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Complexe chaîne alcool [Cu I · M

C 4 NHBoc ](ClO 4 ) 2

3.3 Complexes cuivreux des calix[6]arènes monofonctionnalisés

3.3.2 Complexe chaîne alcool [Cu I · M

C4OH](PF6)

a. Synthèse

Le complexe cuivreux est synthétisé en mélangeant sous atmosphère inerte 1.0 équivalent de ligand MC4OH avec 1.0 équivalent de complexe précurseur Cu

I(CH

3CN)4(PF6) dans un mélange

CH2Cl2/CH3CN 1:1 et isolé après évaporation des solvants.

118 Chapitre 3. Complexes cuivreux et cuivriques des calix[6]arènes monofonctionnalisés MC4OH O O O N N3 O O O N N N N NN N3 CuI N N + HO CH2Cl2/CH3CN 1:1 [CuI•MC4OH]+ α β γ δ Cu(CH3CN)4PF6 99% N3 O O O N N3 O O O N N N N NN N N OH

Schéma 3.9– Synthèse du complexe cuivreux [CuI·MC4OH](PF6) à partir du ligand MC4OH.

b. Étude dans CD2Cl2

i. Complexe seul. Le complexe a été redissous dans CD2Cl2. Le spectre RMN est très large à

300 K (Figure 3.15 - bas) mais on peut distinguer deux résonances extrêmement larges à 0.3 et -0.5 ppm, correspondant aux méthylènes de la chaîne alcool encapsulée. La signature observée à 300 K met en évidence un échange entre les conformations exo et endo dont le temps caractéristique est proche de celui de l’expérience RMN. Cela est aussi démontré par les déplacements chimiques des protons β et γ qui se trouvent dans une situation intermédiaire entre les déplacements d’une chaîne libre et ceux d’une chaîne endo.

s! MeCN!

tBu!

300 K!

240 K!

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!"

Figure 3.15– Spectres RMN (CD2Cl2, 500 MHz) du complexe [CuI·MC4OH](PF6) à 300 K (bas), et à 240 K (haut). s = solvant résiduel.

3.3. Complexes cuivreux des calix[6]arènes monofonctionnalisés 119

Afin de mettre plus clairement en évidence ce phénomène, nous avons enregistré un spectre à 240 K (Figure 3.15 - haut). À cette température, le spectre s’affine et on peut voir très clairement apparaître la signature d’une espèce de symétrie Cs dont deux résonances sont blindées à -0.24 et

-1.20 ppm, correspondant à la chaîne alcool encapsulée, donc à la conformation endo. La présence de résonances très larges en plus des résonances assez résolues de l’espèce endo laisse supposer la présence du conformère exo également. Ainsi, à 240 K, l’échange endo ⇄ exo est lent à l’échelle de temps RMN et on distingue les deux espèces.

La signature Csde l’espèce endo, ainsi que l’absence de plusieurs résonances pour le proton ImH

suggèrent que l’ion cuivreux est tétracoordiné (trois imidazole + ROH), dans un environnement tétraédrique. En revanche, la largeur des signatures de l’espèce exo suppose pour l’ion cuivreux une géométrie dicoordinée linéaire où Cu+ « danse » entre les trois bras imidazole [24] (Schéma 3.10).

Abaisser la température à 240 K permet de ralentir l’échange endo ⇄ exo mais déplace également cet équilibre : d’après l’intégration des résonances à champ fort, l’espèce endo est favorisée à 240 K, ce qui est cohérent car on attend que la coordination de l’alcool à l’ion cuivreux soit enthalpiquement favorisée. Nous avons donc clairement mis en évidence l’équilibre entre les conformations endo et exo du complexe [CuI·M

C4OH](PF6) dans CD2Cl2 (Schéma 3.10). endo O O O N N3 O O O N N NN N N N3 CuI NN + HO O exo O O N N3 O O O N N N N NN N3 CuI N N + OH O O O N3 N O O O N N N N N N N3 CuI N N OH CD2Cl2 ••• +

Schéma 3.10– Équilibre entre les conformations endo et exo du complexe [CuI·MC4OH](PF6) dans CD2Cl2.

La présence du conformère endo est remarquable et souligne une fois de plus la force de l’auto- coordination car la coordination d’un alcool (ligand dur) à un centre cuivreux (métal mou) est rare et n’a jamais été observée sur les complexes entonnoirs cuivreux avec un alcool exogène.

ii. Ajout de CO. Nous avons ensuite fait buller du monoxyde de carbone dans la solution de complexe [CuI·M

C4OH](PF6) dans CD2Cl2. Le spectre RMN

1H (Figure 3.16) est très fin à 300 K

et indique la présence d’une espèce unique de symétrie Cs. La coordination de CO a été mise en

évidence par infra-rouge. La bande d’absorption du monoxyde de carbone coordiné à 2110 cm−1

est superposée à la bande d’élongation des groupes N3 et en augmente l’intensité par rapport au

complexe avant bullage. De plus, la chaîne alcool a été identifiée comme étant en position exo par une expérience COSY. L’ion cuivreux se trouve alors dans un environnement tétracoordiné avec les trois groupes imidazole et CO. L’ajout de ce ligand compétiteur permet alors de chasser quantitativement la chaîne alcool de la cavité.

120 Chapitre 3. Complexes cuivreux et cuivriques des calix[6]arènes monofonctionnalisés s! s! tBu! OCH3! NCH3! ArCHeq! ArCHax! ImCH2! HArN3! HArtria! ImH! HArtBu! !" #" $" %" Htria!

Figure 3.16– Spectres RMN (CD2Cl2, 500 MHz, 300 K) du complexe [CuI·MC

4OH·(CO)](PF6) à

300 K. s = solvant résiduel.

iii. Ajout de n-BuNH2. La n-butylamine a été ajoutée à 240 K à une solution sous argon

du complexe [CuI·M

C4OH](PF6) dans CD2Cl2 par aliquots de 0.2 équivalents.

4 Il est difficile de

suivre l’ajout à 300 K car à cette température l’échange est plus rapide et conduit à des résonances plus larges. De plus à 240 K, la conformation endo est majoritaire et il est plus facile de suivre le déplacement de la chaîne alcool par l’amine. Le dosage est suivi par RMN1H à 240 K (Figure 3.17)

en regardant la zone des champs forts.

Initialement (0 éq.), la cavité est partiellement occupée par la chaîne alcool coordinée. À partir de 0.6 équivalents ajoutés, un couple de résonances apparaît à -0.38 et -1.14 ppm, ce qui atteste de la coordination de n-BuNH2 dont les groupes méthylène centraux conduisent à deux résonances

dans la zone des champs forts (Figure 3.17 - flèches rouges). À 0.8 équivalents, un deuxième couple de résonances apparaît à -0.50 et -1.32 ppm (flèches bleues), ce qui suggère la formation d’un deuxième complexe d’inclusion avec n-BuNH2. L’intensité de ces deuxièmes résonances croît avec

les ajouts supplémentaires d’amine, au détriment des résonances du complexe auto-coordiné initial qui diminue. De façon intéressante, on peut noter qu’à 2 équivalents ajoutés, il reste du complexe alcool auto-coordiné et l’intégration de l’ensemble des signaux à champ fort par rapport au reste du spectre indique que le complexe cavité vide existe également.

Cette étude montre qu’à 240 K la n-butylamine est partiellement encapsulée dans la cavité et se coordine à l’ion Cu+. Le suivi de ce dosage est difficile5mais il suggère la formation de deux nouvelles

espèces qui n’ont pas pu être identifiées avec des expériences RMN 2D. Afin de mieux comprendre ce phénomène, nous avons également étudié l’encapsulation de n-BuNH2 dans le complexe cuivreux

de référence NHBoc.

iv. Contrôle : ajout de n-BuNH2 au complexe cuivreux NHBoc. Nous avons ajouté

progressivement n-BuNH2 au complexe cuivreux [CuI·MC4NHBoc](PF6) en solution sous argon dans

CD2Cl2et analysé les mélanges par RMN à 240 K. Les spectres RMN sont très larges et complexes,

4. Il est important que le milieu soit dépourvu d’oxygène lorsqu’on ajoute l’amine car l’ion cuivreux s’oxyde très facilement lorsque le milieu devient basique.

5. De plus à cette température, la dynamique de l’invesion hélicoïdale des bras imidazole autour de l’ion cuivreux est figée à l’échelle de temps RMN.

3.3. Complexes cuivreux des calix[6]arènes monofonctionnalisés 121

0 éq.! 0.6 éq.! 1.2 éq.! 2.0 éq.!

Figure 3.17– Zoom sur la zone des champs forts des spectres RMN (CD2Cl2, 500 MHz, 240 K) du complexe [CuI·M

C4OH](PF6) avec ajouts graduels de n-BuNH2. Les flèches rouges indique le couple

de résonances du premier complexe d’inclusion, les flèches bleues indiquent le couple de résonances du deuxième.

même à basse température. Nous évaluons alors l’encapsulation de l’amine à l’aide des résonances à champ fort du complexe d’inclusion (Figure 3.18).

À 0.5 équivalents ajoutés, l’apparition des résonances à -0.37 et -1.14 ppm pour les résonances des méthylènes β et γ de l’amine encapsulée suggère la formation d’un premier complexe d’inclusion majoritaire. À 1 équivalent ajouté, les résonances à -0.50, -1.23 et -1.33 ppm attestent de la formation d’un deuxième complexe d’inclusion. Le système est saturé entre 1 et 1.5 équivalents d’amine ajoutés et les deux complexes d’inclusion semblent coexister en quantités comparables. Ainsi, le phénomène observé avec le complexe à chaîne alcool est également observé pour le complexe de référence à chaîne NHBoc. Les deux complexes n’ont pas pu être identifiés avec certitude. On peut imaginer qu’ils présentent des conformations différentes. Par exemple, une unité aromatique anisole pourrait se retourner, conduisant à une conformation cône partiel. Par analogie avec les complexes cuivriques, on peut aussi proposer l’interaction d’une deuxième molécule de n-butylamine avec l’ion cuivreux en position trans-exo pour conduire à un ion métallique pentacoordiné. Une telle géométrie est rare pour un ion CuI et n’a encore jamais été observée avec les complexes entonnoirs mais n’est pas

inenvisageable (des exemples de complexes cuivreux pentacoordinés ont été décrits [25]).

c. Étude dans MeCN

i. Complexe seul. Le complexe [CuI·M

C4OH](PF6) a également été étudié en solution dans

CD3CN à différentes températures (Figure 3.19). À 300 K, le spectre est assez fin et est caractéris-

tique d’une espèce de symétrie Cs bien structurée. Les résonances de la chaîne alcool en position

exo ont été attribuées grâce à une expérience COSY. À cette température, il n’y a aucune trace du composé endo sur le spectre RMN. Ceci suggère une structure tétracoordinée majoritaire pour l’ion cuivreux : trois groupes imidazole et une molécule d’acétonitrile coordinée dans la cavité.

122 Chapitre 3. Complexes cuivreux et cuivriques des calix[6]arènes monofonctionnalisés 0 éq.! 0.5 éq.! 1 éq.! 1.5 éq.! 2 éq.!

Figure 3.18 – Portion de spectre RMN dans la zone des champs forts (CD2Cl2, 500 MHz, 240 K) obtenus lors du dosage du complexe cuivreux [CuI·M

C4NHBoc](PF6) par n-BuNH2 (de 0 à 2

équivalents). s! s! tBu! OCH3! NCH3! ArCHeq! ArCHax! ImCH2! HArN3! HArtria! ImH! HArtBu! !" #" $" %" OH! OH! OH! !" !" OH! w! $" $" $" 300 K! 260 K! 240 K! 300 K! +CO!

Figure 3.19– RMN (CD3CN, 500 MHz) du complexe [CuI·MC4OH](PF6) à 300 K, 260 K et 240 K, puis à 300 K après bullage de CO.

3.3. Complexes cuivreux des calix[6]arènes monofonctionnalisés 123

ce qui indique que même à basse température, le complexe reste exclusivement en conformation exo et la chaîne alcool ne déplace pas la molécule d’acétonitrile. C’est à 260 K que le spectre est le plus fin. En effet, à 240 K les résonances des protons ImCH2, HArtria, ImH et ArCHax sont élargies. Ceci

suggère que l’inversion hélicoïdale au niveau des bras imidazole est ralentie, sans pour autant être figée à l’échelle de temps RMN.

En refroidissant, on peut également voir apparaître des résonances minoritaires à 0.8, 6.5 et 6.9 ppm, indiquant la présence d’une espèce minoritaire favorisée à basse température. Cette espèce n’a pas été identifiée mais il pourrait s’agir d’une espèce dimérique.

De façon intéressante, le spectre est assez fin à 300 K et indique la présence d’une espèce bien structurée que l’on attribue au complexe d’inclusion avec l’acétonitrile [CuI·M

C4OH·(MeCN)](PF6)

alors que dans le cas du calix[6]arène X6Me3Imme3 (possédant six groupes tBu au grand col) le

spectre du complexe cuivreux dans MeCN est très large à 300 K, suggérant que l’inclusion de MeCN n’a pas lieu [22].

Notre équipe a montré par ITC (Isothermal Titration Calorimetry) que la complexation d’un ion métallique à un calix[6]arène tris-imidazole dans MeCN est défavorisée lorsque les groupes tBu des unités anisole sont substitués par des groupes plus petits (NO2, NH2), et que ce phénomène

est d’origine principalement entropique [26]. En effet, la substitution par des groupes plus petits augmente le nombre de degrés de liberté du ligand libre, ce qui conduit à un plus fort coût entropique lorsque la complexation de l’ion métallique fige la structure.

Par ailleurs, cette étude prouve que la complexation d’un ion Zn2+ est plus favorable pour

un composé dont trois groupes tBu du grand col ont été substitués par trois groupes triazole. L’expérience réalisée ici avec le complexe cuivreux d’un calixarène fonctionnalisé avec un seul groupe triazole souligne l’importance de ce noyau vis-à-vis de la complexation d’un ion métallique : il semble qu’un seul noyau triazole soit suffisant pour favoriser la formation du complexe avec l’acétonitrile.

ii. Ajout de CO. Nous avons également fait buller du monoxyde de carbone dans la solution de complexe [CuI·M

C4OH](PF6) dans CD3CN et nous avons enregistré un spectre RMN à 300 K (Fi-

gure 3.19 - haut). Le spectre obtenu est très similaire à celui obtenu dans CD2Cl2. La molécule d’acé-

tonitrile est donc quantitativement chassée par CO, formant le complexe [CuI·M

C4OH·(CO)](PF6).

d. Conclusion pour le complexe [CuI·M

C4OH](PF6)

Dans le dichlorométhane, le complexe cuivreux avec le ligand alcool est en équilibre entre les conformations endo et exo. La conformation endo est favorisée à basse température. L’ajout de n-butylamine conduit à son encapsulation partielle à 240 K, au détriment du conformère endo. Cependant, même en présence d’un excès d’amine (2 équivalents), une partie du complexe reste sous la forme auto-coordinée endo. Par ailleurs, l’ajout de monoxyde de carbone chasse la chaîne alcool coordinée pour conduire à la formation quantitative du complexe carbonyl.

Dans l’acétonitrile, le complexe cuivreux est exclusivement en conformation exo, et une molécule d’acétonitrile est coordinée à l’ion métallique dans la cavité. L’ajout de monoxyde de carbone chasse quantitativement la molécule d’acétonitrile pour conduire au complexe carbonyl.

124 Chapitre 3. Complexes cuivreux et cuivriques des calix[6]arènes monofonctionnalisés