• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 3 : MORPHOLOGIE ET STRUCTURE

3.2 C OMPLEXES AUTO - ASSEMBLAGES / ACIDE NUCLEIQUE

3.2.1. Complexes diC14dT/polyA et diC14dA/polyU

3.2.1.a) Morphologie.

Tout comme pour les résultats exposés précédemment, nous commençons par détailler deux systèmes de référence similaires, l’un concernant un dérivé de la thymine et l’autre concernant l’analogue de l’adénine. Il s’agit des complexes issus des bicaténaires en C14 et de l’acide nucléique complémentaire. Présentons, tout d’abord, FIGURE 3.26, les résultats de DLS relatifs à la morphologie de ces agrégats.

50° 90° 130° d (nm) 3200 700 420  0.6 0.65 0.7 50° 90° 130° d (nm) 2200 2200 2200  0.77 0.63 0.53

FIGURE 3.26 : Valeurs des diamètres hydrodynamiques moyens extraits des courbes d’auto-corrélation du complexe diC14dT/polyA (Tableau 1) et du complexe diC14dA/polyU (Tableau 2) à 50°, 90° et 130°, et des coefficients d’étirement utilisés pour chaque ajustement.

Concernant le complexe formé par le diC14dT avec le brin d’acide nucléique complémentaire (polyA), on constate, FIGURE3.26, que la taille des objets est typiquement multipliée par 25 lorsque l’on passe du système « seul » au système « avec acide nucléique ». Ce constat se fait, cependant, sur les diamètres hydrodynamiques tirés des ajustements à 90° et 130°. Pour les tailles moyennes extraites à 50°, on constate que la population comprend également des objets encore plus gros, une fois l’acide nucléique ajouté. De plus, bien que les courbes d’auto-corrélation doivent être, ici, systématiquement ajustées à l’aide d’une exponentielle étirée alors que celles-ci ont été, en général, ajustées à l’aide d’un modèle à monoexponentielle simple pour le système « seul », les coefficients d’étirement sont très faibles puisqu’ils se trouvent, ici, autour de 0.65. Ces résultats

permettent d’aller dans le sens d’une augmentation nette de la polydispersité des complexes par rapport au système « seul » et bien entendu d’une forte augmentation du diamètre moyen des complexes par rapport aux systèmes seuls, mettant en évidence une modification du système liée à l’interaction entre les deux partenaires.

Concernant le complexe formé par le diC14dA avec le brin d’acide nucléique complémentaire, on note un point remarquable : l’ensemble des diamètres hydrodynamiques tirés des ajustements aux trois angles de diffusion ont la même valeur, typiquement 12 fois plus grande que les tailles caractéristiques du système « seul » à 90° et 130°. Les valeurs utilisées pour le coefficient d’étirement sont, en moyenne, tout aussi faibles que pour le complexe diC14dT/polyA. Il faut donc conclure ici sur la formation d’objets supramoléculaires de grande taille, probablement en raison de l’apparition d’interactions faibles avec le partenaire.

3.2.1.b) Structure.

Les résultats sur la morphologie des complexes ne tenant compte que d’une augmentation de la taille globale des objets diffusant, il peut maintenant être intéressant de quantifier l’effet d’un ajout d’acide nucléique sur les propriétés structurales de l’objet récepteur, pour les deux mêmes systèmes de référence. Pour les analyses par diffusion X, le même protocole de concentration que celui décrit dans la partie précédente a été réalisé, dans les mêmes conditions que pour le système « seul » analogue, afin de rendre le rapport signal/bruit du diffractogramme obtenu optimal. Afin de s’assurer que ce protocole de concentration n’allait pas modifier la structure du système étudié par diffraction X, nous avons pris soin de rediluer l’échantillon afin de vérifier, par DLS, que les résultats étaient identiques avant et après le protocole de concentration.

De manière générale, l’interaction entre l’auto-assemblage et l’acide nucléique impose que le facteur de forme généré sur le diffractogramme caractérisera une bicouche dite « asymétrique ». Comme expliqué dans le CH.2, une conséquence sera l’augmentation de l’intensité diffusée au niveau du « creux » du facteur de forme. De manière qualitative, plus le décalage entre l’intensité lue au niveau de ce minimum local et la ligne de base est grand, plus la bicouche sera considérée asymétrique. De manière quantitative, les interprétations porteront sur l’écart entre la valeur du H asymétrique (noté Ha) et la valeur du H symétrique. De la même manière, le modèle de Nallet pour bicouche asymétrique comporte, en plus du rapport de contrastes électroniques habituel, décrivant la partie externe de la bicouche, un rapport de contrastes électroniques visant à quantifier l’asymétrie de la bicouche en comparant les contrastes de la tête polaire liée à l’acide nucléique et à l’origine de l’asymétrie et celle de la tête polaire libre et décrite habituellement.

H (Å) Ha (Å) T (Å) dm (Å) T/H H a/H 13.5 18.7 8.5 49.2 -1.22 2.1 H (Å) Ha (Å) T (Å) dm (Å) T/H H a/H 26.4 14.5 3.1 47.1 -0.24 1.86 d (Å) q (Å-1) N 62.5 0.69 0.001 21

FIGURE3.27 : Ajustements par le modèle de Nallet (adapté pour une bicouche asymétrique) du diffractogramme SAXS du diC14dT/polyA concentré (Diffractogramme 1) et du diC14dA/polyU concentré (Diffractogramme 3) (Nanostar, d=650 mm, tacq=12h). Diffractogrammes WAXS du diC14dT/polyA concentré (Diffractogramme 2) et du diC14dA/polyU concentré (Diffractogramme 4) (Anode tournante, d=155 mm, tacq=4h). Paramètres d’ajustement pour le diC14dT/polyA (Tableau 1) et pour le diC14dA/polyU (Tableau 2).

L’analyse du complexe diC14dT/polyA montre l’existence d’une bicouche asymétrique dans le système. Les valeurs extraites de l’ajustement, FIGURE3.27, mettent en évidence une assymétrie (Ha - H) égale à +5.2 Å. Cette augmentation indique que l’épaisseur de la tête appartenant à la surface externe de la bicouche, d’après le modèle de Nallet adapté aux bicouches asymétriques, est augmentée par rapport au système seul. De plus, même si les vésicules de diC14dT restent unilamellaires suite à un ajout de polyA, l’acide nucléique induit une transition fluide/gel, à en juger par le diffractogramme WAXS, et

la diminution du paramètre T. En corrélant ces résultats à la discussion précédente sur la morphologie du complexe, on peut probablement affirmer la présence d’une interaction entre le diC14dT et le polyA via le feuillet externe de la bicouche de la vésicule. Les vésicules unilamellaires du diC14dT sont donc décorées par le polyA sur leur surface externe.

Pour ce qui est du complexe diC14dA/polyU, on remarque tout de suite la présence supplémentaire d’un facteur de structure sur le diffractogramme obtenu en SAXS. Celui-ci indique que le polyU est à l’origine d’une transition vésicules unilamellaires du diC14dA vers une structure organisée en vésicules multilamellaires de périodicité 62 Å pour le complexe. De plus, le diffractogramme WAXS montre que le polyU associé au diC14dA provoque un changement de conformation des chaînes aliphatiques qui sont à l’état cristallisé au sein du complexe, comme l’atteste également la très forte diminution du paramètre T. De façon plus surprenante, les paramètres issus de l’ajustement montrent une très forte asymétrie de la bicouche (Ha - H) égale à -11.9 Å. Contrairement au système précédent, la valeur négative observée dans ce cas nous indique que l’augmentation de l’épaisseur de la bicouche se trouve sur la partie interne de la bicouche externe alors que la partie externe est très faiblement modifiée. Ce résultat nous amène à proposer un mécanisme de formation par complexation des acides nucléiques entre les bicouches pour former une vésicule multilamellaire confinée (d = 62 Å) et « saturée » par du polyU à l’intérieur du complexe. Cette réorganisation du système est sans doute liée à une forte interaction entre le diC14dA et le poly U conduisant à une transition vers un système multilamellaire. Le grand nombre de couches suggéré par le résultat de l’ajustement (N=21) peut être corrélé au résultat de DLS qui indique des complexes de très grand diamètre.

3.2.2. Effet de la spécificité de l’acide nucléique : complexes