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Comportement du bourrelet : modèle des arches sèches

Dans un cas de pincement, les lignes triples à l’équilibre sont bordées d’un bourrelet. Une description intéressante de ce type de bourrelet immobile se trouve dans la littérature concer-nant les arches sèches. Les arches sèches se forment lorsqu’une zone sèche s’ouvre dans un film s’écoulant de façon uniforme. Sous certaines conditions cette zone est stable, et elle va former une arche dont le sommet est l’endroit de l’ouverture initiale du film, et qui s’étend dans la direction de l’écoulement. La forme de la limite entre la zone sèche et le film liquide prend la forme d’une arche.

Figure 1.39 – Schéma d’une arche sèche, d’après Podgorski [47]

Ces arches ont été étudiées par Podgorski [47] et Sebilleau et al. [54] en utilisant comme liquide des huiles PDMS. Les expériences, réalisées à débit fixé, sont comparées à des modèles prévoyant la position de la ligne triple et la relation entre le rayon de courbure au sommet de l’arche et le débit linéique. Ces modèles permettent également de définir le débit critique à partir duquel l’arche n’est plus stable.

Présentation du modèle

Ces modèles se basent sur trois équations écrites en considérant un élément du bourrelet tel que la ligne triple en ce point fasse un angle ψ avec la direction verticale, comme représenté sur la figure 1.39 :

— un bilan des forces projeté dans la direction normale à la ligne de contact décrite par le vecteur le vecteur ~eψ

— l’équation de conservation de la masse

— l’expression de la vitesse moyenne hU i dans la section du bourrelet.

Pour les différents modèles, l’équation de conservation de la masse ne change pas. Ce bilan indique que le débit sortant de la section d’arche sèche correspondant à l’angle ψ et d’abscisse

x est égal au débit injecté dans le film en amont, entre x=0 et l’abscisse x correspondant à la

section considérée (figure 1.40).

Figure 1.40 – A gauche : repère associé à la ligne triple. À partir du vecteur ~eψ et du vecteur

~ez une base orthonormée directe du plan de l’écoulement est formée avec le vecteur ~eψ⊥. A droite : conservation du débit dans le bourrelet, avec L la largeur.

Avec L la largeur du bourrelet. Le terme L cos ψ peut être négligé : près du sommet de l’arche ψ tend vers π/2 et L cos ψ tend vers 0, et loin du sommet, l’abscisse est suffisamment grande pour que cette simplification soit valide. La conservation de la masse s’exprime donc :

Γx = V (ψ)A(ψ) (1.73) Trois modèles présentant un degré de complexité croissant ont été développés par ces au-teurs.

Modèle simple de Podgorski [47]

Ce modèle se base sur un bilan des forces dans la direction de ~eψ dans lequel n’interviennent que le poids de l’élément et la résultante des forces capillaires. Le poids de la section du bourrelet est donné par :

~

P = ρS(ψ) sin α ~g = −ρgA(ψ)(cos α ~ez+ sin α ~ey) (1.74)

S(ψ) est calculée en considérant que la section du bourrelet est une calotte circulaire. Dans

la même direction, la résultante des forces de tension superficielle s’écrit :

~

Fγ = γ(1 − cos θ) ~eψ (1.75) Le bilan des forces s’écrit donc :

γ(1 − cos θ) = ρgS(ψ) sin α sin ψ (1.76)

L’écoulement du liquide dans le bourrelet peut être considéré comme indépendant de l’écou-lement du film extérieur. Dans le cadre de l’hypothèse de lubrification, l’écoul’écou-lement est piloté par l’équilibre entre les forces de gravité et visqueuses. Ainsi dans la direction de l’écoulement, l’écoulement peut être considéré établi et la vitesse à l’intérieur du bourrelet, est alors donnée par la projection de l’équation de quantité de mouvement dans cette direction :

La réécriture du laplacien par Podgorski [47] fait apparaître la hauteur maximale du bour-relet H, la vitesse moyenne hV i :

∆~v = 1

m

hV i

H2 (1.78)

Où m est une fonction dépendant uniquement de l’angle de contact lorsque l’hypothèse de la circularité du profil du bourrelet est appliquée. Dans cette hypothèse, la coefficient m varie entre 0.22 et 0.25. L’expression de cette fonction ainsi que sa démonstration est donnée dans l’annexe E.

À partir de ce modèle simple (conservation de la masse 1.73, bilan des forces 1.76et vitesse moyenne 1.78), est développée l’équation de l’arche sèche, paramétrée par l’angle ψ présenté sur la figure 1.40. L’abscisse en fonction de ψ s’exprime à partir des trois équations comme :

x = Rcos ψ

sin2ψ (1.79)

L’ordonnée se déduit par différentiation de l’abscisse, en utilisant l’angle d’inclinaison ψ de la tangente à la ligne triple et en écrivant que x (éq. 1.79) est de la forme x = f (ψ).

y = R 3 1 − 3 cos2ψ sin3ψ − 1 ! (1.80)

R est le rayon de courbure au sommet de l’arche (la démonstration est donnée en annexe),

et son expression en fonction des propriétés du fluide et de la forme du bourrelet est donnée par : R = m(θ)f1(θ) (1 − cos θ)2 l 2 c sin α V Γ (1.81)

De même que m, f1est une fonction dépendant uniquement de l’angle de contact déterminée à partir de l’hypothèse de la circularité du profil du bourrelet. Elle correspond au rapport entre le carré de la hauteur maximale du bourrelet H et de sa section A. Sa démonstration est donnée dans l’annexe E f1(θ) = H 2 S = (1 − cos θ)2 θ − sin θ cos θ (1.82) m(θ) = 1 (1 − cos θ)2 2 3 sin θ θ − sin θ cos θ 15 8 θ sin θ3 2θ sin θ − 13 8 cos θ − 1 4cos 3θ ! (1.83)

Pour les huiles silicones étudiées par Podgorski [47] sur du verre traité, le modèle permet de modéliser correctement le rayon crirtique au sommet, sauf quand la pente de la plaque de-vient faible, et ne permet que d’avoir une valeur qualitative. L’ajout de termes supplémentaire dans le bilan, comme présenté par Podgorski et al. [48], permet d’affiner les resultats mais leur incorporation ne change pas grand chose à forte pente.

Cependant ce bilan simple des forces au niveau de la ligne triple permet d’obtenir une forme de la ligne triple très proche de celle observée expérimentalement, comme montré sur la figure

1.41, à condition de déterminer directement sur l’arche expérimentale, le rayon de courbure au sommet. Exprimer ce rayon de courbure expérimental sous la forme du modèle donne des valeurs de m supérieures à ce que prévoit l’expression théorique.

Figure 1.41 – A gauche : comparaison de Podgorski [47] entre une ligne triple expérimentale et la prévision du modèle simplifié avec le rayon de courbure expérimental. A droite : comparaison de Sebilleau et al. [54] entre la ligne triple prédite par le modèle simplifié et un modèle développé.

Bilan des forces développé de Podgorski [47]

Pour améliorer ces premiers résultats, deux modèles étendus ont été proposés, initialement développés par Podgorski [47] et raffinés par Sebilleau et al. [54]. Ces modèles ne considèrent plus uniquement une section mais sur un élément tridimensionnel, et consistent à projeter dans la direction normale à la ligne triple l’équilibre :

— le poids de l’élément ~P

— les forces capillaires, dans lesquelles sont pris en compte les effets de courbure de l’élément

~

Σ

— la pression hydrostatique du film ~FP

— l’inertie du film extérieur ~FI

Les expressions de ces différentes forces sont données dans l’annexe 3. L’équilibre résultant s’écrit : γ(1 − cos θ) = ρgS(ψ) 1 −S(ψ) 1/2 R(ψ) sin θ (θ − sin θ cos θ)1/2 ! sin α sin ψ (1.84) S(ψ) 1/2 R(ψ) (θ − sin θ cos θ) 1/2+ 1 2ρg cos α h2 f 2 + 2 15h 5 f ρ3g2sin2α η2 sin2ψ

Ce bilan est trop complexe pour pouvoir en déduire de façon analytique, la paramétrisation de l’arche. Cependant, le bilan ainsi développé est intéressant à étudier, car il s’applique sur toutes les lignes triples courbées.

Le modèle de Sebilleau et al. [54] modifie l’équation du bilan de quantité de mouvement à l’intérieur du bourrelet, et est présenté dans l’annexe 3.

3.5 Conclusion

La transition film-ruisselets sur une plaque plane a été étudiée dans la littérature sur deux configurations : à volume constant et à débit constant. Différents comportements sont observés,

des bourrelets peuvent apparaître ou non lors de la transition. Le comportement du film à la ligne triple est caractérisé par une recirculation du liquide de type ” chenille”.

Cette transition est modélisée par l’amplification d’une instabilité périodique de la ligne de contact. Plusieurs travaux théoriques et expérimentaux ont permis de fournir des expressions, présentées dans le tableau1.5, permettant de calculer la longueur d’onde de l’instabilité la plus amplifiée.

Table 1.5 – Modèles permettant de calculer la longueur d’onde λ de la transition film-ruisselets.

Expression de la longueur d’onde λ

Huppert [25] 7.5A1/2 γ ρg sin α

1/3

Troian et al. [60] 14l

Jerrett et de Bruyn [26] 14.1l sin α

0.12

19.2l sin α0.21

Johnson et al. [27] 9.2 href

(3Ca)0.45

Slade [56] 20href

(6Ca)0.4 − 1.51href6(6Ca)1−cos θ−2/3

Le cadre théorique de ces études concerne les liquides totalement mouillants, mais les cor-rélations obtenues peuvent être extrapolées aux liquides partiellement mouillants.

Les effets de la tension de surface et de l’angle de contact ont été étudiés sur ces configu-rations, de même que celui du débit liquide. Dans les cas à forts débits liquides, on observe la configuration du pincement, qui conduit à la formation d’un seul ruisselet. Cette configuration permet par sa simplicité d’analyser les différents phénomènes physiques liés au mouillage et sera donc retenue comme première configuration d’étude pour la thèse. Il s’agira notamment d’étudier l’effet de la viscosité, encore peu utilisée dans la littérature.

Cette configuration est analogue à celle des arches sèches, sur laquelle ont été développés des modèles de bilan de forces pour déterminer le tracé de la ligne triple. Cette approche sera utilisée sur les cas expérimentaux de pincements réalisés sur la configuration de la plaque inclinée dans la suite de cette thèse.

Figure 1.42 – Évolution au cours du temps d’une goutte de PDMS (ν=52 cm s−2) de 80 µl pur une vitesse de rotation de 448 tr/min. D’après Fraysse et Homsy [19].

La variation de la vitesse de rotation ω permet de modifier l’intensité des forces s’appli-quant sur le liquide, ce qui n’est pas possible sur la plaque inclinée. Cette configuration permet donc d’atteindre une gamme d’intensité beaucoup plus grande pour l’étude de la transition film/ruisselets.

Pour la modélisation de l’écoulement sur un disque tournant, les coordonnées cylindriques (~er,~eψ, ~ez) sont utilisées. Les équations sont écrites dans le référentiel tournant associé au disque : son origine est placée au centre, l’axe vertical ~ez est l’axe de rotation et le vecteur rotation est donné par ~ω = ω~ez, où ω est la vitesse de rotation (en rad.s−1).