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Chapitre 3 : Configuration du dispositif TheVIBE

3.4 Codage sonore

3.4.4 Codage de l'intensité sonore

Dans TheVIBE, seul le paramètre d'amplitude globale de chaque source sonore (Ai) est calculé pour chaque image. Il permet de faire le lien entre l'activité calculée dans le champ récepteur i (la moyenne sur les échantillons du champ récepteur i, que nous noterons Acti) et l'intensité sonore de la source Si associée.

Dans la version initiale du logiciel, l'amplitude de chaque signal élémentaire était proportionnelle à l'activité du champ récepteur associé :

Ai=Acti

Ce type de codage a été utilisé dans la première expérience de localisation (ch. 4).

Cette relation linéaire entre l'activité du champ récepteur et l'amplitude du signal n'est néanmoins pas vraiment adaptée au fonctionnement du système auditif. Sur le plan physique tout d'abord, l'intensité (ou la puissance) du signal sonore n'est pas liée à l'amplitude du signal sonore mais à son carré. De plus, en psychophysique, on travaillera non pas directement sur la puissance du signal, mais sur le logarithme de cette puissance. L'échelle usuelle pour représenter l'intensité du signal sonore en psychophysique est en effet le décibel définie par :

LdB=10×log10Ai2=20×log10Ai

L'utilisation d'une fonction logarithmique dérive des travaux de Weber et Fechner sur les capacités de discrimination des systèmes sensoriels, plus précisément sur la notion de seuil différentiel juste perceptible (Just Noticeable Difference en anglais, noté JND). Pour une valeur donnée de l'intensité d'un signal sonore, le JND correspond à la différence minimale d'intensité au dessous de laquelle le sujet ne parvient pas à distinguer deux stimulations.

Les mesures réalisées par Weber le conduisent à postuler que, pour un type de stimulation donné, le seuil différentiel est proportionnel à la grandeur physique. Par exemple, pour discriminer selon leur hauteur tonale, deux sons autour de 1000 Hz, le seuil différentiel sera deux fois plus élevé que le seuil différentiel à 500 Hz. En notant ΔI ce seuil différentiel, on peut écrire :

I

I =k

Cette observation à conduit Fechner à définir l'une des premières fonction psychométriques en proposant d'utiliser le logarithme de la grandeur physique :

I=lnI

L'intérêt de cette proposition réside dans le fait que sur cette échelle psychométrique, le seuil différentiel est constant. En effet, soit ΔF le seuil différentiel pour une valeur F de cette échelle, on peut écrire :

ΔF = Ψ(I) – Ψ(I+ΔI)

où ΔI est le seuil différentiel exprimé dans l'échelle physique. En considérant par ailleurs ΔI<<I, on peut considérer :

F='I I=I

I =constante

L'utilisation du logarithme décimal plutôt que du logarithme naturel et de l'échelle en décibels est issue des usages en traitement du signal. Cela ne change en rien les propriétés de la fonction psychométrique de Fechner.

Intérêt dans le cas du dispositif TheVIBE

D'autres fonctions psychométriques ont été construites après les travaux de Fechner. Stevens en particulier a proposé une nouvelle méthode de mesure psychophysique où le sujet doit quantifier le ratio entre deux signaux. Cette méthode a aboutie à la création d'une nouvelle unité : le sone. Stevens a par ailleurs proposé de modéliser les résultats obtenus en sones par une loi de puissance. Cette loi conserve la notion de ratio, c'est à dire que si on considère 4 stimulus d'intensité I1, I2, I3 et I4 vérifiant I1 I2= I3 I4 alors I1  I2= I3 I4

La question de savoir laquelle des deux fonctions, de Fechner ou de Stevens, représente mieux la réalité telle qu'elle est formalisée dans le cadre de la psychophysique est toujours sujet à controverse (Bonnet, 1986, p194).

Dans le cas présent, la propriété de la fonction de Fechner m'a paru particulièrement pertinente au regard de l'approche sensori-motrice de la perception. En effet, le seuil différentiel, exprimé dans l'échelle de Fechner est constant. Cela signifie qu'une variation de la stimulation correspondant à un certain ΔΨ a la même probabilité d'être détectée quelque soit la valeur de Ψ. On privilégie donc ici la capacité du système sensitif à détecter les variations du signal sonore, plutôt qu'une métrique quelconque des valeurs associées à la stimulation. Par ailleurs, Garner et Hake (1951) expliquent que l'utilisation d'une fonction égalisant les capacités de discrimination du système sensitif maximise sa capacité de transfert, au sens de la théorie de l'information. Nous reviendrons sur cette question par la suite.

Figure 3.28 : mesure de la différence juste notable d'intensité sonore pour un son pur à 1000 Hz et pour un bruit blanc (Houtsma, 1980 reproduit par Hartmann, 1997)

Figure 3.29 : les indices binauraux. Pour une large plage de fréquences, les variations du signal génèrent de variations de sonie équivalentes.

Validité de l'hypothèse de Weber pour l'échelle d'intensité sonore en dB

La figure 3.28 présente les mesures de JND pour un son pur à 1000 Hz et pour un bruit blanc, pour des intensités sonores variant entre 10 et 100 dB SPL. La mesure en dB SPL est une échelle en dB ramenée au seuil de perception auditif humain (qui correspond au 0 de l'échelle).

Dans le cas de TheVIBE, on utilise des sons purs compris entre 30 et 90 dB, ce qui correspond au domaine de confort de l'oreille. Dans ce domaine d'intensité, le JND relatif pour un son pur à 1000 Hz est relativement stable et compris entre 10 et 30%. L'utilisation de l'échelle d'intensité en dB est donc convenable. Une sophistication ultérieure à partir de mesures psychophysiques pour obtenir une meilleure égalisation du JND relatif reste toutefois envisageable (Garner, 1953).

Interaction entre la sonie et la fréquence

Il existe un troisième méthode de mesure en psychophysique : la méthode des ajustements. Le sujet doit, pour ce type de mesure, ajuster un paramètre physique du signal de manière à égaliser sa valeurs psychophysique avec celle d'un stimulus de référence. Ici, le stimulus de référence est une sinusoïde à 1000 Hz, avec différents niveaux d'intensité sonore. L'unité de mesure ainsi obtenue a été appelé le "phone". La figure 3.29 représente des courbes "d'isophonies".

Ces courbes montrent que la sonie d'un son pur dépend non seulement de son niveau exprimé en dB mais également de la fréquence du son pur. Cette dépendance est limitée dans la gamme de fréquence comprise entre 300 et 3000 Hz, mais reste néanmoins sensible, avec des variations allant jusqu'à 10 dB de différence entre deux signaux, pour une même intensité du signal (en dB).

On remarquera néanmoins que, dans cette même gamme de fréquences, l'écart entre chaque courbe d'isophonie est relativement constant (et de fait égal à l'écart d'intensité sonore en dB sur le stimulus de référence, i.e. 10 dB). Ainsi, si le niveau de sonie varie, pour une même intensité du signal, en fonction de la fréquence du signal, les variations de sonie associées à une variation d'intensité du signal sont, elles, relativement indépendante de la fréquence. Cette remarque rejoint de nouveau le cadre théorique dans lequel on s'inscrit. Dans une approche sensorimotrice, ce sont les variations des valeurs et non les valeurs elles même qui ont un sens. A ce titre, l'interaction

observée entre la sonie et la fréquence du stimulus dans la gamme 300-3000 Hz est peu susceptible de réduire la qualité du couplage sensorimoteur.

Sous cette hypothèse, l'utilisation d'une échelle d'intensité sonore en dB est donc toujours admissible. Pour toutes les expériences postérieures à la première expérience sur la localisation, c'est cette échelle que nous avons utilisée.

En pratique

L'activité moyenne des champs récepteurs est calculée par

Acti=1

n

k=1

n

li , k

où li,k est le niveau de gris (compris entre 0 et 255) du kième pixel échantillonné dans le récepteur i.

Dans la version d'origine de TheVIBE, utilisée pour la première expérience de localisation, l'amplitude de la source du champs récepteur est proportionnelle à l'activité et comprise entre 0 et 1:

Ai= 1

255×Acti

Dans les versions suivantes, le codage de l'amplitude est fait en dB, sur une plage totale de 60 dB.

Ai=10−3 ×103

Acti

255