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Comparaison entre le discours médiatique et celui des

Chapitre V – Analyse d’une identité acadienne en mouvement

5.1 L’identité acadienne

5.1.3 Comparaison entre le discours médiatique et celui des

Le discours médiatique est souvent perçu comme quelque peu différent de celui des gens ordinaires. Par exemple, les préoccupations des représentants officiels sont parfois légèrement à côté de celle de la population. Il faut comprendre qu’ils sont contraints de représenter toute une province et que tous les gens ne sont pas concernés par les mêmes enjeux. D’ailleurs, ils préfèrent choisir parfois des enjeux qui affectent surtout la population à un niveau provincial qu’à un niveau individuel. Ces représentants peuvent aussi présenter des enjeux qui sont le souci de grands décideurs politiques. Les individus ont souvent des préoccupations qui sont un peu plus modestes, mais qui affectent néanmoins leur vie au quotidien. La Société des Acadiens du Nouveau-Brunswick (SANB) présente ces enjeux primordiaux en quatre dossiers principaux :

§ L’Éducation en français § La construction identitaire § La santé en français § L’immigration

Il est clair que la SANB se préoccupe principalement des droits linguistiques des Acadiens et de la vitalité de sa culture. Elle pense que certains problèmes pourront être réglés par une augmentation d’une immigration francophone participant au projet acadien. Ces points

rejoignent les préoccupations des répondants. Deux enjeux nommés par les répondants rejoignent en quelque sorte ceux de la SANB, soit l’assimilation à l’anglais et la préservation de la langue française. Pourtant, aucun des répondants n’a nommé l’éducation et la santé comme un des points de la préservation de la langue française. Qui plus est, une des grandes préoccupations des répondants n’est presque pas abordée par la SANB, soit l’économie. Voici les trois enjeux nommés par les répondants qui résument leurs préoccupations à ce sujet :

§ Une situation économique précaire § Des emplois peu nombreux

§ Un exode des jeunes vers les grands centres urbains

Un autre point de comparaison entre le discours médiatique et celui des répondants est la définition de l’Acadie. Nous avons utilisé la société de l’Acadie (SNA) et un manuel scolaire (Chiasson, Godin et Basque, 2007) pour représenter le discours médiatique à ce sujet. La définition de l’Acadie selon la SNA est présentée dans son intégralité en annexe 2. Les définitions de l’Acadie sont analysées en fonction des types d’Acadie exposés par Bérubé (1987), Trépanier (1994), et Gallant (2007). La définition de l’Acadie selon la SNA est un mélange de plusieurs types d’Acadies en fonction du choix de la section étudiée. Nous pouvons dire que l’Acadie historique, l’Acadie généalogique et l’Acadie opérationnelle sont présentes dans cette définition. Ce premier passage témoigne de l’Acadie historique :

« Fondée en 1604, l'Acadie est la première tentative de colonisation du Nouveau Monde. De Monts, Champlain et Poutrincourt, accompagnés de 80 colons français, dirigent l'expédition et installent la colonie à l'Ile-Ste-Croix puis, l'année suivante, à Port-Royal. »

La territorialité de l’Acadie généalogique est présente dans ce deuxième extrait :

« Au Nouveau-Brunswick, les Acadiens s'installent surtout le long des côtes, de Cap-Pelé à Miscou et à l'intérieur des terres jusqu'à St-Jacques, au nord-ouest de la province. »

Finalement, la position de la SNA par rapport au choix d’une Acadie opérationnelle est entrevue dans ce passage : « L'Acadie du Canada atlantique compte aujourd'hui plus de

300 000 Acadiens et Acadiennes fiers de leurs origines. » Toutefois, la SNA préfère modifier

quelque peu la définition originale de Bérubé pour l’élargir en incluant les Acadiens de l’Atlantique et non des Maritimes. De ce fait, le SNA inclut les Acadiens pouvant habiter à Terre-Neuve et au Labrador.

Deux précisions nommées par les répondants ne se retrouvent pas dans cette définition. Premièrement, le fait de parler français n’est pas mentionné comme étant un prérequis pour être Acadien. Deuxièmement, un des deux types de définitions de l’Acadie les plus populaires auprès des répondants, soit l’Acadie sentie et vécue, n’est pas présent. Il n’y a pas de passage dans cette définition concernant un sentiment associé à l’appartenance au groupe si ce n’est que les Acadiens sont fiers de leur origine. La SNA ne s’aventure pas à décrire la nature de ce sentiment de fierté. Il n’est pas étonnant d’arriver à cette constatation, car une définition selon une société quelconque comme la SNA aspire habituellement à une neutralité et une absence de jugement moral. Il serait difficile de décrire un sentiment de fierté auquel peuvent s’associer tous les Acadiens de l’Atlantique. L’Acadie sentie et vécue est très individuelle dans ses représentations. Toutefois, il est difficile de croire à ce but lorsque l’on regarde les qualitatifs utilisés par la SNA dans cette définition (voir annexe 2 pour plus de précisions). Il n’est pas non plus mentionné qu’il est nécessaire de participer au projet acadien. Sur ce point, la SNA s’éloigne de la vision de la population générale acadienne.

Lorsque nous étudions de près la définition de l’Acadie selon le manuel scolaire choisi, il apparaît évident que la vision de la SNA a influencé le choix des auteurs. Ils utilisent la même définition de l’Acadie opérationnelle. À la différence de cette définition de l’Acadie selon Bérubé, ils élargissent tous deux ses contours en incluant les quatre provinces atlantiques au lieu d’inclure uniquement les trois provinces maritimes. La SNA et les auteurs de ce manuel utilisent également le même nombre pour chiffrer la quantité d’Acadiens vivant dans ces provinces. Le manuel scolaire ajoute quelques précisions qui rejoignent l’opinion des répondants. Par exemple, les immigrants peuvent faire partie du groupe des Acadiens et la langue française est le dénominateur commun qui peut rassembler la diaspora acadienne.