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La spongiose à l’origine du signal T2 de l’IRM

Les modélisations précédentes dans la lignée des travaux de Murray en ce qui concernent les gliomes de haut grade reposent sur l’idée que la concentration de cellules tumorales est à l’origine du signal IRM. Cette hypothèse n’a jamais été vraiment montré pour les gliomes de haut grade et encore moins pour les gliomes de bas grade. C’est ce que nous avons chercher à vérifier au cours de ce travail. Tout d’abord, cette idée semble aller à l’encontre de l’intuition : pourquoi les cellules tumorales seraient à l’origine d’une anomalie de signal et pas les cellules saines ? Est- ce parce qu’elles ont un profil immunologique différent ou simplement par leur nombre ? Si la deuxième raison semble la plus probable, elle ne paraît pas correct en ce qui concerne les GBG qui ne présentent pas une concentration cellulaire élevée à l’intérieur du signal, à proximité de la frontière. Les études anathomopatholistes menées depuis la fin des années 1980 ont toute montré que cette partie de l’anomalie de signal contient essentiellement du tissu sain infiltré. Il semble plus probable que le signal soit crée par l’œdème, lui même produit par l’inflammation des tissus au contact de la tumeur. Les cellules n’étant alors qu’une cause indirecte. Cette hypothèse semble plus en accord avec le principe de l’imagerie RMN et avec les résultats que nous avons obtenus (figure 7.19).

Le Bas et al [WTT92, LBLDB84] avaient déjà observé qu’il existe une relation linéaire entre les niveaux de gris de la séquence T1 de l’IRM et la quantité d’eau présente dans les tissus. Les T1 et T2 sont dépendant de changements non spécifiques de la composition des tissus, et plus particulièrement de la quantité d’eau libre et de certaines sortes de lipides. Nos résultats confirment ces observations et vont plus loin en quantifiant l’œdème de type spongiose grâce à la méthode du threshold et les changements de la matière blanche grâce à notre méthode basée sur les couleurs. Des résultats complémentaires vont être publiés prochainement dans [GPD+].

La présence de cellules tumorales infiltrées hors du signal n’ont pas permis de confir- mer la présence de cellules tumorales infiltrées

En revanche, nos essais sur le marquage IDH1 invitent à penser qu’il n’y a pas de cellules tumorales à l’extérieur de l’anomalie ; contrairement à ce qui était attendu au regard des résultats de Pallud et al [PVD+10]. Cela pourrait signifier que les cellules en cycle à l’extérieur du signal

7.4. CONCLUSION DE LA PARTIE III 125

Figure7.19 – Ce graphique, extrait de [GPD+], représente pour chaque patient la densité d’œdème

au niveau de la limite du signal IRM. On peut remarquer que tous les patients s’accordent sur le fait que l’anomalie de signal est caractérisée par 20 % d’œdème.

sont des précurseurs d’oligodendrocytes qui seraient à l’origine de l’épilepsie chez certains patients. Néanmoins ce scénario n’explique pas pourquoi la chirugie large ne supprime pas définitivement le gliome de bas grade. Il reste encore des questions que le marquage IDH1 aidera à résoudre.

La spongiose : un problème qui concerne d’autres maladies ?

Un processus encore mal connu provoque l’apparition d’œdème à proximité et à l’intérieur de la masse tumorale. Cet œdème provoque un effet de masse dont les conséquences ne sont pas clairement identifiées chez le patient atteint d’un gliome de bas grade. Deux hypothèses non contradictoires sont proposées par la littérature : la destruction du parenchyme sain par les cellules tumorales ou l’arrivée de liquide provenant d’une rupture de l’équilibre osmotique. Il semble que des protéines APQ4 ont un rôle important dans l’apparition de l’œdème et que leur importance se retrouve aussi dans d’autres maladies tels que la maladie de Creutzfeldt-Jakob. La piste d’une généralisation de la compréhension du phénomène est l’un des projets importants que j’aurais aimé mené à bien si la durée de ma thèse avait été plus longue. Nous avons déjà établi un contact avec une équipe qui travaille dessus et j’espère qu’une collaboration sera constructive.

L’origine de l’œdème

L’origine de l’œdème n’est pas claire et il semble que plusieurs processus différents expliquent la diversité des comportements observés. D’une part les pertes neuronales pourraient expliquer les manques dans le parenchyme, c’est-à-dire la pâleur des lames colorées en H&E sans que la position des cellules ne soit affectée et d’autre part l’arrivée de liquide provenant peut être du liquide céphalo-rachidien et qui a tendance à provoquer l’expansion du tissu et et la compression du tissu entre deux bulles d’œdème.

Perspectives

A court terme

L’un des objectifs que nous pouvons atteindre rapidement est le recalage des prélèvements de biopsie par rapport au centre de la tumeur. Pour cela, il faut le plus de coupes d’IRM possible, ou le dessin de la tumeur au moment de la biopsie. Ce travail préliminaire servira de base à la comparaison des profils de densité de cellules et d’œdème entre modèle et données cliniques.

A moyen terme

Il existe depuis peu de temps le marqueur IDH-1 des oligodendrocytes tumoraux que nous avons utilisé dans la section 7.3.2 pour connaitre la proportion de cellules tumorales dans la population pour un seul patient. L’utilisation systématique de ce marquage devrait permettre d’établir un profil de densité des cellules tumorales au lieu du profil de densité toutes cellules confondues. Il nécessite le recrutement de nouveaux patients car il n’y a plus de matériel sur ceux que nous avons utilisé et le recalage du trajet de biopsie sur les IRM sera plus précis avec les technologies actuelles. Nous pouvons également espérer que les nouvelles formes d’imagerie telle que l’IRM de perfusion ou le TEP seront des outils plus efficaces de détection des densités cellulaires.

Quatrième partie

La radiothérapie

Dans ce chapitre, nous allons reprendre les résultats obtenus à partir des données cliniques microscopiques de la partie III pour modifier le modèle diffusion-prolifération-saturation. Nous proposons de donner un rôle important à l’œdème qui est crée par la présence de cellules tumorales et qui est à l’origine du signal IRM. Nous allons confronter ce nouveau modèle à des données cliniques de traitement par radiothérapie dans le but de mieux comprendre la réponse de la tumeur au traitement. Nous souhaitons prédire cette réponse pour évaluer l’intérêt de la radiothérapie pour un patient donné (gain en espérance de vie, la durée avant la reprise). A long terme, le but est d’optimiser les traitements : le type, la durée et l’étendue du traitement.

Dans un premier temps, nous étudierons l’impact de chaque paramètre pris individuellement dans le cas général et les plages de variation acceptable pour chaque paramètre. Ensuite nous appliquerons ce nouveau modèle à 30 patients soignés par radiothérapie en première intention. Pour finir, nous comparerons notre nouveau modèle avec celui de la partie III.

État de l’Art

La radiothérapie est la focalisation de rayonnements ionisants dans un volume. Elle repose sur le fait que les cellules tumorales sont plus sensibles que les cellules saines et que le bénéfice est supérieur au risque de cancer radio-induit.

8.1 Conséquences biologiques de la radiothérapie

Cette partie est tirée des notes de cours de radioprotection de M. Biau du Master « Ingénierie, Traçabilité et Développement Durable » et de livres de radiobiologie [GP00, BAG54, JMC07, TAB+08].

Le principe de la radiothérapie est d’éliminer préférentiellement les cellules tumorales qui se caractérisent par une prolifération élevée et une faible différentiation. Les effets déterministes de l’irradiation sont précoces (à l’échelle de quelques heures) et tandis que les effets stochastiques sont tardifs (en années, décennies).

radiosensibilité cellulaire Le cycle de division d’une cellule comporte 4 phases : – G1 : entrée en prolifération,

– S : synthèse et réplication de l’ADN, – G2 : inactivité,

– M : division cellulaire par mitose.

La loi de Bergonié et Tribondeau [BT06] indique que les cellules sont d’autant plus radiosensibles que leur potentiel de divisions est plus grand, qu’elles sont plus immatures, que leur vitesse de prolifération est plus élevée.

La radiosensibilité d’une cellule varie selon les phases du cycle. Les phases les plus sensibles sont les phases G2 et M. La phase la plus résistante est la phase S. Pour la majorité des tissus tumoraux le mécanisme de mort cellulaire prédominant semble être la mort mitotique : suite à des lésions sur l’ADN et la membrane cellulaire, la cellule meurt pendant la mitose en tentant de se diviser. L’apoptose est responsable à moindre degré de la destruction cellulaire ; c’est un processus actif dans lequel la cellule enclenche ses propres mécanismes de destruction en suivant plusieurs étapes successives : activation de la protéine p53, augmentation de la perméabilité de la membrane mitochondriale, fragmentation de l’ADN, destruction de la cellule.

Les conséquences de la radiothérapie La cible majeure des rayonnements ionisants est l’ADN mais il y a également la membrane, les mitochondries et les organites cytoplasmiques.

8.1. CONSÉQUENCES BIOLOGIQUES DE LA RADIOTHÉRAPIE 129

Figure 8.1 – les effets de la radiothérapie en fonction du temps. On peut remarquer que la durée typique de remise en état du tissu est de l’ordre de la dizaine de mois ; comme le délai de recroissance tumorale observé cliniquement pour le gliome.

Les effets moléculaires peuvent être :

– indirects : radiolyse de l’eau qui aboutit à la formation de radicaux libres OH. très réactifs. – directs : perte ou gain d’électron par intéraction directe ou par transfert des charges formées

dans la couche d’hydratation proche. Cet effet est d’autant plus important que l’énergie déposée est élevée.

Ces effets moléculaires sont à l’origine de dommages biologiques irréversibles sur l’ADN : – des troubles fonctionnels lors de la transcription,

– des pontages incompatibles avec la transcription et la réplication,

– des anomalies de la réplication bloquant le cycle cellulaire et empêchant la division cellulaire. On estime qu’une dose de 1 Gy entraine entre 500 et 1000 ruptures simples brin par cellule et environ 40 doubles ruptures.

Au niveau de la membrane, on observe des lésions des phospholipides (attaque par OH. et réactions en chaîne avec les doubles liaisons des acides gras insaturés). Les conséquences sont l’altération de la fluidité membranaire, ce qui entraine des perturbations fonctionnelles (transferts ioniques, affinités des récepteurs pour les ligands...) et des répercussions au niveau de l’organisme entier (perturbation des communications intercellulaires).

La durée des réparations varie de quelques minutes à plusieurs heures ; ce qui entraine une ralentissement de la croissance tumorale pendant ce temps. Le retard dans la division cellulaire dépend de la phae du cyle cellulaire ; l’arrêt est d’autant plus long que la cellule est proche de la division.

Des doses supérieures à 1 Gy réduisent considérablement la prolifération cellulaire dans un tissu. Après un délai de quelques heures, les divisions cellulaires reprennent mais certaines d’entre elles sont anormales et donnent naissance à des cellules qui dégénèrent. Les tissus à renouvellement rapides présentent des effet précoces puisque les cellules mutées restent viables pendant quelques divisions.

(a) Ces deux graphes de Kaplan-Meier à gauche montrent que la vitesse de décroissance du rayon tumoral post-RT est corrélée d’une part à la durée avant reprise tumorale et d’autre part, à la survie globale du patient.

(b) les tumeurs qui ré- pondent vite ont générale- ment un coefficient de pro- lifération plus élevé que les autres puisque les tissus se renouvellent plus vite. Ces trois figures sont extraites de [PLD+12].