• Aucun résultat trouvé

Combinaisons de pratiques et diversité des espèces microbiennes

CHAPITRE I -ELEMENTS BIBLIOGRAPHIQUES ET PROBLEMATIQUE

5.2. Combinaisons de pratiques et diversité des espèces microbiennes

Dans le cadre d’une étude menée dans des élevages de Savoie et Haute-Savoie par Verdiez-Metz et al. (2009), trois groupes de laits issus de ces exploitations se distinguent par leur diversité d’espèces (tableau 15).

Tableau 15 : Espèces et niveaux de flore bactérienne totale des laits issus de trois groupes (Verdier-Metz et al., 2009)

Groupes de lait E F G

Effectif 20 19 28

Indice moyen de diversité microbienne (1) 0.88e 1.09f 1.18g *** Flore Mésophile Aérobie Revivifiable (Ufc.ml-1) 6310e 5012e 15 849f *** Les nombres affectés des lettres e, f, g sont significativement différents (test de Newman-Keuls au seuil de 0,1%).

Indice de diversité : indice de Shanon (Verdier-Metz et al., 2009)

Les indices de diversité sont croissants du groupe E au groupe G.

Pour les laits du groupe E, la proportion de bactéries d’affinage (bactéries corynéformes) est la plus importante.

Le groupe F présente une plus forte proportion de bactéries Gram négatif (Acinetobacter) et de bactéries lactiques (Lactococcus lactis). Ce même groupe se différencie par une plus

70

grande diversité des populations microbiennes que le groupe E. Le niveau de flore totale est similaire.

Le groupe G se distingue par un niveau de flore totale significativement plus élevé (p<0,001) et par la présence de staphylocoques et de bactéries lactiques (Leuconostoc spp.).

Les combinaisons de pratiques des exploitations du groupe E se caractérisent par des hauts niveaux d’hygiène sur l’ensemble de l’exploitation. Les trayons sont plus fréquemment lavés puis essuyés avant la traite. Le post-trempage est plus fréquemment réalisé. Le nettoyage de la machine à traire est plus intense (température et turbulence plus importantes) et la propreté du tank, ainsi que celle de la laiterie, est satisfaisante. L’hygiène générale (propreté du sol de la salle de traite, du couloir d’alimentation, aération du bâtiment) est plus satisfaisante que pour les autres groupes de lait.

Pour le groupe F, les pratiques d’hygiène des mamelles, le lavage de la machine à traire et la propreté générale de la salle de traite sont moins strictes et sont jugées plutôt non satisfaisantes.

Les exploitations appartenant au groupe G sont caractérisées par les pratiques les moins hygiénistes, tant au niveau de l’hygiène des mamelles que de la propreté en général (salle de traite, lavage du matériel de traite).

La diversité des espèces semble donc dépendre des pratiques d’élevage, allant des soins apportés aux mamelles au nettoyage de la machine à traire et de l’hygiène de l’environnement autour des animaux. La raréfaction des microflores d’intérêt technologique dans certains laits, et en particulier les bactéries lactiques, peut donc être en partie rattachée à des pratiques jugées sécuritaires. Par contre, il est plus difficile de conclure pour le niveau de flores totales. En effet, les niveaux sont similaires pour des pratiques jugées sécuritaires (groupe E) et des pratiques moins hygiénistes (groupe F). Ce résultat va à l’encontre des travaux précédemment cités (Michel et al., 2005 ; Elmoslemany et al., 2009b).

71

Synthèse de la bibliographie

Parmi les grands groupes microbiens dénombrés dans les laits crus, les staphylocoques et les bactéries corynéformes ainsi que les bactéries lactiques sont systématiquement mis en évidence. Globalement, en France, les microflores d’intérêts technologiques sont à des niveaux plus élevés que les microflores d’altérations. Cette tendance dépend cependant des élevages et des pratiques de production du lait. La saison est parfois citée, les niveaux de microflores les plus élevés étant souvent retrouvés aux périodes les plus chaudes (printemps, été). Cependant, les pratiques peuvent être différentes selon les saisons, rendant difficile la distinction des impacts respectifs. La nature de la litière, son entretien ainsi que le renouvellement d’air dans l’aire de couchage influencent les niveaux des microflores des laits. L’existence de souches identiques (comme par exemple des souches appartenant aux espèces des lactobacilles du groupe II) dans l’environnement des animaux et dans le lait tend à confirmer que l’environnement des animaux est une source d’ensemencement en microorganismes des laits. Les conditions d’hygiène à la surface des trayons modifient les niveaux des microflores des laits crus. Des pratiques d’hygiène des trayons allégées augmentent les niveaux sans pour autant élever celui des staphylocoques à coagulase positive. Quant à la machine à traire, la longueur des canalisations, les conditions de nettoyage (températures, nature et formulation du détergent) sont des éléments influençant les niveaux des différentes microflores fréquemment rencontrées dans les laits.

Mais ce sont avant tout, les combinaisons de pratiques (hygiène des trayons et de la machine à traire, notamment) qui influencent les niveaux des microflores et la diversité des espèces bactériennes.

72

6-O

BJECTIF DE LA THESE

Aujourd’hui, face à la diminution du nombre d’exploitations en production laitière et en fabrication fromagère fermière (Agreste Graphagri, 2007), la profession et les scientifiques se mobilisent pour identifier les leviers d’actions qui assureront la pérennité de ce secteur. La spécificité sensorielle des fromages fermiers est un élément fort de différenciation de ces produits par rapport aux fromages élaborés à partir de lait pasteurisé. Un constat est récurrent depuis une vingtaine d’années, celui de l’appauvrissement des microflores des laits crus (Montel et al., 2003 ; Michel et al., 2005). L’impact de la microflore des laits crus sur la qualité sensorielle des fromages a été démontré dans de nombreuses études (Demarigny et al., 1997, Buchin and Beuvier, 2000,Verdier-Metz et al., 2005). Certains travaux menés sur du lait de vache par Bouton et al. (2005), Michel et al. (2005), Verdier- Metz et al. (2009) établissent des relations entre conditions d’élevage et de production du lait et équilibres microbiens des laits (niveaux de flores, équilibre entre microflores d’intérêt technologique et indésirables, nombre et nature des espèces bactériennes). Ces pratiques sont les soins apportés aux mamelles et au nettoyage de la machine à traire, l’hygiène de l’environnement autour des animaux.

La raréfaction des microflores d’intérêt technologique dans certains laits, et en particulier les bactéries lactiques, a pu être, en partie, reliée à des pratiques jugées sécuritaires (Verdier-Metz et al., 2009). Les quelques études sur lait de chèvre menées dans un nombre restreint d’exploitations portent sur la caractérisation des microflores des laits crus (Alonso-Calleja et al., 2002, Foschino et al., 2002, Callon et al., 2007). L’origine de la variabilité des caractéristiques microbiologiques des laits est très peu abordée.

Ainsi, à la demande de deux filières professionnelle locales, l’AOP Rocamadour et l’AOP Pélardon, ainsi que quelques exploitations fromagères fermières de Franche-Comté, l’objectif de ce travail est d’identifier des leviers permettant d’obtenir, dans les élevages, des laits dont les équilibres microbiens sont en faveur des microflores d’intérêt technologique et des bactéries lactiques en particulier.

La démarche entreprise est exploratoire. Elle consiste à apprécier la diversité microbienne des laits de chèvre issus d’un grand nombre d’exploitations. Cette diversité microbienne sera étudiée selon différents niveaux de spécificité : grands groupes microbiens, espèces

73 dominantes, sous-espèces de bactéries lactiques en se basant sur différentes techniques d’isolement et de caractérisation microbiennes.

Dans une deuxieme étape, il s’agit d’étudier les liens possibles entre cette diversité microbienne, les conditions d’élevage (sur la base d’un questionnaire et d’observations), la saison (printemps, hiver) et la zone géographique.

Ce travail aboutit à des recommandations concernant les pratiques d’élevage et de production de lait.

Documents relatifs