Chapitre IV- Modulation des voies de biosynthèse des chaînes de GAGs par des
IV. 2 - Les composés β-D-xylosidiques dans le cadre de la réparation du cartilage articulaire76
Si la recherche de xylosides efficaces dans l'initiation de la synthèse des chaînes de GAGs est
bien avancée, la question de la relevance biologique et/ou pharmacologique de ce type de
composés est légitime. Puisque les β-D-xylosides étaient connus très tôt pour stimuler la
biosynthèse des chaînes de CS in vitro et in vivo, le premier contexte biologique dans lequel
l'intérêt de ces xylosides a été discuté a été celui du tissu cartilagineux. Dans l'exemple du
chondrocyte nanomélique mutant incapable de synthétiser des PGs, la présence de
β-D-xylosides permettait d'atteindre un niveau de synthèse en CS comparable à celui obtenu avec
les chondrocytes sains (Stearns K et al., 1979). Cet effet bénéfique du composé est d'autant
plus remarquable que les chaînes synthétisées apparaissaient comparables en taille et en
composition osidique à celles produites par les chondrocytes sains (Stearns K et al., 1979). En
outre, ces xylosides ne semblent affecter ni le niveau de synthèse du collagène ni sa
distribution au sein de la matrice (Dondi P. et al., 1976). Il a d'ailleurs été indiqué que le
niveau de glycosylation du collagène IX n'était pas non plus perturbé en présence du p
-nitrophényl-β-D-xylose (Chandrasekhar et al., 1987). Dans ce sens, les composés
β-D-xylosidiques ont été envisagés très tôt comme des agents pouvant potentiellement être
employés pour soulager certains cas d'arthrites (Carmichael et al., 1977 ; Palmoski et al.,
1982). Cependant, le comportement bénéfique de ces xylosides exogènes vis-à-vis du tissu
cartilagineux a dû être rapidement reconsidéré et pondéré. D'une part, parce que de nombreux
travaux ont montré que les GAGs synthétisés à partir du 4-Methylumbelliferyl-β-D-xylose
étaient plus courts que ceux ancrés sur les protéines porteuses des PGs (Gibson et al., 1977 ;
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Gibson et Segen 1977). D'autre part, des travaux plus récents réalisés sur des lignées
cellulaires issues du chondrosarcome chez le rat confirment que l'addition de composés
β-D-xylosidiques conduit à une diminution significative et généralisée de la glycosylation des PGs
endogènes (Mitchell et al., 1982). Enfin, plus récemment, il a été montré qu'un déficit en PGs
glycosylés du fait de leur compétition avec les β-D-xylosides pourrait être à l'origine d'une
altération de la structure du réseau de collagène empêchant la constitution de la matrice
cartilagineuse (Bastiaansen-Jenniskens et al., 2009). Ensemble, ces données suggèrent
clairement que si les composés β-D-xylosidiques augmentent la biosynthèse des chaînes de
GAGs, en particulier celle des CS dans les chondrocytes, il semble que la qualité de ces
derniers ne permet ni l'élaboration, ni la structuration d'une matrice cartilagineuse répondant
aux qualités mécaniques requises pour une bonne fonctionnalité du tissu. Toutefois, dans le
cadre de la réparation du cartilage, les composés β-D-xylosidiques restent des agents
pharmacologiques potentiellement importants pouvant moduler le ratio collagènes/PGs
glycosylés, paramètre qui semble être un facteur déterminant de la plasticité bio-mécanique
du cartilage (Williams et al., 2011).
IV.3 - Les composés β-D-xylosidiques et la régénération/réparation de la peau
La capacité des β-D-xylosides à synthétiser les chaînes de GAGs a permis très tôt de les
envisager comme des agents pouvant potentiellement modifier l'équilibre biochimique et donc
biomécanique du tissu dermique. Dans ce sens, les premiers essais réalisés sur des fibroblastes
de peau humaine en culture ont montré que le p-nitrophényl-β-D-xylose augmentait
significativement le taux de GAGs solubles synthétisés, tout en réduisant la biosynthèse du
collagène (Schwartz et al., 1975). Le point encourageant de cette étude réside dans le fait que
cette augmentation de la biosynthèse des GAGs est observable aussi bien dans les fibroblastes
sains que dans ceux issus de patients atteints de maladies impactant le tissus conjonctif tels
que le scléroderme (Cabral et al., 1983), la maladie de Hurler ou de Marfan (Hopwood et al.,
1977), le syndrome de Coffin-Lowry (Beck et al., 1983) ou encore celui de Lowe (Harper et
al., 1987). De plus, il est remarquable de constater que la substitution des protéines porteuses
des PGs par ces β-D-xylosides semble ne pas affecter le niveau de sulfatation des chaînes de
GAGs dans ce contexte (Beck et al., 1983 ; Harper et al., 1987). Si les β-D-xylosides
permettent donc sans ambiguïté la biosynthèse en quantité de GAGs correctement sulfatés, il
était nécessaire d'un point de vue pharmacologique de déterminer le type de GAGs
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majoritairement bio-synthétisés à partir de ces composés afin d'asseoir ces derniers comme
agents thérapeutiques/dermatologiques. D'après les premiers travaux, il semble que l'addition
de p-nitrophényl-β-D-xylose sur des fibroblastes humains en culture contribue essentiellement
à la biosynthèse de CS et minoritairement à celles de DS (Hopwood et al., 1977 ; Glössl et al.,
1984). Toutefois, il apparaît que la balance CS/DS puisse être régulée par la concentration en
p-nitrophényl-β-D-xylose utilisée. En effet, pour de faibles concentrations en p
-nitrophényl-β-D-xylose, les GAGs obtenus sont principalement des DS. Au contraire, pour de fortes
concentrations en β-D-xyloside les CS sont le type de GAGs prédominant (Cöster et al.,
1991). La même année, d'autres travaux ont montré que la substitution du groupement p
-nitrophényl- par un groupement 4-Methylumbelliferyl- favorisait la biosynthèse des DS
(Takagaki et al., 1991). Ensemble, ces données démontrent que la nature de l'aglycone couplé
au composé β-D-xylosidique influence la nature des GAGs bio-synthétisés par les fibroblastes.
Actuellement, il n'y a pas d'explication claire permettant de faire un lien direct entre la nature
de l'aglycone du β-D-xyloside et l'orientation de la biosynthèse des chaînes de GAGs par les
fibroblastes vers les DS ou les CS. Cependant, une analyse poussée portant sur les chaînes de
GAGs initiées par le p-nitrophényl-β-D-xylose a montré qu'aucune substitution n'avait affecté
le résidu xylose (Fransson et al., 1992). Au contraire, ce même résidu xylose a été retrouvé
3-O-sulfaté (parmi d'autres fragments xylosidiques déjà identifiés) lorsque les chaînes de GAGs
ont été initiées à partir du 4-Methylumbelliferyl-β-D-xylose (Tazawa et al., 1998). Il est donc
plausible qu'un mécanisme de régulation fin impliquant des modifications sur le résidu xylose
puisse être à l'origine de l'orientation sélective de la biosynthèse des chaînes de GAGs vers
celle des DS ou CS et que ce mécanisme dépende de la nature de l'aglycone couplé au
β-D-xyloside. Dans des contextes cosmétologique et dermatologique, il aurait été nécessaire que
les xylosides proposés permettent également d'initier la biosynthèse des chaînes de HS
puisque ces derniers sont impliqués dans les processus de cicatrisation mais également dans
les processus de régénération de la peau (Olczyk et al., 2015). Dans cette démarche, plusieurs
études ont récemment mis en évidence une nouvelle classe de xylosides capable d'initier la
biosynthèse de chaînes de HS dans la peau humaine : les C-xylosides dont le membre à
l'honneur est actuellement le C-beta-D-xylopyranoside-2-hydroxy-propane (Pineau et
al., 2008 ; Pineau et al., 2011). Les premières études réalisées au sein de la jonction
épiderme/derme montraient que l'ajout de C-xyloside serait capable de densifier la membrane
basale épidermique, de renforcer la jonction derme/épiderme et de stimuler l'expression du
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collagène VII (Sok et al., 2008). Toutefois, les effets bénéfiques avancés concernant ces
derniers composés sur la réparation tissulaire doivent être considérés avec précaution à ce
stade de la recherche. En effet, des travaux réalisés indépendamment par une autre équipe ont
récemment démontré que les chaînes de GAGs initiées par ces mêmes xylosides seraient
exclusivement constituées de CS et DS, de tailles plus courtes, et moins sulfatées modifiant
par conséquent la capacité de la cellule à interagir avec certains facteurs de croissance par
exemple (Vassal-Stermann et al., 2012). Il sera donc nécessaire d'aller plus loin dans la
caractérisation biologique de ces C-xylosides.
Dans le document
Recherche de nouvelles stratégies thérapeutiques ciblant les enzymes de biosynthèse des glycosaminoglycanes
(Page 78-81)