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Conclusions et perspectives relatives au th`eme 1

2.2 Th`eme 1 – Corr´elation d’images et caract´erisation m´ecanique

2.2.5 Conclusions et perspectives relatives au th`eme 1

La corr´elation d’images, d´evelopp´ee `a partir des ann´ees 85-90, est maintenant devenue la technique de mesure de champs cin´ematiques certainement la plus utilis´ee pour la m´eca-nique des mat´eriaux, des structures et des proc´ed´es57. Son d´eveloppement dans les ann´ees 85-90 s’est poursuivi jusque dans les ann´ees 2000. Depuis, largement d´emocratis´ee, c’est son utilisation en tant qu’outil de mesure pour des probl`emes m´ecaniques qui est le plus rapport´ee dans la litt´erature. Son apparition dans l’industrie est un plus tardive, mais `a l’heure actuelle cette technique devient aussi incontournable dans les grands centres de R&D.

Il n’empˆeche qu’il reste plusieurs freins `a la diffusion de la m´ethode. Le premier frein demeure la confiance que l’on peut accorder aux r´esultats du mesurage, c’est-`a-dire les in-certitudes qu’il est raisonnable d’associer `a la mesure. Dans nos travaux, en lien avec ceux du GDR CNRS 2519, un certain nombre de r´esultats ont ´et´e mis en ´evidence concernant les erreurs d’appariement. Pour la st´er´eo-corr´elation, le moins qu’on puisse faire est d’estimer les incertitudes de mesure par d´eplacements de corps solides de l’´eprouvette dans la confi-guration de l’essai. Nous mettons aussi actuellement en place, pour la st´er´eo-corr´elation, etvia le GDR CNRS 2519, une ´etude de type benchmark exp´erimental ainsi qu’une ´etude

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a partir d’images synth´etiques st´er´eoscopiques contrˆol´ees. Cependant, comme nous l’avons d´ej`a soulign´e, il n’existe pas de protocole ni de norme qui permette de fournir, pour une configuration exp´erimentale donn´ee, une estimation des erreurs associ´ees aux mesures par corr´elation d’images. Il n’y a pas non plus de protocole ou de norme qui permette de garantir, pour une exp´erience donn´ee, une configuration mat´erielle et logicielle optimale, bien que sur ce point nous ayons quelques r´eponses. L’id´ee d’un guide de bonnes pratiques

´evoqu´ee presque d`es la cr´eation du GDR CNRS 2519 en 2003 reste donc d’actualit´e.

Le deuxi`eme frein concerne la limite du ratio r´esolution spatiale/incertitude de mesure des m´ethodes de corr´elation d’images, qui est moins favorable que celle des techniques extensom´etriques classiques qui font `a l’heure actuelle r´ef´erence. Comme c’est en pr´esence de champs h´et´erog`enes (donc en pr´esence de gradients de d´eformation) que ce type de mesure est n´ecessaire, il sera toujours d´elicat de mesurer de faibles niveaux de d´eforma-tions (typiquement pour des mat´eriaux h´et´erog`enes se d´eformant faiblement, comme les b´etons ou les composites) en garantissant une bonne description locale des ph´enom`enes (grande r´esolution spatiale). Une des r´eponses `a cette probl´ematique est qu’il est toujours possible (et souhaitable) d’adapter le champ de vue des cam´eras au couple r´esolution spa-tiale/incertitude de mesure souhait´e. C’est ce que nous d´eveloppons avec les approches multi-r´esolutions (ou multi-´echelles) : l’id´ee est d’utiliser plusieurs syst`emes de cam´eras dont le champ de vue est adapt´e `a chaque zone int´eressante `a mesurer sur la surface de l’´eprouvette. Les r´esultats sont ensuite exprim´es dans un r´ef´erentiel commun ce qui n´ecessite des proc´edures d’´etalonnage multi-cam´eras qu’il faut d´evelopper. Enfin, il faut

57. Elle est probablement aussi la plus appropri´ee des techniques photom´ecaniques, d’une part par sa simplicit´e (apparente), d’autre part parce qu’aux ´echelles les plus courantes de la m´ecanique des mat´eriaux et des structures (sup´erieures au centim`etre), le compromis r´esolution spatiale/incertitude de mesure est

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a peu pr`es satisfaisant. Bien qu’en corr´elation d’images la r´esolution spatiale soit th´eoriquement toujours ajustable par le syst`eme optique utilis´e, il faut garder `a l’esprit que les m´ethodes interf´erom´etriques, pour un champ de vue donn´e, sont mieux r´esolues que les m´ethodes de corr´elation[GH11].

2.2. Th`eme 1 – Corr´elation d’images et caract´erisation m´ecanique

garder `a l’esprit que les mesures par corr´elation d’images (et les mesures de champs de mani`ere g´en´erale) ne remplaceront jamais les techniques de mesures ponctuelles mais les compl´eteront. Il faut alors imaginer, en mˆeme temps que l’on con¸coit les essais, `a l’ins-trumentation qu’il faudra leurs fournir, typiquement des mesures ponctuelles (en surface mais aussi au cœur des ´eprouvettes), et des mesures de champs l`a o`u c’est pertinent d’avoir ce type d’information : la richesse des essais m´ecaniques viendra d’une part de la multi-instrumentation associ´ee et d’autre part de la conception optimis´ee de ces essais grˆace `a la simulation num´erique.

Le troisi`eme frein provient des difficult´es qui existent concernant le dialogue que l’on peut proposer entre les mesures de champs et les simulations num´eriques utilis´ees en m´ecanique.

En effet ces deux domaines (exp´erimental et calcul) se sont d´evelopp´es historiquement de mani`ere relativement s´epar´ee, et il est encore h´elas courant de se borner `a comparer des cartes en fausse couleurs. Actuellement, ces pr´eoccupations sont partag´ees par la commu-naut´e des photom´ecaniciens, mais int´eressent aussi beaucoup les industriels. Il est donc particuli`erement important de lever rapidement les verrous li´es aux probl`emes du dialogue essais/calculs dans ce cadre l`a, notamment pour favoriser la diffusion des m´ethodes de mesure de champs dans l’industrie, tr`es utilisatrice de code EF. Jusqu’`a pr´esent, la plu-part des moyens de mesure (e.g. un syst`eme de st´er´eo-corr´elation) et ceux de calcul (un code ´el´ements finis) sont compl`etement disjoints, et les chercheurs d´eveloppent des passe-relles entre les deux outils souvent au cas par cas en utilisant en g´en´eral des proc´edures d’interpolation entre les r´esultats de type nuages de points, champs de d´eplacements ou de d´eformations. Un moyen plus efficace serait de d´evelopper une plate-forme logicielle commune qui int`egre la mesure et la simulation. C’est notamment ce que permettent les m´ethodes de corr´elation d’images globales bas´ees sur des fonctions de forme ´el´ements finis (Hild et Roux [BHR06]). En rendant le champ cin´ematique mesur´e continu, elles r´egula-risent aussi le probl`eme mal pos´e de la corr´elation d’images et propose une mesure avec un filtrage m´ecanique. Il est montr´e qu’en g´en´eral ce filtrage am´eliore les erreurs de mesure dues au bruit dans les images [HR12]. Cependant, il ne faut pas s’affranchir de v´erifier a posteriori l’allure du champ du r´esidu local ρ(x) = |f(x)−g(x+u(x))| [RRH09] et de corriger ´eventuellement l’hypoth`ese cin´ematique conc´ed´ee. Enfin, lorsque la m´ethode de corr´elation est une m´ethode int´egr´ee, la r´egularisation m´ecanique sous-jacente permet d’obtenir une certaine mesure des champs cin´ematiques sous l’hypoth`ese que le mod`ele m´ecanique soit repr´esentatif de l’essai et du comportement r´eel du mat´eriau : si un autre mod`ele est consid´er´e alors la mesure est diff´erente, le champ du r´esidu de la mesure ´etant ici encore le seul juge de paix. Cette approche permet habillement, en s’appuyant sur des d´ecompositions cin´ematique adapt´ees, de mesurer par exemple pr´ecis´ement des champs de tr`es faibles niveaux de d´eformations. Elle permet aussi de r´esoudre des probl`emes de mesure, dans le cas o`u l’information contenue dans les images est insuffisante `a elle-seule (par exemple pour des mesures `a hautes temp´eratures[Lep11]) : la corr´elation d’images ne converge que si on impose une r´egularisation en supposant ici encore une certaine forme au champ cin´ematique. Elle permet ´egalement d’identifier des param`etres constitutifs de mani`ere directe, sans avoir recours `a une m´ethode d’identification inverse it´erative comme la m´ethode de recalage de mod`eles ´el´ements finis.

En fournissant des donn´ees de champs denses et multi-´echelles, la corr´elation d’images est aussi en train de faire ´evoluer la m´ecanique exp´erimentale, par le d´eveloppement de

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niques d’identification de param`etres mat´eriaux adapt´ees, notamment la m´ethode FEMU.

Ce que nous avons observ´e en d´eveloppant les travaux sur la m´ethode FEMU am`ene fi-nalement un certain nombre de questions. Ces questions sont li´ees `a la performance de la m´ethode d’identification.

La premi`ere question est relative `a la d´efinition de la g´eom´etrie de l’´eprouvette et de l’essai.

Il s’agit de savoir quels sont les champs h´et´erog`enes corrects `a utiliser pour un probl`eme d’identification donn´e, et comment optimiser l’essai par rapport `a ce probl`eme. Pour aller plus loin, il faut aussi d´efinir quelles sont les zones du champ cin´ematique mesur´e `a prendre en compte dans la boucle d’optimisation. Il est donc primordial, avant toute conception mˆeme de la g´eom´etrie d’´eprouvette et du type d’essai associ´e, d’analyser la sensibilit´e des param`etres constitutifs au champ cin´ematique qui serait induit par la sollicitation m´eca-nique, afin de savoir quelles sont les zones des champs mesur´es qui sont pr´epond´erantes dans l’estimation d’un terme de la loi de comportement. Cela ouvre clairement la voie `a la simulation num´erique pour l’aide `a la conception des essais exp´erimentaux (simulation num´erique pour le test et l’identification de mod`ele m´ecanique).

La deuxi`eme question est li´ee `a la m´ethode de mesure des champs cin´ematique et `a ses erreurs associ´ees. Il s’agit de comprendre, typiquement, quelle est l’influence et comment se propage le bruit de mesure `a travers la proc´edure d’identification inverse. En effet, et de mani`ere plus g´en´erale, l’ensemble de la chaˆıne de mesure (traitements du signal, filtrage, etc.) influence les r´esultats de l’identification. Le probl`eme majeur est donc de savoir com-ment ´evaluer les incertitudes sur les param`etres constitutifs. De mon point de vue cela peut se faire soit par le d´eveloppement de m´ecanismes de propagation d’erreur dans la proc´edure d’identification FEMU en elle mˆeme, soit en utilisant des approches statistiques de type Monte Carlo.

Une troisi`eme question se pose, elle concerne le choix de la m´ethode d’identification : quelle est la m´ethode d’identification la plus adapt´ee pour un probl`eme donn´e ? Dans quels cas peut-on se contenter d’utiliser des essais homog`enes parfaitement contrˆol´es avec des me-sures ponctuelles ? Cette question reste, `a l’heure actuelle, une question ouverte.

Enfin, dans ces travaux, mais aussi dans ceux de la litt´erature, la m´ethode FEMU est uti-lis´ee pour identifier des param`etres constitutifs de mat´eriaux homog`enes `a partir d’essais h´et´erog`enes. Or si on consid`ere un composite stratifi´e, le comportement avant rupture de-vient souvent non-lin´eaire et spatialement h´et´erog`ene (par exemple `a proximit´e d’une cou-pure, on parle de carte de contraste de propri´et´e). L’utilisation de la m´ethode FEMU pour identifier des propri´et´es m´ecaniques spatialement h´et´erog`enes n’est pas intuitive comme peut l’ˆetre la m´ethode de l’´ecart `a l’´equilibre [APG+11], et n´ecessite des d´eveloppements futurs.