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Chapitre 3- Principaux résultats

3.3 Comparaison entre les réseaux au Québec et au Brésil

Les participants de notre échantillon ont soulevé trois différences des relations professionnelles entre le Québec et le Brésil et une similitude (tableau 27). Pour ce qui est

des différences, on parle de la culture au sein de l’entreprise, le marché du travail et le type des relations. Pour ce qui est de la similitude, il s’agit du rôle des réseaux pour accéder au marché caché des emplois.

Tableau 27 : Différences et similitudes des relations professionnelles au Québec et au Brésil

Différences ou similitudes Québec Brésil

Culture au sein de l’entreprise Respectueuse Agressive Marché du travail Pénurie de main-d’œuvre Taux de chômage élevé

Type des relations Formelles Informelles

Accès au marché caché de l’emploi via les réseaux

Pratique courante Pratique courante

En ce qui a trait aux différences ou similitudes des réseaux au Brésil et au Québec, certains participants ont mentionné le caractère plus informel des échanges professionnels au sein des entreprises au Brésil. Les Brésiliens, selon les commentaires des participants, auraient de la difficulté à faire la distinction entre le travail et la vie personnelle. Geraldo nous donne un exemple :

« Au Brésil, les gens ont tendance à mélanger leur vie personnelle et les

relations personnelles au travail. Et ici j’ai trouvé que les gens font une meilleure séparation. Alors j’ai trouvé qu’il avait moins de disputes. Même s’il y a des disputes, elles sont un peu plus cachées. Il y a moins d’émotions dans les disputes. C’est difficile de voir quelqu’un élever sa voix avec l’autre. Au Brésil j’ai vu ça plusieurs, plusieurs fois. Ici je l’ai vu une fois, un cadre qui avait fait ça avec quelqu’un. Le lendemain il a appelé l’équipe pour s’excuser. Au Brésil c’est quelque chose de normal de crier avec quelqu’un ou maltraiter quelqu’un. J’ai déjà eu des cas où la personne a même démissionné, tellement maltraitée qu’elle était au sein de la compagnie. Les ressources humaines ou la direction ne faisaient absolument rien. Alors c’était un environnement (le Brésil) beaucoup plus agressif si comparé à ici. Ici c’est beaucoup plus professionnel. Par contre tu développes moins d’amis au travail parce qu’il y a toujours une distance. Alors tu vas en trouver, mais c’est vraiment avec des gens avec qui tu as beaucoup d’affinités. Parce que ça vient naturellement et normalement, tu fais ça en dehors du travail. Mais je me fais moins d’amis au travail, mais par contre moins d’ennemis aussi. C’est une bonne chose. J’ai travaillé dans une petite compagnie et deux grandes compagnies, et c’était pareil. »(Geraldo)

Ainsi, les collègues de travail au Brésil sont souvent des amis proches. Au contraire, au Québec les personnes auraient tendance à séparer les connaissances du travail et la vie personnelle. Théo parle d’une situation similaire :

« Une chose que j’ai trouvé intéressante c’est qu’au Brésil je trouvais les

gens, arrivés au travail, ils parlaient pendant la journée de travail. Comme moitié de son temps elle parle des choses personnelles. Elle ne travaille pas. À la fin de la journée, à 5 heures, elle ne peut pas partir parce qu’elle n’a pas fini son travail. Là elle reste jusqu’à 9 heures du soir au travail, pour faire son travail. Mais par contre elle a eu beaucoup de rapports sociaux au travail. Mais c’est plus émotionnel. Ici, les gens font plus la distinction. Alors il y a une personne qui ne veut pas faire ça, peut-être qu’elle va sentir un peu de difficultés d’adaptation parce qu’elle va chercher dans le travail le même niveau d’attachement émotionnel qu’au Brésil. »(Theo)

Raquel mentionne également : « Je pense qu’ici c’est plus professionnel. Au Brésil je

trouve que les réseaux sont moins professionnels et plus personnels ».

En plus, les échanges au Québec se font d’une manière beaucoup plus respectueuse, tandis qu’au Brésil les personnes parfois ne font pas attention, sont plus émotives et les conflits sont plus fréquents si on compare au Québec. Les lois ou normes de travail ne sont pas les mêmes, le Québec ayant des normes plus développées pour protéger les travailleurs.

Gabriella est également d’accord :

« Je pense qu’ici c’est plus formel. Au Brésil on peut considérer les

collègues de travail comme des amis. La relation qu’on a est plus proche. On connaît les détails de la famille. Parce qu’on demande « Comment ça va la famille. On connaît les enfants des collègues, on connaît les conjoints, on fréquente la maison les fins de semaine. Ce sont des amis. Les collègues de travail sont des amis. Ici c’est une relation plus froide. Comme c’est plus formel. On ne sait pas vraiment comment est la vie particulière de la personne avec qui on travaille. Là-bas c’est différent parce qu’on connaît la vie professionnelle et on connaît la vie familiale. »(Gabriela)

La culture est aussi différente dans les sens que, au Québec, il y a une pénurie de main- d’œuvre, tandis qu’au Brésil il y a un grand nombre de personnes à la recherche d’emploi, mais peu d’emplois. En conséquence, ceux qui ont un emploi au Brésil ont souvent peur de le perdre et peuvent endurer des situations conflictuelles ou des conditions difficiles pendant longtemps afin de garder une sécurité d’emploi. Au Québec, si les personnes ont des conditions difficiles au travail, ils n’hésitent pas à aller demander de l’aide au besoin.

Raquel nous explique : « Je trouve que (le réseau au Brésil) c’est même plus important

qu’ici. Parce que là-bas il y a moins d’offres d’emploi qu’ici. Ce n’est pas qu’il y a moins d’offres, c’est qu’il y a plus de gens qui se cherchent un emploi ».

Un point de similitude, c’est le rôle des réseaux pour accéder au marché caché de l’emploi. Dans ce cas, comme au Québec, les Brésiliens approcheraient des amis, de la famille, des collègues ou ex-collègues pour demander du support afin de connaitre les postes qui ne sont pas affichés. Ils ont même une expression très populaire qui s’appelle le « QI (Quem

Indica) », ça veut dire « celui qui indique (la personne pour un poste). Dans ce cas le « QI »

faciliterait l’obtention d’un emploi via les réseaux personnels ou professionnels. Selon le magasin brésilien (Exame, 2015), le Brésil se trouve à la 2e place dans le classement des pays où l’embauche via les réseaux est plus pratiquée par les entreprises. L’Australie est au premier rang, les Émirats arabes arrivent en troisième et la France occupe le quatrième rang.

Vivian nous donne un exemple :

« Au Brésil c’est très important. Oui, c’est très important le réseau. Parce

que le marché c’est très différent. Il y a tellement de bons candidats que parfois c’est très difficile de prendre les décisions entre le candidat A et le candidat B. Finalement le fait que tu connaisses quelqu’un à la compagnie qui va dire oui il est un bon professionnel, ça va aider beaucoup. » (Vivian)

Bref, pour ce qui est des différences entre les réseaux au Brésil et le Québec (selon notre échantillon), nous avons la différence d’approche des relations, plus informelle au Brésil qu’au Québec, la culture, les gens sont plus respectueux au Québec (dans le cadre du travail) en comparaison au Brésil et les personnes sont plus concentrées au travail au Québec qu’au Brésil. En conséquence, les personnes au Brésil font plus d’heures pour pouvoir « rattraper le retard ». Le point principal de similitude est l’importance des réseaux pour avoir accès à l’information et au marché caché de l’emploi. Une fois embauché, la prochaine étape est l’intégration et le maintien en emploi, ce que nous allons explorer dans la section suivante.