politiques de l’Afrique en matière de