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CHAPITRE 5 : INFLUENCE DE L’INTERFACE F/M SUR LE

2. COMPORTEMENT MÉCANIQUE DES COMPOSITES EN TRACTION

2.3 Comportement des composites renforcés par les fibres de carbone

D’après le tableau V.6, les composites T300/SiC et T300/PyC/SiC (ie. sans traitement préalable sur les fibres) présentent un comportement mécanique fragile avec une faible non linéarité du comportement et une déformation à la rupture faible de 0,03% [14][15][16][17]. Pourtant, il était espéré

qu’en présence d’une interphase PyC, la déformation à rupture du composite T300/PyC/SiC soit plus importante. Or, la déformation ainsi que la contrainte à la rupture (28 MPa) du composite T300/PyC/SiC sont équivalentes à celles du composite T300/SiC (figure V.15). Ces composites possèdent aussi un module d’Young faible. Cela serait dû à la fois au fait que les composites renforcés par les fibres de carbone présentent un grand nombre de porosités et que les contraintes résiduelles d’origine thermique engendrent une multifissuration et une décohésion fibres/matrice avant même que le composite soit sollicité mécaniquement.

Il est aussi remarqué que la perte de la linéarité des deux courbes à une déformation d’environ 0,015 % et à une contrainte d’environ 17 MPa pour les deux composites n’est pas accompagnée d’un signal d’émission d’acoustique. Ce signal apparait plus tardivement (ε ~ 0,025% et σ ~ 25 MPa pour T300/SiC et T300/PyC/SiC) et correspond à l’apparition de la première fissure matricielle. Ce début différé de l’émission acoustique peut être dû à la pré-fissuration de ces composites engendrée par l’action des contraintes thermiques résiduelles, lors de leur refroidissement, après élaboration par CVI (chapitre IV §4.4) [18][19]. Par la suite, le nombre

d’évènements, proportionnel à celui des fissures générées au sein du matériau, est faible. Lorsque les composites sont renforcés par les fibres T300THT (fibres traitées à 1600°C sous Ar), le comportement mécanique est considérablement amélioré avec une tolérance à la déformation qui augmente d’un ordre de grandeur (r ~ 0,5 %) (tableau V.6). Le module d’Young ainsi que la

a. b. Matrice SiC Fibre TSA3 PyC Carbone de surface de fibre PyC avec des

CONFIDENTIEL CEA – REPRODUCTION INTERDITE 140 déformation à la rupture entre les composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC sont du même ordre de grandeur. L’interphase ne joue pas un rôle majeur sur la rigidité comme sur les modes de rupture du composite. Les composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC subissent aussi une perte de linéarité vers 0,014 % de déformation qui n’est pas corrélée avec le début de l’émission acoustique (figure V.16). L’émission acoustique, apparaissant vers 0,03 % de déformation, provient comme pour les composites renforcés par les fibres T300 d’une pré- fissuration due aux contraintes thermiques résiduelles.

Ensuite, l’évolution de l’émission acoustique évolue linéairement avec la déformation. La saturation des fissurations matricielles n’est pas observée pour ces composites : le nombre de coups continue à augmenter de façon croissante jusqu’à la rupture du matériau. A l’aide des résultats obtenus après essais de traction monotone, il a été constaté que l’introduction d’une interphase de PyC ne modifie pas les propriétés mécaniques des composites C/SiC. En effet, la contrainte et la déformation à rupture pour les deux classes de matériaux ne sont pas modifiées en présence de cette interphase. Par contre, il est clairement mis en évidence que le traitement thermique imposé aux fibres a une influence bénéfique sur la tenue à la sollicitation mécanique des composites [20]. Les modifications engendrées par ce traitement sur l’organisation des plans de

carbone en surface des fibres T300 présentées au paragraphe 4.2.1 du chapitre III ont diminué l’intensité du couplage fibre/matrice.

Tableau V.6 - Principales caractéristiques mécaniques des composites renforcés par les fibres T300 ou T300THT après essai de traction monotone : E (GPa), r (MPa), r (%)

Figure V.15 - Courbes contrainte-déformation et émission acoustique des composites T300/SiC et T300/PyC/SiC après essai de traction monotone

E (GPa) r (MPa) r (%)

T300/SiC 103 28 0,03

T300THT/SiC 102 193 0,50

T300/PyC/SiC 98 29 0,03

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Figure V.16 - Courbes contrainte-déformation et émission acoustique des composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC après essai de traction monotone

D’après l’observation des éprouvettes de composites dans le sens longitudinal et la mesure de leur pas de fissuration (tableau V.7), après essai mécanique, une densité de fissures plus élevée pour les composites renforcés par les fibres T300THT est remarquée en comparaison aux composites renforcés par les fibres T300 (figures V.17 a. et .b.). Il est intéressant de noter que bien que les composites à base de renforts T300 présentent un comportement mécanique quasi-fragile, une multifissuration périodique est observée. Ces fissures sont générées lors du refroidissement des composites à température ambiante lors de la fabrication des matériaux. Pour les composites à renforts T300THT, le pas de fissuration résulte de la contribution de la sollicitation mécanique et des contraintes thermiques générées lors de l’élaboration. Les composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC présentent des valeurs de pas de fissuration proches de celles des composites SiC/SiC renforcés par les fibres HNS. Par contre, comme la similitude des propriétés mécaniques l’a montré (figure V.16) la présence du pyrocarbone ne modifie pas significativement la densité de fissures dans la matrice que la fibre renfort soit ou non traitée thermiquement.

Figure V.17 - Faciès de rupture dans le sens longitudinal des composites T300/PyC/SiC (a.) et T300THT/PyC/SiC (b.) observés au microscope optique dans le sens longitudinal

50 µm 50 µm

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Tableau V.7 - Pas de fissuration interne et externe pour les composites renforcés par les fibres T300 et les fibres T300THT

2.3.2 Traction cyclée

Les caractéristiques mécaniques des composites renforcés par les fibres T300 et T300THT obtenues après essais de traction cyclée sont répertoriées dans le tableau V.8 et concordent avec les résultats obtenus au cours des essais de traction monotone. Vu les faibles déformations à la rupture des composites en traction monotone, les cycles de chargement et de déchargement sont réalisés à des pas de déformation de 0,005% (au lieu de 0,05 %) pour observer d’éventuelles boucles d’hystérésis au cours de la déformation longitudinale de ces échantillons. D’après les courbes contrainte-déformation de la figure V.18, les composites T300/SiC et T300/PyC/SiC rompent après un nombre restreint de cycles, avec une faible hystérésis. Sur les courbes type des composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC (figure V.19), plusieurs boucles d’hystérésis sont visibles et sont associées à des phénomènes de glissement à l’interface F/M. L’entrave à la re-fermeture des fissures en fin de déchargement est remarquée sur les derniers cycles. Les composites renforcés par les fibres T300THT conservent leur comportement pseudo-ductile au cours de ces essais cyclés avec des déformations à la rupture proches de 0,5 %.

L’évolution du module réduit E/E0 et celle des déformations résiduelles des composites

T300/SiC et T300/PyC/SiC n’ont pas été interprétées étant donné que ces matériaux cassent à de trop faibles déformations. Le module réduit des composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC diminue jusqu’à une déformation de 0,3% (figure V.20 a.). La contribution de la matrice à la reprise de l’effort mécanique diminue fortement jusqu’à ce que les fils longitudinaux contribuent seuls à la reprise de l’effort mécanique. La présence du pyrocarbone ne limite pas significativement la formation de déformations résiduelles au sein du composite T300THT/PyC/SiC (εRes ~ 0,1 %) (figure V.20 b.). Dans les deux cas, la multifissuration

matricielle (induite par les contraintes thermiques résiduelles et par la charge cyclique) associée aux décohésions fibres/matrice (favorisée par les modifications de la structure de la fibre) autorisent le glissement des fibres, lors de ces tractions cyclées. La non fermeture des cycles témoignent d’une friction aux interfaces.

Tableau V.8 - Principales caractéristiques mécaniques des composites renforcés par les fibres T300 ou T300THT après essai de traction cyclé : E (GPa), r (MPa), r (%)

Pas de fissuration externe (µm) Pas de fissuration interne (µm) T300/SiC 409 (± 165) 278 (± 153) T300THT/SiC 172 (± 70) 128 (± 50) T300/PyC/SiC 361 (± 188) 252 (± 130) T300THT/PyC/SiC 183 (± 70) 147 (± 55) E (GPa) r (MPa) r (%) T300/SiC 107 (± 5,4) 25 (± 10) 0,03 (±0,01) T300THT/SiC 106 (± 9,7) 176 (±13) 0,47 (±0,02) T300/PyC/SiC 102 (± 1,3) 18 (± 14) 0,03 (±0,01) T300THT/PyC/SiC 104 (± 2,2) 192 (± 17) 0,52 (±0,03)

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Figure V.18 - Courbes contrainte-déformation et émission acoustique des composites T300/SiC et T300/PyC/SiC après essai de traction cyclée

Figure V.19 - Courbes contrainte-déformation et émission acoustique des composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC après essai de traction cyclée

Figure V.20 - Evolution du module réduit des composites à renforts T300THT en fonction de la déformation (a.) – Evolution des déformations résiduelles des composites à renforts T300THT en fonction

de la déformation (b.)

CONFIDENTIEL CEA – REPRODUCTION INTERDITE 144 2.3.3 Mécanismes d’endommagement à l’interface fibre/matrice

Le faciès de rupture des composites à renforts T300 ne présente pas de déchaussement des fibres du fait du comportement fragile de ces matériaux (figure V.21 a.). Les contraintes résiduelles d’origine thermique ont d’emblée fragilisé le matériau et les fissures ne sont pas déviées à l’interface (figures V.22 a. et V.22 b.). Elles traversent les fibres, même en présence de PyC qui ne joue donc pas son rôle de déviateur de fissures. Au contraire, un déchaussement des fibres T300THT est observé pour les composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC (figure V.21 b.) également pré-fissurés.

Figure V.21 - Images MEB des faciès de rupture des composites T300/PyC/SiC (a.) et T300THT/PyC/SiC (b.)

Figure V.22 - Images MEB (a.) et METHR (b.) de fibres T300 fissurées au sein de composites T300/PyC/SiC après essai de traction

Pour les composites T300THT/SiC, la rupture induit des décohésions entre la matrice SiC et la surface des fibres (figure V.23 a.). Pour les composites T300THT/PyC/SiC, celle-ci s’effectue entre l’interphase de pyrocarbone et la surface des fibres (figure V.23 b.). D’après les chapitres IV §4.3 et §4.4, les observations MET ont semblé montrer que la déviation des fissures matricielles induites par les contraintes résiduelles d’origine thermique pouvait soit intervenir au sein des premiers nanomètres des fibres T300THT, soit en extrême surface de ces fibres. Il est difficile de localiser précisément lors de l’observation de ces interfaces, même en haute résolution, la zone de

1 mm 1 mm a. b. 5 µm a. b. Matrice SiC Fibre T300 PyC

CONFIDENTIEL CEA – REPRODUCTION INTERDITE 145 décohésion après rupture en traction. Le comportement mécanique similaire des composites T300THT/SiC et T300THT/PyC/SiC montre que la tenue à l’endommagement acquise n’est pas liée au PyC. De fait, elle peut être attribuée aux modifications dans la structuration du carbone (augmentation de la taille des domaines cohérents, diminution de la rugosité de surface) et la chimie de surface des fibres T300, après traitement thermique à 1600°C. Le rôle souhaité du pyrocarbone est ainsi assuré par la fibre T300THT elle-même.

Figure V.23 - Images METHR de l’interface F/M après essais de traction des composites T300THT/SiC (a.) et T300THT/PyC/SiC (b.) (coupe FIB dans le sens longitudinal des fibres)

3. COMPORTEMENT MÉCANIQUE DES COMPOSITES SOUS