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Analyse du discours : théories et méthodes

Chapitre III – La communauté acadienne de la Péninsule

3.4 Analyse du discours : théories et méthodes

Dans cette section, une introduction à l’analyse du discours est abordée à travers ses théories et méthodes. Comme mentionné plus haut, ce mémoire consiste principalement en une analyse du discours, celui des participants à l’étude, et celui des médias officiels. Il est donc important d’aborder les lignes directrices qui mèneront la réflexion lors de l’analyse du corpus de données. James Paul Gee fournit une introduction remarquable à une des nombreuses approches de l’analyse de discours. Ses deux ouvrages les plus récents (2005 et 2011) cherchent à offrir des outils d’enquête aux chercheurs. Cet aspect est congruent avec les desseins de ce mémoire, bien que le public cible de Gee étant principalement les étudiants et les chercheurs d’autres domaines.

Qu’est-ce que l’analyse du discours? Gee donne aux lecteurs une définition précise et simple. L’analyse du discours est l’étude du langage employé à travers le monde pour exprimer des choses, mais également pour réaliser des choses (Gee 2011, notre propre traduction de l’anglais). Selon les propos de l’auteur, l’analyse de discours s’apparente à un constant va-et- vient entre le contexte et le langage. Le contexte nous apprend davantage sur le langage en

action et vice versa, il nous donne plus de détail sur le contexte en place. De plus, les discours n’ont pas de frontières définies de manière explicite, car les gens sont constamment en train de créer de nouveaux discours à travers les époques. En d’autres termes, l’analyse du discours se base sur le principe que le langage, qu’il soit écrit ou parlé, promulgue des perspectives sociales, culturelles et identitaires. Elle nous informe sur plusieurs aspects de la société. Gee (2005) expose deux types d’analyse du discours possible. Le premier type d’analyse est l’étude des corrélations générales entre la forme ou la structure et la fonction ou la signification dans le langage. L’autre type d’analyse est l’étude d’interactions beaucoup plus précise entre le langage et le contexte. Ces deux types d’analyses sont favorisés dans ce mémoire. En linguistique, la fonction est définie par les significations variées qu’une forme donnée peut communiquer. Le contexte se réfère aux nombreux facteurs qui accompagnent le langage écrit ou parlé. Ce contexte a été exploré dans le chapitre deux de ce mémoire.

Gee (2005) attribue deux fonctions primordiales au langage humain : 1. Aide aux performances d’activités sociales et aux identités sociales.

2. Aide aux affiliations à l’intérieur des cultures, groupes sociaux et institutions.

La façon dont nous choisissons nos mots et formulons nos phrases est en lien direct avec la façon dont nous percevons le monde. En d’autres mots, le langage est un lien direct vers notre vision du monde. Lorsque nous parlons ou écrivons, nous développons ce que nous voulons énoncer en fonction de la situation. Dans un même temps, ces mots identiques créent la situation. Gee divise l’analyse du discours en sept questions qu’il est possible de se poser sur un corpus de données langagières soit : la signification, les activités, les identités, les relations, les politiques, les liens, et les systèmes de signes et connaissances. Ces types de questionnement vont être utilisés pour l’analyse des entretiens. Certains de ces

questionnements sont particulièrement intéressants pour l’analyse d’un discours identitaire. Tout d’abord, nous utilisons le langage pour donner un sens à certaines choses. Un exemple de ce type de questionnement pourrait être : pourquoi dans telle situation utilisons-nous cette signification plutôt qu’une autre et de quelle façon est-elle utilisée? Dans une situation de débat, une personne peut vouloir choisir soigneusement ses mots pour signifier sa position et gagner l’appui des auditeurs. Ensuite, nous utilisons le langage pour signifier que nous sommes engagés dans certaines activités. Un exemple de ce questionnement pourrait être : quels types d’activités sont reflétés dans cet extrait de texte ou de conversations? Une personne peut utiliser un certain type de langage pour signifier qu’elle fait partie, par exemple, d’un mouvement de danse particulier. De plus, nous utilisons le langage pour signaler quel genre de relations nous entretenons, ou nous voulons entretenir avec un auditeur, un lecteur, un groupe de gens, ou un établissement avec qui nous communiquons. Un exemple de questionnement pourrait être : quelle relation ce langage cherche-t-il à promulguer chez les autres? Une personne va posséder un discours très différent si elle tente de séduire un partenaire amoureux potentiel dans un bar ou si cette même personne tente de persuader un employeur potentiel de la choisir pour un poste lors d’une entrevue formelle. Nous utilisons le langage pour transmettre notre propre perspective sur la nature de biens sociaux. C’est-à-dire, ce que le locuteur juge normal, bien, mal, approprié, etc. Un exemple de ce questionnement pourrait être : quelle perspective sur les biens sociaux est reflétée dans cet extrait de conversation? Le langage est utilisé pour rendre pertinents des liens entre plusieurs objets. Finalement, une fonction du langage est de rendre pertinents certains systèmes de significations et certaines formes de connaissances dans une situation donnée. Dans cette perspective, le langage sert de moyen pour tenter d’augmenter le prestige d’un système de

sens ou de connaissance. Des exemples de ces types de systèmes se retrouvent dans le langage spécifique lié à des professions particulières telles que les avocats, les médecins, les informaticiens, etc.

Pour analyser ces questionnements, Gee propose quelques outils qui sont surtout pertinents à la construction et la reconnaissance d’identités ainsi qu’à la participation d’activités. Premièrement, il y a les variétés de langages que Gee préfère appeler les « langages sociaux » (social languages en anglais). Ces langages sociaux peuvent servir à promouvoir plusieurs des fonctions du langage mentionnées dans le paragraphe précédent. Gee utilise le terme Discours avec un grand « D » pour combiner ce qui touche au domaine du langage et ce qui ne le comprend pas tel que les symboles, les outils, et les objets qui contribuent néanmoins à l’élaboration des identités. L’intertextualité concerne les allusions faites dans des mots et des phrases à d’« autres textes ». Par exemple, un passage d’un texte peut faire allusion à une citation célèbre d’un auteur reconnu. Le lecteur doit donc connaître cet intertexte pour saisir le sens de ce passage du texte en question. L’intertextualité a aussi sa contrepartie orale. Lorsque nous parlons, nous pouvons faire référence à un discours autre connu des auditeurs. Pour terminer, un écrit ou un exposé peut également faire référence à des thèmes ou débats qui ont été le centre de maintes conversations dans le passé. Pour bien saisir le sens d’une manifestation pro-choix, par exemple, une personne doit être en mesure de connaître l’histoire des débats et les arguments présentés par les partisans pro-choix et par les partisans pro-vie.