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AVANT-PROPOS

I.4. DEFINITION DE LA CERAMIQUE FINE

I.4.2. La composition de la pâte

La "céramique fine" a été définie en raison de la qualité de la pâte dépurée, comparée à l’impasto riche en éléments clastiques97. Toutefois, dans les descriptions développées dans les différents catalogues du matériel, nous avons introduit une distinction supplémentaire pour la composition de la pâte, basée sur la taille des correcteurs, permettant de distinguer les pâtes fines de composition grossière (inclusions >2mm), mi-fine (inclusions ≤ 2mm) et fine (inclusions invisibles ou homogènes), avec comme mesure butoir 2mm98.

Plusieurs analyses d'argile, tant des lits que des produits finis, sont à présent disponibles et permettent de préciser davantage la composition de l'argile de la céramique fine. Récemment, l'argile du Canale del Fano a fait l'objet d'analyses physico-chimiques pour tenter de préciser la provenance de la céramique fine du Néolithique Moyen et Récent de la Grotta della Trinità (pour les principaux résultats, cf. figs 13-15); les analyses par XRF ont démontré une teneur particulièrement élevée en CaO (34.35% m/m) et une présence de MgO (1.53% m/m; fig. 15)99. Diverses initiatives d’analyses d’argile sont disponibles pour les sites de Broglio di Trebisacce et environs, Roca Vecchia, Coppa Nevigata, Madonna del Petto et Torre Castelluccia. Parmi toutes ces initiatives, le très ample programme d’analyses archéométriques conduites sur le matériel du site de Broglio di Trebisacce, actuellement centré sur l’impasto et les doliums a fournit les résultats les plus complets et a permis de mettre en évidence bon nombre de composantes régionales des argiles, ainsi que les aires de circulation micro-régionales, aussi bien des argiles que des correcteurs et des récipients finis. Un programme de recherche semblable pour la céramique fine est annoncé100. Malgré que les résultats disponibles se limitent

96 Cf. APPENDIX 1.

97 Pour la définition de l' "impasto" du PGSI, cf. infra IV.5.2.1.2; IV.5.2.1.3.

98 Cf. infra, I.4.3.

99 Cf. A. Mangia, Analisi archeometriche su materiali ceramici del neolitico salentino, Tesi di laurea in paletnologia, Università degli studi di Lecce, Facoltà di beni culturali, Corso di laurea in beni archeologici, architettonici e dell’ambiente (Anno accademico 2000-2001) (inédit), sous la direction du Professeur E.

Ingravallo. Je tiens à exprimer toute ma gratitude à M. Antonio Mangia pour avoir mis à ma disposition cette recherche. Pour l'Age du Fer, ce type d'analyse ne permet toutefois pas de répondre à la question s'il y a des argiles utilisables ou non à I Fani, en raison des mélanges des lits au moment de la préparation de la pâte.

100 Voir principalement EMnS I 413-453 et d’une manière générale la monographie de Levi, Produzione e circolazione. Pour les échantillons de céramique matt-painted prélevés, cf. EMnS I 421 (F1-8) ; pour les résultats F1-F3, cf. ibid. 442, Tableau 17 ; parmi les recherches clés en marge de la monographie Produzione e Circolazione qui traitent de la même problématique, on mentionnera également A. Cazella, S.T. levi, J.L. Williams, "The Petrographic Examination of Impasto from Vivara and the Eolian Islands. Pottery Exchange in the Bronze Age of Southern Italy", Origini 21, 1997, 187-205 ; S.T. Levi, "Importazioni e produzione locale di ceramica protostorica.

Messina : evidenze archeometriche", Origini 22, 1999-2000, 237-241.

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pour l'instant à l’impasto et aux doliums, il est possible de clarifier la composition d’argile de la céramique fine par extrapolation101.

Les résultats des analyses chimiques obtenus par différentes méthodes et selon diverses unités de mesure, ont été résumés à l'aide d'un tableau synoptique (Dépliant 16). Ce tableau reproduit les résultats obtenus pour les sites de Broglio et des environs, de Roca Vecchia, Coppa Nevigata et Madonna del Petto. A l’exception de Roca et de Coppa Nevigata, qui ont produit des analyses sur du matériel du GRS (J2-J10) et du GMD (CNS 269-1596), les autres échantillons de céramique matt-painted et plain-ware concernent la phase du Protogéométrique/Géométrique Ancien. Ce tableau synoptique facilite également l’implantation d’une stratégie d’analyse d’argile pour le matériel du Géométrique Moyen/Récent I d'I Fani (cf. infra APPENDIX 1).

Les résultats démontrent que la caractéristique principale de la pâte de la céramique fine est une argile riche en calcium (Ca). Pour le site de Broglio, les analyses effectuées par AAS ont en outre permis de mettre en évidence que le critère principal qui permet de distinguer la céramique fine de l’impasto est précisément la présence couplée de calcium (Ca) et de Magnésium (Mg), où le manganèse (Mn) ne semble jouer aucun rôle. Les variations observées pour ces deux éléments par rapport au calcium (Ca) oscillent entre 7.83 et 13.15 pour les doliums et entre 8.25 et 13.01 pour la céramique fine protogéométrique. Pour l’impasto, ces valeurs sont nettement plus basses, entre 1.19 et 5.39102. Les analyses effectuées par XRF sur le matériel de Coppa Nevigata aboutissent au même résultat, avec une moyenne de 10.96% d’oxyde de calcium (CaO) et de 2.20% d’oxyde de magnésium (MgO) pour l’impasto et 15.81% de CaO et 3.19%

de MgO pour la céramique matt-painted protogéométrique103. Ces résultats sont également comparables aux résultats par XRF obtenus pour les fragments MP1-8 de Madonna del Petto (Barletta-BA), avec des valeurs d’oxyde de calcium (CaO) comprises entre 9.50 et 13.25% et d’oxyde de magnésium (MgO) entre 2.07 et 2.51%104. Quant aux résultats obtenus pour Roca Vecchia par ICP-AES, ils ne sont disponibles que pour le calcium (Ca) et contrastent nettement par rapport aux résultats obtenus précédemment, mais restent cohérents au niveau des groupements : les doliums et la céramique matt-painted protogéométrique, considérées comme les catégories indigènes (A2-A19), présentent des valeurs comprises entre 2.65 et 4.39% m/m, tandis la céramique matt-painted du GRS et la céramique géométrique corinthienne, considérées comme des catégories importées, présentent des valeurs nettement plus élevées entre 6.075 et 8.98%. Il est intéressant de relever que le groupe A indigène contient proportionnellement moins de Fer que les groupes d’importation G-J105.

101 Voir la recherche de Levi, Produzione e circolazione ; pour une bonne récapitulation, voir Bettelli, Italia meridionale e mondo miceneo 98.

102 Levi, Produzione e circolazione, 94-103.

103 P. Boccuccia, P. Desogus, F. Fratini, S.T. Levi, E. Pecchioni, "Manufacturing Techniques, Raw materials and Provenance of Italo-mycenaean, Protogeometric and Early Geometric of Southern Italy and Daunian Middle Geometric at Coppa Nevigata (Foggia Province, Italy), XIII-VIII century B.C.", in: B. Fabbri (dir.), The Cultural Ceramic Heritage, 3rd European Meeting on Ancient Ceramics, Fourth Euro Ceramics 14 (1995) 82-86 ; 87, Table 4 ; pour d’autres sites comparables, dont Torre Castelluccia, cf Levi, Produzione e circolazione 94.

104 R. Laviano, I. Muntoni, F. Radina, "Technological and Compositional Characteristics of the Matt-painted Production in the South-Italian Late Bronze Age (Madonna del Petto, Barletta-BA), in : M. Vendrell-Saz, T.

Pradell, J. Molera, M. Garcia (éds), Estudis sobre ceràmica antiga, Actes del simposi sobre ceràmica antiga (1995) 29-34, spécialt 30-31 ; 32 Table 2.

105 A. Castellano, A. D'Innocenzo, C. Pagliara and F. Raho, "Composition and Origin of Iapygian Pottery from Roca Vecchia, Italy", Archaeometry 38.1 (1996) 59-65, spécialt 62 Table I.

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Pour I Fani et Otrante, les résultats obtenus par XRF (cf. APPENDIX 1.1, Tableau Appendix 1) montrent des variations de CaO de 6.53% à 17.65% (les deux échantillons du Groupe du Nord-Ouest n° 25-26 présentent des valeurs de 1.53-1.58%) et de MgO entre 1.16% et 2.84% (les deux échantillons du Groupe du Nord-Ouest n° 25-26 présentent des valeurs plus élevées entre 3.97 et 4.78%)106. Ces résultats sont donc comparables à ceux des autres sites méridionaux.

Les analyses INAA effectuées sur le matériel de Broglio et des environs ont démontré des valeurs très proches entre l’impasto et les doliums, qui doivent provenir d’une composition d’argile de base semblable, et ont permis d’introduire une nuance régionale supplémentaire, avec la présence de caesium (Cs) et le rubidium (Rb), qui dépendent fortement de la composition argileuse107. Cette nuance peut s’expliquer d’une part par les mélanges de lits d’argile. D’autre part, il est probable que dans le cas de Broglio, les argiles destinées à l’impasto et aux doliums proviennent de deux carrières d’argiles différentes, mais que les mêmes correcteurs sont employés, ajoutant une problématique supplémentaire à l'identification des provenances ; pour la période du Bronze Final et du Premier Age du Fer, ces correcteurs consistent pour les doliums en sable quartzo-feldspathique, en siltite brune et siltite fossilifère108.

Au moment de la description des pâtes dans le catalogage de notre matériel, nous avons également été confrontés à la question des inclusions, pour lesquelles nous avons choisis de maintenir une terminologie simplifiée. Toutefois, le terme d’inclusion implique une analyse nettement plus complexe de la matrice argileuse de base. Selon la terminologie introduite par S.T. Levi, nous pouvons distinguer trois types d’inclusions109 :

1. les minéraux argileux, qui composent l’argile à l’état naturel et qui sont considérés comme éléments plastiques, permettant le modelage du récipient par adjonction d’eau et sa stabilisation par évaporation et cuisson.

2. les éléments clastiques, qui font partie de la matrice naturelle de l'argile et qui peuvent éventuellement être retirés au moment de l'épuration de la pâte. Ces éléments se reconnaissent notamment à leur taille, ainsi qu’à leur distribution et leur concentration homogènes, dues aux processus de dépôt.

3. les correcteurs, qui sont également considérés comme des éléments non plastiques et qui consistent en dégraissants ajoutés volontairement au moment de la préparation de l’argile. Ces correcteurs se distinguent des éléments clastiques naturels par leur taille,

106 Voir également APPENDIX 1.2 pour les taux élevés de Ca par PIXE-PIGME (diverses provenances des échantillons).

107 Levi, Produzione e circolazione 96-99 ; pour la répartition des zones de la Sibaritide, cf. ibid. 63-69 ; 228 fig.

239 ; les analyses faites sur le matériel de Coppa Nevigata, présentent des valeur de Rb nettement différentes qu’en Sibaritide, avec de nombreuses irrégularités, cf. P. Boccuccia, P. Desogus, F. Fratini, S.T. Levi, E. Pecchioni,

"Manufacturing Techniques, Raw Materials and Provenance of Italo-mycenaean, Protogeometric and Early Geometric of Souhtern Italy and Daunian Middle Geometric at Coppa Nevigata (Foggia Province, Italy), XIII-VIII century B.C.", in: B. Fabbri (éd.), The Cultural Ceramic Heritage, 3rd European Meeting on Ancient Ceramics, Fourth Euro Ceramics 14 (1995) 84 Table 3 ; 87 Table 4.

108 Levi, Produzione e circolazione 223-226.

109 Cf. Levi, Produzione e circolazione 21-22 et réf. ; voir également R.E. Jones, Greek and Cypriot Pottery (1986) 749-760 ; Orton, Tyers, Vince, Pottery in Archaeology 113-117; W. Noll, Alte Keramiken und ihre Pigmente, Studien zu Material und Technologie (1991) 13-14 ; 40-50.

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leur disposition et leur concentration hétérogène ; en outre, ils présentent souvent des angles vifs, attestant un concassage de préparation.

Ces différents types d’inclusions sont habituellement mis en évidence par des analyses pétrographiques, sur la base de sections à lame fines, et des analyses minéralogiques par XRD (X-ray difraction) qui peuvent éventuellement être complétées par des analyses chimiques pour une meilleure compréhension de la composition de la matrice de base argileuse110.

Dans le cas du matériel catalogué pris en considération dans cette étude, nos observations sur les inclusions se fondent essentiellement sur une analyse visuelle. Les inclusions mises en évidence se situent donc principalement au niveau du troisième type d’inclusion, soit les

"correcteurs". Parmi les principaux correcteurs mis en évidence, se trouvent le calcaire (≤1-3mm), les éclats de coquillage (≤5-7mm), le quartz, le minerai de fer (≤(≤1-3mm), le mica, la chamotte, les négatifs végétaux et les éclats d’obsidienne dans le cas particulier du matériel de Lipari. Lors de notre analyse visuelle, les inclusions de calcaire et de quartz ont été testées à l'acide chlorhydrique de concentration 10%, permettant de distinguer le calcaire du quartz par réaction chimique; dans le cas d’inclusions minimes (<1mm), il n’a pas toujours été possible de distinguer le quartz de l’élément lithique. Ces inclusions ont été indiquées par la désignation combinée de quartz/calcaire.