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Chapitre I – Les tissus articulaires humains

I- 2-2 Composition de l’os

• Les cellules osseuses

L’os se compose majoritairement de deux populations cellulaires : les ostéoblastes (Ob) et les ostéoclastes (Oc) (Buckwalter and Cooper., 1987).

Les Ob représentent les cellules de la surface osseuse et sont responsables de la production des constituants de la matrice osseuse. Ils dérivent des cellules souches mésenchymateuses de la moelle osseuse ou des tissus conjonctifs avoisinants qui, sous un stimulus adéquat, vont proliférer et se différencier en pré-Ob puis en Ob matures. Ces derniers sont caractérisés par un noyau rond, un cytoplasme fortement basophile, un appareil de Golgi et un réticulum endoplasmique bien développés, et se retrouvent en général en groupe de 100 à 400 cellules cuboïdales.

Les Oc sont des cellules de la surface osseuse responsables de la résorption osseuse, et qui ont une origine monocytaire. Ce sont des cellules multinucléées géantes que l’on retrouve dans les lacunes de résorption résultant de leur activité. Contrairement aux Ob qui agissent en groupe, les Oc sont rarement plus de deux par lacune. Leurs noyaux peuvent être euchromatiques ou hétérochromatiques. La membrane basolatérale de ces cellules est enrichie en échangeur HCO3-/Cl- et Na+/K+ qui alimentent les pompes à protons et les

canaux chlore présents sur la bordure en brosse (ou membrane plissée) caractéristique des Oc, et qui permet alors de former un milieu suffisament acide au sein des lacunes de résorption pour favoriser la dissolution des minéraux de la matrice osseuse.

• La matrice osseuse

L’os est le tissu conjonctif de l’organisme le plus répandu, et ses propriétés uniques, comme la minéralisation, lui proviennent de la grande diversité des protéines composant sa matrice.

La protéine principale de cette matrice est le collagène de type I qui représente 90% de la matrice organique de l’os. Ce type de collagène est formé d’une triple hélice constituée de deux chaînes α1 identiques et d’une chaîne α2 génétiquement différente, ainsi que de deux télopeptides aux extrémités N-terminale et C-terminale permettant la polymérisation de la protéine (Belaisch and Olivier., 1998). Cette protéine représente l’échafaudage de la matrice osseuse et est le siège de la minéralisation osseuse. On relève également la présence d’autres types de collagène, tels que le collagène de type III, V et X, au cours de certaines étapes de la formation osseuse et qui pourraient influencer le diamètre des fibres de collagène de type I (Lian J.B., 1999).

On relève aussi la présence de Pg au sein de la matrice osseuse durant les stades initiaux de la formation osseuse, mais également des chaînes de GAG de grand poids moléculaire tels que le versicane et le hyaluronane qui seront remplacés avec la maturation de la matrice par la décorine et le biglycane, deux Pg de faible poids moléculaire. On ne connaît pas très bien leur fonction mais ils pourraient être importants pour l’intégrité de la matrice, et notamment en modulant la fibrillogénèse du collagène. De plus, ils seraient aussi en mesure d’influencer la prolifération et la différenciation des cellules osseuses puisque ces Pg auraient la propriété de lier et moduler l’activité du TGF-β (Xu et al., 1998a).

Parmi les autres constituants de la matrice osseuse, on compte un certain nombre d’enzymes et de protéines qui sont essentielles au contrôle de la minéralisation. Ainsi, une enzyme clé de ce processus est la phosphatase alcaline puisque son absence se caractérise par une inhibition de la minéralisation (Khosla S., 1999). En plus de cette protéine, l’ostéonectine est une autre glycoprotéine osseuse importante. Ses fonctions dans l’os seraient multiples et impliqueraient la croissance et la maturation des Ob, ainsi que la minéralisation (Gehron R., 1996) (Lane and Sage., 1994). La minéralisation de la matrice est aussi régulée par la présence de trois protéines contenant des résidus acides γ-carboxylés : la "matrix-gla-protein", l’ostéocalcine et la protéine S. La production des

résidus γ-carboxylés augmente l’affinité calcique de ces protéines, caractéristique jouant un rôle clé dans le contrôle de la minéralisation (Lian et al., 1998).

Un des aspects cellulaires les plus importants est l’interaction des cellules avec la matrice extracellulaire qui leur permet de répondre directement aux différents stimuli externes, et ainsi de moduler des fonctions cellulaires spécifiques comme la migration, la prolifération et la différenciation. Au niveau osseux, ces interactions sont primordiales puisqu’elles influencent le remodelage osseux. Elles impliquent des liaisons cellulaires avec la matrice via des récepteurs de surface qui induiront les signaux intracellulaires. Les cellules osseuses produisent au moins neuf protéines qui peuvent influencer l’attachement cellulaire. Parmi celles-ci, on trouve le collagène de type I, la fibronectine, l’ostéopontine et la sialoprotéine osseuse (Lian J.B., 1999). Cette dernière protéine est spécifique à la matrice osseuse et sa présence est fortement corrélée à l’apparition de minéraux (Ganss et al., 1999). L’ostéopontine et la sialoprotéine osseuse sont toutes deux connues pour assurer l’ancrage des Oc à l’os. Cependant, leurs fonctions biologiques ne sont pas clairement définies puisque la délétion de ces protéines ne semble pas créer une matrice osseuse anormale (Liaw et al., 1998). Finalement, le niveau d’expression varie d’une protéine à une autre, tout comme celui des intégrines qui les lient. Cette variabilité d’expression indique que les interactions cellules-matrice sont modifiées en fonction du stade de maturation de la matrice suggérant que ces protéines pourraient jouer un rôle dans cette maturation.

I-2-3. Remodelage osseux

• Mécanisme général

Le remodelage osseux est un processus complexe qui fait intervenir deux activités opposées mais complémentaires conduisant au maintien de la masse osseuse : la formation du tissu osseux par les Ob et sa destruction par les Oc. C’est ainsi que le tissu osseux peut remplir son rôle métabolique en libérant des sels minéraux lors de la résorption, et son rôle de soutien en adaptant sa structure architecturale aux changements des conditions

mécaniques. Le signal qui déclenche le remodelage osseux peut être de nature mécanique, comme une altération de l’architecture locale de l’os (fracture, prise de poids…) (Turner and Pavalko., 1998), ou hormonale, comme c’est le cas dans l’ostéoporose où une diminution du taux d’œstrogène entraîne une augmentation du nombre et de l’activité des Oc (Pacifici R., 1998). Le remodelage en lui-même présente une succession de quatre phases parfaitement définies : activation, résorption, inversion et formation (Hill PA., 1998) (cf. Figure 5).

À l’état quiescent, la surface de la matrice extracellulaire de l’os est recouverte par une couche d’Ob, ou cellules bordantes, qui empêche l’accès de la matrice aux Oc. Ces cellules bordantes ont une activité métabolique très réduite, mais peuvent se multiplier ou se différencier à nouveau en Ob fonctionnels sous l’influence de stimuli mécaniques ou moléculaires. Lors de la phase d’activation, sous l’action de facteurs pro-résorptifs, les Ob se rétractent et laissent la place aux précurseurs mononucléés des Oc, ou pré-Oc, qui peuvent alors adhérer à la matrice.

Les Ob situés à proximité des pré-Oc vont favoriser la différenciation de ceux-ci en Oc matures via la production de différentes cytokines qui vont interagir avec des récepteurs présents à la surface des pré-Oc. Les cellules ostéoclastiques ainsi différenciées résorbent l’os ancien et forment une lacune. C’est la phase de résorption. Elle débute par l’adhésion des pré-Oc à la surface osseuse au niveau de la zone claire et par la constitution d’une zone de scellement conduisant à la polarisation de la cellule et à la formation de la bordure en brosse. Cette adhésion est rendue possible par la présence de membranes spécialisées portant à leur surface des intégrines (α2β1 et αvβ3), de la taline et de la vinculine associées à

des faisceaux d’actine.

La zone claire délimite ainsi la chambre de résorption où le pH est acide. Cette acidité du milieu au niveau du compartiment sous-ostéoclastique est entretenue par des pompes à protons (anhydrase carbonique) spécifiques de l’Oc qui expulsent les ions H+. Cette acidité ainsi obtenue facilite la dissolution de la phase minérale de l’os, représentée par les cristaux

d’hydroxyapatite, entraînant la libération de calcium et de phosphore, et favorise, par l’intermédiaire de différentes cascades d’activation, les fonctions des enzymes protéolytiques (métalloprotéases et cathepsines) conduisant à la destruction de la matrice organique.

La dégradation de la matrice entraîne une augmentation du taux de calcium intracellulaire des Oc provoquant une désorganisation des podosomes, et par conséquent le détachement des Oc. La phase d’inversion peut alors commencer. Les Oc se détachent de la surface osseuse et meurent par apoptose. Ils sont ensuite remplacés par des cellules mononucléées de type macrophagique qui vont éliminer les derniers résidus de matrice présents dans le fond de la lacune.

L’ultime phase de ce cycle de remodelage tissulaire est la phase de formation osseuse. Elle est caractérisée par le recrutement des Ob au fond de la lacune de résorption qu’ils comblent en apposant une nouvelle matrice collagénique non minéralisée (ou ostéoïde) qui sera secondairement minéralisée.

• La triade moléculaire OPG/RANK/RANKL

Le processus de remodelage osseux est hautement régulé par l’action de nombreux facteurs locaux et systémiques. La découverte en 1997 de l’Ostéoprotégérine (OPG) et l’identification consécutive de son ligand, le "Receptor Activator of Nuclear Factor kappa B Ligand" (RANKL) et de son récepteur membranaire RANK, ont révolutionné les connaissances sur les mécanismes moléculaires de la régulation du remodelage osseux (Simonet et al., 1997) (Wong et al., 1997) (Anderson et al., 1997). Ainsi, cette triade moléculaire, en synergie avec d’autres voies telle que la voie Wnt, contribue à l’équilibre entre la résorption et l’apposition osseuse.

Ainsi, RANKL, exprimé par les cellules ostéoblastiques, est un facteur pro-résorptif qui en se fixant à son récepteur membranaire RANK, exprimé à la surface des cellules

préostéoclastiques, stimule la différenciation et l’activation de ces pré-Oc en Oc matures. L’OPG, membre comme RANK de la superfamille des récepteurs au "Tumor Necrosis Factor" (TNF), est synthétisée par les Ob (Simonet et al., 1997) (Yasuda et al., 1998). Cette protéine est sécrétée dans l’environnement osseux, et agit comme un récepteur soluble et compétiteur de RANKL en se liant à ce dernier et en empêchant ainsi la fixation de RANKL à RANK (Simonet et al., 1997) (Shalhoub et al., 1999). De ce fait, l’OPG exerce un effet anti-résorptif puisqu’il inhibe la formation d’Oc matures.

Figure 5 : Étapes du remodelage osseux (Copyright © 2010 Nathalie Amiable) QUIESCENCE ACTIVATION FORMATION Ostéoclastes actifs Pré-ostéoclastes Pré-ostéoblastes Ostéoblastes Cellules macrophagiques Cellules bordantes RESORPTION INVERSION Os calcifié ancien Ostéocytes Ostéoïde non minéralisée

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