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Les cloisonnements et la concurrence entre administrations nationales, locales, sociales

1.2.1 Des cloisonnements persistants favorisant la concurrence entre les différentes autorités

[109] Les cloisonnements persistent entre l'Etat et l'assurance maladie, entre les administrations de l'Etat et la CNSA, entre l'Etat et les collectivités locales, entre la ville et l'hôpital, entre les acteurs du social, du médico-social et du sanitaire.

[110] Le cloisonnement entre administrations centrales contribue au fractionnement des politiques.

Le dispositif PAERPA est porté par la DSS et la DGOS en concurrence avec la CNSA responsable de la mise en place et de l'animation des MAIA. Le cahier des charges de celles-ci a pourtant été approuvé par la DSS et la DGOS. Par la force des choses, nombre de PAERPA sont adossés à des MAIA répondant ainsi avec pragmatisme à la complexité administrative. Longtemps a été maintenue la concurrence entre la DSS chargée du secteur de la médecine de ville quand la DH (devenue DGOS) s'occupait exclusivement des établissements de santé.

[111] Les ARS ont été créées dans le souci de rassembler au sein d'une même structure le sanitaire et le médico-social quand le social relève des DGICS. Au sein des collectivités locales elles-mêmes, ces cloisonnements apparaissent : souvent, au sein du conseil général, la direction chargée de la santé (prévention sanitaire éducation à la santé) ne s'adresse-t-elle concrètement ni aux personnes âgées, ni aux personnes handicapées ni à l'ASE.

[112] La dichotomie entre les responsabilités respectives de l’union des caisses d’assurance maladie et du Ministère de la santé maintient les efforts de coordination à l'écart de la logique de la loi HPST. Toujours selon la contribution de l'inspection générale, les organismes d’assurance maladie restent maîtres d’œuvre de la politique conventionnelle qui régit les activités des professionnels du secteur ambulatoire et l’Etat de celle de la politique tarifaire des établissements de santé. Ceci se retrouve à l'échelon local : dans le secteur des soins de ville, les ARS disposent certes de quelques leviers, en particulier en matière de permanence des soins ambulatoires via l’élaboration des cahiers des charges régionaux définissant les principes d’organisation, mais le levier conventionnel –qui reste national- leur échappe.

[113] La cour des comptes dans son rapport de juin 201418

18 Rapport de la cour des comptes de juin 2014 sur les relations conventionnelles entre l'assurance maladie et les professions libérales de santé.

note que « la multiplication des expérimentations mettent également en concurrence les ARS et l'assurance maladie : Toutes les ARS se sont investies dans le développement des structures d’exercice coordonné. Dans ce cadre, elles participent à l'expérimentation des nouveaux modes de rémunération. Elles s’investissent également dans la déclinaison des protocoles de coopération découlant de l’article 51 de la loi HPST, et notamment du protocole Asalée. La CNAMTS, de son côté, a développé des expériences de coordination en termes de parcours, en particulier pour la prise en charge des patients en sortie d’hospitalisation (PRADO). »

Le programme de retour à domicile (PRADO) de l’assurance maladie (source rapport du HCAAM sur la coopération entre professionnels de santé)

[114] Ce programme vise à raccourcir la durée de séjour à l’hôpital, répondant ainsi aux souhaits de patients hospitalisés qui veulent retourner rapidement à leur domicile. Il accompagne ainsi la réduction de la durée moyenne de séjour hospitalier, dans une optique d’amélioration de l’efficience de la dépense hospitalière et de la qualité de la prise en charge globale des patients.

[115] Le PRADO a été mis en place à partir de 2010. Il repose sur :

[116] - l’intervention de conseillers de l’assurance maladie au cours d’un séjour hospitalier,

[117] - l’adhésion volontaire de patients éligibles (population déterminée en fonction du programme particulier et de son avancement), avec l’accord de l’équipe médicale ;

[118] - la coordination de l’intervention au domicile de professionnels libéraux suite à l’hospitalisation, ainsi, le cas échéant, que de services sociaux.

[119] Le programme consiste en plusieurs programmes aux enjeux distincts suivant l’hospitalisation concernée.

[120] Ce sont les conseillers de l'assurance maladie qui assurent la coordination administrative pour le retour à domicile des patients, facilitant ainsi la coordination médicale. Si l'aide aux gestes de la vie courante est proposée, la coordination est essentiellement assurée entre professionnels de santé.

[121] Trois programmes sont actuellement développés et devraient être ultérieurement complétés : PRADO maternité, PRADO orthopédie et PRADO insuffisance cardiaque. Cette initiative de la CNAMTS est réservée aux assurés du régime général et peut rentrer en concurrence avec des initiatives d'autres régimes ou des ARS : l'Igas dans son rapport sur la gestion du risque note que :

« PRADO insuffisance cardiaque et ces initiatives se sont développées sans concertation entre les différents porteurs, alors que l'objectif poursuivi semble le même ». Ou encore : « des programmes similaires à PRADO sont développés par certaines ARS. C'est le cas en Ile de France (....). Ces programmes s'inspirent du dispositif CORDIVA, promu en Allemagne (...) ».

1.2.2 La coordination entre les établissements de santé et la médecine ambulatoire a du mal à s'installer

[122] La structuration de l'offre de soins elle-même ne contribue pas à installer la coordination dans la pratique médicale et en rend l'exercice plus difficile que ce soit du fait du cloisonnement et de la concurrence entre l'hôpital et la ville et/ou de la faiblesse de l'exercice collectif en ville.

L'inspection générale, dans son rapport sur l’organisation des soins de 1er recours dans le cadre de sa contribution à la stratégie nationale de santé de juin 2013, le décrit ainsi :

[123] « les établissements de santé occupent une place de premier rang dans la réponse aux problèmes de santé des Français19

19 HCAAM. Avis sur la situation des établissements de santé, 23 avril 2009

: une personne sur six est hospitalisée dans l’année, soit en hospitalisation complète, soit en hospitalisation partielle. Mais le recours global à l’hôpital est beaucoup plus important : soit au titre des soins d’urgence (environ 16 millions de passages par an), soit au titre des séances et cures (dialyse, radio et chimiothérapies), soit encore au titre des 33 millions d’actes dits « externes ». Ce recours massif à l’hôpital concerne toutes les tranches d’âge, avec toutefois une nette prédominance des personnes âgées. (...)

[124] L’attachement historique aux principes de la liberté d’installation et du paiement à l’acte ont conduit à (...) à un manque de coordination entre professionnels de santé. Ainsi le rapport du HCAAM souligne par exemple la multiplicité des intervenants autour d’une personne âgée et leur manque de coordination ».

[125] En ce qui concerne PRADO, le rapport IGAS déjà cité note encore : « les établissements peuvent se trouver face à une juxtaposition de plusieurs dispositifs non coordonnés et nécessitant à chaque fois des travaux spécifiques qui peuvent être dissuasifs décourageants ».

[126] Malgré l'encouragement aux regroupements de professionnels libéraux recherchés par les nouveaux modes de rémunération20

1.2.3 La nomenclature des territoires, fonction de chacune des politiques publiques mises en œuvre, renforce encore la complexité voire la confusion dans l'organisation des prises en charge

par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, le nombre de structures d'exercice collectif reste très faible. Les médecins exerçant dans les pôles et maisons de santé représenteraient 400 équipes à fin 2013 et « environ 10 % des professionnels de soins primaires sont organisés en équipes structurées autour d’un système d’information et d’un projet de soins » selon la fédération française des maisons et pôles de santé (FFMPS).

21

[127] L'article L. 1434-16 du code de la santé publique dispose que « l'agence régionale de santé définit les territoires de santé pertinents pour les activités de santé publique, de soins et d'équipement des établissements de santé, de prise en charge et d'accompagnement médico-social ainsi que pour l'accès aux soins de premier recours. Les territoires de santé peuvent être infrarégionaux, régionaux ou interrégionaux. Ils sont définis après avis du représentant de l'Etat dans la région, d'une part, de la conférence régionale de la santé et de l'autonomie, d'autre part et, en ce qui concerne les activités relevant de leurs compétences, des présidents des conseils généraux de la région. Les territoires interrégionaux sont définis conjointement par les agences régionales concernées, après avis du représentant de l'Etat dans chaque région et, en ce qui concerne les activités relevant de leurs compétences, des présidents des conseils généraux compétents sur ces territoires ».

[128] Sur le portail des ARS, on trouve une description des choix de découpage effectués par elles : « Les découpages ont très majoritairement évolué22

[129] On y voit également que « Au-delà des territoires de santé, les ARS ont identifié des territoires de proximité dits également de projets ou d’actions, qui peuvent dans certaines régions se recouper avec les territoires d’accès aux soins de premiers recours »

par rapport aux anciens territoires.

Seules trois régions sur vingt-six ont maintenu le découpage préexistant, départemental en l’occurrence. Neuf autres régions ont transformé leur découpage spécifique en un découpage départemental. Cinq régions ont évolué vers un nombre de territoires inférieur au nombre de départements. Enfin neuf régions ont choisi un découpage infra-départemental .... »

23

20 Cf. loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2008 et son article 44 autorisant l'expérimentation de rémunérations « complétant le paiement à l’acte ou s’y substituant », pour une durée de 5 ans, dans les maisons de santé et centres de santé.

.

21 Cf. annexe 4.

22 A cette occasion on peut noter une diminution du nombre de territoires de santé : "le nombre de territoires de santé est passé de 159 territoires de santé (DOM compris), définis dans le cadre de l’élaboration des schémas régionaux d’organisation sanitaire de troisième génération (SROS III) à 107 territoires de santé ARS, soit une diminution d’environ 33%." Même source.

23 Site des ARS (www.ars.sante.fr) : présentation générale des ARS

[130] On trouve également pour la mise en œuvre des contrats locaux de santé des territoires spécifiques tels que des bassins de santé intermédiaires visant à l'amélioration des parcours de santé ou la coordination entre l’offre hospitalière de premier niveau (urgences), l'ambulatoire et le secteur médico-social.24

[131] On pourra noter que les services et structures sociales qui relèvent des conseils généraux ont leur propre cartographie. Il en est ainsi des CLIC.

[132] Au total, le thème de la coordination se répand sans véritable perspective d'ensemble et ...

sans coordination.

1.3 Une organisation qui répond mal aux besoins des patients et des