2. Problématique 3.1. Définir les concepts retenus 3.1.4. Concept de l’éducation thérapeutique L’éducation thérapeutique du patient est une démarche constituée d’étapes qui participe continuellement à l’amélioration de la santé et de la qualité de vie d’une personne. Cette instruction permet à l’individu malgré la maladie de devenir expert de sa situation. Cet enseignement favorise le sentiment d’auto-détermination et d’efficacité personnelle. Son approche concerne principalement le contexte des maladies chroniques, mais sa démarche se centre intégralement sur le patient. L’éducation thérapeutique doit être comprise comme un apprentissage à des compétences décisionnelles, techniques et sociales dans le but de rendre le patient capable de raisonner, de faire des choix de santé, de réaliser des projets de vie et d’utiliser au mieux les ressources du système de santé. (Simon, Traynard, Bourdillon, Gagnayre, & Grimaldi, 2013, p. 5) Afin de mieux appréhender le concept de l’éducation thérapeutique du patient, il est nécessaire de reprendre les différentes trajectoires de son évolution. La notion d’éducation dans le domaine des soins a probablement toujours été présente. Dans la première partie du 20ème siècle, les rédactrices ont pu observer que les soignants endossaient clairement le rôle d’enseignant auprès des patients et de leur famille. L’amélioration de l’hygiène de vie, les conseils sur la nutrition, mais encore la remise d’informations concernant les différentes interventions médicales effectuées formaient indirectement une fonction d’enseignement (Lagger, Chambouleyron, Lasserre-Moutet, & Giordan, 2008). En 1972, Leona Miller, médecin, a pu démontrer l’importance de l’éducation du patient en mettant en avant tous les effets bénéfiques de cette démarche (Formarier & Jovic, 2012). C’est en utilisant une approche pédagogique qu’elle a pu aider des personnes diabétiques, issues de milieux défavorisés de Los Angeles, à contrôler leur maladie et ainsi à rester autonomes dans la gestion de celle-ci sans pour autant augmenter leurs traitements (Leona, Miller, & Jack Goldstein, 1972). Durant l’année 1975, Jean-Philippe Assal, diabétologue et Anne Lacroix, psychologue, collaborent afin d’ouvrir une unité spécialisée dans l’enseignement diabétique pour les patients de l’Europe francophone. C’est ainsi qu’en l’espace de quelques années, la notion d’éducation du patient a immigré vers nos frontières (Laplace, 2012). C’est en s’inspirant des écrits de Bülhinger, Freud, Pontalis, Balint et de Carl Rogers qu’ils ont pu exercer un enseignement où l’expérience du patient est une source inépuisable de connaissances et d’apprentissages pour lui-même et le professionnel de la santé (Lagger et al., 2008). L’éducation thérapeutique du patient a été un soulèvement dans tout ce qui concerne l’accompagnement des personnes atteintes de maladies chroniques (Formarier & Jovic, 2012). Elle est historiquement liée au diabète, mais aujourd’hui celle-ci se voit être continuellement développée et pratiquée à de nombreuses autres pathologies. Cette approche qui se voit être médicale, psychologique et pédagogique a pour but d’améliorer la qualité de vie du patient (Lagger et al., 2008). L’ETP peut être observée comme une démarche éducative constituée de plusieurs étapes (Formarier & Jovic, 2012). Premièrement, une récolte de données est effectuée auprès du patient et de son réseau afin d’en faire une analyse pertinente sur la base des diverses connaissances et compétences du professionnel. Cette exploration en partenariat avec le patient permettra la mise en avant d’une synthèse qui aboutira à la pose d’un ou plusieurs diagnostics éducatifs hypothétiques (Sandrin-Berthon, 2010). Il s’agit de repérer les besoins, les attentes ainsi que les ressources nécessaires pour le patient dans la gestion et le vécu de sa maladie. Le diagnostic éducatif, pouvant être nommé bilan éducatif partagé, est relié au mode de vie de la personne, de son environnement, ainsi que la personne elle-même. C’est pourquoi il se voit et se doit d’être en constante évolution. Il est important que le diagnostic éducatif soit argumenté et explicité avec le patient avant d’être posé. Même si le patient est apprenant, il reste aussi un expert de sa propre situation. Suite à la pose du/des diagnostic(s) éducatif(s), plusieurs phases s’en suivent, telles que la formulation d’objectifs éducatifs, le choix de stratégies éducatives, la mise en place et l’opérationnalisation de ces stratégies d’éducation, ainsi que l’évaluation de la démarche effectuée. Il est indispensable que l’ensemble de la démarche éducative s’opère en interdisciplinarité avec le patient. Lors de ce processus, la notion de relation éducative à toute son importance. La relation établie entre le professionnel et le patient est le principal élément de cette démarche. La relation éducative ne fait pas seulement référence à la confiance créée entre les deux intervenants, mais aussi au respect de chacun des rôles qu’exercent les différents membres de la démarche. Élaboré par Jean Houssaye, le triangle pédagogique exprime très clairement la cohésion entre chaque intervenant dans une relation éducative (Houssaye, 2000). Celui-ci dévoile un objet à chacun des angles du triangle : premièrement le patient ayant un rôle d’apprenant, mais aussi d’expert de sa situation. Deuxièmement, celui du soignant ayant la position de formateur et d’expert des connaissances professionnelles. Troisièmement, une composante qui englobe le savoir intégral, la maladie et le traitement et qui joue le rôle de médiateur entre les deux autres acteurs de la relation éducative (Houssaye, 2000). Ainsi, il est important de ne pas uniquement considérer le patient comme un disciple, mais plutôt comme un expert en soi qui apportera beaucoup à son éducation. Le soignant pourra toujours amener les gestes et informations manquants, mais le vécu du patient apportera un apport pertinent dans son apprentissage et donc la réponse adaptée aux besoins spécifiés lors de la démarche éducative (Formarier & Jovic, 2012). 3.2. Théorie de Gestion des Symptômes (Humphreys et al., 2008; Smith & Liehr, 2008) Dans ce chapitre, un cadre théorique va permettre de clarifier les quatre concepts retenus. Ce cadre se rapporte à une théorie de soins. Cette dernière a notamment été choisie pour son intérêt portant sur l’expérience subjective des symptômes vécue par des patients. Il s’agit de la théorie de Gestion des Symptômes qui est une théorie de niveau intermédiaire (Smith & Liehr, 2008). C’est en 1994 à San Francisco, qu’un premier modèle a été élaboré par des chercheurs de la faculté des Sciences Infirmières de l’Université de Californie. Ce modèle a été inspiré par plusieurs autres tels que l’auto-soin d’Orem en 1991 (Fawcett, 2001), « symptoms of self-care » créé en 1990 (Sorofman, Tripp-Reimer, Lauer, & Martin, 1990) ainsi que de divers modèles provenant de l’anthropologie, de la sociologie et de la physiologie (Smith & Liehr, 2008). En 2001, un article scientifique a donné jour à la première version de la théorie. Celle-ci a été révisée en 2008. Cette théorie parait adaptée à la thématique de cette étude, car les patients asthmatiques subissent des symptômes propres à leur pathologie. Il a déjà été évoqué précédemment que l’objectif thérapeutique premier est de reconnaître les symptômes annonciateurs afin d’éviter la crise d’asthme. Ainsi, le choix d’une théorie visant tout aussi bien à réduire les symptômes ainsi qu’à la reconnaissance de ces derniers semble tout à fait judicieux. Comme il a d’ores et déjà pu être décrit précédemment, le métaparadigme de la science infirmière est constitué de quatre concepts. La théorie de gestion des symptômes reprend trois de ces concepts. Le concept de la « personne » met en avant le fait que les variables propres à un individu sont intrinsèques à la manière dont ce dernier perçoit et réagit à l’expérience des symptômes. Ces variables peuvent être de nature démographique, psychologique, sociologique ou physiologique. Chaque variable porte un impact sur la perception et l’attitude d’un individu face à un symptôme (Smith & Liehr, 2008). Le concept de « l’environnement » désigne les contextes et les conditions dans lesquels se trouve un individu et dans lesquels se produit un symptôme. Il implique différentes variables : des variables physiques comme la maison, le travail ou l’hôpital ; des variables sociales comportant le réseau de soutien social, ses relations interpersonnelles et leur qualité ; des variables culturelles pouvant être les croyances, les valeurs et les pratiques qui sont propres à la personne (Smith & Liehr, 2008). Le concept de la « santé / maladie » fait référence à des variables qui sont singulières à l’état de santé de l’individu. Ce champs englobe les facteurs de risques, les potentiels accidents subis ou encore les handicaps (Smith & Liehr, 2008). Enfin, le concept des « soins infirmiers » est absent de cette théorie. Les membres de ce groupe ont comme hypothèse que les créateurs de cette théorie ont voulu qu’elle puisse être applicable à un grand nombre de disciplines de la santé. Ils auraient alors décidé de ne pas évoquer ce concept afin de ne pas catégoriser cette théorie dans la sphère de la science infirmière. La théorie de la gestion des symptômes est composée de plusieurs champs bien distincts et représentés par des cercles qui sont interreliés entre eux. Il y a exactement trois concepts représentés, chacun, dans un cercle : expérience des symptômes, stratégie de gestion des symptômes et effets obtenus sur l’état des symptômes. Ces trois cercles sont interreliés entre eux par des flèches bidirectionnelles et ces trois cercles incluent les trois concepts du métaparadigme infirmier. En outre, un sous-concept étant l’adhérence se situe entre la stratégie de gestion des symptômes et les effets obtenus sur l’état des symptômes. Afin que le lecteur puisse mieux se représenter cette théorie, une représentation schématique se trouve en appendice (appendice A). À présent, chaque concept sera détaillé. Premièrement, le champ de « l’expérience des symptômes » met en avant la perception que se fait une personne des symptômes ressentis. Cette perception amènera l’individu à faire une évaluation des changements subjectifs ressentis et ce afin d’adapter sa réponse à ceux-ci. La deuxième composante de cette théorie est celle de « la stratégie de gestion des symptômes ». Celle-ci fait référence à l’énergie qu’utilise l’individu pour contrer ou lutter contre les symptômes ressentis. Pour soulager les symptômes subis qui lui sont désagréables, la personne déploie diverses interventions et stratégies pour y faire face. Le dernier champ fait référence aux « effets obtenus sur le résultat des symptômes ». Cette dernière approche permet d’évaluer la pertinence des stratégies mises en place pour contrer les symptômes subis. Cette démarche contribue à prouver l’efficacité des stratégies utilisées. Ces dernières influencent les facteurs environnementaux de la personne et il est donc nécessaire de réfléchir s’il y a lieu oui ou non de revoir le processus de gestion des symptômes. En effet, comme décrit précédemment, les liens entre ces trois concepts centraux demeurent bidirectionnels. Cela signifie que la personne se situant dans une des trois étapes précitées peut à tout moment repasser à la phase précédente. Enfin, l’adhérence est un autre concept-clé de ce modèle. Il se caractérise par la manière dont l’individu adhère, donc accepte et utilise la stratégie prescrite. L’adhérence influence fortement la relation entre les deux concepts suivants : celui de la stratégie de gestion des symptômes et celui des effets obtenus sur l’état des symptômes (Smith & Liehr, 2008). L’utilisation de la théorie de gestion des symptômes permet de diviser en plusieurs phases le processus que met en place une personne pour gérer les symptômes qu’elle ressent. Ces différentes phases, étant finalement les trois concepts principaux de cette théorie, permettent d’analyser, en entente avec le patient, son vécu face à un symptôme éprouvé et la manière dont il devrait faire face à ce dernier. Généralement, la personne va mettre en place une stratégie d’adaptation propre à elle-même pouvant se révéler efficace ou non. La finalité de cette analyse est de transformer sa réponse habituelle, dite simultanée en une réponse réfléchie afin d’améliorer les effets et résultats obtenus. Délibérer sur le processus qu’entreprend une personne face à l’expérience du symptôme permettrait de saisir l’origine de la survenue du symptôme ainsi que la réponse simultanée donnée à celui-ci afin de la transformer en une réaction adéquate. Dans le document Chez les adolescents atteints d’asthme allergique, quel est l’impact de l’éducation thérapeutique liée à l’autogestion de la maladie sur la qualité de vie ? (Page 53-61)