• Aucun résultat trouvé

Les mesures de concentrations atmosphériques en POP à partir de systèmes passifs sur disque de mousse (PUF) restent des méthodes de mesure semi-quantitatives, qui permettent de

suivre l’évolution spatiale et temporelle des concentrations atmosphériques.

Dans nos travaux, un taux d’échantillonnage moyen applicable à tous les composés n’a pas pu être défini puisque des taux d’échantillonnage très variables ont été déterminés pour chaque composé entre les différents sites d’étude mais aussi entre les saisons. L’utilisation d’un taux d’échantillonnage théorique moyen issu de la littérature semble également peu

fiable sachant que de nombreux facteurs influencent l’échantillonnage passif comme les

conditions météorologiques, le design du préleveur et la concentration atmosphérique en

particules. En effet, par exemple, sur le site de fond urbain en hiver, l’utilisation d’un R

théorique moyen de 4 m3.j-1 a surestimé la concentration atmosphérique en HAP d’un facteur

2,4 et l’a sous-estimée sur le site d’altitude d’un facteur 2,6 en 2015, comparé au système

actif. Pour les PCB, des variations encore plus importantes ont été observées puisque sur le

site d’altitude en 2015 l’utilisation d’un R théorique moyen de 4 m3.j-1 a sous-estimé la

concentration atmosphérique d’un facteur 13 comparé au système actif. La méthode passive

ne peut ainsi pas être qualifiée de comparable à un système de prélèvement actif (de type

préleveur atmosphérique bas-débit), si ce dernier n’est pas déployé en parallèle pour

déterminer un taux d’échantillonnage réel.

Concernant l’échantillonnage des dépôts atmosphériques totaux, la comparaison des

deux adsorbants (PUF vs XAD®-2) réalisée lors de nos travaux n’a pas permis de conclure

98 Toutefois, des tendances ont été observées. En considérant la somme totale des 15 HAP et des 7 PCB étudiés, des différences entre ces deux familles chimiques ont été mis en évidence. Les flux de dépôts atmosphériques totaux mesurés sont plus élevés sur la PUF pour

les HAP par rapport à la résine XAD®-2, des facteurs 1,3 et 1,8 ont été déterminés entre ces

deux adsorbants. Pour les PCB, l’inverse a été observé, les flux de dépôts totaux sont plus importants lorsqu’ils sont mesurés par la résine XAD®-2, soit des facteurs 3,2 et 5,6 comparé

à la mousse. La variation d’échantillonnage entre les deux adsorbants étant faible et

raisonnable pour les HAP, ces deux adsorbants semblent être des supports ayant les mêmes capacités de collecte des dépôts atmosphérique totaux pour ces composés, contrairement aux PCB.

De plus, des différences dans la répartition des composés ont également été observées.

Pour les deux familles chimiques, les composés les plus légers semblent avoir plus d’affinité

pour la résine XAD®-2 et les composés lourds pour la mousse PUF. Pour les HAP, il a

également été observé qu’en période hivernale, lorsque les températures sont basses, des profils presque similaires ont été retrouvés entre les deux adsorbants. Ce résultat n’a pas été

observé au printemps car une contribution plus importante en HAP légers a été déterminée sur

la résine, laissant penser qu’un phénomène de revolatilisation des composés légers se produit,

à partir de la PUF au printemps lorsque les températures augmentent.

Pour conclure, il serait nécessaire de réaliser une étude comparative complémentaire

sur plusieurs mois et comportant plusieurs réplicats. Une durée minimale d’un an serait primordiale et permettrait de déterminer quels facteurs influencent l’échantillonnage, comme par exemple les concentrations atmosphériques, les températures mais aussi les quantités de précipitations et les radiations solaires.

Dans les deux chapitres suivants, des calculs de flux de transfert de POP à l’interface

entre l’atmosphère et le milieu aquatique seront réalisés. Pour ces calculs, les données

acquises à l’aide des préleveurs définis comme les plus représentatifs des concentrations atmosphériques réelles seront utilisées soit (i) les concentrations atmosphériques mesurées par

prélèvement actif lorsqu’elles sont disponibles et (ii) les mesures de dépôts atmosphériques sec et humide réalisées en échantillonnant sur l’adsorbant XAD®-2. En revanche, ces calculs

nécessitent aussi l’utilisation des constantes physico-chimiques des composés pouvant être très variables dans la littérature selon les différentes études et méthodes utilisées pour les

définir, auxquels s’ajoute l’utilisation de relations mathématiques pour l’étude des transferts.

Généralement, une incertitude moyenne d’environ 60% est estimée pour ces calculs des flux à

l’interface. Il apparait donc plus raisonnable de ne pas ajouter une incertitude supplémentaire liée au choix des techniques d’échantillonnages des POP dans le compartiment

99

CHAPITRE 4 : IMPACT DE L’ATMOSPHÈRE SUR UN LAC

D’ALTITUDE ET TRANSFERT A L’INTERFACE AIR-EAU

I. INTRODUCTION... 100

II. BILAN METEOROLOGIQUE DES DEUX CAMPAGNES ESTIVALES ... 101

III. CARACTERISATION DU COMPARTIMENT ATMOSPHERIQUE... 105 A. Phases gazeuse et particulaire ... 105 1. Concentrations atmosphériques ... 105 2. Répartition des composés en phases gazeuse et particulaire ... 106 3. Concentration relative ... 108 B. Dépôts sec et humide ... 109 1. Flux de dépôts ... 109 2. Concentration relative ... 112

IV. CARACTERISATION DU COMPARTIMENT AQUATIQUE... 114 A. Phase dissoute ... 114 1. Concentrations ... 114 2. Contribution relative ... 116 B. Sédiments ... 118 1. Sédimentation des particules ... 118 2. Concentration relative ... 119

V. IMPACT DE L’ATMOSPHERE SUR LE LAC DE LA MUZELLE... 120 A. Phase dissoute vs phase gazeuse ... 120 B. Phase particulaire atmosphérique vs phase particulaire aquatique ... 122

VI. TRANSFERT DES POP A L’INTERFACE AIR-EAU ... 123 A. Flux d’échanges gazeux à l’interface air-eau ... 123 1. Incertitude des flux estimés ... 124 2. HAP ... 125 3. PCB ... 128 B. Fugacités ... 131 C. Bilan de masse estival à l’interface air-eau ... 132 1. HAP ... 133 2. PCB ... 135

100

I. Introduction

L’atmosphère est le principal vecteur de polluants pour les milieux peu anthropisés tels

que les milieux de montagne (Datta et al., 1998). Les masses d’air transportent les polluants

sous formes gazeuse et/ou particulaire tandis que les précipitations plus abondantes en altitude et les faibles températures favorisent leur déposition sur ces sites. Les polluants se déposent

ainsi sur les lacs d’altitude par voies sèche et humide. A ces formes de dépôts s’ajoutent un mécanisme de transfert à l’interface entre l’air et l’eau : ce sont les échanges entre la phase gazeuse atmosphérique et la phase dissoute aquatique. Les composés sous forme gazeuse dans

l’air peuvent ainsi être absorbés dans l’eau. Cependant, une fois dans l’eau sous forme

dissoute ils peuvent également se revolatiliser depuis la masse d’eau. En 1986, Mackay a

expliqué que les précipitations apportaient une grande quantité de contaminants dans le compartiment aquatique en général mais que les périodes sèches entraînaient de lentes

volatilisation des composés (Mackay et al., 1986). Les lacs d’altitude étant englacés la moitié

de l’année, aucun transfert à l’interface air-eau ne peut se produire en hiver et les POP

s’accumulent sur leur surface enneigée. C’est uniquement à partir de la fonte nivale et en

période estivale que les transferts air-eau peuvent avoir lieu. Les lacs d’altitude deviennent

ainsi selon les conditions météorologiques et les concentrations atmosphériques des puits ou des sources de polluants.

Plusieurs études ont été menées sur les transferts à l’interface entre l’air et l’eau

surtout aux États-Unis et un peu en Europe (Lammel et al., 2015; Mulder et al., 2014; Sundqvist et al., 2004). Les PCB et HAP ont été étudiés notamment dans les grands lacs américains (Baker and Eisenreich, 1990; Hornbuckle et al., 1994; Totten et al., 2003), la baie de Chesapeake (Bamford et al., 1999b; Gustafson and Dickhut, 1997; Nelson et al., 1998) et

l’estuaire du fleuve Hudson connu pour sa forte contamination en PCB (Gigliotti et al., 2002;

Totten et al., 2001; Yan et al., 2008). En revanche, les études des transferts à l’interface entre

l’air et l’eau sur des lacs d’altitude pour quantifier des flux sont rares. Seulement deux études semblent avoir été menées uniquement pour les PCB : une en 1997/1998 au lac Bow, dans les Rocheuses au Canada (Blais et al., 2001a) et une en 2012 au lac de la Muzelle dans les Alpes

Françaises (Nellier et al., 2015b). Plusieurs lacs d’altitude européens ont également été étudiés

mais aucun calcul d’échanges de polluants à l’interface n’a été réalisé. Le but de ces études

étaient de déterminer des concentrations dans les compartiments atmosphérique et aquatique (Fernández et al., 2002; Van Drooge et al., 2010a; Vilanova et al., 2001c, 2001b), les sédiments (Fernández et al., 1999; Grimalt et al., 2004b), les poissons (Grimalt et al., 2001) ou de déterminer des flux de dépôts (Arellano et al., 2015; Carrera et al., 2002). Notons

cependant qu’un modèle air-eau-sédiment a été développé et utilisé pour prédire la dynamique

des flux de PCB à partir d’anciens prélèvements au lac Redo dans les Pyrénées (Meijer et al.,

2006). Les HAP n’ont été que très peu étudiés.

Pour pallier ce manque, le lac de la Muzelle situé à 2105 m d’altitude dans le Parc

National des Écrins a été instrumenté durant les étés 2014 et 2015 pour comprendre les

mécanismes de transfert des PCB et HAP à l’interface entre l’air et l’eau. Contrairement aux

101

préleveurs autonomes en énergie ont été déployés dans l’air et dans l’eau pendant toute la

durée des campagnes soit 89 jours en 2014 septembre) et 134 jours en 2015

(juin-novembre). Ces campagnes d’échantillonnage ont permis de mesurer distinctement les concentrations atmosphériques en phase gazeuse et particulaire, de déterminer des flux de dépôts sec et humide mais aussi de mesurer les concentrations en phase dissoute et des flux de

sédimentation dans l’eau. Ainsi, sans estimation ni approximation, ces résultats permettent

d’apporter des éléments de réponses à plusieurs questions: quel est le rôle de l’atmosphère

sur ce lac ? Les deux familles chimiques ont-elles des mécanismes de transfert air-eau différents ? Quels paramètres influencent les voies de transfert ? Le lac de la Muzelle est-il un puits ou une source de HAP et PCB ?

Dans la première partie du chapitre un bilan météorologique des campagnes est réalisé. Ensuite, les compartiments atmosphériques et aquatiques sont caractérisés pour pourvoir par

la suite déterminer l’impact de l’atmosphère sur le lac et calculer les flux de transferts des HAP et PCB à l’interface air-eau.