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4. Application de la méthode aux données du continent sud-américain

4.1. Mise en œuvre du modèle

4.1.4. Correction crustale

4.1.4.3. Comparaison des deux modèles

Le modèle 3SMAC repose sur l’étude de la distribution de la pression, de la température et de la composition minéralogique en fonction de la profondeur. Les paramètres sismiques tels que la densité, la vitesse et l’atténuation sont alors estimés selon des mesures en laboratoire. 3SMAC repose donc essentiellement sur des estimations de paramètres en fonction de lois empiriques, mais également sur des données, telles l’épaisseur des sédiments. CRUST2.0 ne dépend à la base que de mesures provenant d’expériences de terrain, mesures extrapolées à l’échelle globale.

La profondeur du Moho ainsi que l’épaisseur des sédiments ont été représentées pour ces deux modèles à l’échelle de l’Amérique du Sud (Fig. 11). Qualitativement, ces cartes mettent en évidence d’importantes différences entre les deux modèles. Concernant la profondeur du Moho, le modèle 3SMAC est plus en accord avec la géologie de surface, notamment au Brésil, où la présence des différents domaines structuraux est beaucoup plus contrastée comparativement au modèle CRUST2.0 (grands bassins sédimentaires, provinces cratoniques… voir chapitre 1, Fig. 1, 7 et 9, droite). Par exemple, dans le bassin de l’Amazone, une étude récente (Krüger et al., 2002) à partir de fonctions récepteur a mis en évidence une profondeur du Moho variant de 38 km sous le bassin à 48 km au nord de celui-ci, variation que l’on retrouve dans 3SMAC et non dans CRUST2.0. Le bassin est également beaucoup plus contrasté dans 3SMAC comparativement à CRUST2.0 en terme d’épaisseur de sédiments (Fig. 11D, E, F). Des différences de profondeur du Moho importantes, pouvant atteindre 27.9 km, existent entre les deux modèles, mais elles sont très localisées, et n’excèdent jamais une superficie de plus de 2°x2°. De plus, pour les grands bassins sédimentaires, comme pour la Cordillère des Andes, la profondeur du Moho est systématiquement surestimée dans CRUST2.0 comparativement à 3SMAC (Fig. 11C), ou sous estimée dans 3SMAC comparativement à CRUST2.0. Cependant, dans la mesure où le modèle 3SMAC est plus en accord avec la géologie de surface et l’existence des divers domaines structuraux existants sur le continent sud américain, ce modèle semble plus adapté à la description de la croûte du continent. Les cartes d’épaisseur des sédiments (Fig. 11D et E) montrent également des différences entre les deux modèles, mais la tendance générale est la même dans les deux cas. Des variations de l’ordre de 7.5 km existent entre les deux modèles (Fig. 11F) mais leur extension latérale est très limitée, n’excédant pas la longueur d’une cellule du modèle, soit 2°.

Vp, Vs et ρ ont été représentés selon CRUST2.0 et 3SMAC pour un trajet entre un séisme ayant eu lieu au niveau de la Cordillère et la station KOGG en Guyane (Fig. 12). Ces modèles ont été moyennés sur la longueur du trajet. Cette représentation illustre les différences importantes existant entre les deux modèles, entre la surface et 40 km de profondeur.

Figure 12 : Variations des valeurs des paramètres ρ, Vs et Vp pour un trajet traversant la Cordillère des Andes, et enregistré à la station KOG (Guyane) en fonction des deux modèles de croûte 3SMAC (en trait plein) et CRUST (en pointillé).

Dans la cadre de l’application de la méthode à l’Australie, l’effet de la variation de l’épaisseur crustale sur la détermination des modèles de vitesse 1D a été étudiée pour un trajet comportant une partie océanique et une partie continentale (Debayle et Kennett, 2000a). L’événement de référence a eu lieu à hauteur des îles Célèbes (ouest de Bornéo) et a été enregistré à la station permanente GEOSCOPE de Canberra, Australie. Une épaisseur moyenne de 32 km semble refléter l’épaisseur de la croûte sur le trajet suivi par le rai. Le modèle de vitesse 1D a été calculé en considérant successivement une épaisseur crustale de 32 km, 27 km et 37 km (Fig. 13). La déviation des modèles de vitesse 1D, par rapport au modèle considérant une épaisseur crustale de 32 km, excède les barres d’erreurs dans les 100 premiers kilomètres. L’effet de l’épaisseur crustale est plus accentué lorsque l’on considère l’anisotropie de polarisation. Il ressort de cette étude qu’une zone de 200 km de large, présentant une différence d’épaisseur crustale de 10 km par rapport à la moyenne, produit une différence de 2 km sur le modèle crustal moyen, pour des trajets de l’ordre de 2000 km. Cependant, la nécessité de travailler avec des trajets comportant une composante océanique et une composante continentale, implique inévitablement une influence de la structure crustale.

Figure 13 : Exemple de l’effet produit par une variation de 10 km de l’épaisseur crustale sur un modèle de vitesse 1D moyen,

pour un trajet comprenant une partie océanique et une partie continentale (l’événement est enregistré à la station GEOSCOPE de Canberra, et son épicentre est localisé au niveau des îles Célèbes, lat = 1.32°N, lon = 121.72°E). Le modèle de vitesse obtenu en supposant une épaisseur crustale moyenne de 32 km est représenté en traits pleins, avec les barres d’erreur associées. Les modèles inversés utilisant une épaisseur crustale de 27 km et de 37 km, sont respectivement représentés en ligne pointillés et tiretés (d’après Debayle et Kennett, 2000a).

Dans le cadre de l’Amérique du Sud, nous avons vu ci-dessus qu’entre les modèles crustaux 3SMAC et CRUST2.0, il pouvait exister des différences d’épaisseur crustale de l’ordre de 27.9 km, mais sur des zones n’excédant pas 2°x2°. De plus, la grande majorité des trajets utilisés excèdent 2000 km de longueur (Fig.14). Par conséquent, l’utilisation du modèle CRUST2.0 ou du modèle 3SMAC ne devrait pas présenter une influence significative sur les résultats de l’inversion tomographique à l’échelle du continent sud américain.

Cependant, pour la plaque sud américaine, 3SMAC est plus contrasté, comparativement à CRUST2.0 et, en accord avec la présence des grands domaines structuraux de surface. Il a donc été préféré pour effectuer les corrections crustales pour chacun des trajets étudiés.

0 0 230 890 920 1000 656 541 376 362 392 240 243 0 200 400 600 800 1000 1200 0 500 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000 9000 10000 11000 Longueur des trajets (km)

Nombre de trajets

Debayle et al. (2001) ont comparé les résultats obtenus en utilisant 3SMAC dans une tomographie en ondes de surface de la corne de l’Afrique, avec ceux obtenus pour la même région par Ritsema et Van Heijst (2000), en utilisant CRUST 5.1. Malgré l’utilisation de deux modèles différents pour la correction crustale, les hétérogénéités de vitesse sismique mises en évidence dans les 250 premiers km du manteau concordent d’un modèle à l’autre, dans les régions où les deux modèles offrent une bonne résolution. Pour l’Amérique du Sud, nous avons utilisé le modèle 3SMAC pour l’évaluation de l’épaisseur crustale tandis que Van der Lee et al. (2001) ont utilisé le modèle CRUST 5.1. Dans les domaines où notre modèle et celui de Van der Lee et al. (2001) présentent des couvertures en rais suffisamment denses et homogènes, il s’avère que le choix du modèle crustal n’affecte pas les structures mises en évidence.