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Classifications des diagnostiques cliniques de la goutte

8. Diagnostic de la goutte

8.1. Classifications des diagnostiques cliniques de la goutte

Selon les critères de l’American College of Rheumatology (ACR) de 1977, une association de 6 critères cliniques parmi les suivants pouvaient être suffisants au diagnostic de goutte (tableau VI) :

Tableau VI: Critères de New-York (1966) [88].

Critères de l’American College of Rheumatology (ACR) de 1977

Un sujet est classifié comme ayant la goutte si :

A. des cristaux d’urate de sodium sont présents dans le liquide articulaire B. ou des cristaux d’urate de sodium sont présents dans un tophus

C. ou au moins six des 11 critères restants 1. plus d’un accès d’arthrite aiguë

2. développement maximal d’inflammation articulaire en 24 h 3. accès de monoarthrite

4. rougeur péri-articulaire

5. douleur ou gonflement de la 1ère articulation métatarsophalangienne 6. accès inflammatoire unilatéral de la 1re articulation métatarsophalangienne 7. accès inflammatoire unilatéral du tarse

8. hyperuricémie

9. gonflement articulaire asymétrique d’une articulation sur une radiographie 10. image kystique sous-corticale sans érosion sur une radiographie standard 11. liquide articulaire stérile lors d’un accès

Néanmoins, une critique récente de ces critères ne retrouve qu’une spécificité de 78 % et une sensibilité de 70 %, rendant cette classification de l’ACR 1977 insuffisante.

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La classification de New York de 1966 (tableau VII) permet également un diagnostic fondé uniquement sur des arguments cliniques, avec nécessairement deux critères parmi les suivants:

Tableau VII: Critères de New-York (1966)[88].

Classification de New York de 1966

o Au moins deux accès de monoarthrite d’un membre.

o Antécédent bien décrit en observation par un médecin : début brutal, douleur

importante, rémission clinique complète en moins de deux semaines

o au moins deux accès de monoarthrite d’un membre intéressant le gros orteil

(podagre).

o Sensibilite à la colchicine

o Tophus (cliniquement décelable)

o antécédent bien décrit ou observation par un médecin, définie par une réduction

majeure des signes objectifs d’inflammation en moins de 48h

De manière similaire aux critiques faites aux critères de L’ACR 1977, cette classification a montré ses limites au cours d’études récentes et dans la pratique quotidienne, d’autres propositions de classifications diagnostiques sur une base clinique ont été proposées, permettant d’identifier le diagnostic de goutte de manière plus sensible et spécifique.

La classification Chronic Gout Diagnosis (CGD) (tableau VIII) permet ainsi d’obtenir une sensibilité approchant 90 % pour le diagnostic de goutte pour un patient présentant au moins quatre des huit critères suivants :

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Tableau VIII: La classification Chronic Gout Diagnosis [88].

La classification Chronic Gout Diagnosis (CGD)

o Un épisode d’arthrite aigue

o Mono ou oligoarthrites

o Installation en moins de 24 heures

o Podagre

o Erythème

o Tarsite unilatérale

o Tophus

o Hyperuricémie

L’identification des cristaux reste la méthode de référence pour le diagnostic de la goutte. Cependant, la ponction articulaire et l’identification des cristaux ne sont pas toujours pratiquées car parfois non faisable en pratique clinique courante. De ce fait, pendant des années, les critères de classification de la crise de goutte ont été utilisés par les cliniciens, mais leur faible spécificité a été critiquée. Jansen et al. aux Pays Bas avaient effectué une étude prospective des monoarthrites aigues et avaient utilisé l’identification des cristaux comme gold standard. Plus de 300 patients avec suspicion de goutte étaient évalués, et un diagnostic basé sur l’identification des cristaux a été établi chez plus de 200 patients. En se basant sur l’analyse détaillée des symptômes cliniques, selon la présence ou l’absence de cristaux, ils ont proposé un modèle incorporant 7 caractéristiques qui permettent aux médecins de poser le diagnostic de goutte avec une meilleure fiabilité que les critères ACR, même en l’absence d’analyse du liquide articulaire (tableau IX).

Un score total < 4 permet d’écarter la goutte dans près de 100 % des cas. La goutte a été confirmée chez 80 % des patients avec un score > 8. Un score entre 4 et 8 laisse une

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Tableau IX: modèle de diagnostic de la goutte selon Janssens en absence de ponction articulaire [77].

Critère clinique Score clinique

• Sexe masculin

• Antécédent de crise de goutte

• Survenue de la crise en moins de 24 h

• atteinte de la première métatarsophalangienne

• Rougeur associée

• HTA ou autre maladie cardiovasculaire associée • Uricémie > 350 µmol/L 2 points 2 points 0,5 points 2.5 points 1 points 1,5 points 3,5 points

Score total maximal 13

Interprétation du résultat de score

o Goutte improbable Si Score total ≤ 4

o Goutte probable Si score total ≥ 8

o Goutte incertaine Si Score entre 4 et 8

La présentation clinique typique de la goutte est quasi-pathognomonique mais, elle nécessite une confirmation biologique, comme le rappelle la deuxième recommandation EULAR 2006 (tableau X), qui mettent l’accent sur la valeur de la mise en évidence des cristaux pathogènes dans le liquide articulaire pour le diagnostic des cas difficiles. Plusieurs études ont montré que la ponction d’une articulation ayant été enflammée, pouvait être très utile pour le diagnostic de goutte même en période inter critique [21,66].

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Tableau X: les recommandations EULAR 2006 pour le diagnostic de la goutte [87].

Recommandations EULAR 2006 pour le diagnostic de la goutte

1. Dans les accès aigus, la survenue rapide d’une douleur intense, d’un gonflement et d’une sensibilité articulaire en moins de 6–12 heures, en particulier si ces signes s’accompagnent d’un érythème local, est hautement évocatrice de l’inflammation microcristalline, sans pour autant être spécifique de la goutte.

2. Devant une présentation typique de la goutte (comme une podagre récidivante avec hyperuricémie), le diagnostic de goutte est cliniquement probable, sans en être certain, malgré l’absence de confirmation que serait la présence de microcristaux.

3. La mise en évidence de cristaux d’urate de sodium monosodique (UMS) dans un liquide synovial ou dans le produit de ponction d’un tophus permet d’avoir la certitude du diagnostic de goutte.

4. La recherche systématique de cristaux d’UMS est recommandée dans tout liquide synovial ponctionné d’une arthrite inclassée.

5. L’identification de cristaux d’UMS dans une articulation asymptomatique peut permettre un diagnostic de certitude de goutte lors d’une période intercritique.

6. Goutte et infection peuvent coexister ; aussi quand une arthrite septique est suspectée une coloration de Gram et une culture microbiologique du liquide synovial doivent-elles être réalisées même si des cristaux d’UMS ont été identifiés.

7. Bien qu’étant un important facteur de risque de goutte, le taux d’uricémie ne confirme ni n’exclut la goutte car de nombreuses personnes avec une hyperuricémie ne développeront jamais de goutte ; l’uricémie peut aussi être normale au cours d’un accès aigu goutteux.

8. L’évaluation de l’excrétion urinaire d’acide urique doit être effectuée chez des patients sélectionnés, en particulier avec une histoire familiale de goutte précoce, un âge de survenue inférieur à 25 ans, ou une lithiase rénale.

9. Bien que les radiographies standard puissent être utiles pour le diagnostic différentiel et qu’elles puissent montrer des images typiques d’arthropathie goutteuse, elles ne sont pas utiles pour confirmer le diagnostic de goutte récente ou aiguë.

10. Il faut rechercher les facteurs de risque et les comorbidités associées à la goutte, en particulier les éléments du syndrome métabolique (obésité, hyperglycémie, hyperlipémie, hypertension artérielle).