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Compagnie aérienne. Selon le tribunal de première instance francophone de Bruxelles, aucune faute aquilienne ne

peut être reprochée dans le chef d’une compagnie aérienne pour l’annulation d’un vol dès lors que, d’une part, l’annulation de celui-ci fait suite à des circonstances climatiques exceptionnelles

et que, d’autre part, la fermeture de certaines pistes constitue une circonstance qui ne dépend pas du transporteur lui-même et ne peut donc être évitée par celui-ci. Le tribunal ajoute qu’en tout état de cause, en l’espèce, la proportion de vols annulés en raison des conditions climatiques (41 sur 319) démontre que la compa-gnie aérienne a pris toutes les mesures raisonnables possibles malgré les conditions atmosphériques exceptionnelles pour opérer le maximum de vols. Cette décision intervient dans le cadre de l’examen de l’action d’un employeur, dont le vol de trois de ses employés avait été annulé, en vue du recouvrement de frais de réservation et d’inscription à une conférence (Civ. Bruxelles fr., 17 novembre 2016, R.G. 15/432/A, R.D.C., 2016, liv. 6, p. 654).

98. Presse et éditeurs. Voy. Civ. Bruxelles fr., 77e ch., 2 février 2016, A.M., 2016, liv. 3, p. 279, note (supra, nos 16 et 20, et infra, nos 104 et 303) et Liège, 20e ch., 4 février 2016, A.M., 2016, liv. 5-6, p. 462, note ; J.L.M.B., 2017, liv. 5, p. 212 ; R.G.A.R., 2016, liv. 9, no 15337, note (infra, nos 105 et 234).

§ 13. — La faute des gérants et administrateurs de sociétés

99. Les principes. Dans un arrêt du 22 décembre 2016 (Cass., 1re ch., 22 décembre 2016, R.G. C.10.0210.F, R.P.S., 2018, liv. 5, p. 405, www.cass.be), la Cour de cassation rappelle que « [s]i la faute commise par l’organe d’une société à l’égard du cocontractant de cette dernière ou d’un tiers engage la responsabilité directe de cette personne morale, cette responsabilité n’exclut pas, en règle, la responsabilité personnelle de l’organe dont la faute constitue un manquement à l’obligation générale de prudence mais coexiste avec celle-ci ». L’affaire s’inscrivait en l’espèce dans le cadre d’une action introduite par une compagnie d’assurances subrogée dans les droits de la copropriété d’un immeuble contre le gérant de la société locataire de l’immeuble où un incendie était né. La compa-gnie d’assurances lui reprochait, plus précisément, de ne pas avoir conclu en temps utile une assurance couvrant la responsabilité de la société, en sa qualité de locataire, en cas d’incendie. Aux termes de l’arrêt attaqué, l’action en question avait été déclarée non fondée au motif qu’« à supposer que la non- souscription d’une assurance contre le risque d’incendie constitue une faute de gestion, il reste que, sur la base de la théorie de l’organe, le manquement à l’obli-gation générale de prudence qui aurait été commis par [le gérant] correspondrait à une faute de la société [dont il était le gérant],

excluant toute responsabilité directe de celui-ci ». Faisant applica-tion du principe ci-avant rappelé, la Cour de cassaapplica-tion censure ce raisonnement.

Le même principe est également rappelé par la cour d’appel de Mons dans une décision du 1er octobre 2015. Selon elle, en effet, « [l]e droit commun de la responsabilité est applicable aux gérants des S.P.R.L. qui sont personnellement responsables envers toute personne lésée des actes illicites qu’ils commettent, en vertu des articles 1382 et 1383 du Code civil. Si la faute commise par l’organe d’une société engage la responsabilité directe de cette personne morale, cette responsabilité n’exclut pas, en règle, la responsabi-lité personnelle de l’organe mais coexiste avec celle-ci (voy. Cass., 20 juin 2005, C.03.0105.F) » (Mons, 16e ch., 1er octobre 2015, Bull.

Ass., 2017, liv. 3, p. 319 ; au sujet de cette décision, voy. égal. supra, no 67 ; en ce sens également, au cours de la période étudiée, Anvers, 5e ch., 5 novembre 2015, J.D.S.C., 2017, p. 204, note M. DELVAUX ;

R.P.S., 2016, liv. 4, p. 430, cité supra, nos 100 et 103).

100. Faute et option des responsabilités. Si une faute de gestion simple est une faute contractuelle, un gérant ne peut être tenu pour responsable sur la base des articles 1382 et 1383 du Code civil que moyennant la réunion des conditions du concours (ou de l’option) des responsabilités — ce que confirme la Cour de cassation dans un arrêt précité du 4 mai 2018 (Cass., 1re ch., 4 mai 2018, R.G.A.R., 2019, liv. 2, no 15.546).

La cour d’appel d’Anvers le confirme dans un arrêt du 5 novembre 2015 (Anvers, 5e ch., 5 novembre 2015, J.D.S.C., 2017, p. 204, note M. DELVAUX ; R.P.S., 2016, liv. 4, p. 430, voy. supra, no 99 et infra, no 103). Elle estime en effet que si une faute de gestion simple est une faute contractuelle, un gérant peut égale-ment être tenu responsable sur le fondeégale-ment des articles 1382 et 1383 du Code civil, sous réserve de l’application de la théorie dite du concours, ou de l’option, des responsabilités contractuelle et extracontractuelle.

Le tribunal de commerce d’Anvers énonce, lui aussi, que « les administrateurs ne peuvent en principe pas être tenus pour responsables par les créanciers cocontractants de la société pour un fait illicite qui serait commis lors de l’exécution des obliga-tions de la société (quasi- immunité des administrateurs en leur qualité d’organes de la société). Ces créanciers peuvent unique-ment mettre en cause la responsabilité de l’organe, intervenu pour

compte de la société lors de l’exécution du contrat, moyennant [la réunion des conditions du concours ou de l’option des responsa-bilités] » (traduction libre) (Comm. Anvers, div. Anvers, 19e ch., 7 juillet 2015, J.D.S.C., 2017, p. 133, note M. DELVAUX, abrégé ;

J.D.S.C., 2017, p. 275, note M. CALAUWAERTS, abrégé ; R.P.S., 2016, liv. 4, p. 449, note C. BERCKMANS — voy. infra, nos 101 et 201).

101. Faute du gérant à l’égard des créanciers d’une société. Dans un arrêt du 11 mai 2015 (J.D.S.C., 2017, p. 215, note M. DELVAUX ; R.P.S., 2016, liv. 4, pp. 439-442, note J. VAN EETVELDE), la cour d’appel de Gand (7e ch.) a eu à connaître d’une action en responsabilité intentée par un créancier d’une société faillie contre les administrateurs de cette dernière. Le créancier reprochait aux administrateurs de la société d’avoir fait appel à lui, pour un travail en sous- traitance, alors qu’ils savaient depuis longtemps déjà que la société faisait face à de sérieux problèmes financiers et que les chances de paiement des travaux de sous- traitance commandés étaient pratiquement inexistantes. Il réclamait dès lors aux administrateurs le paiement de la facture émise pour les travaux en question. En l’espèce, contrairement au premier juge, la cour d’appel de Gand estime qu’aucune faute n’a été commise par les administrateurs. Selon elle, ce n’est pas parce que les administrateurs étaient au courant des difficultés finan-cières de la société au moment de la conclusion du contrat de sous- traitance qu’ils savaient déjà, à ce moment, que certains créanciers ne seraient jamais payés, que la procédure de réorganisation judi-ciaire échouerait et que leur société serait déclarée en faillite sept mois plus tard. Les éléments de fait du dossier démontraient en effet une continuité de l’entreprise au moment de la conclusion du contrat, laquelle résultait notamment de l’existence, à cette date, d’une dizaine de chantiers en cours et de factures en attente de paiement en faveur de la société, ainsi que de l’absence, à cette date toujours, de saisie conservatoire. L’existence d’une telle continuité avait, en outre, été confirmée ultérieurement par la recevabilité de la procédure de réorganisation judiciaire introduite deux mois plus tard par la société et la non- remise en cause de la date de cessation de paiement retenue dans le cadre de la faillite. Dans ces circons-tances, la cour estime qu’aucune faute ne peut être retenue dans le chef des administrateurs pour avoir contracté avec le sous- traitant malgré les difficultés financières rencontrées par leur société.

En ce sens également, dans le cadre de plusieurs actions en responsabilité intentées par les curateurs d’une société faillie et

par des créanciers de cette société contre ses gérants sur la base de l’article 1382 du Code civil notamment, le tribunal de commerce d’Anvers énonce que la poursuite d’activités déficitaires par des gérants est fautive uniquement lorsqu’il n’y a plus d’espoir raisonnable de redressement ou lorsque les gérants concluent des contrats dont ils savent manifestement que la société ne pourra pas les respecter (ce qui, en l’espèce, n’était pas prouvé). Outre ces manquements, dans l’affaire précitée, il était également reproché aux gérants d’avoir surévalué les stocks dans les comptes annuels par rapport aux stocks réels. Ce grief est toutefois également rejeté par la cour au motif qu’il n’était pas démontré que les gérants étaient au courant de cette surévaluation et que l’origine de cette erreur n’avait pas pu être établie. Enfin, la cour ajoute qu’en tout état de cause, les actions sur le fondement de l’article 1382 du Code civil n’étaient pas admissibles en l’espèce, les conditions du concours n’étant pas réunies (Comm. Anvers, div. Anvers, 19e ch., 7 juillet 2015, J.D.S.C., 2017, p. 133, note M. DELVAUX, abrégé ;

J.D.S.C., 2017, p. 275, note M. CALUWAERTS, abrégé ; R.P.S., 2016, liv. 4, p. 449, note C. BERCKMANS ; voy. égal. supra, no 100 et infra, no 201).

Une faute sur pied de l’article 1382 du Code civil est en revanche retenue dans le chef des gérants d’une société faillie (et du repré-sentant permanent de l’un d’eux, ces gérants étant des personnes morales) pour avoir, avant la faillite, vendu du matériel de la société faillie à un prix totalement dérisoire (1,21 % de la valeur comptable nette). Il s’agissait en l’espèce d’une action en respon-sabilité introduite par le curateur, au nom des créanciers de la société faillie (Comm. Gand, div. Courtrai, 2e ch., 12 octobre 2016,

R.W., 2016-2017, liv. 28, p. 1107).

102. Faute des dirigeants de société en cas de non- paiement du précompte professionnel et de la TVA.

La période étudiée offre également de nombreux exemples d’examen de la faute de dirigeants d’entreprise sous l’angle des articles 442quater du CIR 92 et 93undeciesC du Code TVA — soit pour non- paiement, respectivement, du précompte professionnel et de la TVA. Pour rappel, l’article 442quater, § 1er, du CIR 92 prévoit qu’« [e]n cas de manquement, par une société (…), à son obligation de paiement du précompte professionnel, le ou les diri-geants de la société (…) chargés de la gestion journalière sont solidairement responsables du manquement si celui-ci est impu-table à une faute au sens de l’article 1382 du Code civil, qu’ils ont

commise dans la gestion de la société (…) Cette responsabilité solidaire peut être étendue aux autres dirigeants de la société (…) lorsqu’une faute ayant contribué au [non- paiement du précompte] est établie dans leur chef ; (…) ». Selon le § 2, « [l]e non-paiement répété par la société (…) du précompte professionnel, est, sauf preuve du contraire, présumé résulter d’une faute visée au § 1er, alinéa 1er. (…) [l’alinéa 1er visant les seuls dirigeants chargés dans la gestion journalière] » et le § 3, « [i]l n’y a pas présomption de faute au sens du § 2, alinéa 1er, lorsque le non-paiement provient de difficultés financières qui ont donné lieu à l’ouverture de la procédure de réorganisation judiciaire, de faillite ou de dissolu-tion judiciaire ». L’article 93undecies C du Code TVA renferme une disposition similaire en matière de TVA. Dans le cadre de ces dispositions, le cas échéant une fois la présomption de responsa-bilité visée au deuxième paragraphe écartée pour ce qui concerne les dirigeants de société chargés de la gestion journalière, les cours et tribunaux sont dès lors amenés à examiner si le non- paiement des impôts précités est imputable à une faute de gestion, au sens de l’article 1382 du Code civil, du ou des dirigeants d’entreprise.

Dans ce cadre, au cours de la période étudiée, il a été rappelé à plusieurs reprises que le simple fait du non- paiement de la TVA et du précompte professionnel n’établit pas (systématiquement) une faute dans le chef du dirigeant de la société, dès lors que ces obligations reposent sur la société elle-même, et non sur celui-ci (Anvers, 5e ch., 24 septembre 2015, J.D.S.C., 2017, p. 224, note M. DELVAUX ; R.A.B.G., 2016, liv. 6, p. 454 ; R.P.S., 2016, liv. 6, p. 808 ; Anvers, 6e ch., 23 février 2016, 2015/AR/108, F.J.F., 2017, liv. 3, p. 98, somm. ; Gand, 5e ch., 7 juin 2016, D.A.-O.R., 2016, liv. 119, p. 88, somm. ; R.W., 2016-2017, liv. 11, pp. 424-426 ; Anvers, 6e ch., 22 mars 2016, Cour. fisc., 2016, liv. 15, reflet S. VERTOMMEN, p. 794 ; Fiscologue, 2016, liv. 1483, p. 11, somm. ; J.D.S.C., 2017, p. 153, égal. cité infra, no 134).

Dans une affaire où le gérant n’avait pas réagi ni pris contact avec l’administration fiscale après des mises en demeure et où la société n’avait pas déposé ses premiers comptes annuels, il a été jugé que ces éléments ne suffisent pas pour démontrer que les non- paiements des précomptes et de la TVA constituent une faute du gérant au sens de l’article 1382 du Code civil. En l’espèce, la cour souligne également qu’il n’était pas non plus démontré que le gérant était tenu, conformément à l’article 9 de la loi sur les fail-lites, de faire plus tôt une déclaration de cessation de paiement dès

lors que peu avant la faillite, des paiements étaient encore inter-venus. Il n’y avait pas, non plus, de preuve apportée de jugements exécutoires ou de mesures d’exécution à charge de la société. Dans son appréciation, la cour prend également en considération que selon un aperçu des comptes, la société faisait effectivement des efforts pour payer les différents créanciers, non seulement les four-nisseurs, les bailleurs… mais également l’administration fiscale (Anvers, 5e ch., 24 septembre 2015, J.D.S.C., 2017, p. 224, note M. DELVAUX ; R.A.B.G., 2016, liv. 6, p. 454 ; R.P.S., 2016, liv. 6, p. 808 ; pour un autre exemple où aucune faute n’a été retenue dans le chef du gérant, voy. égal. Anvers, 6e ch., 23 février 2016, 2015/AR/108, F.J.F., 2017, liv. 3, p. 98, somm.).

L’absence de paiement de la TVA a, en revanche, été jugée constitutive d’une faute dans le chef de l’administrateur délégué d’une société dans une espèce où (i) il n’était pas allégué que la société aurait connu des impayés importants qui l’auraient obligée à débourser sur fonds propres la TVA facturée mais non acquittée par ses débiteurs, (ii) il n’apparaissait pas non plus du dossier que les dirigeants auraient dû momentanément suspendre le paiement de la TVA encaissée pour compte de l’État belge en vue de faire face à des dépenses inopinées mais indispensables afin d’assurer la pérennité de l’entreprise et (iii) le mal était plus profond puisque la société s’est abstenue de remplir correctement l’ensemble de ses obligations en matière de TVA pendant plusieurs années. En l’es-pèce, il semblait, en outre, que (iv) confronté à une baisse progres-sive des activités, d’ailleurs déficitaires, l’on ait voulu privilégier la rémunération du dirigeant de la société au détriment de l’État belge, en disposant de la TVA collectée plutôt qu’en la reversant à qui de droit. L’ensemble de ces éléments permettaient, selon la cour d’appel de Liège, de conclure que l’absence de paiement de la TVA constituait, en l’espèce, une faute quasi-délictuelle dans le chef de l’administrateur délégué. Dans cette affaire, la cour d’appel retient également une faute dans le chef des autres administrateurs de la société, pour leur passivité. La cour estime qu’en restant passifs face au non- paiement de la TVA, dans les circonstances décrites ci-avant, leur attitude ne correspond pas au comportement que des administrateurs normalement prudents et diligents auraient dû adopter dans les mêmes circonstances. Relevons que la faute de ces administrateurs n’a toutefois pas été jugée comme ayant concouru à la réalisation du dommage tel qu’il était survenu (Liège, 14e ch., 7 mai 2015, J.D.S.C., 2016, p. 121 ;

Dans un arrêt du 28 juin 2016 (2015/AR/1296, F.J.F., 2017, liv. 7, p. 238, somm.), la cour d’appel de Gand (5e ch.) estime qu’en laissant se poursuivre les activités de manière imprudente sans entreprendre d’action tendant au rétablissement de la situation et en maintenant systématiquement et entre-temps impayées les dettes de précompte professionnel (et de TVA ainsi que les cotisa-tions sociales) alors qu’ils étaient conscients du fait que l’entreprise n’était pas rentable et que les pertes ne cessaient de s’accroître, les administrateurs ont commis une imprudence qu’un administra-teur normalement prudent dans la même situation n’aurait pas commise.

L’absence de paiement, cette fois du précompte professionnel, est également considérée comme imputable à une faute du diri-geant d’une société dans une espèce où (i) l’engagement du seul employé — employé pour lequel était dû le précompte en ques-tion — et son maintien sous contrat de travail s’étaient déroulés dans des circonstances déraisonnables (engagement de l’employé en question quelques mois après la constitution de la société alors que la société n’avait pas encore engrangé le moindre chiffre d’af-faires, ni conclu le moindre contrat avec un client, attribution d’un véhicule Audi à cet employé et maintien du contrat malgré des pertes importantes et des fonds propres négatifs), (ii) le gérant n’avait pas assuré la tenue des comptes annuels de la société pour les deux derniers exercices, ne les avait pas soumis à l’approbation de l’assemblée générale, ni a fortiori n’avait veillé à leur publica-tion, empêchant ainsi l’État belge d’avoir une idée précise de la situation exacte de celle-ci et d’agir éventuellement en dissolu-tion (article 333 du Code des sociétés), et (iii) le gérant n’avait pas, comme il l’aurait dû, convoqué une assemblée générale extraordi-naire en vue de délibérer sur la dissolution éventuelle de la société ou sur d’autres mesures à prendre en vue de redresser sa situation financière (article 332 du Code des sociétés). Pour tous ces motifs, la cour d’appel de Liège a jugé que le gérant n’a pas eu le compor-tement qu’aurait eu un gérant normalement prudent et diligent placé dans les mêmes circonstances de fait. Dans son apprécia-tion, la cour estime par ailleurs également qu’« [i]l est indifférent que [le gérant] ait payé certaines dettes de sa poche pour compte de la société ou en sa qualité de caution des engagements souscrits par celle-ci. Il en est de même en ce qui concerne la libération du solde du capital social qui de toute façon lui aurait été réclamé par le curateur à la faillite de la société » (Liège, 14e ch., 19 mai 2015, R.G. 2014/RG/460, www.juridat.be).

Dans une affaire où était mise en cause la responsabilité d’un administrateur non chargé de la gestion journalière, la cour d’appel d’Anvers estime quant à elle qu’on peut attendre d’un chef d’entreprise qu’il veille à ce que la société respecte ses obli-gations légales et qu’une telle attitude répond à l’obligation de vigilance du dirigeant d’entreprise. Selon la cour, même si l’on ne s’occupe pas de la gestion journalière de la société, la qualité d’administrateur implique qu’on s’informe au minimum de la situation financière de la société et qu’on intervienne ou réagisse quand la situation devient préoccupante ; on ne peut pas feindre l’ignorance et se cacher derrière l’argument que l’on était unique-ment administrateur sur le papier. Sur cette base, la cour d’appel d’Anvers retient elle aussi une faute dans le chef de l’administra-teur, estimant que celui-ci n’a rien entrepris alors qu’il ne pouvait ignorer les difficultés financières permanentes auxquelles la société était confrontée et le fait que des dettes fiscales restaient impayées. Elle estime plus précisément qu’en n’intervenant pas au moment où l’on pouvait constater que la société, malgré ses difficultés financières et d’importants impayés aux contributions, continuait à émettre des factures et à verser des rémunérations, sans que ni la TVA et ni le précompte professionnel n’aient été acquittés aux autorités, l’administrateur a manqué à sa mission de contrôle. À titre surabondant, elle ajoute que l’administrateur n’a en outre pas pris l’initiative de mettre en route la procédure de la sonnette d’alarme (article 633 du Code des sociétés), alors que les conditions pour ce faire étaient remplies. La Cour ajoute que le fait qu’une requête en réorganisation judiciaire ait été déposée ne peut être considéré comme une mesure efficace pour faire bouger les choses — précisons qu’en l’espèce, celle-ci avait été déposée de façon fort légère (pièces nécessaires non déposées de sorte que la demande avait été déclarée irrecevable). De même, le fait que le mandat de l’administrateur était non rémunéré ne porte pas non plus, selon la cour, préjudice à ce qui précède (Anvers, 6e ch., 22 mars 2016, 2014/AR/2795, Cour. fisc., 2016, liv. 15, reflet S. VERTOMMEN, p. 794 ; Fiscologue, 2016, liv. 1483, p. 11, somm. ;

J.D.S.C., 2017, p. 153 ; voy. égal. infra, no 134).

103. Faute d’un gérant à l’égard de la société. Dans une décision du 7 avril 2016, dans le cadre d’une action en