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Commentaire sur la méthode : eet de la protéine MENTMENT

3.3.1 Expériences

Nous avons aussi tenter de déterminer l'eet d'une protéine, MENT, sur une molé-cule d'ADN tendue entre nos deux billes. Cette protéine est connue pour promouvoir la condensation de la chromatine [63] : nous avons supposé qu'elle pouvait être capable de ponter deux molécules d'ADN. Nous espérions donc qu'en laissant à notre ADN susam-ment de liberté, MENT allait le ponter en diérents endroits, formant ainsi des boucles d'ADN fermées par une ou plusieurs protéines. En tirant sur ce système, nous pensions dégrafer ces boucles d'ADN. Ceci nous aurait renseigné entre autre sur l'espace moyen entre chaque protéine et la force nécessaire pour les décrocher de l'ADN.

Nous avons été confrontés à de multiples problèmes de dilutions des protéines et de tampon de fonctionnalisation. Pourtant, de temps en temps, le diagramme force-extension présentait un plateau en dents de scie pour une force d'environ 15 pN (Fig 3.13), très repro-ductible, qui ne présente quasiment pas d'hystérésis. Nous l'avons tout d'abord interprété comme la signature de MENT accroché sur l'ADN.

Mais nous avons ensuite eectué une série de contrôles négatifs, c'est-à-dire une série d'étirements avec le même type d'ADN, dans le même tampon, mais cette fois ci, sans protéines. A notre grande surprise, nous observions à nouveau parfois (1 étirement sur 30 environ) ce plateau à 15 pN. Notre protéine n'était donc pas impliquée dans ce plateau autour de 15 pN.

3.3.2 Discussion

Cette (més-) aventure souligne bien le caractère important des contrôles à faire en sciences et en biologie en particulier. Sans ceux-ci il est quasiment impossible de conclure quoique ce soit d'une simple expérience d'étirement, et cela conduit souvent à des erreurs d'interprétations. Ceci peut même arriver à des équipes conrmées et reconnues [30][31]. Cette étude portait sur les interactions entre la condensine et l'ADN. Brièvement, le terme condensine désigne une classe de protéines qui contiennent une partie SMC et qui organisent et compactent le chromosome selon un processus encore inconnu.

Avec la même approche que nous avons eue avec MENT, les auteurs en mélangeant ADN et condensine, espéraient enregistrer un signal propre au complexe ADN-condensine en tirant sur la molécule d'ADN. Cette étude fait mention d'un plateau à 17 pN dans le prol d'étirement de l'ADN [30]. Les étirements successifs sont hautement reproductibles, et, pour retrouver sa conguration initiale après avoir été étiré, l'ensemble ne requiert pas d'énergie. Les auteurs ont alors proposé un nouveau modèle pour expliquer comment la condensine organise le chromosome in vivo.

Fig. 3.13 Exemple de plateau à 15 pN. Nous avons parfois observé ce type de prol en étirant un fragment d'ADN λ long de 38 kbp (∼12.9 µm). La presque parfaite reproductibilité du prol entre la phase d'étirement et celle de relaxation suggère un mécanisme bien déni, certainement l'appariement entre bases.

Ce plateau autour de 17 pN ressemblait fortement à celui que nous avions obtenu lors de nos expériences avec MENT. Et comme pour nous, cette équipe a eue le même problème avec l'ADN qu'elle utilisait : le plateau existait aussi parfois en l'absence de condensine. Seulement les contrôles négatifs ont été faits après publication et l'erreur a été mentionnée dans [31].

L'origine de cet artefact est un défaut dans l'ADN utilisé. Lors de la fonctionnalisation de l'ADN avec la biotine ou l'antidigoxigénine, un des brins peut être marqué aussi en son milieu. Par la suite, au moins une des deux billes se trouve xée au milieu du brin d'ADN, et en tirant sur cette bille, l'ADN est dégrafé. Cela se traduit par une phase d'étirement où la force croit rapidement avce l'extension imposée, puis, une fois une force seuille atteinte (entre 10 et 20 pN), les brins de la molécule d'ADN sont séparés, toujours autour de cette force seuille ; ce qui ce traduit par un pseudo plateau dans le diagramme force-extension. Il a été montré que les irrégularités de ce plateu sont essentiellement dues aux variations de la quantité de paire de base C-G ou A-T [24].

Nous nous trouvons bien dans la gamme de forces mentionnée par les équipes qui étudient le dégrafage de l'ADN [51] ou de l'ARN [94]. Lors de telles expériences de dégra-fage, avec un dispositif permettant d'exercer une force constante (pinces magnétiques), la grande reproductibilité du signal recueilli permettrait d'envisager d'analyser des séquences d'ADN [24]. C'est cette spécicité d'appariement des paires de bases qui se manifeste

lorsque nous utilisons des ADN de piètre qualité, et qui explique une telle reproductibilité des détails du plateau.

Bien que diérent de celui d'une molécule d'ADN nu, le prol d'étirement de la chro-matine conserve quelques similitudes : La courbe de relaxation est fort semblable à celle de la molécule d'ADN nu, et le plateau de transition B-S autour de 60 pN est conservé.

Conformément aux résultats obtenus lors d'autres expériences d'étirement de la chro-matine, nous nous attendons à observer une courbe d'étirement, force-extension, présen-tant un prol en dents de scie pour une gamme de forces autour de 20 pN. Chaque pic est interprété comme le signal de décrochage ou de rupture d'un ou plusieurs nucléosomes. A partir de ces prols, il est possible d'extraire la longueur moyenne d'ADN libérée au cours de ces ruptures. Celle-ci est évaluée en mesurant la base du pic de rupture.

Le processus qui mène du nucléosome plus ou moins complet à un ADN + huit histones n'est pas déterministe. Même si c'est parfois le cas, le plus souvent nous n'observons pas de réel plateau sur les courbes d'étirements, où tous les nucléosomes seraient rompus à une même force.

Nous exposons dans cette partie les résultats obtenus sur chaque type de chromatine avec lesquel nous avons travaillé, en soulignant les particularités de chacun. Nous les comparerons entre eux, et aussi avec ceux d'autres équipes, essentiellement dans le chapitre qui suivra.

4.1 Sur la chromatine reconstituée avec des histones