Chapitre 3. Analyse des simulations numériques provenant du modèle CMAM
3.4. Résultats au nivea u de l’OHP
3.5.2. Comparaison selon la latitude
On effectue la moyenne zonale des profils de tendances obtenus pour les différentes régions de 6 bandes de latitudes qui couvrent l’ensemble du globe (les bandes 80N, 45N, 20N,
20S, 45S et 80S). On peut ainsi comparer selon la latitude l’effet de la dynamique sur les
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Figure 3.9 : Profils de tendances moyennés zonalement sur différentes bandes de
latitudes : 80N (a), 45N (b), 20N (c), 20S (d) , 45S (e) et 80S (f). Les courbes d’hiver
correspondent aux mois d’octobre à mars pour l’hémisphère nord et à ceux d’avril à
septembre pour l’hémisphère sud. Les données sont moyennées sur la période 1990 –
2010. Pour permettre une comparaison plus aisée, l es échelles horizontales et verticales sont les mêmes pour les six graphes. Les barres d’erreur (pour les
composantes de fond) indiquent l’intervalle de confiance à 95%.
L’étude de ces six familles de profils permet de remarquer différentes caractéristiques.
Les profils des latitudes plus faibles indiquent des tendances moins marquées et moins
fortement variables en fonction de l’altitude que ceux des latitudes plus élevées. Cela témoigne notamment de l’activité dynamique intense qui affecte davantage ces
dernières latitudes.
Pour l’ensemble des 6 graphes, les profils hivernaux moyens indiquent en général des
tendances plus marquées que les profils estivaux moyens. De même, l’activité
dynamique renforcée en hiver est en bonne partie responsable de cette observation.
Les profils de l’hémisphère sud indiquent globalement des tendances légèrement plus
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relier à la présence plus importante de continents et de chaînes de montagnes dans
l’hémisphère nord que dans l’hémisphère sud. Or ces deux éléments ont été décrits
comme éléments déclencheurs d’ondes de gravité et d’ondes planétaires. Par ailleurs,
les terres émergées empêchent le pôle nord de se refroidir autant que le pôle sud, ce
qui affaiblit le vortex qui s’y forme.
On retrouve à toutes les latitudes et dans les deux hémisphères un point qui a été
souligné tant pour les profils CMAM obtenus au niveau de l’OHP (paragraphe 3.4.2.)
que pour les profils calculés avec les données lidar (paragraphe 2.4.2.2.) : le profil hivernal de fond diffère du profil hivernal moyen pour se rapprocher des profils estivaux, voire se confondre avec eux. De plus, on notera, comme on l’a vu dans tous
les cas précédents, que les deux profils estivaux – de fond et moyen – diffèrent peu l’un de l’autre. (Ceci est vrai à l’exception de l’hémisphère sud, à certains niveaux
seulement, comme il sera expliqué dans le point suivant.) À nouveau, cela valide notre hypothèse de séparation de la température en une composante de fond et une composante dynamique, ainsi que notre méthodologie de filtrage de la composante dynamique. Cependant, on remarquera que lorsque la tendance hivernale moyenne est très prononcée, comme au-dessus de 40 km pour le graphe (a), la tendance hivernale
de fond ne rejoint pas exactement les profils estivaux. Ceci pourrait signifier qu’aux
altitudes et aux latitudes où l’impact de la dynamique atteint son maximum, la
composante de fond elle-même peut être affectée par les événements dynamiques. Notre méthodologie semble alors atteindre une limite, et l’activité dynamique n’est
pas suffisamment filtrée.
Les graphes de l’hémisphère sud montrent que les profils d’été – de fond et moyen –
peuvent à certaines altitudes différer significativement l’un de l’autre : on l’observe
notamment dans la moyenne stratosphère ainsi que dans la haute mésosphère pour (e) et (f). Les hypothèses de départ de notre méthodologie suggèrent d’expliquer cette différence par la présence d’une certaine activité dynamique estivale dans l’hémisphère sud. Or on note qu’à ces altitudes le profil de fond d’hiver se rapproche
du profil de fond d’été (et non du profil moyen d’été) : cela corrobore cette proposition d’explication (les deux profils de fond, filtrés de l’activité dynamique, se rapprochent l’un de l’autre). Une telle résurgence d’activité dynamique en été dans l’hémisphère sud pourrait être liée à l’influence des événements de grande ampleur qui ont lieu au même moment dans l’hémisphère nord. On notera qu’un tel couplage
dynamique inter-hémisphères a déjà été souligné par Karlsson et al. [2007], ainsi que par Becker and Fritts [2006] en ce qui concerne l’autre saison de l’année (l’été de l’hémisphère nord) : l’activité intense des ondes planétaires troposphériques de l’hémisphère sud est reliée aux observations faites aux hautes latitudes de la
mésosphère dans l’hémisphère nord pour l’année 2002. Tout ceci rappelle ce qui avait
été observé sur les données lidar dans la haute mésosphère (figure 2.8 et paragraphe 2.4.2.2.), où l’on avait également suggéré le rôle des ondes de gravité dans la présence d’une variabilité importante dans la haute mésosphère d’été [Keckhut et al., 2011b].
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Quant à l’étude de l’occurrence des événements dynamiques importants, les tendances
hivernales de la bande 45N (figure 3.10) sont d’amplitudes plus faibles que celles observées au niveau de l’OHP (figure 2.9, paragraphe 2.4.2.3.).
Figure 3.10 : Profils de tendances de la composante dynamique hivernale pour la bande 45N :
occurrence (bleu, en jours par an) et anomalie de température (rouge, en K par décennie). Les
calculs sont effectués sur l’ensemble de la période 1990 – 2010. On veillera à noter que les tendances sont ici représentées jusqu’au sol, contrairement à la figure correspondante pour les données de l’OHP (figure 2.9, paragraphe 2.4.2.3.).
On observe en moyenne que chaque année davantage de jours sont concernés par les échauffements en-dessous de 40 km (+0,5 jours par an, à comparer à une moyenne d’un peu
plus de 50 jours concernés chaque hiver), alors qu’aucune tendance significative n’apparaît
au-dessus de cette altitude (-0.1 jours par an, à comparer à une moyenne d’un peu moins de
60 jours concernés chaque hiver). Contrairement aux résultats de la partie 2, l’anomalie
dynamique suit une tendance globalement négative, excepté au niveau de la stratopause. Ainsi les effets sont les mêmes que ceux décrits dans la partie 2 (puisque nous avons constaté –
figure 3.9 (b) – que la composante de fond se rapproche des courbes d’été par rapport au
profil moyen), mais les causes sont différentes : si l’on observe autour de 35 km une tendance
de fond supérieure à la tendance moyenne, c’est parce qu’à cette altitude il y a davantage d’échauffements qui sont de moins en moins chauds (ce qui tire la tendance moyenne vers les
valeurs négatives). C’est l’inverse au niveau de la stratopause (mais toujours avec les mêmes
conséquences, puisque la tendance de fond est inférieure à la tendance moyenne à cette
altitude), où la tendance de l’anomalie dynamique est positive et celle de l’occurrence de
faible amplitude : on observe donc environ le même nombre d’échauffements chaque hiver,
mais ils sont de plus en plus chauds, ce qui tire la tendance moyenne vers les valeurs positives.
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