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2. Principaux résultats sismologiques

1.1. Bref historique

La première mise en évidence de l’anisotropie sismique de propagation a été réalisée par Hess (1964) en domaine océanique. L’étude de 14 profils de sismique réfraction lui a permis de mettre en évidence le fait que les ondes Pn, qui sont des ondes P se propageant sous le Moho, montrent des variations azimutales de vitesse (anisotropie azimutale), avec une direction rapide orientée parallèlement à la direction du mouvement des plaques. Ce résultat suggère que l’anisotropie peut être un marqueur du mouvement absolu des plaques.

Un autre effet de l’anisotropie azimutale est acquis par l’étude des ondes P. De nombreux travaux (Babuska et al., 1993, Plomerova et al., 1996, Babuska et Plomerova, 2000, Plomerova et al., 2000), sont basés sur l’étude des résidus d’ondes P (Fig. 1). Un résidu représente la différence entre le temps d’arrivée observé et théorique d’une onde P. La technique repose sur une normalisation régionalisée des résidus, afin de s’affranchir des erreurs systématiques liées au choix des tables de temps de propagation et de l’erreur sur la localisation des séismes. La dépendance des résidus en fonction de l’azimut de l’événement et de l’angle d’incidence, fournit une information sur les variations spatiales des vitesses relatives des ondes P dans la lithosphère subcrustale sous une station sismologique. Les variations de vitesse sont représentées en chaque station d’enregistrement par une projection stéréographique. Dans chaque stéréogramme, les directions de vitesse de propagation rapide et lente sont représentées par rapport à un résidu moyen indiquant le niveau 0. Dans chaque diagramme, le signe – symbolise des arrivées “en avance”, tandis que le signe + symbolise des arrivées “en retard”. L’observation d’une fabrique bipolaire dans les sphères de résidus d’ondes P est le signe d’une fabrique lithosphérique inclinée. L’analyse conjointe de l’inversion des sphères de résidus d’ondes P et des paramètres anisotropes obtenus à partir de l’étude du déphasage des ondes de cisaillement télésismique résulte en la construction de modèles 3D anisotropes (Fig. 1).

La méthode des sphères de résidus d’ondes P demeure cependant très controversée. Il est en effet difficile de faire la part des choses entre une structure anisotrope inclinée, et la présence d’une hétérogénéité latérale de vitesse sismique. Cependant, en fonction de la taille et de la profondeur d'une hétérogénéité par rapport à celle du réseau d'enregistrement, l’observation de figures bipolaires stables sur plusieurs stations est incompatible avec une lithosphère isotrope hétérogène (Fig. 2).

Figure 2 : Effets d'une hétérogénéité de vitesse sismique (a) et d'une structure anisotrope inclinée (b) sur les résultats de la

méthode des sphères de résidus d'ondes P. Dans chaque projection stéréographique des résidus normalisés aux stations 1, 2 et 3, le signe – indique des arrivées en avance, le signe + indiquant des arrivées en retard. Dans le cas b, les doubles flèches indiquent la direction rapide des ondes P, et on constate que tous les rais venant du sud sont avance (d’après Judenherc, 2000).

Figure 1 : Schéma représentant la propagation

d’ondes P et SKS télésismiques au travers du manteau supérieur anisotrope. Les deux domaines de manteau lithosphérique sont séparés par une suture et montrent des structures anisotropes différant de par leur inclinaison et leur orientation. Ce modèle reflète la distribution des ondes P rapides et lentes au travers des sphères de résidus d’ondes P, ainsi que la direction de polarisation de l’onde SKS rapide et le déphasage temporel δt (d’après Babuska et al., 2002).

L’anisotropie de polarisation, c’est à dire la différence, en fonction de la polarisation, des vitesses des ondes de surface ou de cisaillement, fut mise en évidence par Anderson en 1961. Cette mise en évidence fut basée sur la différence existant entre des modèles de vitesse du manteau supérieur réalisés à partir d’ondes de Rayleigh (polarisées verticalement) ou d’ondes de Love (polarisées horizontalement). Une autre manifestation de l’anisotropie de polarisation est le déphasage des ondes de cisaillement (S, SK(K)S, PK(K)S…).

Un phénomène analogue au déphasage des ondes de cisaillement est observé dans un milieu optiquement anisotrope. Un cristal de calcite, par exemple (Fig. 3), répète deux fois le texte sur lequel il est posé. Il démontre ainsi l’existence de deux rayons réfractés, c’est à dire le phénomène de biréfringence. C’est dans le réseau cristallin que le signal lumineux se dédouble : l’un des rayons, le rayon ordinaire, obéit aux lois de Descartes, tandis que l’autre, le rayon extraordinaire, ne les suit pas. Pour le rayon ordinaire, l’indice de la calcite est 1.65, tandis que pour le rayon extraordinaire, beaucoup plus rapide, il est de 1.48. Les deux rayons sont polarisés dans des plans orthogonaux, et se propagent à des vitesses différentes. Cette caractéristique du cristal de calcite lui a valu d’être utilisé en microscopie optique (observations en lumière polarisée).

Figure 3 : Mise en évidence du phénomène de biréfringence optique : le cristal de calcite répète deux fois le texte sur lequel il

est posé.

Lorsqu’une onde de cisaillement pénètre dans un milieu anisotrope, elle se sépare en deux ondes quasi-S polarisées perpendiculairement et se propageant à des vitesses différentes. Un délai δt se crée entre les temps d’arrivée des deux ondes à la surface de la Terre. La direction du plan de polarisation de l’onde rapide est dénommée φ et ce sont ces deux paramètres, φ et δt, qui vont être mesurés pour caractériser un milieu anisotrope. Le délai est fonction de l’épaisseur de la couche anisotrope, du pourcentage d’anisotropie intrinsèque, et de la cohérence de la déformation verticale. Cette partie sera détaillée ultérieurement.