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” La phrase la plus excitante à entendre pour un scientifique, celle qui annonce de nouvelles découvertes, n’est pas « Eureka ! » mais « C’est bizarre » „ [Isaac Asimov, écrivain américano-russe, 1920-1992]

Dans l’introduction, j’ai défini sommairement l’importance, au regard des données d’accidentologie, et la complexité du problème que représente l’étude biomécanique du thorax. Parler de sa géométrie est un avant-goût de l’ampleur du problème. [Sauf que, je n’aime pas l’anatomie...] J’ai choisi, ici et au cours de ma carrière, d’aborder la description du thorax osseux sous deux angles : l’un structurel, c'est-à-dire la géométrie de cet assemblage mécanique qu’est la cage thoracique, l’autre fonctionnel décrivant les articulations lui donnant sa souplesse. Pour les étudier une approche expérimentale originale a été imaginée. La simulation numérique sur thorax personnalisés a été utilisée pour aller au-delà de l’expérimentation en s’intéressant à des questions telles que les variabilités inter et intra-individu dans le cas du vieillissement et de leurs influences sur le comportement de notre système mécanique, le thorax, n’étant, et cela serait trop simple, ni identique d’un individu à l’autre, ni figé dans le temps. Enfin, ces recherches ont eu leurs applications dans le développement d’outils d’évaluation du risque lésionnel.

Un peu de géométrie

Dans ma démarche, je préfère parler de géométrie plutôt que d’anatomie. C'est-à-dire définir des paramètres physiques caractéristiques tels que : longueur, épaisseur, rayon de courbure, inclinaisons et angles divers. Toutefois, il est nécessaire, au moins au début et rapidement, de nous retourner vers nos amis anatomistes, à la fois par sécurité et pour bénéficier de leur savoir. C’est pourquoi, cette section a pour objet la présentation de notions élémentaires d’anatomie indispensables à la compréhension de la suite, afin d’en faciliter la lecture aux personnes pour lesquelles ce n’est pas familier. Les lecteurs intéressés pourront se référer aux divers ouvrages d’anatomie cités dans le texte pour obtenir des informations plus détaillées.

Comprendre et modéliser la déformation du thorax

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Le thorax est la partie supérieure du tronc, la région du corps qui s’étend de la base du cou au diaphragme. Douze vertèbres thoraciques, douze paires de côtes avec leurs cartilages, le sternum et les deux clavicules forment la cage thoracique et protègent les organes internes du thorax. A l’arrière, les côtes sont fixées sur la colonne vertébrale, à l’avant, certaines sont fixées sur le sternum, les autres sont « flottantes » (Fig. 2-1 et Fig. 2-2).

Fig. 2-1 : Vue d’ensemble de la cage thoracique (d’après KAMINA, 2009).

Communément, dans son tiers supérieur, la cage thoracique a l’aspect d’un cône tronqué, et elle est plus cylindrique dans sa partie inférieure. D’autres formes, moins courantes, existent comme la cage thoracique en forme de « parapluie » (Fig. 2-2) qui, a, dans le cadre de deux projets européens, servi à l’élaboration, du modèle numérique humain HUMOS (ROBIN, 2001 ; VEZIN et VERRIEST, 2005). Nous reparlerons de ce problème de variabilité inter-individu.

Fig. 2-2 : Vues face et profil de la cage thoracique (d’après RICHER, 1890) ; Comparaison avec le modèle numérique humain HUMOS (ROBIN, 2001).

Bien que souvent omise dans de nombreux ouvrages d’anatomie thoracique, l’épaule, et plus spécifiquement dans notre cas, la clavicule fait également partie intégrante du thorax. Son rôle dans les divers modes de chargement possible de la cage thoracique lors d’un accident avec ceinture de sécurité est un élément important qu’il faut prendre en compte. La clavicule a une forme de S, doublement incurvée

dans le plan horizontal : convexe dans sa partie interne et concave dans sa partie externe. Cette dernière est reliée avec l’acromion (excroissance osseuse sur la scapula, c'est-à-dire l’omoplate), l’autre partie l’étant avec le sternum (Fig. 2-3).

1. Clavicule 2. Manubrium 3. Sternum 4. Processus xiphoïde 5. Côtes 6. Cartilage A. Orifice supérieur B. Orifice inférieur

Un peu de géométrie

Fig. 2-3 : Vue supérieur et inférieure de la clavicule (d’après RICHER,1890).

Dans la suite de ce mémoire, les côtes et les vertèbres seront désignées respectivement par les lettres majuscules C et T suivies du numéro de la côte ou de la vertèbre, par exemple la ie vertèbre thoracique sera désignée par Ti ; i = 1, 12.

Le volume du thorax est principalement occupé par les poumons, le cœur, les bronches et les gros vaisseaux, dont l’aorte pour laquelle j’ai étudié expérimentalement son comportement (LITLZER et VEZIN, 2012 ; MENUT et coll., 2015), qui sont des organes vitaux qu’il faut protéger (Fig. 2-4). La paroi thoracique, faite de muscle, d’os et de graisse, isole et protège les organes de l’extérieur. En outre, de par leurs propriétés mécaniques viscoélastiques, ces viscères influent fortement sur la réponse de la cage thoracique sous chargement dynamique.

Fig. 2-4 :Vues de face et dos du contenu intrathoracique (d’après KAMINA,2009).

La cage thoracique est résistante du fait de sa capacité à se déformer : elle est mobile naturellement entre deux positions extrêmes (inspiration et expiration) au cours de la respiration. Cette mobilité est assurée par les muscles intercostaux, internes et externes, qui assurent également sa cohésion (Fig. 2-5). Ils sont disposés obliquement entre les côtes adjacentes qu’ils relient. Les muscles intercostaux externes permettent l’élévation des côtes lors de l’inspiration, et les muscles intercostaux internes l’abaissement des côtes lors de l’expiration (HEBERT et

CAMIRAND, 1996). Ils solidarisent toutes les côtes entre elles en assurant une précontrainte sur les os. Outre ces muscles intercostaux, des muscles externes au gril costal, attachés aux omoplates, à la clavicule et aux côtes, assurent une fonction locomotrice. La cohésion des articulations costo-vertébrales est également maintenue grâce aux muscles (et aux ligaments). La cage thoracique est limitée en dessous par un muscle en forme de cloche, le diaphragme, qui sépare les cavités thoracique et abdominale. Le diaphragme, muscle fin et très résistant inséré sur les côtes basses, la pointe du sternum et en arrière sur le corps vertébral des quatre premières vertèbres lombaires : ce muscle présente plusieurs ouvertures qui permettent la continuité entre l'étage thoracique et la cavité abdominale, des gros vaisseaux et de l’œsophage.

Comprendre et modéliser la déformation du thorax

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Fig. 2-5 :Muscles intercostaux (d'aprèsWILSON,2014).

Je ne rentrerai pas plus dans les détails anatomiques du thorax dans ce mémoire, cela ne présentant que peu d’intérêt pour la suite des recherches présentées. J’ai seulement souhaité mettre en évidence les éléments importants qui vont éclairer les recherches présentées dans les sections qui suivront.

Une structure mécanique articulée

Une caractéristique fondamentale de la morphométrie, c'est-à-dire, de la géométrie de la cage thoracique est l’orientation du gril costal, autrement dit l’inclinaison des côtes. Ce point est extrêmement important dans la capacité de la cage thoracique à absorber l’énergie d’un choc. Par exemple, l’une des raisons avancées par Kent (KENT et coll., 2005) pour expliquer le sur risque de blessure chez les personnes âgées est que l’inclinaison, dans le plan sagittal, des côtes diminuerait en vieillissant (Fig. 2-6). C’est en partie sur ce point que j’ai initié mes premiers travaux d’encadrement de thèse suite notamment à mes premières recherches sur la réponse du corps humain en choc frontal soumis à différents modes de chargements (VEZIN

et coll., 2002.a ; VEZIN et coll., 2002.b), qui se sont focalisés naturellement sur le

thorax, ce dernier étant le second segment le plus lésé après la tête.

Fig. 2-6 :Modification de l’inclinaison des côtes en fonction de l’âge, comparaison de reconstruction à partir de scanner d’un thorax d’une femme de 17 ans (à gauche) et d’un

homme de 64 ans (à droite), (d’aprèsKENT et coll.,2005).

Muscle intercostal interne Muscle intercostal externe

Une structure mécanique articulée

Kent suppose que l’anneau costal en se redressant (thorax « âgé ») et en devenant ainsi plus parallèle à la direction de chargement aurait une plus grande proportion à se déformer dans son plan. Au contraire, des côtes plus verticales (thorax « jeune ») montreraient une facilité à tourner dans le plan sagittal et donc aurait ainsi une tendance à échapper au chargement diminuant ainsi leur déformation. Ainsi, théoriquement, l’augmentation de l’angle entre les côtes et la colonne vertébrale augmenterait la raideur structurelle de la cage thoracique résultant en une diminution de sa tolérance. C’est ce que j’ai voulu démontrer, expérimentalement, puis numériquement, dans les deux thèses que j’ai dirigées sur le thorax (BERTHET, non soutenue, YOUSSEF, 2012), et aussi dans les projets européens Aprosys et THORAX avec une post doctorante puis une ingénieure de recherche. Les schémas ci-après, extraits de VEZIN et BERTHET (2009) et adapté de l’article de Kent, illustrent le mécanisme proposé.

a)

b)

Fig. 2-7 :Influence de l’inclinaison des côtes sur le mécanisme de déflexion de la cage thoracique. a) côtes horizontales ; b) côtes verticales (d’après KENT et coll., 2005).

Plusieurs études se sont intéressées à l’orientation initiale des côtes, mais aucune, à part nous (VEZIN et BERTHET,2009), n’avait mesuré leur rotation au cours d’un chargement. Par exemple, Gayzik (GAYZIK et coll., 2008) a quantifié la relation âge

vs forme à partir de l’analyse des coordonnées 3D de points anatomiques sur le

squelette. Ces auteurs ont mis en évidence l’influence de l’indice de masse corporel. Cette étude très complète confirme les résultats préliminaires que nous avons publiés en 2005 (Fig. 2-10, BERTHETet coll., 2005) sur la base de coordonnées 3D de points anatomiques sur soixante-quatre personnes (âge moyen 30 ± 9 ans). Cette base de données a été développée dans le cadre du projet européen HUMOS2 [dont j’ai assuré

l’essentiel de la coordination scientifique et administrative, bien que le coordinateur officiel fût Jean-Pierre Verriest directeur du LBMC à l’époque].

Déformations des côtes pour un angle initial « horizontal » des côtes Côtes « horizontales » Côtes « verticales » Angle initial des côtes Angle initial des côtes

Moins de rotations articulaires, Plus de déformation des côtes

Plus de rotations articulaires, Moins de déformation des côtes c

Rotations des côtes pour un angle initial « vertical » des côtes c

Direction du chargement Direction du chargement

Comprendre et modéliser la déformation du thorax

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Elle regroupe des mesures externes et internes de soixante-quatre personnes en bonne santé, incluant l’âge, le genre, le poids et plusieurs données anthropométriques (taille, longueur, circonférence…). Les mesures internes, c.-à-d. les coordonnées 3D de point anatomiques sur le squelette, ont été acquises sur les personnes assises par le système de stéréoradiographie base dose EOS® (BERTRAND et coll., 2006). Après avoir transformé ces données pour les rendre homogènes et exprimées dans un repère identique, nous avons déterminé pour chaque personne les orientations de chacune de leurs côtes.

Fig. 2-8 : Exemple de coordonnées 3D des points anatomiques obtenus sur une personne assise et définition de l’inclinaison d’une côte, ij : angle de la je côte de la ie personne.

Plan définissant l’angle frontal , et latéral d'une côte

(d’aprèsDANSEREAUet STOKES,1988).

L’idée de ce travail était d’analyser les variations intra/inter-individu de ces angles à travers la distribution pour chaque côte et de trouver des relations entre les inclinaisons et des paramètres dimensionnels pour « personnaliser » un modèle numérique de thorax. Je mets personnaliser entre guillemets, car, comme déjà abordé dans le chapitre précédent, il ne s’agit pas ici de personnalisation au sens de réaliser un modèle personne-spécifique, qui n’a pas réellement d’intérêt en sécurité routière, mais plutôt un modèle classe d’individu-spécifique.

A partir de la base de données, nous avons défini un angle normalisé, calculé sur une interpolation du plan de la côte passant par cinq points mesurés sur sa longueur (Fig. 2-8), puis moyenné, pour une même côte, entre le côté droit et gauche du thorax :

ij i

i ij S / avec 2 ijDroite ijGauche ij    

Où i et i sont respectivement la valeur moyenne et l’écart type de l’inclinaison des côtes pour une personne. A partir de la valeur moyenne sur l’ensemble des personnes, Sj, de cet angle normalisé, on obtient au final une relation qui peut permettre d’estimer l’inclinaison de chacune des côtes d’une personne :

 

jSj.

On a ainsi pu mettre en évidence la variation de l’orientation des côtes en fonction de l’étage costal, (Fig. 2-9, conformément à DANSEREAU et STOKES, 1988).

1ere côte 10e côte plan frontal plan sagittal Axe de référence ij Angle latéral Colonne vertébrale Sternum Angle frontal Plan de la côte

Une structure mécanique articulée

Fig. 2-9 : Distribution de l’inclinaison des côtes et de l’inclinaison moyenne standardisée

L’angle moyen, , et l’écart type, , ont été analysés en fonction de relations avec des données anthropométriques telles que la masse, M, la taille, H, où l’épaisseur thoracique, D :

;

f(Age,M,H,D,...)

Une forte influence de la corpulence, M/H², soit l’Indice de Masse Corporel IMC (Fig. 2-10), confirmée par GAYZIK et coll. 2008, et de la profondeur thoracique normalisée par la hauteur, D/H, (un facteur d’élancement en quelque sorte), sur l’inclinaison des côtes plutôt que l’âge a été mise en évidence. La valeur de la pente initiale (au repos) des côtes va être un élément important de la déformation tridimensionnelle de la cage thoracique.

Fig. 2-10 : Variation de l’inclinaison moyenne des côtes en fonction de paramètres morphométriques.

Un autre élément fondamental pour analyser et comprendre la déformation 3D de la cage thoracique est le rôle fonctionnel des articulations costo-vertébrales. En effet, plus que l’inclinaison initiale des côtes, c’est leur capacité à tourner sous un effort, leur capacité à échapper à la déformation, qui peut conditionner la topologie de la déformation 3D du thorax sous chargement dynamique.

-50° -45° -40° -35° -30° -25° -20° -15° -10° -5°

Rib 01 Rib 02 Rib 03 Rib 04 Rib 05 Rib 06 Rib 07 Rib 08 Rib 09 Rib 10

θj

HUMOS2 Database Dansereau and Stokes

20 30 40 50 60 10 20 30 40 20 30 40 50 60 0.05 0.1 0.15 0.2 20 30 40 50 60 10 30 50 70 R² = 0.476 R² = 0.118 R² = 0.504 iM/H² iAge iD/H 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Côtes

Données HUMOS2 DANSEREAU et STOKES

j

i

Comprendre et modéliser la déformation du thorax

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Sous le vocable articulations costo-vertébrales sont regroupées en fait les articulations costo-vertébrales proprement dites et les articulations costo-transverses. Mes recherches ont, en partie, été consacrées à leur caractérisation mécanique. Toutefois, il est nécessaire de définir la géométrie et le fonctionnement de ces articulations de manière plus précise. Comme leur nom l’indique, ces articulations mettent en jeu les côtes et les vertèbres thoraciques. Ces dernières (Fig. 2-11) se composent chacune d’un corps vertébral, de deux apophyses transverses et d’une épineuse.

Latéralement, les corps vertébraux ont deux facettes articulaires, dont chacune constitue la moitié d'une surface articulaire pour l'articulation avec la tête d'une côte. Font exception les vertèbres T1, T10, T11, T12. Le bord supérieur du corps vertébral de T1 a une facette articulaire complète et le bord inférieur une demi-facette. La 10e

vertèbre a une demi-facette au bord supérieur tandis que la 11e a, elle, une facette complète. La facette articulaire de T12 se trouve au milieu de la face latérale du corps vertébral. L'apophyse transverse des dix premières vertèbres, présente une facette pour l'articulation avec la tubérosité costale. Cette facette n'est concave que de T2 à

T5, pour T1 et de T6 à T10, sa surface est plane (MOORE et coll., 2013).

Les articulations costo-vertébrales permettent donc les mouvements entre les côtes et les vertèbres thoraciques. Une côte Cn s’articule donc entre les vertèbres thoraciques Tn-1 et Tn au niveau des facettes articulaires situées sur le corps vertébral (articulation costo-vertébrale proprement dites, Fig. 2-11). Les côtes s'articulent également avec les vertèbres au niveau des apophyses transverses sauf pour C11 et

C12 (articulation costo-transverse). Dans l'articulation costo-transverse, les surfaces

qui s'articulent sont la saillie inférieure interne de la tubérosité et la facette costale de l'apophyse transverse. Les capsules de ces articulations sont fragiles et sont renforcées par de nombreux ligaments, notamment le ligament costo-transverse inter-osseux, le ligament costo-transverse interne et le ligament costo-transverse supérieur (Fig. 2-12).

Fig. 2-11 : Exemple d’articulations costo-vertébrales entre les vertèbres T6 et T7. Axe de rotation passant par la tête et le cou de la côte (flèches rouges)

(d’après MOORE et coll., 2013). 8 9 10 11 12 1 2 3 4 5 6 7 Abaissement 7e Côte 8. Facette articulaire supérieure

9. Demi facette articulaire pour la tête costale de la 7e côte

10. Facette articulaire pour le tubercule de la 7e côte 11. Apophyse transverse de la 7 iéme vertèbre 12. Epineuse de la 6e vertèbre 1. Corps vertébral de la vertèbre n-1 2. Disque intervertébral 3. Tête de la côte n 4. Corps vertébral de la vertèbre n 5. Tubercule de la côte n 6. Apophyse transverse de la côte n 7. Axe physiologique de rotation de la côte n Cos to -tr an sver se Cos to -ver téb ra le Elévation

Comment mesurer la déformation thoracique

.

Fig. 2-12 : Ligaments mis en action dans les articulations costo-vertébrales (d’après KAMINA,2009).

Les articulations costo-vertébrales sont des articulations très peu mobiles (elles autorisent des mouvements de côtes de faibles amplitudes) d’où la difficulté de les mesurer comme on le verra plus tard. Les diverses formes des surfaces articulaires permettent une mobilité différente des côtes, selon l’étage costal. D’après KAPANDJI

(1994), lors des mouvements de respiration, les côtes ont un mouvement de rotation par rapport à leurs vertèbres correspondantes, guidé par l’articulation costo-vertébrale et l’articulation costo-transverse. L’axe de rotation passe alors par les centres de ces deux articulations et reste fixe au cours du mouvement (Fig. 2-11). Ce mouvement physiologique des côtes est dû à l’action des muscles intercostaux (ROHEN et coll., 1999).

L’orientation de cet axe change en fonction de l’étage costal du fait de la géométrie particulière de chacun de ces étages. Pour les côtes basses, cet axe tend à se rapprocher du plan sagittal. La question de recherche que je me suis posées était de savoir ce qu’il en était lors d’un chargement non-physiologique. En d’autres termes, quelle était la rotation des côtes par rapport aux vertèbres dans le cas d’un impact dynamique sur le thorax ? Ceci faisait suite à une thèse au LBMC (ECKERT, 2001) qui avait étudié ceci en quasi statique. C’est également cette question qui a guidé l’étude expérimentale et numérique sur la déformation 3D de la cage thoracique e dynamique que j’ai menée et qui sera décrite dans la section qui va suivre.

Comment mesurer la déformation thoracique 3D ?

Le décor est ainsi planté : les blessures du thorax sont d’une importance majeure et il reste le segment, avec la tête, à protéger en priorité. Les lésions thoraciques concernent principalement, dans l’ordre de fréquence, les fractures de côtes, les lésions pulmonaires et les ruptures traumatiques des gros vaisseaux et principalement de l’aorte. [Je ne me suis pas intéressé aux secondes mis à part brièvement au

cours d’un master (THIBAULT, 2012) sur les lésions pulmonaires pour des impacts à hautes énergies (balistiques non-pénétrantes) avec le service de santé des armées. J’aurais pu traiter ces questions lors d’un projet européen auquel il m’a fallu renoncer notamment à cause de mes fonctions de direction. Cette thématique a depuis été prise par une autre personne qui se l’est appropriée.] La

géométrie et les articulations de la structure mécanique que compose le thorax sont identifiées et décrites, reste à comprendre leur rôle.

1. Ligament costo-vertébral antérieur 2. Ligament costo-transverse interosseux 3. Ligament costo-transverse interne 1 2 3

Comprendre et modéliser la déformation du thorax

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On comprend aisément que la déformation du thorax est directement liée aux mécanismes entrainant les blessures thoraciques. C’est-à-dire qu’elle va fortement les influencer. La question posée est donc quels sont ces mécanismes et les paramètres les gouvernant ? Parmi ceux-ci, on peut distinguer des paramètres intrinsèques : topologies des organes, propriétés mécaniques des matériaux, mobilité articulaires, âge et vieillissement de la personne, etc. On peut aussi identifier des paramètres extrinsèques : les conditions de chargement par les dispositifs de retenue, la posture initiale, la position dans le véhicule, etc. Nous avons donc tous les ingrédients de notre bon vieux problème de mécanique :

 Un domaine à topologie complexe => Anatomie humaine ;  Des conditions aux frontières => Systèmes de protection ;  Des conditions initiales => Conditions de chocs ;

 Des lois de comportement => Matériaux biologiques, articulations. De plus, le critère lésionnel actuellement utilisé dans les crash-tests mesure la déflexion thoracique à mi-hauteur du sternum. Or, on imagine facilement que cette valeur de déplacement entre deux points de part et d’autre de la cage thoracique peut être obtenue de différentes manières. Une même déflexion peut être observée pour différentes conditions de chargement : distribué, localisé, … mais, ceux-ci vont entraîner des blessures différentes. Elle peut aussi être obtenue, pour un même chargement, de manières différentes en fonction des paramètres intrinsèque du thorax. Par exemple, la déformation du thorax peut être décomposée en une rotation

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